L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Collectionneur a écrit:Le wiki indique un rapport de force - pour les effectifs - de un à trois en faveur des Moldaves dans la bataille finale. J'ai peut-être écrit un peu trop vite, les polonais n'ayant pas alors déployer énormément de moyens, Petru IV avait des chances de l'emporter :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d%27Obertyn
Je me suis appuyé sur cette source et vérifié avec celle anglophone (je tends à croiser les informations pour avoir la meilleure perspective de la situation historique pour savoir comment l'aborder dans la réalité alternative de mon récit).
Concernant les Polonais, il ne faut pas oublier qu'ils étaient dans une monarchie élective où la noblesse et l'aristocratie locale avaient d'importants pouvoirs (à l'instar de la Hongrie). Cela signifie que les forces pouvant être mobilisées dépendaient de la bonne volonté de ces élites (un peu ce qui s'est passé lors de la bataille de Mohacs pour les Hongrois en 1526 : Louis II n'a pu mobiliser que les seigneurs et prélats qui ont répondu favorablement à son appel alors que d'autres ont refusé d'y participer ou se sont abstenus d'intervenir, comme Jean Zapolya). Il y a aussi la taille conséquente du territoire polonais et lituanien à l'époque et je doute que les voies de communication étaient de qualité à l'époque, que ce soit pour informer rapidement de la situation et surtout pour l'envoi de forces armées pour régler rapidement le problème.
Du fait de ces différents facteurs, Petru IV avait effectivement une chance de remporter cette bataille contre les forces polonaises locales comme il l'avait fait en 1530. Une question intéressante est de savoir s'il aurait été en mesure de maintenir la présence de son armée dans la province du Pocutie dans la durée, même en tenant compte du soutien de l'empire Ottoman.
Et je ne pense pas que tu aies écrit trop vite, ton commentaire est pertinent et permet de soulever des points et des aspects importants à prendre en compte dans le développement d'une uchronie. Je la trouve bienvenue et pertinente.
Yodarc- Messages : 424
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L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Cette vingt-deuxième partie va porter sur une région qui n'a pas été abordé dans ce récit jusqu'à présent : la Scandinavie, et plus précisément les royaumes du Danemark et de Norvège. Elle va présenter des événements qui s'intègrent dans le nouveau contexte d'événements tout en faisant écho à des aspects et situations qui ont eu lieu historiquement. Du fait de la nature des événements présentés, cette partie est très longue (la plus longue que j'ai rédigé jusqu'à présent, dépassant celle sur la guerre de la Sainte-Ligue). Et comme vous allez le constatez, un contexte on ne peu plus explosif.
J'espère que cette partie sera à la hauteur des précédentes et qu'elle saura vous plaire.
Bonne lecture !
1527-1531 : Danemark ou la guerre des deux rois
Les années 1527-1531 voient les événements se précipiter dans les royaumes scandinaves alors que les problèmes issus des conflits du début des années 1520 se retrouvent de nouveau sur le devant de la scène.
Dans les années 1527-1529, Frédéric I de Danemark poursuit le développement d’une politique mise en place depuis son couronnement en 1524 : tolérer les prédicateurs luthériens tout en affaiblissant le pouvoir des évêques et des nobles catholiques. Cela se concrétise lors de la diète d’Odense d’août 1527 : le roi obtient l'égalité civile des protestants et des catholiques, le mariage des prêtres et l'indépendance à l'égard de Rome pour le choix des évêques, plaçant le clergé sous sa tutelle. Il ordonne aussi durant cette période la fermeture des maisons franciscaines et des monastères dans 28 villes de son royaume. Il permet aussi la prédication luthérienne en Norvège à partir de 1529. Cette politique résulte de son titre de værner (1) de l’Église catholique au Danemark, ce qui lui permet de choisir les évêques pour les diocèses du pays. Le souverain est cependant suffisamment habile pour préserver la paix entre les luthériens et les catholiques, restant en dehors des affaires germaniques. La paix est d’autant mieux assurée que le souverain et ses alliés suédois et lübeckois ont réussi à chasser de Gotland Søren Norby en 1526 alors que la loyauté de ce dernier envers son neveu Christian II et ses actes de piraterie déstabilisaient la région.
Les actions du souverain suscitent cependant en Norvège une certaine hostilité, notamment de la part de l’archevêque, Olav Engelbrektsson. Ce dernier ne fait pas confiance au souverain danois, ayant retardé à trois reprises son couronnement en tant que roi de Norvège. L’ecclésiaste espère le retour de Christian II au pouvoir et travaille à la rupture des relations qui lient la Norvège au Danemark. L’archevêque lutte aussi contre le développement des idées luthériennes dans le royaume. Dans cette lutte, l’archevêque peut s’appuyer sur l’amiral Kristoffer Trondson. Il est cependant en forte opposition avec Vincens Lunge, membre du Riksråd et lieutenant général de Norvège dans le Nord-Norge pour Frédéric I. Le noble danois contribue à nuire à la coopération norvégienne en n’hésitant pas à exproprier les familles nobles opposées à lui de leurs propriétés et semblant avoir des sympathies pour les idées de Martin Luther, autorisant notamment des prêcheurs luthériens à séjourner à Bergen en 1526 et même à prêcher à partir de 1529. A cela s’ajoute le renforcement de la présence danoise à des positions importantes, notamment pour le commandement des forteresses du territoire.
C’est dans ce contexte que le neveu de Frédéric I, le roi déchu Christian, prépare une expédition afin de reprendre la couronne. Cela n’a été rendu possible que grâce au soutien de son beau-frère, Charles Quint, et de la tante de ce dernier, Marguerite d’Autriche, gouvernante des Pays-Bas. Si durant les premières années d’exil de Christian II, son intérêt pour les idées de Martin Luther (2) et l’implication de Charles Quint dans la guerre contre les Ottomans ont contribué à une absence de soutien de l’empereur, la situation évolue à partir de 1527 avec le retour de Charles Quint de son expédition. L’empereur veut être le champion de la chrétienté et contrer l’expansion des idées de Martin Luther qui s’épanouissent notamment dans les royaumes nordiques. Le souverain Habsbourg veut aussi tirer profit de ses liens familiaux avec l’ancien roi du Danemark pour avoir d’autres alliés pour renforcer son influence alors que le contexte diplomatique devient compliqué pour lui. L’empereur exige cependant de Christian II de renoncer aux idées de Martin Luther et de défendre la foi catholique s’il veut son soutien pour récupérer son trône. Christian II accepte en 1528 de revenir à la foi catholique, lui permettant de recevoir de l’aide financière de l’empereur. Le souverain déchu a aussi le soutien de Gustave Trolle, l’ancien archevêque de Suède, qui l’a rejoint en 1526 et de Søren Norby. Ce dernier, après avoir été chassé du Gotland en 1526, avait fui en Livonie et rejoint la cour de Vasili III de Moscovie. Ce dernier, travaillant à développer des relations avec Charles Quint, permet à ce dernier de rejoindre son souverain au début de l’année 1529.
Du fait de ces différents soutiens, Christian II prépare une expédition destinée à reprendre la Norvège. Charles Quint et sa tante, Marguerite d’Autriche lui fournissent la flotte et les hommes nécessaires pour son entreprise. C’est au début de l’été 1529 que le souverain déchu s’embarque pour rejoindre la Norvège. Grâce à l’expérience de Søren Norby, il rejoint Oslo au début de juillet 1529 et est accueilli en ferveur par ses habitants. Assiégeant la forteresse d’Akershus qui protège la baie d’Oslo, il parvient à s’en emparer en août 1529. Cela lui permet de consolider sa position à Oslo et de poursuivre la prise de contrôle de la Norvège. La chute de la forteresse provoque la fuite de certains membres danois du Riksråd qui étaient favorables à Frédéric I alors que d’autres restent soit pour se rallier à Christian II, soit pour le contrer. Parmi les adversaires du souverain figure Heinrich Krummedige, une éminente figure des royaumes danois et norvégien qui n’a pas pardonné au souverain d’avoir pris parti en faveur de son rival Karl Knutsson et de lui avoir retiré ses charges et titres. Quant à Vincens Lunge, il cherche à s’imposer malgré les sympathies qu’il a pour les idées luthériennes et la vive rivalité qu’il a avec l’archevêque de Norvège.
Si Christian II est confronté à la difficulté de convaincre le Riksråd de le reconnaître comme roi légitime de Norvège et à faire de son fils Jean l’héritier à la couronne norvégienne, il peut s’appuyer sur l’archevêque Olav Engelbrektsson et le clergé norvégien. Il est cependant plus réticent à reprendre Vincens Lunge à son service du fait des avis que lui donnent Olav Engelbrektsson et de l’hostilité d’une partie des nobles norvégiens envers le lieutenant-général. En octobre 1529, la diète norvégienne accepte ses demandes à la condition qu’il respecte la charte qu’Olav Engelbrektsson avait voulu imposer à Frédéric I en 1524, à savoir la préservation de l’indépendance de la Norvège dans tous les domaines. Christian II y consent, voulant s’appuyer sur les Norvégiens pour pouvoir consolider sa position. Dans la même logique, il s’efforce de pouvoir constituer une armée qui lui permettra de s’imposer sur l’ensemble du royaume et de pouvoir mener campagne contre son oncle. En décembre 1529, il envoie des messagers à Charles Quint et Marguerite d’Autriche pour leur demander de nouvelles aides.
En parallèle des débats politiques au Riskråd, Christian cherche à s’imposer dans le reste du royaume afin de pouvoir être en position de force face à son oncle. Plusieurs contraintes s’imposent à lui. D’une part, il n’a qu’une armée limitée dans ses effectifs pour pouvoir espérer soumettre l’ensemble du royaume rapidement. D’autre part, si une bonne partie de la population norvégienne semble favorable à lui, les forteresses lui posent un défi du fait des commandants danois qui les dirigent et qui ont été placés par son oncle. A ces difficultés s’ajoutent celle de l’opposition ouverte de certains de ses adversaires en Norvège qui sont rejoints à l’hiver 1529-1530 par Vincens Lunge : ce dernier, voyant que le souverain est inflexible à son égard, décide de rejoindre le Nord-Norge pour refuser à Christian II toute autorité sur le royaume tout entier et faire peser une menace sur les territoires ralliés au souverain.
Le souverain possède cependant plusieurs atouts : le ressentiment norvégien contre la présence de danois aux postes importants du royaume, le désir de défendre la foi traditionnelle contre la prédication luthérienne et la flotte fournie par Charles Quint. S’appuyant sur ses alliés, Christian II cherche à exploiter ces différents avantages durant l’automne et l’hiver 1529 en dépêchant Kristoffer Trondsson et Søren Norby avec une partie de sa flotte pour rejoindre les cités majeures du royaume et leur demander de se rallier à lui. Le souverain peut aussi s’appuyer sur la chute de la forteresse d’Akershus et du soutien du Riskråd pour escompter obtenir le ralliement des autres territoires du royaume. Il fait aussi déployer une partie de ses forces en direction de la province du Bohuslän afin de se prémunir de la menace que pourrait faire peser le royaume de Suède. En octobre 1529, le souverain est rejoint par Klemen Andersen surnommé « Skipper Clement », un ancien vice-amiral danois qui lui est demeuré fidèle et qui est devenu corsaire après 1525 à cause de cela. Christian II accepte ses services et le charge d’accompagner les troupes chargés de prendre le contrôle des provinces orientales.
Fin septembre 1529, Kristoffer Trondsson et Søren Norby quittent Oslo avec une flottille pour rallier les principales cités sur la côte norvégienne à la cause de leur souverain. Malgré la météo automnale qui rend le trajet difficile, les deux hommes et leur groupe atteignent d’abord Tønsberg début octobre. La cité s’est ralliée à Christian II quelques semaines auparavant avec la venue d’une partie des forces accompagnant le souverain dans son expédition. Seule la forteresse a présenté quelques oppositions avant que la garnison norvégienne ne s’insurge contre son commandant danois. Après cette escale, la flottille rejoint Stavanger à la mi-octobre où Kristoffer Trondsson et Søren Norby parviennent à la rallier à la cause de leur souverain. Repartant début novembre, ils rejoignent Bergen et sont accueillis avec ferveur par le clergé et les nobles de la ville, ces derniers étant devenus hostiles aux politiques de Frédéric I du fait la présence des prédicateurs luthériens à Bergen et étant informés par un message d’Olav Engelbrektsson en octobre 1529. L’arrivée de la saison froide empêche les deux commandants de reprendre la mer pour rejoindre Trondheim. Cette dernière est cependant en insurrection contre Frédéric I et se rallie officiellement à Christian II en décembre 1529.
Le ralliement des principales villes de Norvège permet à Christian II d’affermir son autorité sur le royaume. A ces ralliements s’ajoutent la prise de contrôle des provinces du Vestford et du Telemark. Seul le Ranrike (3) et le Bohuslän (4) échappent au sud au contrôle des alliés de Christian II du fait de la présence des troupes suédoises depuis le traité de Malmö de 1524 (5). Christian II se concentre sur consolider son pouvoir en Norvège afin de pouvoir avoir le soutien nécessaire pour entreprendre la conquête du Danemark.
En octobre 1529, alors que son neveu consolide sa position en Norvège, Frédéric I fait tenir la diète pour chercher le soutien de la noblesse danoise pour défendre son trône. Cette dernière le soutient dans son ensemble, bien que quelques troubles émergent dans certaines provinces. Le clergé danois est plus divisé sur la question : si le souverain assure la paix dans le royaume, il permet aux prédicateurs luthériens de prospérer et si la diète d’Odense permet la liberté religieuse, les décisions du roi restreignent le pouvoir des membres catholiques du clergé.
Le soutien de la diète permet néanmoins à Frédéric I de charger le Protecteur du royaume, Mogens Gøye, de mobiliser le ban afin de neutraliser la menace que Christian II représente pour son pouvoir. Le souverain danois se doit d’agir rapidement, car s’il a le soutien de la majeure partie de la noblesse du royaume, il sait que Christian II a le soutien de Charles Quint et qu’il peut être écrasé s’il laisse à son neveu l’occasion de se renforcer. Il entreprend aussi de nouer une alliance avec Gustave Vasa afin de pouvoir défaire son neveu en cas de situation défavorable.
Au printemps 1530, Christian II contrôlent les principales provinces du royaume. Seuls lui échappent les provinces contiguës à la Suède et celles septentrionales contrôlées par Vincens Lunge. Ce dernier envoie en février 1530 ses forces s’emparer de Trondheim. Le lieutenant-général de Norvège est parvenu à reprendre le contrôle de l’ancienne capitale du royaume, mais se retrouve confronté aux nombreux troubles au sein des territoires qu’il contrôle. Les autres seigneurs rebelles se soulèvent à la même période et entreprennent de se regrouper pour espérer contrer les alliés de Christian II. Mais seule une partie d’entre eux rallie Vincens Lunge, les autres ne faisant pas confiance au lieutenant général.
S’il se trouve en position de force en Norvège, Christian II doit cependant composer avec le Riksråd afin d’avoir le soutien de la noblesse et du clergé pour triompher de ses adversaires et de contrer les contre-attaques de son oncle ou la menace suédoise. A cela s’ajoute la révolte des seigneurs opposés à lui et la chute de Trondheim. Il peut cependant s’appuyer sur le soutien de Charles Quint qui lui envoie en avril 1530 de nouveaux renforts des Pays-Bas. L’empereur refuse cependant la demande de son beau-frère d’envoyer son héritier en Norvège : Charles Quint désire le former et préfère avoir un allié potentiel à proximité plutôt que de le perdre dans les eaux incertaines de la mer du Nord alors que la position de Christian II n’est pas totalement garantie. Charles Quint cherche cependant à consolider l’alliance avec son beau-frère en lui proposant de faire marier Jean à Marie du Portugal, la fille de sa sœur Eléonore et du défunt roi Manuel I du Portugal. Désireux de consolider sa position et de triompher de son oncle, Christian II accepte les demandes de son beau-frère et signe en octobre 1530 le traité d’Ostende qui confirme l’alliance entre les deux monarques.
En avril 1530 Christian II obtient du Riksråd la possibilité de lever le ban afin de renforcer son armée et de neutraliser Vincens Lunge. Il charge aussi Søren Norby de mener des raids sur les côtes danoises pour entraver la réaction militaire de son oncle. Toujours déterminé à récupérer le trône du Danemark, il commande enfin à Klemen Andersen de rallier la population du Jutland à sa cause afin de pouvoir développer une position favorable au Danemark, mais aussi d’empêcher Frédéric I de déployer l’ensemble de ses forces en Scanie.
Christian II entreprend au cours de l’été 1530 de réorganiser la gouvernance du royaume de Norvège, en s’inspirant notamment du gouvernement de Marguerite d’Autriche aux Pays-Bas et rétablit le grand Landelove (6) qu’il avait édicté en 1521 pour le Danemark. Ses mesures heurtent certains membres de la noblesse et du clergé norvégien même si l’opposition à Frédéric I et au développement des idées de Martin Luther restreint l’opposition aux réformes du souverain.
A partir de mai 1530, Søren Norby mène plusieurs attaques contre les côtes danoises et harcèle les navires de la flotte danoise, forçant cette dernière à le traquer et l’empêchant de pouvoir transporter les forces de Frédéric I vers la Scanie ou les terres norvégiennes. Il permet aussi à Klemen Andersen de traverser le Skager-Rak (7) au début de l’été 1530. Plusieurs escarmouches font rage entre les deux flottes durant la période, le plus important intervenant près de l’île de Læsø début août 1530 où Søren Norby est forcé de se replier vers Oslo. Cet affrontement coupe Klemen Andersen des appuis norvégiens durant l’été 1530 alors que la flotte de Christian II se réorganise pour pouvoir assurer la défense des côtes norvégiennes et prévenir une attaque danoise sur le royaume.
En juin 1530, une armée norvégienne accompagnée de mercenaires hollandais quitte Oslo pour rejoindre Trondheim. Vincens Lunge cherche à les empêcher pour conserver le contrôle de la cité et les rencontre près de Lundamo début août 1530. La bataille est difficile, Vincens Lunge s’appuyant sur la rivière Gaula. Mais ses forces, affaiblies par les multiples troubles qui frappent la région, se font finalement écrasées. Le lieutenant général est lui-même grièvement blessé dans la bataille et décède de ses blessures tandis que plusieurs de ses alliés sont soit tués ou capturés. Le succès de Lundamo permet le ralliement de Trondheim et d’une grande partie du Nord-Norge à Christian II. Seuls quelques endroits, comme la forteresse de Tromsø, échappent encore à l’autorité de Christian II à l’automne 1530. Les forces de Christian II entreprennent de soumettre les territoires rebelles durant la même période.
Au printemps 1530, Frédéric I doit faire face à la menace maritime posée par Søren Norby au début de l’année 1530, ce dernier menant des raids sur les côtes danoises. Pour pouvoir contrer la menace posée par son neveu, Frédéric I se tourne vers ceux qui l’ont aidé à chasser Søren Norby du Gotland, Gustave I Vasa de Suède et la cité de Lübeck. Le souverain suédois apporte son soutien du fait de la menace que fait peser Christian II sur son trône. Les deux souverains négocient durant l’hiver 1530-1531 et signent le traité de Lund en mars 1530 qui officialise la paix entre les deux royaumes et établit une alliance contre Christian II. Si Lübeck est favorable à soutenir le roi danois, des émeutes importantes menées par les habitants favorables à la réforme luthérienne et aux idéaux politiques républicains préviennent la cité hanséatique de soutenir le souverain danois. Si Frédéric I ne peut s’appuyer sur la cité libre, il peut cependant compter sur le soutien diplomatique d’Albert I de Prusse qui avait épousé sa fille Dorothée en 1526. Le souverain danois charge son intendant, Mogens Gøye, de préparer l’armée pour l’amener en Scanie et préparer la campagne pour rejoindre le Bohuslän et attaquer Oslo avec l’aide de Gustave Vasa.
Le roi danois doit cependant gérer son fils Christian, luthérien convaincu, alors que le clergé catholique demeure puissant malgré ses réformes. Christian veut pousser son père à prendre parti pour la cause luthérienne, arguant que son cousin va tout faire pour réaffirmer le pouvoir du clergé catholique et chasser les prédicateurs luthériens. Les soutiens du prince Christian sont aussi de cet avis, car lors de la diète de Copenhague de mai 1530 destiné à discuter de la gestion du royaume et des problèmes suscités par l’attaque de Christian II, les défenseurs de la réforme luthérienne présente la Confession de Copenhague : inspiré de la Confession de Spire des princes luthériens allemands, cette déclaration présente trente-trois articles qu’ils souhaitaient soutenir contre les docteurs catholiques. Le clergé catholique s’y oppose farouchement et la diète de Copenhague fut dissoute après avoir confirmé le recès d’Odense. Mais la révélation de la Confession de Copenhague eut pour conséquence de susciter de graves incidents et troubles dans le royaume, le clergé catholique demandant à Frédéric I d’être plus ferme contre les prédicateurs luthériens alors que des actes iconoclastes ont lieu dans différentes villes. Frédéric I conserve le soutien du Riksdag mais se retrouve confronté à une situation tendue du fait de l’initiative des partisans de la réforme luthérienne.
C’est dans ce contexte incertain et tendu que Klemen Andersen débarque avec quelques centaines de mercenaires sur la côte nord du Vendyssel en juin 1530 afin de rallier la population locale à Christian II. Au cours du mois de juin, il connaît quelques succès et se voit rallier par une partie de la population paysanne contre la noblesse locale. Ces ralliements lui permettent de s’emparer de Skagen et de Hjørring et de contrôler au début de juillet 1530 le nord du territoire. Au début de juillet 1530, sa petite force défait une armée locale chargée de réprimer la révolte près de Vester Brønderslev [8]. Ce succès lui permet de rallier davantage de paysans et de consolider le contrôle d’une partie du Vendyssel au nom de Christian II. A la fin juillet, son armée contrôle la majeure partie de la presqu’île. Deux possibilités s’offrent à Klemen Skipper : chercher à rallier Aalborg, la ville la plus importante dans la région ou descendre dans le Jutland par l’isthme d’Agger. Il tente la première approche en parlementant avec les notables de la ville de reconnaître Christian II comme le roi légitime du Danemark début août 1530. Mais ces derniers se montrent peu enclins à accepter les demandes, d’autant plus qu’ils peuvent tirer profit du bras de mer qui sépare leur cité du Vendyssel. Ce n’est pas l’avis d’une partie de la population qui décide de se soulever lors de l’Assomption 1530, forçant la fuite des notables et nobles favorables à Frédéric I. Durant l’insurrection, un incendie ravage une grande partie de la ville. La destruction de la ville prive Klemen Andersen d’une base solide qui lui aurait permis de consolider la révolte dans le Jutland et l’oblige à déplace son armée à l’ouest afin de rejoindre le Jutland par l’isthme d’Agger.
