L'héritage de Lazare Hoche

Chapitre 9. Le nouveau visage des Amériques

Au Mexique, le règne de Luis-Felipe Ier est marqué par une relative consolidation de l’Etat. Connaissant peu le pays, et sachant sa position fragile, le roi joue dans les premières années un rôle moindre que celui que lui fixe la Constitution du pays, mais parvient à s’imposer comme un arbitre indispensable. Penchant personnellement du côté des libéraux, il gagne le soutien de la bourgeoisie mexicaine tout en ménageant les intérêts des conservateurs.
Après de longues négociations, les frontières sont définitivement fixées avec les Etats-Unis, et un Etat-tampon amérindien, surtout dominé par les Comanches, est créé. Si les Etats-Unis reconnaissent au Mexique le droit de mener une politique migratoire restrictive sur les territoires du nord, celui-ci ne peut empêcher l’implantation de nombreux colons anglo-saxons.

La découverte d’or en Californie en 1846 entraine l’année suivante une tentative de sécession avec la proclamation d’une République de Grande Californie. Si, au bout de deux ans, l’essentiel des combats est terminé et la côte reprise en main par le Mexique, il faut encore deux ans supplémentaires pour venir à bout d’une République théocratique protestante. La participation aux combats, du côté mexicain, de nombreux immigrés irlandais, est à l’origine du nom de la ville de San Patricio, à la frontière.

La loi d’amnistie de 1851 permet de stabiliser à nouveau le pays, tandis que l’exploitation de l’or marque le début d’une ère d’expansion économique rapide. La population augmente rapidement, notamment du fait de l’immigration française, irlandaise puis, surtout, italienne. Par sa participation active à la guerre, Luis-Felipe II a pu acquérir une popularité assez forte pour s’impliquer plus activement que son père dans la politique de son pays. Il soutient plus clairement les libéraux et la nationalisation des biens de l’Eglise catholique. La présence d’une dynastie d’origine française entraîne également le développement rapide de la viticulture…

En Amérique du sud, le royaume du Brésil obtient progressivement son autonomie interne vis-à-vis du Portugal et la fin de la politique d’exclusif colonial. Des mouvements républicains tentent à plusieurs reprises de prendre le pouvoir, mais leur volonté d’abolir l’esclavage les empêche de gagner un soutien important.

Dans l’Amérique du sud hispanophone, les années 1840 et 1830 sont marquées par des conflits de frontières entre les jeunes Etats, quels que soient leurs régimes politiques. En Nouvelle-Grenade et au Pérou, le pouvoir est toujours nominalement exercé par les rois d’Espagne, qui ne peuvent pas empêcher l’évolution vers des régimes constitutionnels laissant peu de pouvoir à leurs représentants sur place. Les Républiques du Chili et du Vénézuela, ainsi que la nouvelle monarchie Argentine se consolident.

Chapitre 10. En Europe, le libéralisme avance lentement

En 1821, le régent Charles Albert accorde, suite à une insurrection, une constitution d’inspiration libérale. Mais l’exemple du Piémont, encerclé par des Républiques libérales, n’est pas représentatif et n’a dans un premier temps que peu de répercussions. Piémont, République italienne et République ligurienne forment la Ligua italica, sensée réunir l’ensemble de la péninsule, mais qui n’est rejointe par aucun autre pays.

En Allemagne, la politique de l’Empereur et de Metternich tend à réprimer les velléités de réforme, à l’exception relative du Hanovre, logiquement influencé par la Grande-Bretagne. La volonté de Vienne de relancer la centralisation du Saint Empire, après la réforme de 1803, aboutit sur de nombreux échecs. Les Habsbourg ne parviennent pas à faire la jonction avec les partisans libéraux de l’unité, eux-mêmes minoritaires dans leur camp. Ainsi, la proposition de faire officiellement du Saint Empire une monarchie héréditaire fait scandale et est rapidement abandonnée.

L’essentiel des libéraux allemands restent concentrés sur leurs propres Etats, avec jusque-là peu de succès. En Prusse, les révoltes d’ouvriers du textile sont récupérées, de façon plus ou moins bancale, par les partisans d’une Constitution. Mais l’Etat prussien, profondément conservateur, évolue en décalage complet avec le reste de l’Europe. Le servage n’est définitivement aboli qu’en 1822… Occupé à digérer sa partie de la Pologne, le pays renonce pour un temps à ses projets expansionnistes. Mais le royaume regarde de plus en plus vers le nord, et les territoires appartenant au Danemark et à la Suède.

Dans les territoires non-allemands des Habsbourg, le nationalisme développé depuis le XVIIIe siècle continue de se développer, mais les idées libérales y restent minoritaires. En Hongrie notamment, la noblesse obtient des concessions sur les question culturelles et l’autonomie interne, mais ne lance aucune réforme politique.

En Russie, malgré ses échecs militaires, Alexandre Ier parvient à imposer des réformes progressives qui lancent la dynamique d’abolition du servage. S’il n’est pas parvenu à s’emparer définitivement de la Bessarabie, il réussit en 1813 à arracher à Téhéran l’Arménie iranienne.
Malgré la réforme efficace de son armée, l’Empire ottoman s’avère incapable d’infliger une défaite décisive à l’insurrection grecque. Avec la sympathie de toute l’Europe, les Grecs obtiennent leur indépendance en 1831, tandis que la Serbie conquiert son autonomie.

Au chapitre 9, Une lettre oubliée : Si les Etats-Unis reconnaissent au Mexique le droit de mener une politique migratoire restrictive sur les territoires du nord, ... elui-ci ne peut empêcher l’implantation de nombreux colons anglo-saxons.

Aparté : la vie de Napoléon Bonaparte

Après son échec à soulever l’armée pour s’opposer au coup d’Etat de Sieyès, le vainqueur de Rivoli et grand rival de Hoche se réfugie en Allemagne avec son frère Lucien. Ayant sérieusement pensé au suicide, il décide de tenter sa chance à l’étranger. Peu désireux de se mettre au service de ses ennemis d’hier, il propose son aide au Sultan, à Constantinople. Accueilli à bras ouverts, il est chargé de réformer l’artillerie ottomane, et se convertit rapidement à l’islam pour éteindre les soupçons à son égard. Dans son sillage arrivent de nombreux officiers et soldats européens en quête de gloire et de fortune, alors que l’Europe revient au calme. Bonaparte est rapidement en charge de la supervision de ces nouveaux auxiliaires et organise la nouvelle armée ottomane au-delà de l’infanterie.

En 1804, il peut faire la démonstration de son efficacité en participant à une expédition contre les Mamelouks d’Egypte. L’artillerie mobile et une infanterie peu nombreuse mais disciplinée font de la campagne un succès et permettent aux Ottomans de reprendre le contrôle du Caire.
Alors qu’il espère obtenir le gouvernement de la province, il est rappelé en urgence à Constantinople après le déclenchement d’une nouvelle guerre contre la Russie. Les nouveaux succès de son artillerie achèvent de lui donner la confiance des élites ottomanes. Un mariage prestigieux lui donnera une descendance nombreuse, qui s’illustrera dans différentes parties du monde. En 1809, il remporte en Valachie la plus belle victoire de sa carrière en anéantissant l’armée russe et en capturant le général Koutouzov.

Au sommet de sa gloire, le général se montre néanmoins trop imprudent en voulant jouer un rôle actif dans la politique du pays, au-delà des simples aspects militaires. Ses nombreux ennemis obtiennent sa disgrâce trois ans plus tard, l’accusant d’être resté un révolutionnaire français dans l’âme et de vouloir renverser la dynastie au profit d’une République turque, ou d’être un espion au service de Paris.