A la mi-septembre 1530, Klemen Andersen a franchi l’isthme et rallié Holstebro. Son armée s’avance sur Viborg pour en faire un lieu-clé de la révolte avant de s’avancer sur Aarhus pour en prendre le contrôle. Mais à la fin de septembre 1530, une armée menée par Mogens Gøye arrive dans la province. L’arrivée du lieutenant-protecteur du royaume dans la province amène Klemen Andersen à se replier pour pouvoir préserver ses forces. Revenant dans le Vendyssel en octobre 1530, il entreprend de fortifier Vestervig pour bloquer le passage de l’isthme à Mogens Gøye qui s’est emparé d’Holstebro et de Lemsvig à la même période. Hjørring devient la base centrale de la rébellion soutenant Christian II du fait de son rôle dans la tenue des assemblées locales. En novembre 1530, Mogens Goye mène un assaut violent contre les défenses de Vestervig et parvient à s’en emparer après de terribles affrontements avec les rebelles. Durant l’hiver 1530-1531, Klemen Andersen harcèle son adversaire pour ralentir son entrée dans le Vendyssel alors que ses propres forces sont ravitaillées par quelques navires envoyés par Søren Norby.
Le soulèvement dans le Vendyssel et le Jutland force Frédéric I à modifier la campagne militaire de son armée, ne voulant pas voir son neveu obtenir une position sur la péninsule qui lui permettrait de menacer Copenhague. Il charge Mogens Gøye de réprimer le mouvement et demande à ses alliés d’intervenir pour stopper son neveu et l’empêcher de se renforcer. La révolte aggrave les tensions dans les autres provinces, les partisans de la réforme luthérienne accusant le clergé danois d’avoir permis aux rebelles de s’imposer dans la pointe de la péninsule alors que la noblesse est assoiffée de vengeance et déterminée de châtier les paysans qu’ils soupçonnent et accusent de soutenir Christian II. La dégradation de la situation au sein de son royaume affecte le roi qui voit toute sa politique de conciliation s’effriter à cause de son neveu. Son fils et certains membres de son entourage veulent le pousser à officialiser la Confession de Copenhague comme doctrine de l’Église du Danemark mais Frédéric I refuse de céder, cherchant à tout prix à préserver ce qui reste de paix dans son royaume alors que le clergé catholique commence à se déchirer dans ses loyautés. A l’automne 1530, il se tourne vers Gustave I et lui demande son aide pour neutraliser Christian II.
A la fin de l’automne 1530, Christian II se trouve dans une position forte en Norvège : il contrôle désormais la quasi-totalité du royaume et peut compter sur Klemen Andersen qui mène une révolte dans le Vendyssel et lui permet d’avoir une position vers laquelle envoyer des renforts pour menacer son oncle et pouvoir récupérer son trône. Il doit cependant composer avec le Riksråd pour pouvoir gouverner, d’autant alors que la présence des soldats hollandais et allemands et de conseillers des Pays-Bas suscitent la désapprobation d’une partie de la noblesse et du clergé norvégien qui le soupçonne de vouloir enfreindre la charte de 1524. A cela s’ajoute le fait qu’il doit s’endetter auprès des Függer pour pouvoir continuer de financer sa campagne militaire.
Au début de janvier 1531, il apprend pour la progression de l’armée de Gustave Vasa vers le nord. Ne voulant pas voir son adversaire menacer Oslo, le souverain envoie une partie de ses forces à la rencontre de ce dernier pour le contrer. Son armée quitte Oslo à la mi-janvier. Elle rejoint le Vestfold fin janvier et confronte l’armée suédoise près de Sarpsborg. Durant la bataille, si les mercenaires hollandais et germaniques permettent de contenir les suédois, les capacités militaires de Gustave Vasa lui permettent de vaincre l’armée norvégienne, la forçant au repli sur Oslo. La défaite de Sarpsborg place Christian II dans une posture difficile, car elle fragilise sa position en Norvège alors que Gustave Vasa se rapproche d’Oslo. Les nobles danois et norvégiens opposés à lui dans le Riksråd, notamment Heinrich Krummedige, en profitent pour chercher remettre en cause sa légitimité alors que d’autres considèrent de l’amener à abdiquer en faveur de son fils qu’ils avaient reconnu comme héritier légitime. Face à l’imminente arrivée de Gustave Vasa, Christian II préfère quitter la capitale, rejoignant Bergen par la mer, bien que plusieurs membres du Riksråd aient suggéré Trondheim comme nouveau centre de pouvoir. Seuls les membres de la diète défavorables ou hostiles à Christian II demeurent à Oslo et ouvrent la cité aux hommes de Gustave Vasa début mars 1531 et renouvelant leur allégeance à Frédéric I.
L’attaque suédoise et la chute d’Oslo fragilisent la position de Klemen Andersen et de la révolte paysanne du Vendyssel. Leur situation se complique davantage lorsqu’en janvier 1531, une armée menée par Johann Rantzau débarque dans le sud du Vendyssel à partir d’Aalborg grâce à des embarcations et au soutien de la flotte danoise. L’armée danoise remonte vers Hjørring pour mettre un terme à la révolte. Cherchant à le stopper, Klemen Andersen et son armée font à sa rencontre et la confronte près de Wra (9) vers la fin de février. Les affrontements vont à l’avantage de John Rantzau qui détruit la moitié des forces de Klemen Andersen. Ce dernier est forcé de se replier avec les débris de son armée et prend refuge à Skagen dans l’espoir de pouvoir quitter le Vendyssel. Tout en pourchassant son adversaire, Johan Rantzau reprend le contrôle d’Hjørring début février 1531 au nom de Frédéric I. Son armée est rejointe quelques jours plus tard par celle de Mogens Gøye avant d’avancer sur Skagen. Les danois atteignent la cité fin février et les affrontements pour s’emparer du port font rage, les rebelles ayant l’avantage d’être dans une position géographique les empêchant d’être submergés par leurs adversaires. De terribles combats se font jusque dans les rues de la ville. La discipline et la supériorité numérique de l’armée royale danoise lui permet finalement de s’emparer de la vile après de violents combats alors que ses hommes s’adonnent au pillage. Plusieurs centaines de personnes, rebelles comme habitants ou soldats danois, décèdent dans les combats et le pillage de la ville qui fait suite. Klemen Andersen et une poignée des hommes qui l’accompagnaient dans la campagne militaire réchappent de peu à la capture alors qu’ils s’embarquent sur un petit bateau afin de rejoindre les côtes norvégiennes. La traversée est difficile et les rescapés rejoignent la côte norvégienne courant mars.
En mai 1531, la position de Christian II est très compliquée. La perte d’Oslo et de sa province le place en position de faiblesse face à la noblesse et au clergé norvégien, une partie préférant demeurer neutre quand certains préfèrent offrir leur allégeance à Frédéric I. La défaite de Klemen Andersen dans le Vendyssel l’empêche d’avoir la possibilité de mener campagne dans la péninsule pour récupérer la couronne. Il ne peut compter que sur l’armée de Kristoffer Trondsson, dont une partie des forces a préféré se retirer avec le choix de neutralité de nobles norvégiens, une partie des mercenaires fournis par Charles Quint et quelques figures éminentes du royaume, comme l’archevêque de Norvège, qui lui demeurent fidèles.
L’émergence de troubles dans le royaume de Suède oblige Gustave Vasa à revenir dans son royaume. Ce départ est accueilli avec soulagement par Christian II qui voit une opportunité de pouvoir préserver ses chances pour la couronne de Norvège. Mais étant dans une position de faiblesse, il est forcé de faire des concessions à ses alliés afin de pouvoir avoir leur soutien et contrer son oncle et ses alliés. Il s’engage ainsi à respecter la charte de 1524 et à tenir compte des avis du Riksråd dans ses décisions lors du Serment de Bergen de juin 1531. Le souverain cherche aussi à soutenir les rebelles du Dalécarlie, mais les contraintes auxquelles il se retrouve confronté l’empêchent de faire aboutir ce projet.
Durant l’été 1531, Christian II rallie l’armée de Kristoffer Trondsson et échange avec Charles Quint et sa sœur Éléonore pour demander de nouvelles aides. Les Habsbourg se montrent cependant plus prudents et attentistes que l’année précédente, les échecs de Christian II et de ses alliés faisant craindre l’échec de son entreprise. Déterminé à réussir à au moins conserver la couronne de Norvège, Christian II charge Kristoffer Trondsson de reprendre Oslo et de sécuriser le Ranrike pour sécuriser la frontière sud du royaume avant de pouvoir espérer récupérer le Bohuslän ou les provinces danoises du Halland, de la Scanie et du Blekinge. Mais en attendant de pouvoir envoyer cette force, le souverain est contraint de réorganiser les terres qu’il contrôle afin de pouvoir s’assurer de la loyauté du clergé et de la noblesse norvégienne, même s’il peut compter sur le soutien des paysans.
L’année 1531 permet à Frédéric I de conforter sa position face à son neveu. Durant le printemps 1531, son armée a écrasé le mouvement rebelle qui avait agité le Vendyssel et le Jutland alors que Gustave Vasa s’est emparé d’Oslo, donnant au roi danois l’opportunité de réaffirmer son autorité sur les terres de Norvège et de fragiliser la situation de son neveu. En juillet 1531, il charge Mogens Gøye de rétablir son autorité à Oslo alors que son allié suédois est obligé de revenir dans son propre royaume pour résoudre un problème de révolte. L’intendant du royaume arrive à Oslo en août et rétablit l’autorité de Frédéric I comme souverain légitime de Norvège, bien qu’une partie du Riksråd soit présent pour confirmer cette situation.
La situation générale reste cependant compliquée pour Frédéric I. Une partie de la Norvège continue de soutenir son neveu alors qu’il doit aussi gérer les conséquences de la révolte du Vendyssel et du Jutland. La révolte a renforcé les tensions entre catholiques et luthériens, les seconds accusant les premiers d’avoir permis le développement de la révolte en faveur du souverain déchu alors que les premiers dénoncent la volonté jugée destructrice des traditions des prétendus réformés. A l’automne 1531, de nombreux incidents violents éclatent entre des soutiens du clergé catholique ou des paysans avec des partisans de la réforme luthérienne alors que le Jutland subit des saccages de la part des nobles locaux tirant profit de l’absence de l’intendant royal pour assouvir leur vengeance à l’encontre de la paysannerie qui demeure favorable à Christian II.
Frédéric I s’efforce d’apaiser les situations, conscient de la toute puissance du clergé catholique malgré ses sympathies luthériennes et ne voulant pas voir son royaume se déchirer alors que son neveu continue de demeurer une potentielle menace. Le souverain se voit pénaliser dans son entreprise alors que son fils Christian affirme plus ouvertement ses positions luthériennes et lui demande d’être sévère avec les rebelles et d’appliquer la Confession de Copenhague, considérant l’attaque des alliés de Christian II comme la preuve du danger que représente le clergé catholique et du fait que Christian II est soutenu par Charles Quint considéré comme le champion de l’Eglise catholique. Frédéric I s’efforce de demeurer ferme sur ses positions, mais cela suscite des tensions avec son fils et une partie de son entourage qui trouve que sa politique conciliatrice n’a plus lieu d’être. Ces tensions diverses tendent à affecter sa santé alors qu’il se rapproche de la soixantaine. A l’hiver 1531, le roi s’inquiète de l’avenir de son royaume alors qu’il sent sa santé se dégrader.
(1) Titre de grand protecteur.
(2) Durant son exil, Christian II échangea une correspondance avec Martin Luther et commanda une traduction danoise de la Bible.
(3) Ancienne province norvégienne correspondant au nord de la province actuelle du Bohuslän.
(4) Province norvégienne au XVIe siècle, et province suédoise actuelle, située au nord de Göteborg.
(5) Un traité de paix signé entre Gustave Vasa et Frédéric I du Danemark, mettant officiellement fin à la guerre de libération suédoise et à l'Union de Kalmar en reconnaissant l'indépendance du royaume de Suède.
(6) Un code des lois, basé pour la plus grande part sur les modèles hollandais et témoignant des visées égalitaristes du roi, édicté à la fin de l'année 1521 par Christian II alors qu'il était encore roi du Danemark, de Norvège et de Suède.
(7) Le détroit séparant la péninsule du Jutland des côtes norvégiennes et suédoises.
[8] Village fermier à l'origine de la ville actuelle de Brønderslev.
(9) Nom d'époque de Vrå.
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Voici la nouvelle partie de cette TL. Elle explore la situation de la Suède durant les années 1527-1531 en parallèle des troubles qui affectent le royaume de Danemark et celui de Norvège. La majeure partie des événements s'inspirent d'événements historiques, mais l'influence des événements qui frappent le Danemark et la Norvège à la même période.
J'espère que cette partie saura vous plaire, même si elle peut ressembler à une forme d'interlude.
Bonne lecture !
1527-1532 : La Suède dans l’ombre de la guerre des deux rois
Durant les années 1527-1531, le royaume de Suède connaît une évolution particulière, marquée par des ruptures et des troubles alors qu’elle subit l’impact du conflit fracturant son voisin.
En janvier 1528, Gustave Vasa est sacré roi à Uppsala, concrétisant son autorité sur la Suède. Le souverain place son royaume sur la voie d’une émancipation de l’autorité de Rome : lors du Riksdag de Västerås tenu l’année précédente, les Etats acceptent les réformes visant à donner au roi le mandat de confisquer les biens du clergé ; à rendre illégales les fonctions ecclésiastiques qui n’ont pas reçu le consentement royal ; à soumettre le clergé serait soumis au droit séculier, et à obliger l’enseignement des paroles de la Bible dans les sermons dans les églises et les écoles (ce qui revient à supprimer toutes les doctrines de l'église catholique). Ces réformes amènent à la confiscation des biens de l’Eglise par la couronne suédois, provoquant la colère du pape Paul III qui dénonce les agissements de Gustave Vasa et réaffirme en 1528 la légitimité de Gustavee Trolle comme archevêque de Suède. Gustave Vasa officialise la rupture de ses relations avec le Saint-Siège peu après, amenant à son excommunication en 1530 par le successeur de Paul III, Pie IV. En février 1529, le souverain suédois tient le synode d’Orëbro qui désapprouve les enseignements catholiques et les pèlerinages. Entre 1527 et 1530, les diocèses catholiques de Linköping, de Skara et de Växjö sont fermés.
En réaction à l’établissement d’un nouveau culte influencé par les idées de Martin Luther éclatent deux révoltes entre 1527 et 1529. La première a lieu dans la province du Dalécarlie au printemps 1527 : la révolte de l’écuyer de Dal menée par un homme affirmant être Nils Sture, fils de Sten Sture le jeune, et exprimant ses prétentions à la couronne de Suède. C’était la seconde fois que la province se révoltait contre Gustav Vasa après 1523 alors qu’elle avait soutenu ce dernier durant la guerre de libération contre Christian II. La révolte de l’écuyer de Dal conjugue en outre l’opposition traditionnelle des élites aux augmentations d’impôt à celle nouvelle à la nouvelle doctrine théologique défendue par le roi, aggravée par les décisions du Riksdag de Västerås de juin 1527. L’homme s’allie avec Vincens Lunge, lieutenant général de Suède, mais la révolte échoue et est écrasée en 1528. Le meneur fuit à Rostock avant d’être arrêté et exécuté sous la pression suédoise. Vincens Lunge conserve sa position grâce à la mansuétude de Gustave Vasa. Une seconde révolte éclate en avril 1529 après le synode d’Orëbro : une partie de la noblesse du Västergötland, (dont Magnus Haraldsson, évêque de Skara, et Ture Jönsson, intendant de la cour du roi) fit alliance avec les paysans du Småland et accuse le souverain de mener une politique non chrétienne. Gustave et sa sœur, Margareta af Höya, sont faits brièvement prisonniers par les rebelles, amenant le souverain à promettre de réprimer l’hérésie luthérienne et de préserver la doctrine de Rome. Cela permet de mettre un terme à la révolte et au roi de la réprimer et d’en châtier les meneurs, revenant sur ses promesses. L’issue de la révolte précipite aussi la perte de faveur de Gustave Vasa envers Laurentius Andreae : ce dernier était jugé responsable des nouvelles politiques théologiques par les rebelles et Gustave Vasa y a saisi l’opportunité de s’en séparer, ses vues sur la gestion de l’Église de Suède étant en contradiction avec celles du réformateur, ce dernier défendant une vision plus proche de celle de Martin Luther.
L’attaque de Christian II sur la Norvège à l’été 1529 provoque l’alliance de Frédéric I avec Gustave Vasa. Ce dernier s’allie d’autant plus facilement avec le souverain danois qu’il n’a pas pardonné au roi déchu et à son archevêque Gustave Trolle le bain de sang de Stockholm dans lequel son père a été exécuté. Un traité d’alliance est signé à Lund en novembre 1529 engageant Gustave Vasa à soutenir Frédéric I à briser la menace suscité par son neveu et de protéger le trône du Danemark. Cette alliance amène le roi de Suède à faire appel à la noblesse suédoise pour lever le ban au printemps 1530. La noblesse répond favorablement à l’appel de son souverain, permettant à Gustave Vasa de lever une armée en mai 1530. Lors de l’assemblée d’Uppsala qui se tient en mai, le souverain obtient le soutien favorable de la noblesse, lui permettant de pouvoir lever le ban. Lors de la même assemblée, la décision est prise de décréter un impôt sur les cloches des églises des villes du royaume afin de lever des fonds et de rembourser la dette que Gustave I doit à la cité de Lübeck.
Au cours de l’été 1530, Le triomphe de Christian II en Norvège et les nouvelles d’une révolte en sa faveur dans le Jutland poussent Gustav Vasa à agir rapidement, la province du Västergötland étant proche des terres norvégiennes alors que la révolte de la noblesse locale est encore fraîche dans les mémoires. Cette inquiétude est confortée lorsque Frédéric I lui demande de l’aide pour empêcher son neveu de descendre sur les provinces orientales du royaume du Danemark. Face à l’urgence de la situation, le souverain suédois fait lever le ban au cours de l’automne 1530. Durant l’assemblée d’Örebro tenue en octobre 1530, il fait étendre l’impôt sur les cloches d’église aux villages suédois afin d’obtenir suffisamment de fonds pour rembourser la dette envers Lübeck et assurer le financement de la campagne militaire. Le souverain suédois part en campagne en novembre 1530. Son armée rejoint le Västergötland fin décembre 1530 et rejoint le fort de Bohus dans les premiers jours de janvier 1531. Il se dirige ensuite vers le nord afin de menacer Oslo, traversant le Bohuslän et le Ranrike. Il rencontre l’armée de Christian II près de Sarpsborg au début de février 1531. Si ses adversaires peuvent s’appuyer sur des mercenaires hollandais et allemands qui suscitent de fortes difficultés pour son armée, notamment du fait de la géographie des lieux, Gustave Vasa déploie ses capacités militaires et parvient à triompher de l’armée adverse envoyant des hommes traverser le lac Isesjøen qui est encore gelé en cette période hivernale. Sa victoire lui permet de disperser la principale force de Christian II pouvant lui barrer la route d’Oslo et l’amène à remonter au nord. Atteignant Oslo début mars 1531, il se la voit ouvrir du fait des complicités des membres du Riksråd demeurés dans la capitale norvégienne et favorables à Frédéric I. Il apprend le repli de Christian II sur Bergen et l’existence d’une autre armée se trouvant dans la province de Trondheim. Il occupe Oslo pour le compte de son allié et assiège la forteresse d’Akershus qui est demeurée fidèle à Christian II. Il faut attendre l’arrivée de navires danois pour pouvoir tenter de s’emparer de la forteresse début avril 1531.
Durant avril et mai 1531, Gustav I réorganise Oslo, notamment en poussant à la prédication luthérienne dans la capitale norvégienne. Le souverain suédois prépare aussi sa campagne militaire afin de chasser Christian II et de permettre à Frédéric I de récupérer le royaume de Norvège. Il rejoint ainsi Tønsberg à la fin mai 1531. Le souverain est obligé d’assiéger la forteresse qui protège la ville et celle-ci tombe grâce à la traîtrise de certains membres de la garnison. Mais alors qu’il préparait la campagne en direction de Stavanger et de Bergen, il apprend l’éclatement d’une nouvelle révolte dans la province du Dalécarlie : l’impôt sur les cloches des églises a suscité la colère des dalécarliens qui se sont soulevés contre le roi suédois en février 1531. La nouvelle de cette révolte oblige Gustave I à interrompre la campagne militaire en Norvège et à revenir dans son royaume pour réprimer la révolte, ne laissant qu’une petite force protéger Oslo en attendant que les Danois l’investissent pour Frédéric I. Revenant à Stockholm en août 1531, le souverain suédois s’occupe d’abord des affaires du royaume avant d’envoyer l’armée s’occuper des rebelles durant l’automne 1531. Le principal mouvement est écrasé durant l’hiver 1531-1532, bien que des groupes mineurs continuent l’insurrection.
Dernière édition par Yodarc le Mar 22 Nov - 18:00, édité 1 fois
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Gustav abdikation ! Gustav bannlysning !
Gustav Vasa, skitstövel, vi hämtar dig hos dig ! Gustav Vasa, dumma Huvud, vi kommer att bryta allt i ditt hus !
Ci dessus une gravure d'époque des jacqueries suédoises.
Dernière édition par Préhistorique le Sam 2 Juil - 11:02, édité 2 fois
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L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Cette vingt-quatrième partie sera sur une nouvelle zone géographique inédite dans ce récit alternatif : les états musulmans de l'Afrique du Nord, de l'Empire Ottoman et de l'empire Perse. Y seront présentés les événements qui font suite aux répercussions de la Guerre de la Sainte-Ligue. Cette partie présente l'impact sur les différents royaumes musulmans de la région, notamment sur le plan des relations diplomatiques.
Petit avertissement : l’Égypte (qui fait partie de ces territoires) est un cas particulier, faute d'informations précises qui auraient pu aider à présenter de manière plus détaillée sa situation.
Cette partie clôt la période des années 1520 et d'un contexte qui présente de nombreuses différences de la réalité OTL et des tendances récurrentes.
J'espère que découvrir la situation de la situation des territoires du sud et de l'est de la Méditerranée saura vous plaire comme pour les précédentes régions.
Bonne lecture !
1527-1531 : Les répercussions de la guerre de la Sainte-Ligue en terre d’Islam
Les années 1527-1531 voient le monde musulman d’Afrique du Nord et de l’Orient être affectés par la guerre de la Sainte-Ligue et l’expédition de Charles Quint sur les côtes d’Afrique du Nord et d’Égypte.
La région ayant le moins été affectée par l’expédition est le royaume du Maroc, même si les Portugais ont profité de leur participation à l’expédition pour renforcer leurs possessions, notamment Santa Cruz do Cabo de Aguer (1) afin de contrer la menace saadienne. Cette dernière monte en puissance depuis les années 1500 et est en rivalité avec les Portugais et la dynastie régnante des Wattasides, s’étant notamment emparé dans le début des années 1520 du Souss et de Marrakech. En 1527, Ahma Al-Wattasi tente de reprendre Marrakech, mais est forcé de se retirer. Suite à cela, un traité est signé à Tadla où le royaume est partagé entre les deux dynasties : les Saadiens conservent le Souss et Marrakech tandis que les Wattasides demeurent la lignée régnante du Maroc avec leur capitale à Fès. Cela permet l’établissement d’une paix entre les deux lignées qui donnent aux Saadiens l’opportunité de se réorganiser et de concentrer leurs efforts sur les possessions portugaises.