Installé en Italie avec sa famille turque, l’ascension au pouvoir de son frère lui permet de rentrer en France dès 1813. Comblé d’honneurs, sa volonté d’exercer le pouvoir et d’orienter la politique de son frère entraine une brouille. En 1815, il s’embarque à Rochefort pour les Etats-Unis.

Mais ce révolutionnaire français devenu pacha turc ne soulève que la méfiance au sein des forces armées américaines. Pendant cinq ans, il cherche en vain à obtenir un commandement important, et finit assassiné dans des circonstances suspectes. Son épouse turque et ses enfants retournent à Constantinople, où Bonaparte est enterré avec les honneurs.

Collectionneur a écrit: Au chapitre 9, Une lettre oubliée : Si les Etats-Unis reconnaissent au Mexique le droit de mener une politique migratoire restrictive sur les territoires du nord, ... elui-ci ne peut empêcher l’implantation de nombreux colons anglo-saxons.

Rien ne t'échappe! C'est corrigé.

En faisant des recherches pour ce récit, j'ai d'ailleurs découvert par hasard le destin du général Humbert, l'un des participants à l'expédition de Hoche qui a par la suite, dans notre réalité, commandé la deuxième expédition de 1798 (bien moins ambitieuse).

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Joseph_Amable_Humbert

Général de la révolution, amant de Pauline Bonaparte, puis combattant au côté des pirates de la Nouvelle Orléans puis des indépendantistes mexicains...
Les personnages de mes uchronies ont parfois des destins un peu trop romanesques pour être réalistes...mais que dire de destins réels comme le sien!

Chapitre 11. „ Ich bin ein Preusser, und will ein Preusser sein“

Désireuse de reprendre sa politique expansionniste et de s’affirmer face à la volonté recentralisatrice de Vienne, la Prusse lance en 1838 la « guerre Baltique », ou « guerre du nord » face aux royaumes de Danemark-Norvège et de Suède. Prenant prétexte de querelles de succession sur les duchés de Schleswig et de Holstein, la monarchie Hohenzollern multiplie les provocations et finit par engager les hostilités.

La Poméranie suédoise est rapidement occupée, et les armées prussiennes s’emparent des forteresses qui barrent l’entrée de la péninsule de Jutland. Mais l’avancée s’avère plus difficile que prévu face à un ennemi bien armé. Finalement, l’arrivée des troupes suédoises permet à la coalition scandinave de vaincre les prussiens en bataille rangée et de les expulser de la péninsule. Une seconde offensive prussienne n’obtient pas un résultat aussi humiliant mais ne parvient pas à renverser la situation.

La mobilisation de la France et de la Grande-Bretagne, pour une fois sur la même ligne, dissuade les autres Etats allemands d’intervenir. Vienne, qui officiellement déplore l’échec prussien, se réjouit en silence de l’abaissement de sa principale rivale dans l’Empire. La médiation britannique aboutit sur un retour au statu quo territorial et une autorisation faite au Danemark d’aligner les règles de succession du Schleswig sur les siennes, et de renforcer la centralisation autour de Copenhague.

Mythe fondateur pour les pays scandinaves, la campagne de Jutland est une terrible humiliation pour la Prusse, et la prise de conscience du retard de ses forces armées et de son organisation sociale. En 1840, Frédéric-Guillaume IV, le roi romantique, monte sur le trône. Il lance des réformes efficaces, mais son caractère et son adhésion à l’idée d’unité allemande à travers le Saint Empire est source de frictions avec son entourage et l’opinion publique naissante. En 1841, il accepte un acte de réforme de l’Empire qui renforce la coopération entre les Etats dans la lutte contre le libéralisme et les mouvements révolutionnaires. Le roi pense avoir obtenu une victoire en introduisant dans la réforme une transformation du système électif pouvant en théorie permettre l’élection d’un monarque non-Habsbourg, mais de nombreux Prussiens y voient l’adhésion à un projet réactionnaire et la soumission à l’ordre viennois.