Si les terres marocaines ont peu été affectées par l’expédition de Charles Quint, le renforcement des possessions portugaises et espagnoles contribue à un développement plus prononcé des politiques distinctes des deux lignées envers les Portugais : les Wattasides sont dans une posture prudente et diplomatique alors que les Saadiens se montrent des plus agressifs contre ces derniers, en imposant notamment un blocus à Santa Cruz do Cabo de Aguer en 1530. La situation est aussi affectée par l’arrivée des musulman espagnols qui ont pu choisir l’exil suite à la décision de la couronne espagnole et de l’inquisition d’abolir officiellement l’islam comme religion dans la péninsule, forçant les morisques à l’exil ou à la conversion forcée. L’arrivée de ces personnes contribuent à nourrir la défiance et la colère des populations locales contre les Espagnols et les Portugais, surtout du fait que les autres morisques ont été forcés de se convertir au catholicisme. Le succès de l’expédition de Charles Quint en Égypte suscite une profonde inquiétude des populations locales qui voient les puissances chrétiennes du nord s’imposer contre elles. Cette inquiétude contribue au renforcement des Saadiens qui se présentent comme les défenseurs de la foi contre les Portugais et Espagnols.
L’expédition de la Sainte-Ligue a permis le renforcement du royaume Koukou. L’alliance avec Charles Quint leur a permis de reprendre Alger et de chasser les pirates barbaresques. Le royaume berbère passe la fin des années 1520 à renforcer son autorité sur Alger et de prendre le contrôle des territoires qui se trouvaient sous l’autorité d’Alger et de Khayr Ad-Dîn. Ils soumettent ainsi le beylik du Titteri en 1528 avant de s’étendre dans la région à l’ouest de Médéa en 1531. Ce renforcement se heurte à l’hostilité d’une partie de la population qui leur reproche l’alliance avec les Espagnols et appréhendent de voir ces derniers investir davantage de territoires et d’influence dans la région ou de mener des razzias dans le territoire comme ils le faisaient au début des années 1500. Le sultanat Koukou entre en contact avec le sultanat de Tlemcen et les tribus de Banu Rashid, héritière de celles de Banu Hilal.
Alors que les Koukous étendent leur influence sur les côtes d’Algérie, un autre royaume berbère tire profit de la disparition de la Régence d’Alger : le royaume de Beni Abbés. Ce royaume fondé en 1510 par les berbères de la région de Béjaïa pour se protéger des razzias espagnoles, avait été forcé en 1516 à s’allier à la régence d’Alger mise en place par Khayr Ad-Dîn et son frère. La disparition de la régence et l’exil de Khayr Ad-Dîn suite à l’expédition de Charles Quint libère le royaume d’un voisin puissant et menaçant pour se retrouver de nouveau confronté à la présence espagnole et à un nouveau voisin qui cherche à s’étendre. L’expansion des Koukous se faisant cependant sur le littoral et l’ouest durant la fin des années 1520, Abdelaziz, le souverain de Beni Abbés, en profite pour renforcer son royaume sans avoir la menace d’un voisin prêt à l’envahir. Le souverain renoue des liens avec les Espagnols afin de ne pas être menacé par ces derniers, renouvelant en 1529 l’alliance avec eux qui avait été brisée par Arudj Reïs et son frère Khayr Ad-Dîn en 1516. Au début des années 1530, le royaume entreprend de s’imposer sur les territoires orientaux de l’ancienne régence d’Alger.
L’expédition de Charles Quint a complètement bouleversé les équilibres fragiles qui existaient sur les côtes barbaresques. Avec la prise d’Alger et la défaite de Khayr Ad-Dîn, les principales forces de pirates barbaresques ont été décimés, s’étant réfugiés à Bône sous contrôle ottoman. La situation de Khayr Ad-Dîn est difficile car ses efforts pour reprendre Alger et consolider sa position grâce à l’alliance ottomane ont été réduits à néant par l’expédition de la Sainte-Ligue. Le pirate barbaresque n’est cependant pas anéanti et s’efforce de reconstituer ses forces durant la fin des années 1520. Il est obligé de faire profil bas pour pouvoir rétablir une force politique et militaire solide dans la région. Cela l’amène à offrir ses services à Soliman en échange de son aide pour reconstituer ses forces. Soliman accepte et le fait participer aux expéditions navales de son empire durant la période, notamment contre Corfou en 1530. Avec l’aide des Ottomans présents à Bône, il entreprend aussi d’étendre la domination de ces derniers sur la région entourant Bône pour leur permettre d’avoir un point d’appui en Afrique du Nord qui leur permettra de s’étendre.
L’expédition de la Sainte-Ligue a enfin permis au sultanat zianide de Tlemcen d’être libérée de la menace potentielle que faisait peser Khayr Ad-Dîn. Le royaume consolide ses relations avec les Espagnols situés à Oran et entreprend de reprendre plusieurs territoires de l’ancienne régence, les amenant à entrer en contact avec les Koukous lorsque ces derniers s’emparent de Médéa en 1531. La même année, le sultan zianide, Abū Muḥammad ʿAbdallāh décède, laissant son royaume à ses deux fils Mouley Mohammed et Abou-Abdallah Mohammed, qui se disputent le trône, faisant tomber le royaume dans une guerre civile.
Durant la même période, Khayr Ad-Dîn et les Ottomans peuvent tirer profit des troubles qui se développent et se renforcent sur les terres qui demeurent encore sous l’autorité de la dynastie Hafside sur le territoire de Tunis et ses environs. Abû `Abd Allâh Muhammad V al-Hasan, aussi connu sous le nom de Mawlāy al-Ḥasan al-Ḥafṣī, qui a succédé à son père en 1526, est confronté à une colère croissante de la population qui dénonce la faiblesse de sa lignée face aux Chrétiens alors que les Espagnols contrôlent désormais la forteresse de la Goulette, plaçant Tunis sous la menace directe de leur puissance. Le sultan doit aussi gérer la menace que représente son frère Rashid : ce dernier a réussi à échapper au massacre de ses proches perpétrés par Mawlāy al-Ḥasan pour récupérer le pouvoir et avait rejoint Bône sous la protection des Ottomans et de Khayr Ad-Dîn. Ces derniers n’hésitent pas à utiliser le prince exilé pour susciter le trouble dans le sultanat Hafside et rallier des franges de la population à leur cause.
L’Égypte connaît une situation particulière à la fin des années 1520. Suite à l’expédition de Charles Quint, des émirs mamelouks s’imposent dans le territoire et s’efforcent de consolider leur position afin de pouvoir contrer la menace ottomane. Cela les amène à développer une alliance compliquée avec les Espagnols, mais aussi avec les Vénitiens en 1528 en échange de l’installation d’un comptoir commercial à Alexandrie. Les mamelouks ont accepté ce traité à la fois pour avoir des alliés pour contrer les Ottomans, mais aussi pour pouvoir reconstituer la trésorerie qui a été déstabilisée par les années de troubles qui ont frappé le territoire depuis la révolte d’Ahmed Pacha. Dans le même but de se parer des Ottomans, les mamelouks cherchent à renouer contact avec les Séfévides de Perse afin de constituer une alliance commune contre Soliman. Les émirs bénéficient cependant du fait que les Ottomans sont confrontés à des difficultés et conflits qui les détournent de l’Égypte et le fait que la défaite du gouverneur de Syrie a retardé le risque d’une nouvelle campagne contre eux. Les émirs cherchent à retenir les leçons de leurs défaites en 1516 et 1517 face aux Ottomans en modernisant leurs forces, mais se trouvent confrontés à l’opposition d’une partie des autres émirs qui sont réticents à renier leurs armes traditionnelles.
En plus de ces difficultés, les émirs mamelouks qui se sont imposés grâce à Charles Quint se rivalisent et sont en rivalité avec d’autres. Ils doivent gérer un territoire qu’ils ne contrôlent que de nom et sur lequel ils doivent s’imposer alors que certaines franges de la population égyptienne leur sont hostiles du fait de la déliquescence des dirigeants mamelouks avant la conquête ottomane et de leur alliance avec des puissances chrétiennes qui semblent être les véritables maîtres de l’Égypte après l’expédition de Charles Quint. La fin des années 1520 voient les émirs mamelouks s’efforcer d’imposer leur autorité fragile sur l’Égypte alors que divers émirs cherchent à s’imposer face à eux, notamment dans le sud de l’Égypte. La question de désigner un sultan se fait jour après le départ des armées chrétiennes, les émirs voulant avoir un chef capable de les mener et de défendre les terres d’Égypte contre toute menace. Cette recherche amène dans les années 1527-1529 à une série de complots, les émirs maintenus par Charles Quint ne voulant pas perdre leur position mais devant faire face à l’opposition et l’hostilité de leurs pairs. Assassinats et exécutions sont perpétrés durant cette période alors que les mamelouks recherchent à se rétablir comme pouvoir central en Égypte. Plusieurs sultans se succèdent sans parvenir à se maintenir au point qu’en 1528-1529 (l’an 934 du calendrier hégirien) sera connue comme « l’année des trois sultans ». Ce n’est qu’à l’été 1529 que la situation se stabilise avec un sultan parvenant à s’imposer et à recevoir l’adhésion des différents émirs, permettant à la caste dirigeante de pouvoir consacrer son énergie à la défense de leur pouvoir contre la menace ottomane.
A ces difficultés s’ajoutent les problèmes économiques, l’Égypte étant désorganisée par les troubles et l’expédition de Charles Quint. Ces problèmes sont aggravés par la perte de la protection des lieux saints de La Mecque et de Médine, désormais sous le contrôle Ottoman, et la présence portugaise dans l’Océan indien et aux portes de la Mer rouge prive les Mamelouks de l’accès aux épices. Cela oblige ces derniers à réorganiser la flotte égyptienne afin de réaffirmer leur présence en mer rouge et de protéger le commerce contre les ingérences portugaises et ottomanes. Cette tâche est dévolue à Selman Reis : ce corsaire avait déjà travaillé pour les Mamelouks durant les années 1510 mais avait été prisonnier des Ottomans après la chute de l’Égypte pour déloyauté envers Selim I avant de revenir en Égypte avec Ibrahim Pacha en 1524. La chute de l’Égypte par Charles Quint a permis au navigateur de pouvoir de nouveau offrir ses services aux mamelouks. Chargé de la flotte égyptienne en Mer Rouge, il la réorganise au cours des années 1527-1530, même si les troubles intérieurs et la succession rapide de sultans entrave sa capacité à être plus efficace, notamment pour contrer les raids portugais en mer Rouge.
Les années 1527-1531 sont pleines de défis pour Soliman et l’empire Ottoman. Le sultan doit en effet gérer plusieurs problèmes qui frappent son empire et qui remettent en cause son autorité.
Le conflit avec la Sainte-Ligue a résulté en la perte de son allié barbaresque d’Alger et de l’Égypte et au déclenchement d’un nouveau conflit avec la République de Venise alors que la guerre contre le royaume de Hongrie est toujours en cours. Cela amène les Ottomans à se concentrer contre leurs nouveaux adversaires, notamment pour reprendre le port de Durrës perdu en 1524. Cela détourne une partie des attaques ottomanes contre le sud de la Hongrie vers la Dalmatie vénitienne et les possessions insulaires de la Sérénissime.
Mais en plus de ces conflits dans lesquelles il peut s’appuyer sur des forces conséquentes et une flotte qui se renforce, Soliman est confronté à plusieurs révoltes durant les années 1527-1529, obligeant le sultan et les beys d’envoyer des troupes pour réprimer ces insurrections. En 1527 éclate une nouvelle révolte des Celali (2) contre le pouvoir absolutiste du sultan, obligeant le gouverneur d’Anatolie à envoyer ses forces pour la réprimer. L’insurrection ne sera réprimée qu’à l’été 1529. En 1528, Soliman est confronté à une révolte de janissaires qu’il finit par réprimer.
A ces troubles s’ajoutent les raids portugais dans la mer Rouge durant la même période. Le raid le plus dangereux intervient en 1529 lorsque les Portugais tentent de s’emparer de Djeddah qui protège le passage vers La Mecque. Si les fortifications mises en place par les mamelouks préviennent les Portugais de s’en emparer de la cité, cela pousse Soliman à renforcer les défenses de la cité en 1530-1531, le sultan prenant conscience de l’importance stratégique du lieu pour protéger les lieux saints de l’Islam. Mais il ne peut déployer que s’appuyer sur le Sharifat de Médine, la Mer Rouge étant disputée par les mamelouks qui veulent réimposer leur présence dans la région et n’ayant pas de port important pour y déployer une flotte.
Alors qu’il gère ces différentes difficultés qui affectent son empire, Soliman entreprend de réorganiser le fonctionnement de ce dernier sur le plan juridique et fiscal. Dans les années 1530-1531, les principales crises qui ont émergé sur son empire ont été étouffés ou résolus. Ainsi, son empire signe un traité de paix avec Venise revenant à un statu quo avec un tribut lourd à payer pour la Sérénissime et aucune reprise des accords commerciaux pour sanctionner leur contribution aux expéditions de la Sainte-Ligue. La résolution de plusieurs des difficultés qu’il a connu sur la période permet au sultan ottoman de se tourner de nouveau vers les campagnes militaires, principalement vers l’Égypte qu’il a l’intention de reprendre.
Durant les années 1527-1531, l’empire perse est sous la régence d’Hossein Khan, le sultan Tamasp I étant encore trop jeune pour régner (3). Ils reçoivent durant les années 1528-1529 les ambassades Habsbourg et mamelouks pour faire alliance contre l’Empire Ottoman. Si le jeune sultan et son régent sont intéressés par l’alliance qui permettraient de contrer la menace turque, ils sont occupés à gérer les rébellions des tribus turcomanes dans le Khorassan, de la menace Chayanide qui cherche à s’emparer d’Hérat en 1528 puis en 1530 et de la révolte de l’émir de Bagdad en 1528. En 1531, ils se décident à créer une alliance avec les Mamelouks, ces derniers étant les plus proches à contacter, même s’ils envoient un message pour la possession espagnole de Damiette.
(1) Nom portguais d'Agadir.
(2) Les Celali sont des milices provinciales, notamment de l'Anatolie, qui contestent à partir de la fin du règne de Selim le pouvoir absolutiste grandissant du sultan ottoman.
(3) Tamasp est né en 1514 et succède à son père en 1524.
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Yodarc a écrit:Bonjour à tous !
Cette vingt-quatrième partie sera sur une nouvelle zone géographique inédite dans ce récit alternatif : les états musulmans de l'Afrique du Nord, de l'Empire Ottoman et de l'empire Perse. Y seront présentés les événements qui font suite aux répercussions de la Guerre de la Sainte-Ligue. Cette partie présente l'impact sur les différents royaumes musulmans de la région, notamment sur le plan des relations diplomatiques.
Petit avertissement : l’Égypte (qui fait partie de ces territoires) est un cas particulier, faute d'informations précises qui auraient pu aider à présenter de manière plus détaillée sa situation.
Cette partie clôt la période des années 1520 et d'un contexte qui présente de nombreuses différences de la réalité OTL et des tendances récurrentes.
J'espère que découvrir la situation de la situation des territoires du sud et de l'est de la Méditerranée saura vous plaire comme pour les précédentes régions.
Bonne lecture !
1527-1531 : Les répercussions de la guerre de la Sainte-Ligue en terre d’Islam
Les années 1527-1531 voient le monde musulman d’Afrique du Nord et de l’Orient être affectés par la guerre de la Sainte-Ligue et l’expédition de Charles Quint sur les côtes d’Afrique du Nord et d’Égypte.
La région ayant le moins été affectée par l’expédition est le royaume du Maroc, même si les Portugais ont profité de leur participation à l’expédition pour renforcer leurs possessions, notamment Santa Cruz do Cabo de Aguer (1) afin de contrer la menace saadienne. Cette dernière monte en puissance depuis les années 1500 et est en rivalité avec les Portugais et la dynastie régnante des Wattasides, s’étant notamment emparé dans le début des années 1520 du Souss et de Marrakech. En 1527, Ahma Al-Wattasi tente de reprendre Marrakech, mais est forcé de se retirer. Suite à cela, un traité est signé à Tadla où le royaume est partagé entre les deux dynasties : les Saadiens conservent le Souss et Marrakech tandis que les Wattasides demeurent la lignée régnante du Maroc avec leur capitale à Fès. Cela permet l’établissement d’une paix entre les deux lignées qui donnent aux Saadiens l’opportunité de se réorganiser et de concentrer leurs efforts sur les possessions portugaises.
Si les terres marocaines ont peu été affectées par l’expédition de Charles Quint, le renforcement des possessions portugaises et espagnoles contribue à un développement plus prononcé des politiques distinctes des deux lignées envers les Portugais : les Wattasides sont dans une posture prudente et diplomatique alors que les Saadiens se montrent des plus agressifs contre ces derniers, en imposant notamment un blocus à Santa Cruz do Cabo de Aguer en 1530. La situation est aussi affectée par l’arrivée des musulman espagnols qui ont pu choisir l’exil suite à la décision de la couronne espagnole et de l’inquisition d’abolir officiellement l’islam comme religion dans la péninsule, forçant les morisques à l’exil ou à la conversion forcée. L’arrivée de ces personnes contribuent à nourrir la défiance et la colère des populations locales contre les Espagnols et les Portugais, surtout du fait que les autres morisques ont été forcés de se convertir au catholicisme. Le succès de l’expédition de Charles Quint en Égypte suscite une profonde inquiétude des populations locales qui voient les puissances chrétiennes du nord s’imposer contre elles. Cette inquiétude contribue au renforcement des Saadiens qui se présentent comme les défenseurs de la foi contre les Portugais et Espagnols.
L’expédition de la Sainte-Ligue a permis le renforcement du royaume Koukou. L’alliance avec Charles Quint leur a permis de reprendre Alger et de chasser les pirates barbaresques. Le royaume berbère passe la fin des années 1520 à renforcer son autorité sur Alger et de prendre le contrôle des territoires qui se trouvaient sous l’autorité d’Alger et de Khayr Ad-Dîn. Ils soumettent ainsi le beylik du Titteri en 1528 avant de s’étendre dans la région à l’ouest de Médéa en 1531. Ce renforcement se heurte à l’hostilité d’une partie de la population qui leur reproche l’alliance avec les Espagnols et appréhendent de voir ces derniers investir davantage de territoires et d’influence dans la région ou de mener des razzias dans le territoire comme ils le faisaient au début des années 1500. Le sultanat Koukou entre en contact avec le sultanat de Tlemcen et les tribus de Banu Rashid, héritière de celles de Banu Hilal.
Alors que les Koukous étendent leur influence sur les côtes d’Algérie, un autre royaume berbère tire profit de la disparition de la Régence d’Alger : le royaume de Beni Abbés. Ce royaume fondé en 1510 par les berbères de la région de Béjaïa pour se protéger des razzias espagnoles, avait été forcé en 1516 à s’allier à la régence d’Alger mise en place par Khayr Ad-Dîn et son frère. La disparition de la régence et l’exil de Khayr Ad-Dîn suite à l’expédition de Charles Quint libère le royaume d’un voisin puissant et menaçant pour se retrouver de nouveau confronté à la présence espagnole et à un nouveau voisin qui cherche à s’étendre. L’expansion des Koukous se faisant cependant sur le littoral et l’ouest durant la fin des années 1520, Abdelaziz, le souverain de Beni Abbés, en profite pour renforcer son royaume sans avoir la menace d’un voisin prêt à l’envahir. Le souverain renoue des liens avec les Espagnols afin de ne pas être menacé par ces derniers, renouvelant en 1529 l’alliance avec eux qui avait été brisée par Arudj Reïs et son frère Khayr Ad-Dîn en 1516. Au début des années 1530, le royaume entreprend de s’imposer sur les territoires orientaux de l’ancienne régence d’Alger.
L’expédition de Charles Quint a complètement bouleversé les équilibres fragiles qui existaient sur les côtes barbaresques. Avec la prise d’Alger et la défaite de Khayr Ad-Dîn, les principales forces de pirates barbaresques ont été décimés, s’étant réfugiés à Bône sous contrôle ottoman. La situation de Khayr Ad-Dîn est difficile car ses efforts pour reprendre Alger et consolider sa position grâce à l’alliance ottomane ont été réduits à néant par l’expédition de la Sainte-Ligue. Le pirate barbaresque n’est cependant pas anéanti et s’efforce de reconstituer ses forces durant la fin des années 1520. Il est obligé de faire profil bas pour pouvoir rétablir une force politique et militaire solide dans la région. Cela l’amène à offrir ses services à Soliman en échange de son aide pour reconstituer ses forces. Soliman accepte et le fait participer aux expéditions navales de son empire durant la période, notamment contre Corfou en 1530. Avec l’aide des Ottomans présents à Bône, il entreprend aussi d’étendre la domination de ces derniers sur la région entourant Bône pour leur permettre d’avoir un point d’appui en Afrique du Nord qui leur permettra de s’étendre.
L’expédition de la Sainte-Ligue a enfin permis au sultanat zianide de Tlemcen d’être libérée de la menace potentielle que faisait peser Khayr Ad-Dîn. Le royaume consolide ses relations avec les Espagnols situés à Oran et entreprend de reprendre plusieurs territoires de l’ancienne régence, les amenant à entrer en contact avec les Koukous lorsque ces derniers s’emparent de Médéa en 1531. La même année, le sultan zianide, Abū Muḥammad ʿAbdallāh décède, laissant son royaume à ses deux fils Mouley Mohammed et Abou-Abdallah Mohammed, qui se disputent le trône, faisant tomber le royaume dans une guerre civile.
Durant la même période, Khayr Ad-Dîn et les Ottomans peuvent tirer profit des troubles qui se développent et se renforcent sur les terres qui demeurent encore sous l’autorité de la dynastie Hafside sur le territoire de Tunis et ses environs. Abû `Abd Allâh Muhammad V al-Hasan, aussi connu sous le nom de Mawlāy al-Ḥasan al-Ḥafṣī, qui a succédé à son père en 1526, est confronté à une colère croissante de la population qui dénonce la faiblesse de sa lignée face aux Chrétiens alors que les Espagnols contrôlent désormais la forteresse de la Goulette, plaçant Tunis sous la menace directe de leur puissance. Le sultan doit aussi gérer la menace que représente son frère Rashid : ce dernier a réussi à échapper au massacre de ses proches perpétrés par Mawlāy al-Ḥasan pour récupérer le pouvoir et avait rejoint Bône sous la protection des Ottomans et de Khayr Ad-Dîn. Ces derniers n’hésitent pas à utiliser le prince exilé pour susciter le trouble dans le sultanat Hafside et rallier des franges de la population à leur cause.
L’Égypte connaît une situation particulière à la fin des années 1520. Suite à l’expédition de Charles Quint, des émirs mamelouks s’imposent dans le territoire et s’efforcent de consolider leur position afin de pouvoir contrer la menace ottomane. Cela les amène à développer une alliance compliquée avec les Espagnols, mais aussi avec les Vénitiens en 1528 en échange de l’installation d’un comptoir commercial à Alexandrie. Les mamelouks ont accepté ce traité à la fois pour avoir des alliés pour contrer les Ottomans, mais aussi pour pouvoir reconstituer la trésorerie qui a été déstabilisée par les années de troubles qui ont frappé le territoire depuis la révolte d’Ahmed Pacha. Dans le même but de se parer des Ottomans, les mamelouks cherchent à renouer contact avec les Séfévides de Perse afin de constituer une alliance commune contre Soliman. Les émirs bénéficient cependant du fait que les Ottomans sont confrontés à des difficultés et conflits qui les détournent de l’Égypte et le fait que la défaite du gouverneur de Syrie a retardé le risque d’une nouvelle campagne contre eux. Les émirs cherchent à retenir les leçons de leurs défaites en 1516 et 1517 face aux Ottomans en modernisant leurs forces, mais se trouvent confrontés à l’opposition d’une partie des autres émirs qui sont réticents à renier leurs armes traditionnelles.