En novembre de la même année, une émeute lancée par des étudiants nationalistes menace la stabilité de la monarchie ; le mouvement n’est apaisé que lorsque qu’une insurrection à Varsovie détourne l’attention de la population et des intellectuels prussiens. La répression efficace du mouvement polonais restaure pour un temps l’autorité de Frédéric-Guillaume IV. Mais, dans le secret, les sociétés nationales-libérales développent leur influence en Prusse ; pour beaucoup, il serait légitime de laisser à la Pologne sa liberté pour retrouver les projets de Frédéric II et se lancer à la conquête du Hanovre et de la Saxe.

Une question pour laquelle j'aurais peut-être besoin de conseils : quelle incidence de tous ces événements sur l'Asie orientale?

DemetriosPoliorcète a écrit:Une question pour laquelle j'aurais peut-être besoin de conseils : quelle incidence de tous ces événements sur l'Asie orientale?

Le modèle prussien OTL à influencé en partie le système politique l'appareil militaire, notamment l'armée.
Le gouvernement du Japon de l'époque Meiji a décidé de modeler l'armée impériale japonaise sur l'armée prussienne, après la victoire allemande sur les Français lors de la guerre franco-prussienne. Jakob Meckel a été invité au Japon en tant que professeur à l'école d'état-major de l'armée et conseiller de l'état-major de l'armée impériale japonaise.
Il travaillait en étroite collaboration avec les futurs Premiers ministres, le général Katsura Tarō et le général Yamagata Aritomo, ainsi qu'avec le stratège de l'armée, le général Kawakami Soroku. Meckel a formulé de nombreuses recommandations qui ont été mises en œuvre, particulièrement la réorganisation de la structure de commandement de l'armée en divisions et régiments, augmentant ainsi la mobilité, le renforcement de la logistique de l'armée et de la structure de transport, les principales bases de l'armée étant reliées par des chemins de fer, l'établissement de l'artillerie et des régiments du génie en tant que commandements indépendants, et la révision du système de conscription universelle pour abolir pratiquement toutes les exceptions. Un buste de Meckel a été placé devant l'école d'état-major de l'armée japonaise de 1909 à 1945.
Bien que sa présence au Japon (1885-1888) ait été relativement brève, Meckel a eu un impact considérable sur le développement de l'armée japonaise. On lui attribue l'introduction des théories militaires de Clausewitz et du concept prussien de jeux de guerre (Kriegspiel) dans un processus de perfectionnement des tactiques. En formant une soixantaine d'officiers japonais parmi les plus hauts gradés de l'époque à la tactique, à la stratégie et à l'organisation, il a pu remplacer les influences précédentes des conseillers français par ses propres philosophies.

Tant t'as TL, je ne sais pas si l'influence française précédente la prussienne est arrivé jusqu'au Japon, auquel cas, elle ne serait pas remplacée par l'influence prussienne.
Je pense que le Royaume-Uni de ta TL ira soit se rapprocher très fortement du japon, soit ne s'y intéressera pas. Dans ce dernier cas, on peut avoir un partenariat long et fort entre la France et le Japon, et donc un Japon qui évitera de sombrer dans le militarisme totalitaire. Le pays pourrait par contre connaitre de forte instabilité dans 3 premières décennies du 20ème siècle.

Merci pour ta réponse!

D'ailleurs, une autre question se pose pour le Japon : la façade pacifique des Etats-Unis étant réduite, pas sûr qu'ils envoient Perry et sa flotte ouvrir le Japon.

En effet.

Je pensais aussi un autre truc qui important.
L'émergence du Marxisme ou d'un équivalent. L'émergence d'un mouvement prolétaire ou paysans dans les pays développés et libéraux est inévitable, mais dans TL, peu importe ou cela émergera, ça chamboulera pas mal de choses.

Thomas a écrit:En effet.

Je pensais aussi un autre truc qui important.
L'émergence du Marxisme ou d'un équivalent. L'émergence d'un mouvement prolétaire ou paysans dans les pays développés et libéraux est inévitable, mais dans TL, peu importe ou cela émergera, ça chamboulera pas mal de choses.

Oui! D'ailleurs, côté français, cela risque d'arriver plus vite, avec une industrialisation plus rapide.

Chapitre 11. L’Europe se crispe à nouveau

La guerre baltique ouvre un nouveau cycle de tensions entre les puissances européennes, et la fin de la période de l’ « Europe endormie ». Alors qu’en France les Jacobins dominent pour la première fois le corps législatif, l’opinion publique pousse à une politique de confrontation avec l’Europe monarchique. Cette politique trouve contre toute attente un certain soutien parmi les milieux diplomatiques, où l’antagonisme envers l’Angleterre tend à laisser la place à une peur de voir Vienne unifier l’Allemagne.

L’occasion d’une intervention est donnée par les conflits en Italie. En 1846, les autonomistes vénitiens, inquiets de la volonté de l’Empire de développer les ports concurrents sur l’Adriatique, lancent une insurrection rapidement stoppée par le pouvoir. Mais le soutien apporté par la République italienne conduit à une montée de tension puis à une invasion autrichienne. La France, après avoir tenté de jouer les arbitres, intervient aux côtés de la ligue italique. Le principal objectif se concrétise rapidement : la plupart des Etats allemands refuse de suivre l’Empereur, prétextant le fait que l’Autriche soit l’agresseur et qu’ils ne sont donc pas tenus de lui venir en aide. L’Empire réformé voit donc sa fragilité éclater au grand jour.
La guerre n’en est pas moins extrêmement violente, les techniques militaires s’avérant vite inadaptées à la nouvelle puissance de feu des armées. La prise de Venise puis de Trieste assure finalement la victoire des Franco-italiens, et l’indépendance de Venise, sous le nom de République de Saint-Marc, est reconnue. La crédibilité de Vienne en est largement entamée.

Plus à l’est, la guerre russo-ottomane est relancée par Alexandre II en 1852. Alors que l’on s’attend à un long conflit au résultat incertain, la Russie montre l’efficacité de ses réformes et inflige plusieurs défaites aux Turcs. La paix signée l’année suivante permet à Moscou d’annexer enfin la Bessarabie et d’obtenir la suzeraineté sur la principauté de Valachie. Vaincu, l’Empire ottoman accélère ses réformes internes et se rapproche de la France et de l’Angleterre.

Chapitre 12. Les Européens à la conquête du monde.

Le Directoire avait réglé dès 1800 sa dette à l’égard de la Régence d’Alger, l’une des premières puissances à reconnaître la République française. Au cours des décennies suivantes, le rapport s’inverse, et les Deys successifs empruntent de fortes sommes en France pour assurer la modernisation de leur pays et réagir à plusieurs crises frumentaires.

Au cours des années 1820, l’influence européenne croissante provoque plusieurs révoltes, dont celle du religieux soufi Abd el-Kader, qui s’empare de l’ouest du pays et marche sur Alger, qui n’est sauvée que par l’intervention directe de la France. Une armée directement formée équipée et commandée par des officiers français parvient à repousser l’émir, qui voit néanmoins l’indépendance de son Etat autour de l’oranais reconnue. Une tutelle française informelle mais de plus en plus concrète se fait sentir sur l’Algérie. Dans le même temps, les idées de la révolution se diffusent dans les classes éduquées des villes côtières. Il en va de même en Egypte où la double tutelle mamelouke et ottomane est de plus en plus mal vécue. Le nationalisme commence progressivement à se développer dans les pays arabes, au même rythme qu’en Europe.

Alors que la traite des esclaves a progressivement été abolie, le reste de l’Afrique reste en grande partie inexploré. La colonie batave du Cap consolide son emprise territoriale, sans chercher une expansion rapide vers le nord. Plus anciens, les établissements portugais continuent leur avancée vers l’intérieur des terres.