En plus de ces difficultés, les émirs mamelouks qui se sont imposés grâce à Charles Quint se rivalisent et sont en rivalité avec d’autres. Ils doivent gérer un territoire qu’ils ne contrôlent que de nom et sur lequel ils doivent s’imposer alors que certaines franges de la population égyptienne leur sont hostiles du fait de la déliquescence des dirigeants mamelouks avant la conquête ottomane et de leur alliance avec des puissances chrétiennes qui semblent être les véritables maîtres de l’Égypte après l’expédition de Charles Quint. La fin des années 1520 voient les émirs mamelouks s’efforcer d’imposer leur autorité fragile sur l’Égypte alors que divers émirs cherchent à s’imposer face à eux, notamment dans le sud de l’Égypte. La question de désigner un sultan se fait jour après le départ des armées chrétiennes, les émirs voulant avoir un chef capable de les mener et de défendre les terres d’Égypte contre toute menace. Cette recherche amène dans les années 1527-1529 à une série de complots, les émirs maintenus par Charles Quint ne voulant pas perdre leur position mais devant faire face à l’opposition et l’hostilité de leurs pairs. Assassinats et exécutions sont perpétrés durant cette période alors que les mamelouks recherchent à se rétablir comme pouvoir central en Égypte. Plusieurs sultans se succèdent sans parvenir à se maintenir au point qu’en 1528-1529 (l’an 934 du calendrier hégirien) sera connue comme « l’année des trois sultans ». Ce n’est qu’à l’été 1529 que la situation se stabilise avec un sultan parvenant à s’imposer et à recevoir l’adhésion des différents émirs, permettant à la caste dirigeante de pouvoir consacrer son énergie à la défense de leur pouvoir contre la menace ottomane.
A ces difficultés s’ajoutent les problèmes économiques, l’Égypte étant désorganisée par les troubles et l’expédition de Charles Quint. Ces problèmes sont aggravés par la perte de la protection des lieux saints de La Mecque et de Médine, désormais sous le contrôle Ottoman, et la présence portugaise dans l’Océan indien et aux portes de la Mer rouge prive les Mamelouks de l’accès aux épices. Cela oblige ces derniers à réorganiser la flotte égyptienne afin de réaffirmer leur présence en mer rouge et de protéger le commerce contre les ingérences portugaises et ottomanes. Cette tâche est dévolue à Selman Reis : ce corsaire avait déjà travaillé pour les Mamelouks durant les années 1510 mais avait été prisonnier des Ottomans après la chute de l’Égypte pour déloyauté envers Selim I avant de revenir en Égypte avec Ibrahim Pacha en 1524. La chute de l’Égypte par Charles Quint a permis au navigateur de pouvoir de nouveau offrir ses services aux mamelouks. Chargé de la flotte égyptienne en Mer Rouge, il la réorganise au cours des années 1527-1530, même si les troubles intérieurs et la succession rapide de sultans entrave sa capacité à être plus efficace, notamment pour contrer les raids portugais en mer Rouge.
Les années 1527-1531 sont pleines de défis pour Soliman et l’empire Ottoman. Le sultan doit en effet gérer plusieurs problèmes qui frappent son empire et qui remettent en cause son autorité.
Le conflit avec la Sainte-Ligue a résulté en la perte de son allié barbaresque d’Alger et de l’Égypte et au déclenchement d’un nouveau conflit avec la République de Venise alors que la guerre contre le royaume de Hongrie est toujours en cours. Cela amène les Ottomans à se concentrer contre leurs nouveaux adversaires, notamment pour reprendre le port de Durrës perdu en 1524. Cela détourne une partie des attaques ottomanes contre le sud de la Hongrie vers la Dalmatie vénitienne et les possessions insulaires de la Sérénissime.
Mais en plus de ces conflits dans lesquelles il peut s’appuyer sur des forces conséquentes et une flotte qui se renforce, Soliman est confronté à plusieurs révoltes durant les années 1527-1529, obligeant le sultan et les beys d’envoyer des troupes pour réprimer ces insurrections. En 1527 éclate une nouvelle révolte des Celali (2) contre le pouvoir absolutiste du sultan, obligeant le gouverneur d’Anatolie à envoyer ses forces pour la réprimer. L’insurrection ne sera réprimée qu’à l’été 1529. En 1528, Soliman est confronté à une révolte de janissaires qu’il finit par réprimer.
A ces troubles s’ajoutent les raids portugais dans la mer Rouge durant la même période. Le raid le plus dangereux intervient en 1529 lorsque les Portugais tentent de s’emparer de Djeddah qui protège le passage vers La Mecque. Si les fortifications mises en place par les mamelouks préviennent les Portugais de s’en emparer de la cité, cela pousse Soliman à renforcer les défenses de la cité en 1530-1531, le sultan prenant conscience de l’importance stratégique du lieu pour protéger les lieux saints de l’Islam. Mais il ne peut déployer que s’appuyer sur le Sharifat de Médine, la Mer Rouge étant disputée par les mamelouks qui veulent réimposer leur présence dans la région et n’ayant pas de port important pour y déployer une flotte.
Alors qu’il gère ces différentes difficultés qui affectent son empire, Soliman entreprend de réorganiser le fonctionnement de ce dernier sur le plan juridique et fiscal. Dans les années 1530-1531, les principales crises qui ont émergé sur son empire ont été étouffés ou résolus. Ainsi, son empire signe un traité de paix avec Venise revenant à un statu quo avec un tribut lourd à payer pour la Sérénissime et aucune reprise des accords commerciaux pour sanctionner leur contribution aux expéditions de la Sainte-Ligue. La résolution de plusieurs des difficultés qu’il a connu sur la période permet au sultan ottoman de se tourner de nouveau vers les campagnes militaires, principalement vers l’Égypte qu’il a l’intention de reprendre.
Durant les années 1527-1531, l’empire perse est sous la régence d’Hossein Khan, le sultan Tamasp I étant encore trop jeune pour régner (3). Ils reçoivent durant les années 1528-1529 les ambassades Habsbourg et mamelouks pour faire alliance contre l’Empire Ottoman. Si le jeune sultan et son régent sont intéressés par l’alliance qui permettraient de contrer la menace turque, ils sont occupés à gérer les rébellions des tribus turcomanes dans le Khorassan, de la menace Chayanide qui cherche à s’emparer d’Hérat en 1528 puis en 1530 et de la révolte de l’émir de Bagdad en 1528. En 1531, ils se décident à créer une alliance avec les Mamelouks, ces derniers étant les plus proches à contacter, même s’ils envoient un message pour la possession espagnole de Damiette.
(1) Nom portguais d'Agadir.
(2) Les Celali sont des milices provinciales, notamment de l'Anatolie, qui contestent à partir de la fin du règne de Selim le pouvoir absolutiste grandissant du sultan ottoman.
(3) Tamasp est né en 1514 et succède à son père en 1524.
La perte de l'Egypte semble avoir un énorme impact dans la région
Flosgon78- Messages : 289
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Flosgon78 a écrit:La perte de l'Egypte semble avoir un énorme impact dans la région
En effet et à plus d'un titre. C'est un aspect dont je m'en suis rendu compte au regard des informations recueillis sur la période et la région et la réflexion qui a abouti à la rédaction de cette partie.
Historiquement, le contrôle de l’Égypte à partir de 1517 a permis à l'empire Ottoman d'avoir la maîtrise de la Mer Rouge, notamment face aux Portugais qui demeuraient une menace importante pour La Mecque. Ainsi, Selman Reïs est chargée d'une expédition navale pour protéger Jeddah et prendre le contrôle du Yémen en 1527. Cela a aussi permis au sultan de Gujarat de défendre Diu en 1531 face aux Portugais grâce à l'aide d'une flotte ottomane, retardant de quatre ans la capture de la ville par le royaume lusophone.
L'absence de contrôle de l’Égypte prévient le développement immédiat d'une flotte ottomane en mer Rouge qui pourrait contrer et menacer les Portugais. Avec notamment pour conséquence la poursuite du renforcement de l'influence portugaise dans la région d'Aden et la prise de Diu de manière plus précoce qu'historiquement, aux alentours de 1531-1532 (je n'ai pas mentionné ces éléments, étant très mineurs et concernant surtout le Portugal).
La perte de contrôle de l’Égypte par les Ottomans a aussi une incidence sur le plan diplomatique. Durant les années 1510-1520, l'empire Séfévide a cherché l'alliance des Habsbourg et réciproquement. Mais cette démarche était très compliquée à cause des contraintes géographiques et des risques de voir le messager capturé par les Ottomans (un élément qui a contribué au dernier conflit entre l'empire Ottoman et les Mamelouks, ces derniers ayant cherché l'alliance avec les Séfévides dans les années 1510). Il fallait plus d'une année pour pouvoir obtenir un message si aucun problème ne se pointait sur le trajet. Le père de Tahmasp I, Ismaïl I, avait envoyé en 1523 des ambassadeurs rencontrer Charles Quint qui est favorable à l'alliance, mais le décès d'Ismaïl en 1524, fait capoter le projet. Une seconde tentative a été réalisée en 1529-1530 par Charles Quint, mais le contexte dans l'empire Perse rend la mise en place d'une alliance inapplicable.
Dans le contexte de cette réalité alternative, le développement d'alliances entre les Habsbourg et les Séfévides sont plus faciles à réaliser du fait d'un territoire intermédiaire qui cherche aussi l'alliance avec la Perse pour se protéger des Ottomans (historiquement, les derniers sultans mamelouks ont cherché l'alliance avec Ismaïl I, ce qui a contribué au déclenchement de la campagne militaire de Selim I qui a abouti à la conquête de l’Égypte).
Je tiens enfin à ajouter le fait que la perte de l’Égypte va avoir une incidence dans les projets militaires ottomans : Soliman va chercher à reprendre le territoire et laver l'affront de la perte de la région en 1525. Cela signifie que cela va détourner l'empire Ottoman des Balkans pendant quelques années supplémentaires, préservant un minimum le royaume de Hongrie (même si ce dernier continuerait sans doute de subir des raids des gouverneurs ottomans locaux). La reprise de l’Égypte est d'autant plus nécessaire que cela permettrait à Soliman d'avoir de nouveau le (quasi) contrôle de la Méditerranée orientale.
Un enjeu qui sera exploré dans les parties ultérieures sur cette région sera la survie de l’Égypte mamelouk en tant qu'entité indépendante, étant donné les contraintes auxquels les mamelouks sont confrontés, les potentielles divisions qui les traversent (après tout, les quelques années d'occupation ottomane ont eu le temps d'influencer certaines figures locales) et le fait que l'empire ottoman est devenu une puissance redoutable (sans compter le fait que l'espace égyptien est beaucoup moins vaste que les Balkans ou l'empire perse, encore plus en prenant compte le fait que les territoires habités se concentrent au niveau du Nil).
Yodarc- Messages : 424
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Je ne savais pas tout ça merci beaucoup ! J'ai hâte de voir la suite !Yodarc a écrit:Flosgon78 a écrit:La perte de l'Egypte semble avoir un énorme impact dans la région
En effet et à plus d'un titre. C'est un aspect dont je m'en suis rendu compte au regard des informations recueillis sur la période et la région et la réflexion qui a abouti à la rédaction de cette partie.
Historiquement, le contrôle de l’Égypte à partir de 1517 a permis à l'empire Ottoman d'avoir la maîtrise de la Mer Rouge, notamment face aux Portugais qui demeuraient une menace importante pour La Mecque. Ainsi, Selman Reïs est chargée d'une expédition navale pour protéger Jeddah et prendre le contrôle du Yémen en 1527. Cela a aussi permis au sultan de Gujarat de défendre Diu en 1531 face aux Portugais grâce à l'aide d'une flotte ottomane, retardant de quatre ans la capture de la ville par le royaume lusophone.
L'absence de contrôle de l’Égypte prévient le développement immédiat d'une flotte ottomane en mer Rouge qui pourrait contrer et menacer les Portugais. Avec notamment pour conséquence la poursuite du renforcement de l'influence portugaise dans la région d'Aden et la prise de Diu de manière plus précoce qu'historiquement, aux alentours de 1531-1532 (je n'ai pas mentionné ces éléments, étant très mineurs et concernant surtout le Portugal).
La perte de contrôle de l’Égypte par les Ottomans a aussi une incidence sur le plan diplomatique. Durant les années 1510-1520, l'empire Séfévide a cherché l'alliance des Habsbourg et réciproquement. Mais cette démarche était très compliquée à cause des contraintes géographiques et des risques de voir le messager capturé par les Ottomans (un élément qui a contribué au dernier conflit entre l'empire Ottoman et les Mamelouks, ces derniers ayant cherché l'alliance avec les Séfévides dans les années 1510). Il fallait plus d'une année pour pouvoir obtenir un message si aucun problème ne se pointait sur le trajet. Le père de Tahmasp I, Ismaïl I, avait envoyé en 1523 des ambassadeurs rencontrer Charles Quint qui est favorable à l'alliance, mais le décès d'Ismaïl en 1524, fait capoter le projet. Une seconde tentative a été réalisée en 1529-1530 par Charles Quint, mais le contexte dans l'empire Perse rend la mise en place d'une alliance inapplicable.
Dans le contexte de cette réalité alternative, le développement d'alliances entre les Habsbourg et les Séfévides sont plus faciles à réaliser du fait d'un territoire intermédiaire qui cherche aussi l'alliance avec la Perse pour se protéger des Ottomans (historiquement, les derniers sultans mamelouks ont cherché l'alliance avec Ismaïl I, ce qui a contribué au déclenchement de la campagne militaire de Selim I qui a abouti à la conquête de l’Égypte).
Je tiens enfin à ajouter le fait que la perte de l’Égypte va avoir une incidence dans les projets militaires ottomans : Soliman va chercher à reprendre le territoire et laver l'affront de la perte de la région en 1525. Cela signifie que cela va détourner l'empire Ottoman des Balkans pendant quelques années supplémentaires, préservant un minimum le royaume de Hongrie (même si ce dernier continuerait sans doute de subir des raids des gouverneurs ottomans locaux). La reprise de l’Égypte est d'autant plus nécessaire que cela permettrait à Soliman d'avoir de nouveau le (quasi) contrôle de la Méditerranée orientale.
Un enjeu qui sera exploré dans les parties ultérieures sur cette région sera la survie de l’Égypte mamelouk en tant qu'entité indépendante, étant donné les contraintes auxquels les mamelouks sont confrontés, les potentielles divisions qui les traversent (après tout, les quelques années d'occupation ottomane ont eu le temps d'influencer certaines figures locales) et le fait que l'empire ottoman est devenu une puissance redoutable (sans compter le fait que l'espace égyptien est beaucoup moins vaste que les Balkans ou l'empire perse, encore plus en prenant compte le fait que les territoires habités se concentrent au niveau du Nil).
Flosgon78- Messages : 289
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
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L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Dans cette nouvelle partie, nous entrons dans le cœur des années 1530. Nous revenons au royaume de France pour voir comment Charles IX affermit son règne personnel. Les tendances décrites présenteront à la fois la poursuite et le renforcement de phénomènes ayant émergé sous la régence de Marie d'Angleterre, mais présentent aussi des événements similaires à ceux ayant eu lieu historiquement. Cette période présente une amorce d'évolution vers une nouvelle phase pour le royaume de France et ses voisins.
J'espère que cette partie saura vous plaire.
Bonne lecture à tous !
1532-1535 : L’affirmation de Charles IX comme roi
Durant les années 1532-1535, le royaume de France voit son jeune souverain s’imposer petit à petit comme un roi remarquable désireux de faire ses preuves pour son royaume et dans la Chrétienté.
Durant le début des années 1530, Charles IX entreprend d’imprimer sa marque et son autorité sur un royaume qu’il a appris à connaître par sa formation et son grand tour. S’appuyant sur les exemples de son père et de Saint Louis, Charles IX s’efforce d’établir une gouvernance chrétienne de son royaume tout en tirant profit des politiques établies sous la régence de sa mère. Ainsi, dans le domaine économique, il reprend les politiques mises en place par sa mère et entreprend aussi de s’inspirer de son père en diminuant les impôts directs tout en augmentant ceux indirects. Il continue d’encourager le commerce et développe des relations avec les banquiers génois, même si la situation de la république maritime contribue à rendre compliquée celle-ci. Dans la même optique, il encourage les expéditions vers le Nouveau Monde, ce qui l’amène à renforcer la collaboration avec Jean Ango dans le financement et l’organisation de ces expéditions.
Si sa mère avait principalement mené sa régence au Louvre, la santé jugée frêle de Charles IX amène la cour à revenir dans les châteaux de la Loire, notamment à Amboise et Blois. Cela n’empêche pas le jeune roi de mener diverses activités physiques, notamment la chasse. Il entreprend aussi de renforcer son autorité, notamment en s’appuyant sur ses jeunes compagnons d’armes, comme Louis III de Bourbon. S’il appuie encore sur les conseils de sa mère, il développe une relation de confiance avec Antoine Duprat et Guillaume Budé, son ancien tuteur. La mort du chancelier en 1535 amène à l’évolution du conseil royal alors que plusieurs des positions occupées par des personnes proches du clan des Valois-Angoulême ont été remplacés au fil des années, laissant place à des hommes proches de la reine et du clan Bourbon. Si François d’Angoulême demeure une des figures importantes du conseil royal, il est désormais concurrencé par Charles de Bourbon-Montpensier alors que Guillaume Budé devient un conseiller plus important auprès du roi.
Dans le domaine culturel, Charles IX bénéficie des années de régence de sa mère pour développer un rôle de mécène. Sa grande culture humaniste l’amène à être le protecteur des penseurs de son temps, mais aussi de correspondre avec d’autres. Parmi les hommes avec lesquels il développe une correspondance figurent Érasme, Thomas More du fait des liens de ce dernier avec son oncle Henri VIII. Il soutient le collège royal, contribuant à son développement, même si l’institution est confrontée à de fortes controverses concernant la question de la réforme théologique et du rapport aux idées de Martin Luther et du concile de Mantoue. Dans le domaine artistique, il décide de s’appuyer sur la peinture et la sculpture, bien qu’il tire aussi profit de la musique du fait de l’influence de sa mère. Il fait ainsi commander un portrait de lui par Jean Clouet en 1534. Du fait de sa vie dans les châteaux de la Loire, il entreprend de les rénover à son goût au cours de la période, reprenant en partie le style « mariale » tout en l’adaptant à ses goûts, inspirés notamment des influences italiennes.
Les années 1532-1535 voient la controverse religieuse se renforcer à l’image du concile de Mantoue. Si Charles IX suit l’approche de sa mère, entre rejet des idées de Martin Luther et soutien d’une réforme interne de l’Église permettant à la couronne de France de renforcer son influence sur l’Église de France, il est confronté à un renforcement des incidents qui l’amènent à prendre une position. Ainsi, fin 1533, des étudiants de Caen placardent les 95 thèses de Martin Luther sur les murs de l’université tandis qu’à l’université de Paris, son recteur Nicolas Cop délivre début novembre 1533 un discours imprégné d’évangélisme demandant au concile de Mantoue de revenir aux sources évangéliques et de ne plus s’enfermer dans des traditions désuètes et corrompues. Ce discours l’amène à s’exiler pour échapper à l’ire de l’université et des autorités. L’incident le plus grave intervient à l’automne 1534 avec l’Affaire des Placards : des écrits injurieux et séditieux contre l’Eucharistie sont affichés dans les rues de Paris et de plusieurs villes du royaume, notamment à Blois où un de ces textes est placardé sur la porte de la chambre du jeune roi. Cet incident provoque une des colères les plus célèbres de Charles IX à cause de la teneur du texte et du fait que sa sécurité ait pu être menacée. Cela l’amène à renforcer la dénonciation et la répression des idées luthériennes au cours de l’automne 1534 et de l’hiver 1534-1535, notamment en s’inspirant de la politique d’Henri VIII. Cela aboutit à l’arrestation de plusieurs personnes considérées hérétiques et à la condamnation de certaines d’entre elles, mais aussi à la publication de La Défense de la Messe et de la Sainte Cène à l’été 1535, texte dénonçant point par point l’attaque et affirmant avec force la légitimité de l’Eucharistie. Le jeune roi entreprend aussi une procession expiatoire début 1535. Si une répression se met en place, Charles IX suit les conseils de sa mère et fait preuve de retenue, châtiant les impénitents et amnistiant ceux qui se repentent. Le souverain entreprend aussi de travailler à comment combattre avec efficacité les idées de Luther pour éviter de voir son royaume connaître les affres du Saint-Empire romain ou de Scandinavie. Dans le cadre de sa politique religieuse, il soutient les décisions prises par le Concile de Mantoue.
Si le souverain est focalisé sur les affaires de son royaume, il n’en oublie pas pour autant les relations extérieures. Sur les conseils de sa mère, il entreprend de développer et de consolider ses relations avec son oncle Henri VIII, contribuant à renouveler l’alliance anglaise alors que les tensions avec Charles Quint se renforcent. Les relations avec le royaume d’Écosse sont cordiales mais compliquées du fait du soutien de Jacques V à son cousin Christian II et l’appréhension de le voir marier une des filles de ce dernier alors qu’un contrat de mariage existe entre sa demi-sœur Renée et le souverain écossais. Il renforce ses liens avec Henri II de Navarre, notamment au travers du mariage de ce dernier avec Marie de Bourbon-Vendôme en 1534. Ce renforcement des liens entre les deux royaumes intervient afin de pouvoir se prémunir contre la menace potentielle que représente Charles Quint. Les relations entre Charles IX et l’empereur Habsbourg sont en revanche plus tendues et tendent à se dégrader au fil des années, les deux souverains s’opposant sur différents sujets, notamment la question des territoires du Nouveau Monde ou les relations dans la péninsule italienne ou le fait que le roi de France refuse d’adhérer au projet universel de Charles Quint alors que son royaume paraît encerclé par les domaines contrôlés par le souverain Habsbourg. Cette opposition ne l’amène cependant pas à développer d’importants contacts avec les princes allemands, le jeune roi étant incertain de pouvoir s’allier avec des hommes qui ont décidé de soutenir les idées de Martin Luther, surtout après l’Affaire des Placards. Le jeune roi développe aussi les relations avec les territoires italiens. Il renforce ses liens avec le duché de Savoie, surtout alors que ce dernier se retrouve en conflit avec les cantons suisses. Dans la même logique, il renouvelle les bonnes relations de son royaume avec Venise. Il renforce enfin ses liens avec le pape Pie IV, en le soutenant sur le concile de Mantoue mais aussi en négociant une révision de la bulle Inter Caetera à l’automne 1535. Ses relations se dégradent cependant avec le duché de Milan à cause de la situation génoise alors que François d’Angoulême l’encourage à revendiquer le duché contre Maximilien Sforza du fait de son lignage. Charles IX fait pression sur le duché et joue les médiateurs dans leur conflit avec l’Alliance des Trois Ligues. Le jeune souverain consolide aussi ses relations avec le royaume de Pologne alors que son mariage devient de plus en plus imminent au fil des années.
Durant ces années, la mère de Charles IX, Marie, commence à s’affaiblir. Les années de régence et de nombreuses maladies (1) ont affecté la reine douairière au fil des années et alors qu’elle s’approche de la quarantaine, elle se sent lasse. Cela l’amène à être de plus en plus en retrait, même si elle continue de soutenir et de conseiller son fils.
Durant ces années, François d’Angoulême occupe une position particulière. Toujours héritier présomptif à la couronne, le prince cherche à avoir une position forte dans le conseil du jeune roi et d’affaiblir la position de la reine douairière. Mais il doit gérer l’affaiblissement de l’influence de sa maison au sein du conseil, notamment avec le décès d’Antoine Duprat, alors que la maison Bourbon devient un allié important du roi. Le retrait progressif de la reine douairière permet cependant de compenser en partie la situation compliquée de sa maison, notamment suite à l’Affaire des Placards. Sa position d’héritier lui permet cependant d’avoir des positions importantes, notamment celle de connétable en 1533. Sur le plan politique, l’héritier présomptif soutient la politique sur le Nouveau Monde et veut relancer une politique italienne plus importante, notamment alors que les tensions et incidents se multiplient dans la péninsule. Il s’efforce aussi de renforcer de nouveau l’influence de sa maison, notamment par l’intermédiaire de son fils aîné François IV de Bretagne. Il renforce aussi sa relation avec Henri II de Navarre en faisant aboutir en 1534 le mariage de son jeune fils Henri avec la sœur du roi navarrais, Isabeau.
Sur le plan théologique, le prince héritier continue d’abord de suivre la devotio moderna pratiquée par sa sœur, bien qu’il le fasse moins et plus discrètement du fait de la méfiance de Charles IX et de sa mère. L’Affaire des Placards bouleverse sa position, sa famille se trouvant parmi les figures suspectes qui auraient permis l’affichage du texte sur la porte de la chambre du roi. Cela amène aussi à l’isolement de sa sœur Marguerite qui est forcée de mener une pratique clandestine de sa foi spirituelle alors que son époux Charles IV d’Alençon est beaucoup moins enclin à accepter les pratiques de foi se démarquant de la pratique catholique. François d’Angoulême décide de défendre une position dure contre les défenseurs des idées luthériennes et conseille le roi de faire preuve de la plus vive fermeté contre ceux qui ont commis un crime de lèse-majesté à ses yeux. Ce changement de position lui permet de gagner quelque peu la confiance de Charles IX, même si ce dernier demeure vigilant à son égard.
Le fils aîné de François atteint l’âge de gouverner par lui-même le duché de Bretagne durant la période. Le jeune homme cherche à imprimer sa marque, s’inspirant en partie des actions de son père et cherchant à s’assurer la loyauté de ses vassaux. En tant que prince de sang, il va souvent à la cour royale, notamment pour tisser des liens avec son cousin. Le jeune duc passe cependant une partie de son temps à Nantes pour développer son duché et poursuivre les décisions menées par ses parents. Cela l’amène aussi à échanger avec la cour d’Angleterre dans le cadre de son contrat de mariage avec la princesse Marie alors que la situation suivant l’annulation de mariage d’Henri VIII a créé quelques incertitudes et interrogations sur le statut de sa fille. Le développement de ces relations l’amène à rencontrer à Caen sa promise au printemps 1535 avant de l’épouser à l’été 1535. Dans la même optique, il développe les échanges avec les côtes sud du royaume d’Angleterre. François IV soutient enfin la poursuite des expéditions vers le Nouveau Monde, pensant trouver des opportunités et débouchés qui aideront à l’épanouissement de son duché. Le jeune duc est confronté à l’émergence des idées luthériennes, notamment du fait d’actes iconoclastes perpétrés en 1534 à Morlaix ou à Dinan. Le jeune duc est dans une posture ferme, d’autant plus après l’Affaire des Placards où il suit l’exemple de son père et de Charles IX. Mais si les idées luthériennes s’avèrent minoritaires et s’expriment au travers d’incidents, ils trouvent une bonne réception auprès des gentilshommes des campagnes et les magistrats urbains.
Parmi les politiques qui bénéficient d’un certain soutien du roi, celle des explorations et du Nouveau Monde bénéficient encore d’un important soutien. A l’été 1532, Giovanni Verrazzano repart vers le Nouveau Monde avec pour mission d’explorer les territoires au nord de Terre d’Orléans, son expédition de 1530 ayant suscité la curiosité et la volonté du roi de renforcer la présence française dans cette partie du monde. Il est accompagné dans son expédition par un navigateur breton appelé Jacques Cartier qui a été repéré par François d’Angoulême et son fils aîné. Ce dernier est chargé de participer au renforcement de la présence française sur Terre-Neuve. L’expédition rejoint Terre-Neuve en août 1532 où elle renforce le fort protégeant Saint-Jean. Saint-Jean s'est développé au fil des années, servant parfaitement son rôle de point de pêche pour les marins bretons, mais aussi pour des marins anglais ou basques. Les occupants du fort ont aussi commencé à développer quelques contacts avec les Beothuks, bien que ces derniers préfèrent éviter autant que possible les rencontres avec les Européens.
A Terre-Neuve, elle se divise en deux parties. La première menée par Jacques Cartier part rejoindre Fort Charlesbourg à l’automne 1532 où elle découvre les séquelles de l’épidémie de variole sur les Leni Lenape. Si la colonie a su survivre à l’hiver 1531-1532 en tirant profit des ressources locales et des ressources trouvés dans les villages abandonnés, la désorganisation des autochtones résultant de l’épidémie soulève la question de la marche à suivre pour le maintien et le développement de Fort Charlesbourg. Le gouverneur rend compte au navigateur malouin de la situation et des décisions qu’il a prises pour chercher à préserver la colonie, notamment en cherchant à exploiter davantage les ressources locales pour garantir la survie de la colonie et préparer à l’envoi de ressources vers le royaume. Il cherche aussi à maintenir le contact avec les Leni Lenape malgré l’épidémie afin de maintenir les échanges avec ces derniers. Le désastre épidémique a cependant vu quelques survivants dans les populations touchés rejoindre la colonie après avoir été baptisés dans la foi chrétienne. Durant l’automne et l’hiver 1532, Jacques Cartier et le gouverneur entreprennent de rencontrer les tribus voisines pour établir le contact et espérer faire commerce avec eux.
Alors que l’équipage de Jacques Cartier découvre les aléas de la Terre d’Orléans et les choix du gouverneur et des colons pour surmonter les difficultés, Giovanni Verrazzano part explorer la baie du Saint-Laurent pour espérer trouver un passage vers l’Asie. Durant l’automne 1532, il explore les côtes et l’embouchure du Saint-Laurent. Durant cette exploration, le navigateur italien et son équipage croise d’autres autochtones, notamment lorsqu’il atteint le village de Stadaconé en octobre 1532 où il fait la connaissance des iroquoiens et de leur chef Donnaconna. La rencontre entre les deux groupes se passe assez bien malgré des incidents. L’arrivée de la saison froide l’oblige à hiverner, permettant à son équipage et lui de bénéficier des connaissances de leurs hôtes et de l’expérience des expéditions précédentes pour survivre aux affres de l’hiver et du scorbut. Les échanges entre Giovanni Verrazzano et Donnaconna permettent l’établissement de premiers contacts faisant espérer au navigateur italien l’établissement d’une position pour échanger avec les tribus locales. Donnaconna est intéressé par la perspective de faire commerce avec les Français et voulant conserver une position forte dans ce domaine, raconte l’existence du royaume de Saguenay à Giovanni Verrazzano. Le récit du chef iroquoien suscite la curiosité de Giovanni Verrazzano. L’hiver 1533-1534 voit cependant de nombreux habitants de Stadaconé perdre la vie à cause des maladies portées par les Français.
Au printemps 1533, Jacques Cartier repart vers la France. De retour dans le royaume, il informe le roi de la situation de la Terre d’Orléans. La nouvelle trouble le souverain et la reine douairière car la survie de la colonie se retrouve en jeu avec la perte d’une partie des tribus avec lesquelles elle échangeait. Cela amène le roi et son conseil à discuter de la pérennité du projet et comment faire évoluer la colonie. Certains membres du conseil et de la cour sont réticents à poursuivre les expéditions du fait de leur coût et de l’apparente faiblesse de l’investissement sur ces nouvelles terres malgré les dires des navigateurs. Malgré ces difficultés et oppositions, Charles IX peut s’appuyer sur sa mère, François d’Angoulême, François IV de Bretagne et Jean Ango pour défendre la politique du Nouveau Monde.
Cette défense est confortée par le récit de Giovanni Verrazzano lorsque ce dernier revient en France peu après Jacques Cartier en juillet 1533. Le navigateur italien revient de son expédition avec un des fils de Donnaconna et de quelques autres autochtones. Le retour de Verrazzano et son récit confortent Charles IX dans le fait que le développement de colonies servant de comptoirs d’échange avec les tribus locales permettra de renforcer la présence française dans le Nouveau Monde et de tisser des alliances qui pourront être utiles contre les Espagnols qui se renforcent au sud. La description du royaume de Saguenay renforce l’intérêt du roi pour la région du Saint-Laurent désormais revendiquée comme part de la Nouvelle-France. Le jeune roi considère une nouvelle stratégie concernant le Nouveau-Monde : renforcer Fort Charlesbourg et la présence sur Terre-Neuve mais aussi préparer à installer une colonie dans la baie du Saint-Laurent afin de développer les échanges avec les habitants de Stadaconé et de préparer pour le futur une expédition pour trouver le royaume de Saguenay. Ces décisions amènent à la préparation d’une nouvelle expédition conséquente visant à la fois à renforcer les colonies préexistantes et à en établir une dans la baie du Saint-Laurent pour pouvoir entrer en contact avec Stadaconé. Dans la décision, François d’Angoulême et son fils jouent un rôle prépondérant dans les objectifs de la nouvelle expédition en insistant sur l’importance de renforcer les accès entre Terre-Neuve et Terre d’Orléans, ce qui amena à quelques ajustements et rectifications dans la préparation de l’expédition alors que l'enjeu financier joue aussi un rôle important dans l'attention portée aux préparatifs.
Cette nouvelle expédition quitte Dieppe en avril 1534 avec de nouveau à sa tête Giovanni Verrazzano, accompagné par Jacques Cartier. Rejoignant Terre-Neuve en juin 1534, ils se dirigent ensuite dans la baie du Saint-Laurent et établissent début juillet 1534 une colonie qu’ils nomment Fort Sainte-Croix dans l’estuaire du Saint-Laurent à quelques jours de navigation de Stadaconé. Giovanni Verrazzano renoue contact avec Donnaconna à l’automne 1534 et entreprend de tisser des liens avec ce dernier à la fois pour développer des échanges avec son peuple et pour savoir où se trouve le royaume de Saguenay. Le chef Iroquoien accepte alors que son kanata (2) a subi au printemps 1534 une terrible attaque d’une tribu rivale, les Toudaman (3). Des relations se tissent entre Fort Sainte-Croix et Stadaconé durant la même période alors que Giovanni Verrazzano et Jacques Cartier explorent les territoires environnants de Stadaconé et de Fort Sainte-Croix. Durant l’hiver 1534-1535, les Français font de nouveau face aux rudesses du climat et s’ils peuvent s’appuyer sur les liens qui se développent avec Donnaconna, ils subissent d’importantes pertes du fait du froid, de la faim et du scorbut. Stadaconé subit une nouvelle vague épidémique durant cet hiver, bien que moins virulente que durant l’hiver 1532-1533.
Durant l’année 1535, Giovanni Verrazzano et Jacques Cartier achèvent de consolider les relations entre Fort Sainte-Croix et Stadaconé : outre la promesse de commerce, Donnaconna parvient à obtenir des Français la promesse d’un soutien contre leurs adversaires. Si les deux navigateurs sont réticents à s’engager dans des alliances militaires alors que leur mission est d’explorer et de développer des relations commerciales, l’importance de Stadaconé et le fait qu’il s’agit de la première communauté importante d’autochtones rencontrés dans la région du Saint-Laurent les amène à accepter cette demande afin de préserver les relations commerciales qui émergent avec le village. Les deux navigateurs entreprennent aussi d’explorer la région, notamment pour découvrir la voie qui mènerait au royaume de Saguenay. Cela contribue au renforcement des relations entre Fort Sainte-Croix et les habitants de Stadaconé alors que les Français se familiarisent avec le territoire.
(1) Marie d'Angleterre a connu tout au long de sa vie moult maladies qui ont nécessité de nombreux soins. OTL, c'est de maladie qu'elle décède en 1533, notamment parce qu'elle ne s'est jamais totalement remise de la suette qu'elle avait contractée en 1528.
(2) Nom du lieu de vie commun des Iroquiens.
(3) Une tribu amérindienne du sud du fleuve Saint-Laurent, rivale de celle des Iroquiens de Stadaconé.
Dernière édition par Yodarc le Sam 9 Juil - 10:58, édité 1 fois
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Dans la décision, François d’Angoulême et son fils jouent un rôle prépondérant dans les objectifs de la nouvelle expédition en insistant sur l’importance de renforcer les accès entre Terre-Neuve et Terre d’Orléans, ce qui amena à quelques ajustements et rectifications dans la préparation de l’expédition. L’enjeu financier de l’expédition contribua aussi à une longue préparation de ''cette expédition.''
En apparté, l'équipement de quelques navires, de fournitures pour quelques centaines de personnes et la solde de l'équipage était si onéreux que les responsables des trésors royaux ait des réticences à financer celles ci ?
Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Collectionneur a écrit:Un doublon dans le paragraphe suivant :
Dans la décision, François d’Angoulême et son fils jouent un rôle prépondérant dans les objectifs de la nouvelle expédition en insistant sur l’importance de renforcer les accès entre Terre-Neuve et Terre d’Orléans, ce qui amena à quelques ajustements et rectifications dans la préparation de l’expédition. L’enjeu financier de l’expédition contribua aussi à une longue préparation de ''cette expédition.''
En apparté, l'équipement de quelques navires, de fournitures pour quelques centaines de personnes et la solde de l'équipage était si onéreux que les responsables des trésors royaux ait des réticences à financer celles ci ?
Merci pour le doublon. Je l'ai rectifié.
Concernant la dimension financière des expéditions, les expéditions européennes du début du XVIe siècle étaient comme des investissements incertains, d'autant plus que le but initial de ces expéditions (comme ce fut le cas pour Christophe Colomb) était de trouver un passage vers l'Asie et les épices pour pouvoir en faire commerce sans subir les contraintes résultant de la présence de l'Empire ottoman sur les routes commerciales traditionnelles. La rumeur ou la découverte d'or et d'argent dans les nouvelles terres pouvait être un moteur supplémentaire d'investir dans ces expéditions. Dans le cas des expéditions françaises (du moins celles OTL), c'était surtout des armateurs privés comme Jean Ango qui finançaient ces expéditions. Et comme tout investissement, il faut qu'elles soient rentables très rapidement, sinon elles seront abandonnés ou peu soutenues.
Il faut ajouter le fait qu'en plus de l'entretien des navires (dont le bois se faisait attaquer par l'eau de mer et les microorganismes qui y vivent) et des fournitures et soldes de l'équipage, il y avait les vivres nécessaires au voyage (huit mois de vivres pour la seconde expédition de Jacques Cartier en 1535-1536) et le caractère assez incertain que pouvaient avoir ces expéditions à l'époque (traverser l'Atlantique, subir ses éléments, explorer des côtes inconnues, le retour...).
Il faut aussi considérer les territoires concernés : l'Amérique du Nord a certes des ressources importantes, mais au 16e et 17e siècles, elles n'étaient pas visibles ou connues (pétrole et charbon) ou pas autant indispensables (le bois). La fourrure était une des ressources les plus prisées au 17e siècle, mais cela avait pris du temps pour se mettre en place, notamment du fait des contraintes pour le développement des colonies. Le climat nord-américain est plus rude que celui de l'Europe et le contexte d'arrivée des nouveaux colons pouvait déterminer leurs chances de survie. Ainsi, Jamestown en 1607 et les puritains du Mayflower en 1620 ont beaucoup souffert de leur premier hiver parce qu'ils étaient arrivés tard dans la saison, ne pouvant tirer profit des ressources locales (maïs par exemple) ou de faire de la récolte de denrées alimentaires locales.
A l'inverse, l'un des facteurs d'expansion de l'Espagne en Amérique centrale et dans les Antilles, en plus de la découverte de l'or et l'argent dans les empires précolombiens, a été le développement de l'exploitation de la canne à sucre, une denrée qui s'est avéré très rentable. La ressource mercantile permettant de nourrir le trésor royal et une denrée ayant le même rôle que les épices (du moins à ses débuts) ont contribué au développement des empires coloniaux dans cette région dès le 16e siècle.
Il ne faut pas oublier (même si je reconnais que ce n'est pas formulé ainsi dans le texte) que le royaume de France est d'abord une puissance continentale avec des prétentions territoriales et dynastiques (notamment en Italie) et que pour une partie de la noblesse de l'époque (mais aussi des autres commandants), la guerre leur permettait d'avoir des avancements, notamment sur le plan financier et prestige (cet élément est un des facteurs ayant contribué à l'éclatement des guerres de religion, la plupart des hommes ayant combattu dans les dernières guerres d'Italie se retrouvant sans moyens de progresser dans la société ou de prospérer sur le plan financier).
Il y a aussi la dimension politique qui intervient : les expéditions ITTL ont été développées du fait de Marie d'Angleterre dans un contexte de régence et afin de développer du commerce avec les peuples qui seraient découverts par les expéditions. Près d'une décennie s'est écoulée depuis la première expédition et ces expéditions ont certes abouti à l'installation de Fort Charlesbourg et d'un fort sur Terre-Neuve, mais semblent avoir un bénéfice restreint comparé aux politiques commerciales avec les voisins immédiats du royaume ou des politiques de soutien aux artisans et autres métiers. Entretemps, Charles IX est devenu majeur et commence à régner par lui-même, ce qui signifie que certains membres de la cour ou du conseil vont chercher à l'influencer pour qu'il mène d'autres politiques, notamment pour affaiblir l'influence de la reine douairière. Du fait de sa jeunesse, il faut aussi considérer que tôt ou tard, Charles IX voudra faire ses preuves et dans le contexte de l'époque, cela passait généralement par la voie des armes, parfois par la voie diplomatique (notamment lors des premières années de Thomas Wolsey en tant que chancelier d'Henri VIII).
Par conséquent, les conseillers royaux qui ne sont pas favorables à la poursuite des expéditions le sont en partie pour des raisons financières (même si l'absence de conflits atténue ce problème), mais surtout parce que le gain potentiel de ces expéditions leur paraît bien infime par rapport aux coûts et qu'ils cherchent à renforcer leur rôle et influence auprès de Charles IX.
Ce sont en tout cas les principaux facteurs que je peux mettre en avant concernant les réticences de certains membres de la cour et du conseil royal concernant la poursuite de ces expéditions.
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Collectionneur a écrit:''Culture du risque '' limité en somme. Déjà les comptables au pouvoir
C'est littéralement ça !
C'est plus ou moins la raison pour laquelle Christophe Colomb a eu beaucoup de mal à trouver un souverain favorable à soutenir son expédition : le roi du Portugal avait déjà les expéditions le long de l'Afrique, ce qui signifie qu'une expédition vers l'ouest n'avait que peu d'intérêts pour lui alors que les "souverains catholiques" (Ferdinand d'Aragon et Isabelle de Castille) avaient initialement refusé, notamment parce qu'ils venaient de s'emparer de Grenade, dernier bastion musulman en Espagne, ce qui signifie que la perspective de découvrir un passage vers l'ouest n'était pas dans leur projet (du moins initialement). La seule raison pour laquelle ils ont accepté est sans doute la possibilité de faire le commerce des épices sans avoir affaire aux Ottomans, aux Vénitiens ou d'être en concurrence immédiate avec les Portugais.
C'est aussi pour cette raison de "culture du risque" limitée qu'Henri VIII d'Angleterre n'a guère soutenu d'expéditions, son intérêt dans ces dernières étant surtout lié à la perspective de trouver un passage par le nord-ouest vers l'Asie qui lui permettrait de faire le commerce des épices sans passer par les Portugais (ou sans être en concurrence avec ces derniers).
Concernant Christophe Colomb, le fait d'avoir découvert la mentalité mercantile derrière les expéditions du XVIe siècle m'a rendu l'idée fameuse selon laquelle il aurait fait ce voyage pour prouver que la Terre était ronde encore plus incongrue et drôle. Sans tenir compte du fait que les gens de savoirs et lettrés savaient que la Terre était ronde depuis l'Antiquité (grâce notamment à Ératosthène), rien que d'imaginer Ferdinand d'Aragon et Isabelle de Castille soutenir ce projet juste pour cette intention me paraît désormais bien cocasse tant l'expédition aurait été un investissement nul et très risqué pour eux : pourquoi dépenser des sommes importantes pour une expédition qui risquerait de ne jamais revenir ? Si Colomb était venu leur proposer cette expédition juste pour prouver que la Terre était ronde, il aurait été expulsé tête la première du palais de Séville.
Yodarc- Messages : 424
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L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
La vingt-sixième partie de ce récit se concentre sur l'évolution des royaumes d'Angleterre et d’Écosse durant le début des années 1530. Quelques éléments récurrents, mais surtout d'importantes différences du fait des événements antérieurs, plaçant les îles britanniques dans un contexte particulier et une destinée d'allure distincte par rapport au cadre historique.
J'espère que cette partie saura vous plaire.
Bonne lecture ! "Dieu et mon droit!"
1532-1535 : Évolutions et tensions dans les îles britanniques
Les années 1532-1535 voient les royaumes d’Angleterre et d’Écosse prendre des directions assez distinctes.
L’année 1532 voit le roi changer de chancelier. S’il a pu conserver sa position malgré les troubles et difficultés suscités par l’annulation du mariage de son maître, Thomas Wolsey est cependant fragilisé et confronté à une opposition plus forte, notamment incarnée par la nouvelle reine. Le clan Boleyn et Norfolk domine le conseil royal et œuvre à faire chuter le cardinal-chancelier. Ce dernier est épuisé et ne possède plus qu’une confiance infime d’Henri VIII. L’élément déclencheur qui va aboutir à la déchéance de Wolsey est le décès de William Warham, l’archevêque de Canterbury, en août 1532. Le clan Norfolk et Boleyn cherchent à persuader le roi de choisir Thomas Cranmer comme nouvel archevêque, ce à quoi Thomas Wolsey manœuvre à s’y opposer, cherchant notamment à jouer sur le fait que Thomas Cranmer posséderait des liens avec des prêcheurs proches de Zwingli (1). Le conflit latent entre le chancelier et les nouveaux soutiens du roi achèvent de dégrader ses relations avec le roi qui n’écoute plus ses conseils. A l’automne 1532, Thomas Cranmer est confirmé en tant qu’archevêque de Canterbury alors qu’Henri VIII envoie un message à Pie IV pour confirmer la position du nouvel archevêque. Dans un geste désespéré, Thomas Wolsey envoie un message au pape demandant de refuser la demande sur le fait des rapports troubles entre le nouvel archevêque et des prêcheurs prétendus réformés. Cette tentative échoue cependant et provoque l’ire d’Henri VIII contre son chancelier, n’appréciant pas sa tentative d’agir derrière son dos pour demander une aide extérieure. Thomas Wolsey est forcé de renoncer à la position de chancelier en novembre 1532, ce qui l’amène à se retirer à Hampton Court. Sa retraite est cependant écourtée, car ses adversaires dressent une série d’accusations contre le cardinal, l’accusant notamment de détournements de fonds et de corruption. Henri VIII fait arrêter son ancien chancelier en mai 1533. Ce dernier est jugé en juin 1533. Le procès suscite une réaction du Saint-Siège, car Thomas Wolsey est cardinal et encore légat du pape dans le royaume d’Angleterre. Si le message du pape suscite l’irritation d’Henri VIII, il cherche aussi à ménager le pape, conscient qu’il doit à ce dernier l’annulation de son mariage et la possibilité de se remarier. Il n’empêche pas la condamnation de son ancien chancelier en août 1533 mais ne le fait pas exécuter. Il le dépossède cependant de son château d’Hampton Court et des autres propriétés qu’il possédait et l’oblige à payer une forte indemnité. Dépouillé et humilié, Thomas Wolsey voit sa santé se dégrader avant de tomber malade à l’automne 1533. Il décède début décembre 1533.
Avec la démission et la chute de Thomas Wolsey, Henri VIII se cherche un nouveau chancelier. Son choix se porte sur Thomas More. Ce dernier, bien que réticent du fait de son amitié avec Catherine d’Aragon, finit par accepter la requête du souverain en décembre 1532. Thomas More s’efforce de mener à bien les décisions du souverain mais se retrouve confronté aux querelles qui opposent les Norfolk et Boleyn à d’autres membres du conseil et de la cour. Il est en outre en conflit latent avec Anne Boleyn, son soutien à Catherine d’Aragon et son refus d’assister au couronnement d’Anne en 1531 ayant suscité de vives tensions entre eux. L’humaniste mène cependant avec diligence sa fonction et peut compter sur Thomas Cromwell, ce dernier s’étant maintenu au conseil royal malgré sa proximité avec Thomas Wolsey grâce à ses compétences.
Les Howard (2) et Boleyn consolident leur influence à la cour durant cette période, notamment en orchestrant la chute de Thomas Wolsey. Ils récupèrent une partie des domaines possédés par l’ancien chancelier en 1533-1534. Ils soutiennent la politique d’alliance avec le royaume de France et cherchent à renforcer l’influence anglaise en Écosse. Ils contribuent enfin au printemps 1533 au mariage d’Henri Fitzroy, le fils illégitime d’Henri VIII, avec Mary Howard, la fille unique du duc de Norfolk, Thomas Howard. Anne joue un rôle important dans cette influence. La jeune reine voit sa position consolidée avec la naissance d’une fille appelée Élisabeth en septembre 1532. Sa troisième grossesse voit en mars 1534 la naissance d’un second fils appelé Georges. Ce dernier décède quelques semaines plus tard, provoquant un profond chagrin dans le couple royal. La jeune reine joue un rôle assez important à la cour et n’hésite pas à jouer de son influence pour avoir un impact sur certains aspects de la politique du royaume. Elle contribue ainsi au plus grand investissement d’Henri VIII dans la question de la gouvernance de l’Église d’Angleterre. Elle s’emploie aussi à s’appuyer sur les factions les plus importantes de la cour. Sa position et ses actions suscitent cependant l’inimitié de différentes figures de la cour. A cela s’ajoute le trouble suscité par l’annulation du mariage d’Henri VIII, même si l’existence de son fils Henri atténue beaucoup cet aspect. Certains adversaires de la reine soupçonnent enfin cette dernière de chercher à influencer son époux en s’appuyant sur les écrits de William Tyndale, notamment La Soumission du Chrétien.
Le changement de chancelier n’amène pas de bouleversements immédiats dans les politiques du royaume. Il voit cependant Henri VIII renforcer son pouvoir en s’appuyant sur le système développé par Thomas Wolsey durant ses années à la tête du conseil. Il s’appuie aussi sur son conseil et le parlement pour faire appliquer ses décisions. Cela l’amène à intervenir plus directement dans différents domaines. Ainsi, las des querelles qui nuisent à la stabilité de l’Irlande (3), il exige la venue du Lord-Lieutenant (4), Gérald Fitzgerald, qu’il fait emprisonner en février 1534. L’arrestation de ce dernier et les rumeurs de sa mort sur ordre du roi provoque en juin 1534 une révolte de son fils, Thomas Fitzgerald. Ce dernier cherche à s’emparer du château de Dublin en juillet 1534 mais échoue lourdement, l’obligeant à se replier sur ses terres. En septembre 1534, Gerald Fitzgerald décède à la Tour de Londres. Au printemps 1535, les Anglais s’emparent de Maynooth Castle, le château de Thomas Fitzgerald. En juillet 1535, Henri VIII charge Léonard Grey de la position de lord protecteur de l’île et l’envoie en juillet 1535 rétablir l’ordre et imposer la stabilité. L’arrivée du nouveau Lord-Lieutenant d’Irlande provoque la dissolution des maigres forces de Thomas Fitzgerald. Ce dernier demande grâce et se rend à Léonard Grey à l’automne 1535.
Sur les conseils de son épouse, mais aussi dans la continuité de ce que Thomas Wolsey avait fait durant sa position de légat, Henri VIII commence à s’occuper des problèmes qui touchent l’Église d’Angleterre. Il échange avec le pape afin d’obtenir son accord pour intervenir dans ce domaine, même si la déchéance de Thomas Wolsey et son procès contribuent à rendre leur relation compliquée. Dans l’optique de la défense de l’Église, Henri VIII continue de réprimer la diffusion des idées de Martin Luther. La poursuite de la politique de lutte contre les idées luthériennes ou équivalentes oblige de nombreux penseurs favorables à ces positions à s’exiler d’Angleterre alors que d’autres sont emprisonnés, comme Hugh Latimer, ou exécutés. Il engage aussi une politique de combat des abus au sein de l’Église et peut s’appuyer sur son chancelier qui cherche à défendre l’Église et à l’aider à surmonter ses défis. Parmi les actions que le souverain et son conseil entreprennent de préparer durant la période figure une enquête sur la bonne tenue des couvents du royaume. S’inspirant de l’action de son précédent chancelier durant les années 1523-1527 qui a vu la dissolution d’une trentaine de couvents dans l’archidiocèse de York, Henri VIII entreprend de préparer une enquête sur l’ensemble du royaume, à la fois pour affermir sa politique religieuse et pour obtenir des ressources financières. Le projet prend cependant du temps à se mettre en place, le roi devant demander l’accord du pape pour pouvoir faire cette action, ce qu’il fait à l’automne 1534. Le roi s’appuie sur le précédent de son ancien chancelier et sur le fait qu’il souhaite mener cette action pour permettre à l’assainissement de l’Église en son royaume dans la suite des politiques pontificales. Il obtient l’accord pontifical au printemps 1535, ce qui lui permet de commencer le recensement des couvents.
Sur le plan diplomatique, Henri VIII maintient et renforce ses liens avec les royaumes de France et d’Angleterre. Il entretient notamment une correspondance avec François IV de Bretagne alors que ce dernier est bientôt en âge d’épouser sa fille Marie. Il envoie cette dernière rencontrer son futur époux au printemps 1535 et assiste à son mariage en juillet 1535. Cela l’amène aussi à rencontrer Jacques V près de York au printemps 1534. Ses relations avec Charles Quint sont tendues mais demeurent neutres. Le souverain anglais observe avec méfiance le développement de la ligue de Marbourg, la percevant comme un mouvement de rebelles hérétiques, même si sa présence contribue à détourner l’attention de Charles Quint. Il est dans une posture neutre vis-à-vis du conflit en Scandinavie, n’étant peu favorable aux soutiens de Christian III mais étant incertain de Christian II du fait de ses liens avec Charles Quint. Ses relations avec la papauté sont enfin correctes, même si la chute de Thomas Wolsey et son procès amènent le souverain anglais à prendre de la distance avec le Saint-Siège, notamment concernant le concile de Mantoue auquel Henri VIII ne prête qu’une attention infime. Cela ne l’empêche pas de demander au pape l’accord pour pouvoir commencer à enquêter sur les couvents du royaume, s’appuyant sur la bulle pontificale de 1523 que Paul III avait édictée pour permettre à Thomas Wolsey de faire le recensement des couvents du royaume et d’enquêter sur leur conduite.
Durant cette période, l’ancienne épouse d’Henri VIII, Catherine d’Aragon, consacre la majeure partie de son temps à suivre les préceptes de l’Ordre de Saint-François dont elle fait partie. Elle mène une vie retirée du monde et a renoncé aux biens dont elle pouvait prétendre après l’annulation de son mariage. L’ancienne reine consort demeure cependant attentive aux nouvelles du royaume, notamment concernant sa fille Marie dont elle apprend le mariage à l’automne 1535 Elle reçoit des visiteurs, notamment des représentants de son neveu Charles Quint et son ancien confesseur. Son nouveau mode de vie, plus ascétique, contribue à l’épuisement de l’ancienne reine alors que les séquelles du procès sur l’annulation de son mariage et l’impossibilité pour elle de revoir sa fille l’affectent.
En 1535, un marchand anglais du nom de Richard Hore, affrète deux navires pour mener une expédition dans les eaux de Terre-Neuve avec un groupe de personnes de bonne société dans le but de découvrir le territoire, de faire la pêche et d’imiter l’expédition de Verrazzano qui avait eu lieu deux ans auparavant. Son expédition explore les côtes du Lavrador et fait de la pêche et de la chasse sur l’île du Pingouin (5). La flottille revient en Angleterre au début de l’hiver 1535-1536.
Entre 1532 et 1535, Jacques V d’Écosse achève d’affermir son autorité sur son royaume. Il fonde en 1532 le Collège de Justice, juridiction suprême d'appel, perçu comme une atteinte à l'autonomie judiciaire des seigneurs. Il poursuit la politique établie depuis 1528 mais voit le développement d’une faction impériale du fait des troubles en Scandinavie et de la demande de certains de ses seigneurs à soutenir son cousin Christian II. Le roi écossais est enclin à le faire alors qu’il est déterminé à prévenir l’expansion des idées luthériennes en son royaume et soutenir son cousin lui permettrait d’avoir un allié supplémentaire. La tentation d’aller épouser une des filles de Christian II est très forte dans les années 1533-1534 malgré les conseils de sa mère Margaret et du duc d’Albany qui lui conseillent de maintenir de bonnes relations avec son oncle et son cousin. Cela l’amène à rencontrer Henri VIII près de York au printemps 1534 où les deux souverains entreprennent de renouveler l’alliance entre leurs royaumes respectifs et la paix qui existent entre eux depuis 1528. L’année suivante, Jacques V part en France afin de rencontrer et de marier Renée de France. Cela lui donne l’occasion de rencontrer sa tante, Marie d’Angleterre, et son cousin, Charles IX à Saint-Quentin. Il rencontra peu après sa promise et l’épouse à Notre-Dame de Paris en septembre 1535.
(1) En 1530-1531, Thomas Cranmer rencontre et échange avec Simon Grynaeus, un humaniste de Bâle partisan des idées d'Ulrich Zwingli et d'Œcolampade.
(2) Les Howard sont les tenants du titre de duc de Norfolk et la belle-famille de Thomas Boleyn.
(3) L'Irlande était divisée en différents comtés dirigés par des familles puissantes qui pouvaient être rivales les unes des autres, alors que la région de Dublin était sous le contrôle de la couronne anglaise.
(4) Représentant du roi et le chef de l'exécutif irlandais depuis 1171 et le début de l'implantation de l'autorité royale anglaise sur l'île.
(5) Ile actuelle de Funk au large de Terre-Neuve.
Yodarc- Messages : 424
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Yodarc a écrit:Bonjour à tous !
La vingt-sixième partie de ce récit se concentre sur l'évolution des royaumes d'Angleterre et d’Écosse durant le début des années 1530. Quelques éléments récurrents, mais surtout d'importantes différences du fait des événements antérieurs, plaçant les îles britanniques dans un contexte particulier et une destinée d'allure distincte par rapport au cadre historique.
J'espère que cette partie saura vous plaire.
Bonne lecture ! "Dieu et mon droit!"
1532-1535 : Évolutions et tensions dans les îles britanniques
Les années 1532-1535 voient les royaumes d’Angleterre et d’Écosse prendre des directions assez distinctes.
L’année 1532 voit le roi changer de chancelier. S’il a pu conserver sa position malgré les troubles et difficultés suscités par l’annulation du mariage de son maître, Thomas Wolsey est cependant fragilisé et confronté à une opposition plus forte, notamment incarnée par la nouvelle reine. Le clan Boleyn et Norfolk domine le conseil royal et œuvre à faire chuter le cardinal-chancelier. Ce dernier est épuisé et ne possède plus qu’une confiance infime d’Henri VIII. L’élément déclencheur qui va aboutir à la déchéance de Wolsey est le décès de William Warham, l’archevêque de Canterbury, en août 1532. Le clan Norfolk et Boleyn cherchent à persuader le roi de choisir Thomas Cranmer comme nouvel archevêque, ce à quoi Thomas Wolsey manœuvre à s’y opposer, cherchant notamment à jouer sur le fait que Thomas Cranmer posséderait des liens avec des prêcheurs proches de Zwingli (1). Le conflit latent entre le chancelier et les nouveaux soutiens du roi achèvent de dégrader ses relations avec le roi qui n’écoute plus ses conseils. A l’automne 1532, Thomas Cranmer est confirmé en tant qu’archevêque de Canterbury alors qu’Henri VIII envoie un message à Pie IV pour confirmer la position du nouvel archevêque. Dans un geste désespéré, Thomas Wolsey envoie un message au pape demandant de refuser la demande sur le fait des rapports troubles entre le nouvel archevêque et des prêcheurs prétendus réformés. Cette tentative échoue cependant et provoque l’ire d’Henri VIII contre son chancelier, n’appréciant pas sa tentative d’agir derrière son dos pour demander une aide extérieure. Thomas Wolsey est forcé de renoncer à la position de chancelier en novembre 1532, ce qui l’amène à se retirer à Hampton Court. Sa retraite est cependant écourtée, car ses adversaires dressent une série d’accusations contre le cardinal, l’accusant notamment de détournements de fonds et de corruption. Henri VIII fait arrêter son ancien chancelier en mai 1533. Ce dernier est jugé en juin 1533. Le procès suscite une réaction du Saint-Siège, car Thomas Wolsey est cardinal et encore légat du pape dans le royaume d’Angleterre. Si le message du pape suscite l’irritation d’Henri VIII, il cherche aussi à ménager le pape, conscient qu’il doit à ce dernier l’annulation de son mariage et la possibilité de se remarier. Il n’empêche pas la condamnation de son ancien chancelier en août 1533 mais ne le fait pas exécuter. Il le dépossède cependant de son château d’Hampton Court et des autres propriétés qu’il possédait et l’oblige à payer une forte indemnité. Dépouillé et humilié, Thomas Wolsey voit sa santé se dégrader avant de tomber malade à l’automne 1533. Il décède début décembre 1533.
Avec la démission et la chute de Thomas Wolsey, Henri VIII se cherche un nouveau chancelier. Son choix se porte sur Thomas More. Ce dernier, bien que réticent du fait de son amitié avec Catherine d’Aragon, finit par accepter la requête du souverain en décembre 1532. Thomas More s’efforce de mener à bien les décisions du souverain mais se retrouve confronté aux querelles qui opposent les Norfolk et Boleyn à d’autres membres du conseil et de la cour. Il est en outre en conflit latent avec Anne Boleyn, son soutien à Catherine d’Aragon et son refus d’assister au couronnement d’Anne en 1531 ayant suscité de vives tensions entre eux. L’humaniste mène cependant avec diligence sa fonction et peut compter sur Thomas Cromwell, ce dernier s’étant maintenu au conseil royal malgré sa proximité avec Thomas Wolsey grâce à ses compétences.
Les Howard (2) et Boleyn consolident leur influence à la cour durant cette période, notamment en orchestrant la chute de Thomas Wolsey. Ils récupèrent une partie des domaines possédés par l’ancien chancelier en 1533-1534. Ils soutiennent la politique d’alliance avec le royaume de France et cherchent à renforcer l’influence anglaise en Écosse. Ils contribuent enfin au printemps 1533 au mariage d’Henri Fitzroy, le fils illégitime d’Henri VIII, avec Mary Howard, la fille unique du duc de Norfolk, Thomas Howard. Anne joue un rôle important dans cette influence. La jeune reine voit sa position consolidée avec la naissance d’une fille appelée Élisabeth en septembre 1532. Sa troisième grossesse voit en mars 1534 la naissance d’un second fils appelé Georges. Ce dernier décède quelques semaines plus tard, provoquant un profond chagrin dans le couple royal. La jeune reine joue un rôle assez important à la cour et n’hésite pas à jouer de son influence pour avoir un impact sur certains aspects de la politique du royaume. Elle contribue ainsi au plus grand investissement d’Henri VIII dans la question de la gouvernance de l’Église d’Angleterre. Elle s’emploie aussi à s’appuyer sur les factions les plus importantes de la cour. Sa position et ses actions suscitent cependant l’inimitié de différentes figures de la cour. A cela s’ajoute le trouble suscité par l’annulation du mariage d’Henri VIII, même si l’existence de son fils Henri atténue beaucoup cet aspect. Certains adversaires de la reine soupçonnent enfin cette dernière de chercher à influencer son époux en s’appuyant sur les écrits de William Tyndale, notamment La Soumission du Chrétien.
Le changement de chancelier n’amène pas de bouleversements immédiats dans les politiques du royaume. Il voit cependant Henri VIII renforcer son pouvoir en s’appuyant sur le système développé par Thomas Wolsey durant ses années à la tête du conseil. Il s’appuie aussi sur son conseil et le parlement pour faire appliquer ses décisions. Cela l’amène à intervenir plus directement dans différents domaines. Ainsi, las des querelles qui nuisent à la stabilité de l’Irlande (3), il exige la venue du Lord-Lieutenant (4), Gérald Fitzgerald, qu’il fait emprisonner en février 1534. L’arrestation de ce dernier et les rumeurs de sa mort sur ordre du roi provoque en juin 1534 une révolte de son fils, Thomas Fitzgerald. Ce dernier cherche à s’emparer du château de Dublin en juillet 1534 mais échoue lourdement, l’obligeant à se replier sur ses terres. En septembre 1534, Gerald Fitzgerald décède à la Tour de Londres. Au printemps 1535, les Anglais s’emparent de Maynooth Castle, le château de Thomas Fitzgerald. En juillet 1535, Henri VIII charge Léonard Grey de la position de lord protecteur de l’île et l’envoie en juillet 1535 rétablir l’ordre et imposer la stabilité. L’arrivée du nouveau Lord-Lieutenant d’Irlande provoque la dissolution des maigres forces de Thomas Fitzgerald. Ce dernier demande grâce et se rend à Léonard Grey à l’automne 1535.
Sur les conseils de son épouse, mais aussi dans la continuité de ce que Thomas Wolsey avait fait durant sa position de légat, Henri VIII commence à s’occuper des problèmes qui touchent l’Église d’Angleterre. Il échange avec le pape afin d’obtenir son accord pour intervenir dans ce domaine, même si la déchéance de Thomas Wolsey et son procès contribuent à rendre leur relation compliquée. Dans l’optique de la défense de l’Église, Henri VIII continue de réprimer la diffusion des idées de Martin Luther. La poursuite de la politique de lutte contre les idées luthériennes ou équivalentes oblige de nombreux penseurs favorables à ces positions à s’exiler d’Angleterre alors que d’autres sont emprisonnés, comme Hugh Latimer, ou exécutés. Il engage aussi une politique de combat des abus au sein de l’Église et peut s’appuyer sur son chancelier qui cherche à défendre l’Église et à l’aider à surmonter ses défis. Parmi les actions que le souverain et son conseil entreprennent de préparer durant la période figure une enquête sur la bonne tenue des couvents du royaume. S’inspirant de l’action de son précédent chancelier durant les années 1523-1527 qui a vu la dissolution d’une trentaine de couvents dans l’archidiocèse de York, Henri VIII entreprend de préparer une enquête sur l’ensemble du royaume, à la fois pour affermir sa politique religieuse et pour obtenir des ressources financières. Le projet prend cependant du temps à se mettre en place, le roi devant demander l’accord du pape pour pouvoir faire cette action, ce qu’il fait à l’automne 1534. Le roi s’appuie sur le précédent de son ancien chancelier et sur le fait qu’il souhaite mener cette action pour permettre à l’assainissement de l’Église en son royaume dans la suite des politiques pontificales. Il obtient l’accord pontifical au printemps 1535, ce qui lui permet de commencer le recensement des couvents.
Sur le plan diplomatique, Henri VIII maintient et renforce ses liens avec les royaumes de France et d’Angleterre. Il entretient notamment une correspondance avec François IV de Bretagne alors que ce dernier est bientôt en âge d’épouser sa fille Marie. Il envoie cette dernière rencontrer son futur époux au printemps 1535 et assiste à son mariage en juillet 1535. Cela l’amène aussi à rencontrer Jacques V près de York au printemps 1534. Ses relations avec Charles Quint sont tendues mais demeurent neutres. Le souverain anglais observe avec méfiance le développement de la ligue de Marbourg, la percevant comme un mouvement de rebelles hérétiques, même si sa présence contribue à détourner l’attention de Charles Quint. Il est dans une posture neutre vis-à-vis du conflit en Scandinavie, n’étant peu favorable aux soutiens de Christian III mais étant incertain de Christian II du fait de ses liens avec Charles Quint. Ses relations avec la papauté sont enfin correctes, même si la chute de Thomas Wolsey et son procès amènent le souverain anglais à prendre de la distance avec le Saint-Siège, notamment concernant le concile de Mantoue auquel Henri VIII ne prête qu’une attention infime. Cela ne l’empêche pas de demander au pape l’accord pour pouvoir commencer à enquêter sur les couvents du royaume, s’appuyant sur la bulle pontificale de 1523 que Paul III avait édictée pour permettre à Thomas Wolsey de faire le recensement des couvents du royaume et d’enquêter sur leur conduite.
Durant cette période, l’ancienne épouse d’Henri VIII, Catherine d’Aragon, consacre la majeure partie de son temps à suivre les préceptes de l’Ordre de Saint-François dont elle fait partie. Elle mène une vie retirée du monde et a renoncé aux biens dont elle pouvait prétendre après l’annulation de son mariage. L’ancienne reine consort demeure cependant attentive aux nouvelles du royaume, notamment concernant sa fille Marie dont elle apprend le mariage à l’automne 1535 Elle reçoit des visiteurs, notamment des représentants de son neveu Charles Quint et son ancien confesseur. Son nouveau mode de vie, plus ascétique, contribue à l’épuisement de l’ancienne reine alors que les séquelles du procès sur l’annulation de son mariage et l’impossibilité pour elle de revoir sa fille l’affectent.
En 1535, un marchand anglais du nom de Richard Hore, affrète deux navires pour mener une expédition dans les eaux de Terre-Neuve avec un groupe de personnes de bonne société dans le but de découvrir le territoire, de faire la pêche et d’imiter l’expédition de Verrazzano qui avait eu lieu deux ans auparavant. Son expédition explore les côtes du Lavrador et fait de la pêche et de la chasse sur l’île du Pingouin (5). La flottille revient en Angleterre au début de l’hiver 1535-1536.
Entre 1532 et 1535, Jacques V d’Écosse achève d’affermir son autorité sur son royaume. Il fonde en 1532 le Collège de Justice, juridiction suprême d'appel, perçu comme une atteinte à l'autonomie judiciaire des seigneurs. Il poursuit la politique établie depuis 1528 mais voit le développement d’une faction impériale du fait des troubles en Scandinavie et de la demande de certains de ses seigneurs à soutenir son cousin Christian II. Le roi écossais est enclin à le faire alors qu’il est déterminé à prévenir l’expansion des idées luthériennes en son royaume et soutenir son cousin lui permettrait d’avoir un allié supplémentaire. La tentation d’aller épouser une des filles de Christian II est très forte dans les années 1533-1534 malgré les conseils de sa mère Margaret et du duc d’Albany qui lui conseillent de maintenir de bonnes relations avec son oncle et son cousin. Cela l’amène à rencontrer Henri VIII près de York au printemps 1534 où les deux souverains entreprennent de renouveler l’alliance entre leurs royaumes respectifs et la paix qui existent entre eux depuis 1528. L’année suivante, Jacques V part en France afin de rencontrer et de marier Renée de France. Cela lui donne l’occasion de rencontrer sa tante, Marie d’Angleterre, et son cousin, Charles IX à Saint-Quentin. Il rencontra peu après sa promise et l’épouse à Notre-Dame de Paris en septembre 1535.
(1) En 1530-1531, Thomas Cranmer rencontre et échange avec Simon Grynaeus, un humaniste de Bâle partisan des idées d'Ulrich Zwingli et d'Œcolampade.
(2) Les Howard sont les tenants du titre de duc de Norfolk et la belle-famille de Thomas Boleyn.
(3) L'Irlande était divisée en différents comtés dirigés par des familles puissantes qui pouvaient être rivales les unes des autres, alors que la région de Dublin était sous le contrôle de la couronne anglaise.
(4) Représentant du roi et le chef de l'exécutif irlandais depuis 1171 et le début de l'implantation de l'autorité royale anglaise sur l'île.
(5) Ile actuelle de Funk au large de Terre-Neuve.
Très intéressant ! Hâte de lire la suite !
Flosgon78- Messages : 289
Date d'inscription : 19/03/2019
Age : 25
Localisation : Paris
Yodarc aime ce message
L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Cette nouvelle partie s'intéresse à la papauté et à la suite du concile de Mantoue. Avec cette partie, on s'écarte définitivement de la réalité historique pour des raisons évidentes, même si plusieurs éléments y feront écho (seulement dans un tout autre contexte). Cette partie vous donnera une idée des répercussions des événements sur le monde, notamment sur le plan religieux et théologique.
J'espère que cela saura vous plaire.
Bonne lecture à tous !
Deus veult !
1532-1535 : La Papauté et la conclusion du concile de Mantoue
Dans les années 1532-1535, la papauté gère les difficultés suscitées par le concile de Mantoue et des relations diplomatiques pas toujours faciles à maintenir alors que la situation générale de la Chrétienté tend à se détériorer.
Durant ces années, le pape Pie IV s’efforce de trouver des solutions pour résoudre le problème de rupture provoqué par Martin Luther, Ulrich Zwingli et d’autres prédicateurs plus ou moins proches de ces deux hommes. S’il poursuit la politique de son prédécesseur Paul III pour résoudre les abus de l’Église et réformer le fonctionnement de certains ordres, le pape cherche aussi à combattre sur le plan des idées les positions luthériennes et zwingliennes. Son soutien des intellectuels l’amène à réfléchir la question sur le plan des idées et de la théologie et l’amènent à entreprendre un travail de réflexion pour établir la meilleure défense du canon de l’Église romaine. Cela aboutit à la bulle papale Veritas ex Deo est, fides ex corde et opere publiée à l’automne 1533 où le pape expose les arguments défendant le canon de l’Église catholique et pointant les erreurs et égarements des différents prédicateurs se disant réformés, principalement Martin Luther. Le pape devient aussi conscient de la nécessité de former les membres du clergé pour que ces derniers soient capables de connaître la Bible et de pouvoir mieux répondre aux demandes spirituelles des croyants. Cela amène notamment à la création de séminaires sur les terres pontificales, notamment à Bologne. L’objectif de ces séminaires est de former les futurs prêtres et religieux à la maîtrise du latin et des textes sacrés. Il réorganise certaines institutions de l’Église. A ces mesures, le pape est attentif à la manière dont évolue le concile de Mantoue.
Alors qu’il s’efforce de réformer l’Église, Pie IV entreprend aussi de faire épanouir Rome sur le plan artistique et intellectuel. La cour pontificale devient une des plus brillantes de la Chrétienté alors que de nombreux projets artistiques sont développés, certains dans la prolongation de commandes réalisées par les précédents papes. Ainsi, Michel-Ange est amené à travailler sur le plafond de la Chapelle Sixtine, libéré de ses engagements avec les Della Rovere sur le tombeau de Jules II grâce à un motu proprio publié en août 1534. Le pape fait des commentaires sur différentes œuvres de penseurs grecs de l’Antiquité et approuve l’œuvre de Nicolas Copernic, encourageant ce dernier à publier ses travaux.
Sur le plan diplomatique, le pape poursuit l’approche choisi depuis son élection, même si le contexte l’amène à la nuancer. Il entretient de bonnes relations avec Charles IX, saluant son soutien et sa détermination à combattre les idées de Martin Luther. Cela l’amène à accorder une modification de la bulle Inter Caetera en novembre 1535 en indiquant la précision précisa donc que la bulle n'affecte que les territoires occupés par l'Espagne ou le Portugal, toutes les terres nouvelles non occupées pouvant être réclamées par d'autres monarques chrétiens. Cette décision vient nourrir des relations compliquées et ambiguës avec Charles Quint. D’un côté, Pie IV s’efforce de garder une certaine distance de l’empereur Habsbourg dont il craint la toute-puissance et de l’autre, s’efforce de garder de bonnes relations avec ce dernier avec le maintien du concile de Mantoue et les tensions vives qui secouent le Saint-Empire. Ses relations avec les cantons suisses sont compliquées à cause de la présence des idées luthériennes et zwingliennes dans plusieurs d’entre eux : s’il maintient de bonnes relations avec les cantons catholiques, les relations se sont dégradées avec les cantons réformés. Cela l’amène à soutenir le duc de Savoie dans le conflit qui l’oppose au canton de Berne.
Ses relations avec Henri VIII sont assez bonnes, même si la déchéance et l’arrestation de Thomas Wolsey suscite une profonde controverse entre le royaume d’Angleterre et le Saint-Siège à cause du statut de cardinal et de légat du pape de l’ancien chancelier. Le pape consent à retirer à Wolsey sa position de légat, mais est ferme concernant le fait que la mise à mort du cardinal pourrait impliquer de lourdes répercussions pour le roi. Si cette controverse a contribué à détériorer quelque peu les relations entre le pape et le souverain anglais, cela n’empêche pas Henri VIII de demander à l’automne 1534 la permission de pouvoir enquêter sur la bonne tenue des couvents de son royaume en s’appuyant sur la bulle pontificale de 1523 qui a permis à Wolsey de pouvoir enquêter et dissoudre plusieurs couvents dans le territoire de York et d’Ipswich. Si le Saint-Siège hésite à donner une réponse favorable du fait des controverses qui persistent autour de l’annulation du mariage du souverain et de la déchéance de Thomas Wolsey, Pie IV y consent en janvier 1535 à autoriser le roi à entreprendre cette démarche.
Les actions du pape suscitent des tensions au sein de la curie et de l’aristocratie romaine, certains n’appréciant pas les choix politiques et diplomatiques du pape. Plusieurs membres de la curie regardent d’un œil incertain ou méfiant la présence d’auteurs humanistes à la cour papale, appréhendant le risque de contagion des idées de Martin Luther jusque dans les territoires pontificaux. Les tensions et discussions au sein du concile de Mantoue et le contexte extérieur contribuent à nourrir les tensions au sein du Saint-Siège. La nécessité de réformer l’Église est cependant soutenue par la Curie qui comprend la nécessité de faire face aux ruptures provoquées par Martin Luther, Ulrich Zwingli et les autres prédicateurs. Les représentants religieux favorables à la réforme interne de l’Église tendent cependant à diminuer en nombre au cours de cette période du fait des décès, notamment celui du cardinal Guillaume Briçonnet début 1534.
Durant la même période, le concile de Mantoue continue de manière compliquée et tumultueuse. Le départ des représentants zwingliens et luthériens à l’automne 1531 provoque l’interruption du concile, une partie de ses membres voulant le retour des représentants zwingliens et luthériens pour essayer de trouver une issue aux problèmes frappant l’Église. Pie IV contribue à cette interruption à la fois dans cette optique et pour chercher à limiter le risque que le concile gagne une position similaire à celle qu’ont pu avoir ses prédécesseurs au siècle précédent (1). Durant l’année 1532, des colloques sont tenus pour amener le retour de représentants réformés au sein du concile, mais les rencontres d’Augsbourg d’avril 1532 et de Trente de septembre 1532 échouent faute d’accord entre les différentes parties, notamment concernant les aspects théologiques et le rôle du pape dans l’organisation du concile.
L’échec des colloques de l’année 1532 amènent Pie IV à reconnaître l’échec du concile à pouvoir réconcilier les différentes tendances qui émergent au sein de l’Église. Charles Quint faisant pression sur lui pour relancer le concile, il décide d’ouvrir une nouvelle session en mars 1533. Devant se réorganiser suite aux échecs de négociation pour revoir les représentants luthériens et zwingliens, le concile repense les débats, faisant le tri des sessions précédentes pour retenir le plus pertinent aux yeux de ses représentants et élaguer ce qui est associé aux représentants prétendus réformés. Il se concentre sur la réforme de l’Église catholique et sur la défense de ses dogmes face aux critiques et attaques des luthériens et autres prétendus réformés. Les sessions de l’année 1532-1535 voit les représentants du concile débattre de la réforme disciplinaire, des dogmes et de la répartition des pouvoirs au sein de l’Église. Si dans les sessions de cette période, les représentants italiens sont les plus nombreux, les Français ont envoyé un contingent important et les Espagnols ont quelques représentants alors que le contingent germanique a été lourdement amoindri par le départ des figures luthériennes. Certains des pères conciliaires entendent lutter contre les abus des princes, mais la toute-puissance de Charles Quint dissuade le concile d’explorer cette voie. Ces sessions se clôturent en septembre 1535.
Après huit ans de sessions marqués par des interruptions et de nombreuses tensions et divisions, le concile a abouti à plusieurs décisions. Il définit le Canon, réaffirme la légitimité de la Vulgate sans interdire la lecture d’autres versions ou la traduction en langue vernaculaire bien que celle-ci soit conseillée dans le cadre de lectures académiques. Il définit les caractéristiques du salut, confirme la liste des sept sacrements dégagée par l'Église à la fin du XIIIème siècle, confirme le culte des saints tout en définissant la distinction entre dulie (simple vénération) et latrie (adoration due seulement à Dieu et aux hypostases de la Trinité). Le concile détermine les grands axes de l’œuvre disciplinaire en définissant un âge minimal à la prêtrise, renforce le pouvoir des évêques tout en rappelant le rôle central du pape, souligne l’importance de la formation du clergé et met l’accent sur le rôle pastoral de l’Église.
(1) En 1418, le concile de Constance mettait un terme au Grand Schisme d'Occident qui avait divisé la Chrétienté sous l'autorité de deux (puis trois) papes (un à Avignon, l'autre à Rome et le dernier venu à Pise), ce qui avait permis l'émergence de nombreuses hérésies (les vaudois et les hussites). Le rôle du concile dans la résolution de la crise avait donné à ce dernier une importance très forte et abouti à l'émergence du conciliarisme, doctrine qui affirmait la primauté du concile dans le domaine théologique au détriment du pape, ce qui a amené de nombreux débats et controverses au sein de l’Église durant le demi-siècle suivant. Ce n'est que dans les années 1460 que la primauté du pape est de nouveau réaffirmé et le conciliarisme débouté.
Yodarc- Messages : 424
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
L"Eglise un peu plus reformée qu'IRL c'est très intéressant !Yodarc a écrit:Bonjour à tous !
Cette nouvelle partie s'intéresse à la papauté et à la suite du concile de Mantoue. Avec cette partie, on s'écarte définitivement de la réalité historique pour des raisons évidentes, même si plusieurs éléments y feront écho (seulement dans un tout autre contexte). Cette partie vous donnera une idée des répercussions des événements sur le monde, notamment sur le plan religieux et théologique.
J'espère que cela saura vous plaire.
Bonne lecture à tous !
Deus veult !
1532-1535 : La Papauté et la conclusion du concile de Mantoue
Dans les années 1532-1535, la papauté gère les difficultés suscitées par le concile de Mantoue et des relations diplomatiques pas toujours faciles à maintenir alors que la situation générale de la Chrétienté tend à se détériorer.
Durant ces années, le pape Pie IV s’efforce de trouver des solutions pour résoudre le problème de rupture provoqué par Martin Luther, Ulrich Zwingli et d’autres prédicateurs plus ou moins proches de ces deux hommes. S’il poursuit la politique de son prédécesseur Paul III pour résoudre les abus de l’Église et réformer le fonctionnement de certains ordres, le pape cherche aussi à combattre sur le plan des idées les positions luthériennes et zwingliennes. Son soutien des intellectuels l’amène à réfléchir la question sur le plan des idées et de la théologie et l’amènent à entreprendre un travail de réflexion pour établir la meilleure défense du canon de l’Église romaine. Cela aboutit à la bulle papale Veritas ex Deo est, fides ex corde et opere publiée à l’automne 1533 où le pape expose les arguments défendant le canon de l’Église catholique et pointant les erreurs et égarements des différents prédicateurs se disant réformés, principalement Martin Luther. Le pape devient aussi conscient de la nécessité de former les membres du clergé pour que ces derniers soient capables de connaître la Bible et de pouvoir mieux répondre aux demandes spirituelles des croyants. Cela amène notamment à la création de séminaires sur les terres pontificales, notamment à Bologne. L’objectif de ces séminaires est de former les futurs prêtres et religieux à la maîtrise du latin et des textes sacrés. Il réorganise certaines institutions de l’Église. A ces mesures, le pape est attentif à la manière dont évolue le concile de Mantoue.
Alors qu’il s’efforce de réformer l’Église, Pie IV entreprend aussi de faire épanouir Rome sur le plan artistique et intellectuel. La cour pontificale devient une des plus brillantes de la Chrétienté alors que de nombreux projets artistiques sont développés, certains dans la prolongation de commandes réalisées par les précédents papes. Ainsi, Michel-Ange est amené à travailler sur le plafond de la Chapelle Sixtine, libéré de ses engagements avec les Della Rovere sur le tombeau de Jules II grâce à un motu proprio publié en août 1534. Le pape fait des commentaires sur différentes œuvres de penseurs grecs de l’Antiquité et approuve l’œuvre de Nicolas Copernic, encourageant ce dernier à publier ses travaux.
Sur le plan diplomatique, le pape poursuit l’approche choisi depuis son élection, même si le contexte l’amène à la nuancer. Il entretient de bonnes relations avec Charles IX, saluant son soutien et sa détermination à combattre les idées de Martin Luther. Cela l’amène à accorder une modification de la bulle Inter Caetera en novembre 1535 en indiquant la précision précisa donc que la bulle n'affecte que les territoires occupés par l'Espagne ou le Portugal, toutes les terres nouvelles non occupées pouvant être réclamées par d'autres monarques chrétiens. Cette décision vient nourrir des relations compliquées et ambiguës avec Charles Quint. D’un côté, Pie IV s’efforce de garder une certaine distance de l’empereur Habsbourg dont il craint la toute-puissance et de l’autre, s’efforce de garder de bonnes relations avec ce dernier avec le maintien du concile de Mantoue et les tensions vives qui secouent le Saint-Empire. Ses relations avec les cantons suisses sont compliquées à cause de la présence des idées luthériennes et zwingliennes dans plusieurs d’entre eux : s’il maintient de bonnes relations avec les cantons catholiques, les relations se sont dégradées avec les cantons réformés. Cela l’amène à soutenir le duc de Savoie dans le conflit qui l’oppose au canton de Berne.
Ses relations avec Henri VIII sont assez bonnes, même si la déchéance et l’arrestation de Thomas Wolsey suscite une profonde controverse entre le royaume d’Angleterre et le Saint-Siège à cause du statut de cardinal et de légat du pape de l’ancien chancelier. Le pape consent à retirer à Wolsey sa position de légat, mais est ferme concernant le fait que la mise à mort du cardinal pourrait impliquer de lourdes répercussions pour le roi. Si cette controverse a contribué à détériorer quelque peu les relations entre le pape et le souverain anglais, cela n’empêche pas Henri VIII de demander à l’automne 1534 la permission de pouvoir enquêter sur la bonne tenue des couvents de son royaume en s’appuyant sur la bulle pontificale de 1523 qui a permis à Wolsey de pouvoir enquêter et dissoudre plusieurs couvents dans le territoire de York et d’Ipswich. Si le Saint-Siège hésite à donner une réponse favorable du fait des controverses qui persistent autour de l’annulation du mariage du souverain et de la déchéance de Thomas Wolsey, Pie IV y consent en janvier 1535 à autoriser le roi à entreprendre cette démarche.
Les actions du pape suscitent des tensions au sein de la curie et de l’aristocratie romaine, certains n’appréciant pas les choix politiques et diplomatiques du pape. Plusieurs membres de la curie regardent d’un œil incertain ou méfiant la présence d’auteurs humanistes à la cour papale, appréhendant le risque de contagion des idées de Martin Luther jusque dans les territoires pontificaux. Les tensions et discussions au sein du concile de Mantoue et le contexte extérieur contribuent à nourrir les tensions au sein du Saint-Siège. La nécessité de réformer l’Église est cependant soutenue par la Curie qui comprend la nécessité de faire face aux ruptures provoquées par Martin Luther, Ulrich Zwingli et les autres prédicateurs. Les représentants religieux favorables à la réforme interne de l’Église tendent cependant à diminuer en nombre au cours de cette période du fait des décès, notamment celui du cardinal Guillaume Briçonnet début 1534.
Durant la même période, le concile de Mantoue continue de manière compliquée et tumultueuse. Le départ des représentants zwingliens et luthériens à l’automne 1531 provoque l’interruption du concile, une partie de ses membres voulant le retour des représentants zwingliens et luthériens pour essayer de trouver une issue aux problèmes frappant l’Église. Pie IV contribue à cette interruption à la fois dans cette optique et pour chercher à limiter le risque que le concile gagne une position similaire à celle qu’ont pu avoir ses prédécesseurs au siècle précédent (1). Durant l’année 1532, des colloques sont tenus pour amener le retour de représentants réformés au sein du concile, mais les rencontres d’Augsbourg d’avril 1532 et de Trente de septembre 1532 échouent faute d’accord entre les différentes parties, notamment concernant les aspects théologiques et le rôle du pape dans l’organisation du concile.
L’échec des colloques de l’année 1532 amènent Pie IV à reconnaître l’échec du concile à pouvoir réconcilier les différentes tendances qui émergent au sein de l’Église. Charles Quint faisant pression sur lui pour relancer le concile, il décide d’ouvrir une nouvelle session en mars 1533. Devant se réorganiser suite aux échecs de négociation pour revoir les représentants luthériens et zwingliens, le concile repense les débats, faisant le tri des sessions précédentes pour retenir le plus pertinent aux yeux de ses représentants et élaguer ce qui est associé aux représentants prétendus réformés. Il se concentre sur la réforme de l’Église catholique et sur la défense de ses dogmes face aux critiques et attaques des luthériens et autres prétendus réformés. Les sessions de l’année 1532-1535 voit les représentants du concile débattre de la réforme disciplinaire, des dogmes et de la répartition des pouvoirs au sein de l’Église. Si dans les sessions de cette période, les représentants italiens sont les plus nombreux, les Français ont envoyé un contingent important et les Espagnols ont quelques représentants alors que le contingent germanique a été lourdement amoindri par le départ des figures luthériennes. Certains des pères conciliaires entendent lutter contre les abus des princes, mais la toute-puissance de Charles Quint dissuade le concile d’explorer cette voie. Ces sessions se clôturent en septembre 1535.
Après huit ans de sessions marqués par des interruptions et de nombreuses tensions et divisions, le concile a abouti à plusieurs décisions. Il définit le Canon, réaffirme la légitimité de la Vulgate sans interdire la lecture d’autres versions ou la traduction en langue vernaculaire bien que celle-ci soit conseillée dans le cadre de lectures académiques. Il définit les caractéristiques du salut, confirme la liste des sept sacrements dégagée par l'Église à la fin du XIIIème siècle, confirme le culte des saints tout en définissant la distinction entre dulie (simple vénération) et latrie (adoration due seulement à Dieu et aux hypostases de la Trinité). Le concile détermine les grands axes de l’œuvre disciplinaire en définissant un âge minimal à la prêtrise, renforce le pouvoir des évêques tout en rappelant le rôle central du pape, souligne l’importance de la formation du clergé et met l’accent sur le rôle pastoral de l’Église.
(1) En 1418, le concile de Constance mettait un terme au Grand Schisme d'Occident qui avait divisé la Chrétienté sous l'autorité de deux (puis trois) papes (un à Avignon, l'autre à Rome et le dernier venu à Pise), ce qui avait permis l'émergence de nombreuses hérésies (les vaudois et les hussites). Le rôle du concile dans la résolution de la crise avait donné à ce dernier une importance très forte et abouti à l'émergence du conciliarisme, doctrine qui affirmait la primauté du concile dans le domaine théologique au détriment du pape, ce qui a amené de nombreux débats et controverses au sein de l’Église durant le demi-siècle suivant. Ce n'est que dans les années 1460 que la primauté du pape est de nouveau réaffirmé et le conciliarisme débouté.
Flosgon78- Messages : 289
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Flosgon78 a écrit:L"Eglise un peu plus reformée qu'IRL c'est très intéressant !
En effet. C'est un élément que je trouvais intéressant d'explorer, à savoir le fait que l’Église catholique aurait plus d'opportunités et de possibilités de se réformer plus tôt qu'historiquement, le concile de Trente s'étant déroulé entre 1545 et 1563 (même si dans les faits, il s'est déroulé entre 1545 et 1549, 1551 et 1552 et 1562 et 1563).
Il y a eu plusieurs raisons pour lesquelles l’Église a eu autant de mal à se réformer face au développement des idées de Luther, de Zwingli (et par la suite de Calvin) :
_ les conflits entre Charles Quint et François I prévenaient le rassemblent de l'ensemble des évêques pour un concile (soit parce que les évêques de l'un ou de l'autre royaume ne voulaient pas se mettre en danger, soit par décision politique pour protester notamment contre l'autre camp) ; et même sans tenir compte de la contrainte pratique, il y avait l'impact politique, l'un ou l'autre camp pouvant chercher à influencer le concile au travers de ses intérêts
_ les divergences entre le pape et Charles Quint sur la nature du concile : Charles Quint considérait le concile comme moyen de réconcilier les deux factions, alors que la papauté considérait le concile comme moyen de ramener tout le monde dans le giron catholique sans avoir à passer par des compromis (seulement des rectifications doctrinales)
_ la volonté politique des papes concernés : quand ils n'étaient au cœur des conflits entre Valois et Habsbourg (comme Léon X, Adrien VI ou Clément VII) ou qu'ils n'avaient pas le temps de se pencher sur la question (comme Marcel II), les papes n'étaient pas forcément intéressés ou disposés à faire tenir un concile (Paul IV est le meilleur exemple dans ce cadre, étant donné qu'il a été pape entre 1555 et 1559 et que le concile de Trente n'a pas tout été tenu sous son pontificat)
_ les contingences et contraintes d'organisation d'un concile : même sans tenir compte de tous les éléments précédents, un concile n'était pas une assemblée facile à rassembler, du fait du nombre de participants et de leur provenance (il s'agit d'une assemblée des représentants ecclésiastiques catholiques de toute la Chrétienté, bien qu'en pratique, il ne s'agisse que des principaux royaumes), ce qui signifie qu'il fallait choisir un emplacement qui pouvait accueillir tous ces représentants (et en fonction du contexte politique, un territoire neutre pour éviter toute embrouille politique) alors que les circonstances pouvaient entraver ces efforts. C'est ce qui s'est passé avec la première tentative de concile de Paul III à Mantoue en 1537 : la ville n'avait pas les moyens de tenir un tel événement, une nouvelle guerre entre Charles Quint et François I s'était déclenchée et les représentants protestants ont préféré renoncé à y venir pour différentes raisons.
Résultat, l’Église catholique n'a pu empêcher le développement des confessions réformées (ou protestantes comme nous les appelons aujourd'hui) et a du se contenter de la Contre-Réforme après Trente pour juguler l'expansion de ces confessions (notamment celle des calvinistes qui étaient les plus actifs dans la seconde moitié du XVIème siècle).
Dans cette TL, la tenue plus précoce d'un concile (facilitée par un contexte international plus favorable et des papes réformateurs) permet à l’Église d'avoir une situation plus favorable pour contrebalancer le développement de la Réforme. Est-ce que cela suffira à tout bouleverser ? Une question qui sera explorée par petites touches dans les parties ultérieures.
Yodarc- Messages : 424
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Flosgon78- Messages : 289
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L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Cette nouvelle partie se concentrent sur les événements et tendances se passant dans le reste de l'Italie et dans les cantons suisses durant les années 1532-1535. Des tendances pouvant faire écho à des événements historiques et d'autres qui renforcent les évolutions qui caractérisent la région depuis le POD. Des évolutions qui pointent vers un changement de période en termes de stabilité, de paix et de relations entre territoires.
J'espère que cette période saura vous plaire.
Bonne lecture à tous !
1532-1535 : Tensions en Italie et Suisse
Les années 1532-1535 voient le retour d’importantes tensions et même d’incidents graves dans la péninsule italienne, laissant présager à certains le retour des conflits.
Alors que les cantons suisses s’efforcent à s’organiser après la paix imposée entre les cantons réformés et ceux catholiques, le retour des ingérences du duché de Savoie dans la petite république de Genève provoque d’importantes tensions alors que les cantons de Berne et de Fribourg cherchent à prévenir les ambitions de Charles III de Savoie. La confrontation des intérêts opposés des cantons suisses et du duc de Savoie précipite le conflit à l’été 1532. Des escarmouches ont lieu entre savoyards et suisses durant l’automne et l’hiver 1532 alors que Charles III entreprend de réaffirmer son emprise sur la république de Genève. Cela suscite de vives tensions au sein de la petite république, les patriotes genevois étant plus hostiles que jamais aux interventions et ingérences de Charles III et se tournant vers les cantons suisses pour demander leur aide.
En février 1533, Berne envoie une force pour soutenir Genève et chasser les savoyards de la petite république. Ils sont rejoints par une armée de Fribourg et des soldats de Lausanne avec qui ils sont liés par le traité d’alliance de 1525. Charles III envoie une armée soutenir l’évêque Pierre de Baume et contrer les Bernois avant qu’ils ne soient soutenus par d’autres cantons suisses. Durant leur traversée du pays de Vaud sous le contrôle spirituel de l’évêque de Lausanne, les Bernois saccagent le territoire et s’emparent des différentes cités sur leur chemin. Ils finissent par rencontrer l’armée savoyarde près du village de Genthod en mars 1533. L’affrontement est bref mais violent et voit les Savoyards être mis en déroute. La défaite de Genthod oblige les Savoyards à quitter précipitamment Genève alors que l’évêque est forcé de fuir. Après ce succès, les Bernois imposent la réforme zwinglienne dans le Pays de Vaud, forçant l’évêque de Lausanne, Sébastien de Montfalcon, à l’exil.
Les succès de Berne et de ses alliés contre le duché de Savoie ne masquent pas les tensions persistantes -qui existent entre les différents cantons du fait de la paix fragile qui a été imposée en 1530. Les cantons réformés conservent toujours l’espoir d’imposer leur approche des baillages alors que les cantons catholiques sont déterminés à préserver le statu quo, renforçant leurs liens avec les Habsbourg et le duché de Milan. Ils renforcent d’autant plus leurs liens avec ces derniers que plusieurs des cantons réformés désirent réaffirmer la réforme des bailliages et s’imposer face aux cantons catholiques.
Dans ce contexte incertain, la réforme zwinglienne continue de se renforcer dans les cantons réformés, bien que la réforme luthérienne s’y développe aussi, ce qui suscite quelques controverses. Bien qu’étant en retraite spirituelle, Ulrich Zwingli continue de jouer un rôle important dans la vie politique de Zurich. Malgré la défaite de la première guerre de Kappel, les cantons réformés sont déterminés à faire triompher leurs positions dans les cantons suisses. Ils entreprennent de renouer des liens avec les princes luthériens du Saint-Empire, notamment Philippe de Hesse. Si Zwingli est défavorable à l’intégration de Zurich à la Ligue de Marbourg avec Berne et Bâle, il ne peut empêcher ses concitoyens de rejoindre l’alliance à l’été 1532. Cette alliance contribue à relancer les tensions entre les cantons catholiques et réformés, les premiers n’acceptant pas cette initiative et la voyant comme un moyen de faire pression sur eux et de rompre la paix de Kappel.
En 1534, Oswald Myconius, un prédicateur réformé de Bâle, publie ce qui sera connue comme la première Confession de Bâle. Dans le court texte rédigé, le prédicateur cherche à aligner sur le parti réformateur à la fois ceux qui sont encore enclins à la foi catholique et ceux qui sont devenus anabaptistes. La publication provoque une vive controverse, notamment dans les déclarations sur l’eucharistie. Ulrich Zwingli cherche à défendre le texte, mais déplore l’intention concernant les anabaptistes.
La controverse autour de la Confession de Bâle est cependant supplantée par le renforcement des tensions qui opposent certains des cantons réformés et les membres de l’Union Chrétienne au printemps 1534. Suite à l’éclatement du conflit qui oppose l’Alliance des Trois Ligues avec le duché de Milan, certains des cantons réformés souhaitent aider les ligues grisonnes. Les cantons catholiques s’y opposent, notamment du fait de leurs bonnes relations avec le duché de Milan malgré la rupture du traité de Bergame. A cela s’ajoutent le fait qu’une partie des cantons de l’Alliance des Trois Ligues se sont ralliés aux idées luthériennes et zwingliennes et la volonté des cantons catholiques de prévenir toute potentielle rupture de la paix par Zurich et ses alliés. Les cantons de l’Union Chrétienne exigent le retour à la foi catholique des cantons des Trois Ligues en échange de leur aide. Le retour des tensions vives entre les deux factions amène les cantons réformés à renouer d’importants liens pour former une ligue défensive, aggravant les tensions avec les cantons catholiques. Dans le même temps, ils cherchent une approche pour forcer les cantons catholiques à soutenir l’Alliance des Trois-Ligues ou du moins les autoriser à soutenir les cantons grisons. Si certains comme Zurich sont favorables pour rouvrir les hostilités contre les cantons catholiques, ils acceptent la position bernoise qui consiste à imposer un blocus alimentaire sur l’Union Chrétienne, Berne n’étant pas favorable à un conflit militaire avec les autres cantons, d’autant moins alors que le duché de Savoie demeure à leurs yeux une menace plus importante.
La pression du blocus alimentaire s’avère être l’étincelle qui met le feu aux poudres : les cantons catholiques dénoncent l’approche des cantons réformés, les accusant de vouloir rompre la paix en les forçant à se soumettre à leurs volontés. Le maintien du blocus alimentaire précipite les hostilités lorsque les cantons de l’Union Chrétienne déclarent la guerre à Zurich et ses alliés en octobre 1534. Ils attaquent Zurich peu après. Un affrontement a lieu près de Husen (1). Si les forces zurichoises sont en infériorité numérique, elles sont mieux préparées qu’en 1530 et tiennent en respect leurs adversaires plus longtemps que lors du précédent conflit. Mais ils sont finalement défaits et mises en déroute, perdant la moitié de leurs forces dans la débâcle. Parmi les victimes figurent Zwingli qui a accompagné ses compatriotes en tant qu’aumônier. L’Union Chrétienne est cependant affaiblie et doit ménager ses forces avant de tenter une attaque sur Zurich. L’arrivée des forces bernoises et de leurs alliés début novembre oblige l’Union Chrétienne à se replier. Les forces de Berne et de ses alliés sont prises en embuscade près de Steinhusin (2), stoppant net leur attaque. Les deux camps sont épuisés et préfèrent négocier en janvier 1535. Le traité de paix qui en ressort revient au statu quo de 1530, mais voit les cantons réformés être forcés de se distancer de la Ligue de Marbourg alors que l’Union Chrétienne renforce sa position dans la Confédération.
La défaite de Genthod fragilise les ambitions de Charles III de Savoie qui s’inquiète du risque d’expansion de Berne sur ses terres. Voyant plusieurs des baillages du nord de son duché occupés par les Bernois et leurs alliés, le duc utilise sa position de prince d’empire et se tourne vers Charles Quint et son frère Ferdinand pour chercher de l’aide auprès de ces derniers. Mais ni l’empereur ni son frère ne sont intéressés à aider le duc de Savoie, étant davantage préoccupés par les troubles qui menacent le Saint-Empire. Cela amène Charles III à se tourner vers Charles IX de France avec lequel il entretient une relation plutôt cordiale, renforcée depuis le décès de Louise de Savoie qui enlève au duc une menace pour sa position. Mais le roi de France ne présente qu’un intérêt restreint à la question genevoise, même si la proximité d’un foyer réformé à proximité de son royaume ne l’enchante guère. Il se rapproche du duché de Milan pour contrer les cantons suisses. Les deux duchés signent un traité d’alliance défensive contre les cantons suisses réformés à l’automne 1533. Il renforce ses liens avec les cantons catholiques et Ferdinand de Habsbourg durant la même période.
Si le conflit entre Milan et les Trois Ligues détournent l’attention des cantons suisses et précipitent un nouveau conflit entre eux, Charles III de Savoie entreprend de mieux préparer la reprise en main de Genève et des territoires du Vaud, conscient qu’il n’est pas en position de force face aux cantons suisses. Il cherche à obtenir le soutien de Maximilien Sforza, mais ce dernier est concentré sur la récupération de la Valteline. Cela oblige le duc à négocier avec les cantons suisses en 1535, renonçant aux revendications qu’il avait sur la république de Genève en échange de la récupération d’une partie du pays de Vaud. Il doit aussi négocier avec le Valais. Le canton a tiré profit du conflit entre la Savoie et les cantons suisses pour s’emparer du Chablais.
Au début des années 1530, le duché de Milan réaffirme une position forte dans le nord de l’Italie, s’émancipant définitivement de la tutelle suisse qui existait depuis la guerre de la Ligue de Cambrai. La cité est désormais un haut lieu de la culture italienne, en concurrence avec Rome et Florence. Maximilien entreprend aussi de tisser des relations et alliances au travers notamment du mariage de ses enfants, à commencer de son héritier Francesco. Voulant renouer avec le duché de Ferrare, il parvient à faire marier sa fille Béatrice avec Hercule II d’Este à l’été 1534. Il cherche aussi à faire marier son fils avec Catherine de Médicis afin de développer une alliance avec les Médicis. Ce projet se concrétise à partir de 1535 lorsque Alessandro de Médicis se rapproche du duc pour concrétiser un projet matrimonial pour sa cousine. Par l’intermédiaire de son frère Francesco, il développe ses relations avec Charles Quint afin de maintenir de bonnes relations avec l’empereur, même si son épouse Bona n’est toujours pas vraiment favorable.
En parallèle de la poursuite de l’épanouissement de sa cité, du développement d’alliances et de travailler à la pérennité de sa lignée, le duc entreprend de renforcer la position de son duché dans la péninsule. Sa principale action est de réaffirmer la suzeraineté de son duché sur la république de Gênes comme cela avait été le cas par le passé (3). S’il appuie les Fregoso dans un premier temps, il finit par les amener à reconnaître son autorité sur la cité à l’automne 1532. Ce succès contribue à renforcer la position de Maximilien auprès de ses sujets, mais provoque aussi de vives tensions avec le royaume de France : Charles IX dénonce la mise sous tutelle de Gênes. Ce retour de tensions suscite l’inquiétude du duc car le jeune roi a des prétentions dynastiques fortes sur le duché par son père Louis XII. Cela amène le duc à développer davantage ses relations et alliances, mais aussi à se rapprocher de Charles Quint afin de pouvoir s’assurer une protection contre la menace française.
A ce risque s’ajoute le renforcement des tensions avec les cantons suisses qui dénoncent la rupture du traité de Bergame et surtout les incidents multiples de la part de Gian Giacomo Médicis envers l’Alliance des Trois Ligues. Le condottiere qui travaille au service du duc, profite des divisions de la Confédération suisse pour s’emparer de la Valteline contrôlée par les Grisons depuis 1512 et dont le contrôle avait été reconnu par le traité de Bergame. En 1532, il s’empare du château de Musso près du lac de Côme. Cet incident suscite de vives tensions entre le duché et l’Alliance des Trois Ligues qui exigent du duc qu’il redonne le château et livre le Medeghino. Maximilien refuse, le Medeghino et sa famille étant désormais de solides soutiens à son autorité malgré des inimitiés à leur égard des autres figures importantes du duché, mais aussi parce que les années de paix ont permis à son duché de se renforcer et à lui d’avoir une légitimité plus ferme sur ses terres. Le sentiment d’être en une position plus favorable est renforcé par le désir de reprendre des terres qui sur le plan patrimonial appartenait au duché et dont une partie de l’entourage de Maximilien estime qu’ils ont été pris sous la contrainte. Le refus du duc amène à une série d’escarmouches entre Milanais et Grisons au début de l’année 1533, Giacomo Médicis continuant ses coups de force dans la région alors que l’Alliance des Trois Ligues cherche à le contrer et à reprendre le contrôle des territoires autour du lac de Côme. La multiplication des incidents amène Maximilien Sforza à préparer le conflit avec les Grisons, cherchant à s’assurer le soutien ou la neutralité de ses autres voisins. Il parvient à réaliser une alliance défensive avec Charles III de Savoie à l’automne 1533.
Assuré de ces soutiens, le duc soutient plus ouvertement Giacomo de Médicis contre les Trois Ligues et envoie une partie de ses forces rejoindre le condottiere au printemps 1534. Ses forces capturent Morbegno et renforcent le contrôle sur la vallée de Chiavenna. Après ce succès, le duc entreprend de reprendre la Valteline, déterminé à restaurer les frontières septentrionales de son duché. Son armée rencontre une des Trois Ligues près de Sondrio en mai 1534. L’affrontement est bref et violent et voit Giacomo e Médicis et les Milanais se replier après avoir subi d’importantes pertes face à leurs adversaires. Cette défaite oblige le Medeghino à se replier, même s’il continue de conserver la vallée de Chiavenna. Cela oblige Maximilien à recruter de nouvelles forces pour défendre la vallée. Durant l’été 1534, les Milanais parviennent à tenir la vallée de Chiavenna face à leurs adversaires et leurs alliés suisses. Seul le conflit entre les cantons suisses permet au Medeghino de pouvoir tenir sa position. Des escarmouches font rage entre les deux camps durant l’automne et l’hiver 1534. Au printemps 1535, Giacomo de Médicis est renforcé par de nouvelles troupes milanaises et reprend l’initiative contre les Trois Ligues. Il s’empare de Morbegno en avril 1535 et s’enfonce dans la Valteline. Les Trois Ligues parviennent à stopper la campagne militaire milanaise près de Sondrio en mai 1535, mais sont épuisés pour tenter de continuer les hostilités. Ils décident de négocier la paix avec Milan et bénéficie de la médiation de Charles IX pour trouver un accord de paix avec Maximilien Sforza. Un traité est signé à Côme en octobre 1535 qui voit les Trois Ligues renoncer à leur souveraineté sur la vallée de Chiavenna. Ce succès renforce cependant l’isolement du duché de Milan avec le rapprochement qui commence entre l'Alliance des Trois Ligues et le royaume de France.
Avec le retour de Gênes sous la domination milanaise, plusieurs figures éminentes choisissent l’exil sur leurs terres ou offrant leurs services à d’autres souverains. Andrea Doria présente ainsi ses services au roi de France Charles IX afin de pouvoir obtenir le soutien du souverain pour permettre à sa cité de retrouver son indépendance face aux Sforza. L’amiral génois renoue aussi avec la lutte contre les pirates barbaresques alors que ces derniers reprennent une activité assez conséquente à la même période.
Le début des années 1530 voit Florence subir de façon croissante les rivalités entre Alessandro et son cousin Ippolito. Pour chercher d’apaiser le conflit latent entre ses deux neveux, le cardinal Giulio de Médicis obtient du pape Pie IV d'élever Ippolito à la charge de cardinal en 1533, s’étant décidé de faire de ce dernier son héritier pour les affaires ecclésiastiques et ayant remarqué les capacités de gouvernance d’Alessandro et le soutien que ce dernier avait obtenu d’une partie importante des Florentins. Si cette décision permet d’éloigner Ippolito de Florence et de permettre à Alessandro de régner en seul maître sur la cité, elle n’empêche pas son cousin de continuer de comploter contre lui et d’échanger avec la faction républicaine. Cette dernière entreprend de se renforcer et de comploter contre Alessandro et Giulio. Pouvant gouverner sans les conflits avec son cousin, Alessandro renforce le caractère princier de sa gouvernance, établissant à l’automne 1533 un symbolique « conseil des deux cents » et un Sénat composé de quarante-huit membres nommés à vie, donnant un semblant de caractère républicain aux institutions de sa cité. Ses initiatives permettent de conforter le soutien de la population à son égard et renforce la détermination de la faction républicaine qui ne veut pas voir les Médicis réussir à triompher. Il complote aussi pour se débarrasser d’Ippolito avec lequel il est en très vive rivalité et dont il se méfie. Dans un but politique mais aussi pour l’éloigner davantage de son cousin, il entreprend de chercher un bon parti pour sa demi-sœur Catherine. Parmi les candidats figurent Guidobaldo della Rovere, l’héritier du duc d’Urbino, François-Marie I, afin de réconcilier sa famille et la sienne après les conflits autour du duché d’Urbino. Mais suite au mariage de ce dernier avec Giulia Varano, duchesse de Camerino, en octobre 1534, Alessandro se rapproche de Maximilien Sforza, ce dernier désirant marier son héritier Francesco à Catherine. Son oncle lui conseille de chercher une alliance qui assurerait à la famille un prestige conséquent, notamment auprès de la cour de France ou des Habsbourg.
Durant la même période, Alessandro Médicis entreprend de resserrer les liens avec d’autres voisins, notamment la papauté et le royaume de France, se démarquant quelque peu de son oncle. Il poursuit enfin la politique de déstabilisation de Sienne en soutenant des patriciens favorables à sa famille.
Durant les années 1532-1535, la République de Venise se remet doucement du conflit avec l’Empire Ottoman, le coût du conflit et du tribut payé à Soliman greffant sa capacité à agir sur le plan financier. Les Vénitiens entreprennent de renforcer leurs possessions du mieux de leurs capacités et renforcent leurs liens avec les Mamelouks dans l’espoir de restaurer une partie de leurs échanges commerciaux et pour pouvoir contrer les Ottomans à l’avenir. Les Vénitiens entreprennent des relations diplomatiques avec leurs différents voisins afin de les ménager. La tendance expansionniste de Milan suscite cependant leur vigilance et les amène à se rapprocher davantage du royaume de France. Elle a des relations avec les cantons suisses, même si elle ne s’engage pas dans ses querelles. Elle joue cependant le rôle de médiateur avec Charles IX dans le conflit entre Milan et les Trois Ligues.
(1) Nom porté par l'actuelle Hausen am Albis sur la fin du Moyen Age.
(2) Nom initial de Steinhausen dans le territoire de Zoug.
(3) Gênes a été occupée par le duché de Milan à deux reprises : d'abord entre 1421 et 1436 et ensuite entre 1488 et 1507.
Yodarc- Messages : 424
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Flosgon78- Messages : 289
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Re: L'Inattendu : à l'époque de l'héritier de Louis XII
Tant qu'il restera une personne qui aura des revendications assez fortes sur certains des territoires (notamment le duché de Milan), qui ce soit en tant que souverain ou dans son entourage, des tensions vont demeurer.Flosgon78 a écrit:Très intéressant, l'Italie semble rester la poudrière de l'Europe
Historiquement, une des causes du début des guerres d'Italie est que Charles VIII ait été poussé par certains, dont Louis II d'Orléans (le futur Louis XII) à défendre ses revendications sur le royaume de Naples (brisant la politique diplomatique de son père Louis XI au passage). Étant donné que François d'Angoulême est un proche parent de Charles IX et possède lui-même des revendications sur le duché de Milan, j'ai considéré qu'il puisse jouer un rôle assez similaire auprès du jeune souverain que le père de ce dernier. Il y a aussi l'âge des souverains à prendre en compte : Charles VIII entre en campagne contre le royaume de Naples en 1494 alors qu'il a 23-24 ans et dans la période actuellement décrite dans le récit, Charles IX a atteint ses vingt ans, entrant dans la période où il voudra faire ses preuves, notamment par la voie des armes. L'évolution du conseil royal en France et des figures politiques des royaumes voisins affecte aussi les équilibres fragiles, avec ceux qui veulent gagner en influence et prestige et ceux qui veulent faire leurs preuves.
Enfin, je me suis appuyé sur les relations diplomatiques développées au fil des années dans les parties précédentes et des précédents historiques, notamment concernant Gênes et Milan.
La fin de la régence française et l'entrée à l'âge adulte de Charles IX va contribuer à l'évolution des équilibres géopolitiques vers un potentiel retour aux rivalités dynastiques plus prononcées (mais cela, ce sera exploré dans les parties ultérieures ).
Yodarc- Messages : 424
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