En Inde, l’Angleterre renforce sa position dans les confins himalayens, mais, à sa grande fureur, elle ne peut empêcher Mohammad Shâh Qadjar de s’emparer de Hérât en 1838, avec la bénédiction de la Russie et de la France. Les Qadjar compensent ainsi aux yeux des Iraniens les nombreuses pertes territoriales endurées face aux Russes. Le reste de l’Afghanistan reste divisé entre les émirats de Kaboul et de Kandahar. La Confédération marâthe, enclavée au milieu des possessions britanniques, entame un pénible processus de centralisation et de modernisation, ralenti par de multiples révoltes seigneuriales et révolutions de palais.

En Asie orientale, la Grande-Bretagne, qui a déjà écrasé la Chine dans la guerre de l’opium, déclare en 1862 la guerre au Japon en prenant prétexte d’un incident maritime. Le corps expéditionnaire britannique s’empare l’année suivante de la ville de Nagasaki et oblige le Japon à mettre fin à son isolement. Le pouvoir shogunale, constatant son incapacité à faire face aux puissances européennes, entame une série de réformes mais est contraint de faire appel, au cours des années suivantes, à la Grande Bretagne pour se maintenir face à plusieurs révoltes. Il faut attendre une dizaine d’année pour qu’un régime parlementaire inspiré des modèles français et britanniques se mette en place. Mais le protectorat informel de l’Angleterre alimente les tensions et la violence politique, qui marqueront longtemps le pays.

Face à l’expansionnisme anglais, la rivale française réagit en renforçant ses liens diplomatiques avec l’Iran et la Chine, et en prenant pied en Corée, au prétexte d’expéditions visant à protéger les missionnaires. En 1876, un traité secret apaise les tensions en fixant les zones d’influences respectives des deux pays en extrême-orient : Japon et sud de la Chine pour les Britanniques, Nord de la Chine et Corée pour la France. Furieuse, la Russie accélère sa pénétration en Mandchourie et renforce sa présence en Alaska, refusant de laisser passer sa part du gâteau.

Et concernant l'Asie du sud-est ? La même chose qu'OTL ? Indochine pour la France, Malaisie / Singapour pour la GB et Indonésie pour la Hollande ?

ezaski a écrit:Et concernant l'Asie du sud-est ? La même chose qu'OTL ? Indochine pour la France, Malaisie / Singapour pour la GB et Indonésie pour la Hollande ?

Pour le coup, je vais devoir faire plus de recherches. Les Pays Bas vont avoir plus de stabilité en Europe, ils ne vont probablement pas avoir de problème pour poursuivre la colonisation de l'Indonésie. Il faudra voir si les accords avec les Britanniques découperont le monde malais de la même façon.

Encore aucune idée pour l'Indochine.

Je partage l'opinion de Demetrios. L'Indochine a vu ses bases lancées par Napoléon III. Sans lui, pas obligé que la République se lance dans cette conquête.

LFC/Emile Ollivier a écrit:Je partage l'opinion de Demetrios. L'Indochine a vu ses bases lancées par Napoléon III. Sans lui, pas obligé que la République se lance dans cette conquête.

Franchement histoire passionnante, je pense qu'une France plus stable irait peut-être moins dans la colonisation directe car elle aurait moins besoin de prouver sa puissance que pendant la troisième république

LFC/Emile Ollivier a écrit:Je partage l'opinion de Demetrios. L'Indochine a vu ses bases lancées par Napoléon III. Sans lui, pas obligé que la République se lance dans cette conquête.

Peut-être une implantation dans le Delta du Mékong pour ses ressources rizicoles, sans chercher à contrôler toute la péninsule?

D'ailleurs pour la Corée, je pars d'expéditions qui ont réellement eu lieu sous le Second Empire, pour protéger des missionnaires, mais qui n'ont pas abouti sur une implantation.

Flosgon78 a écrit:

LFC/Emile Ollivier a écrit:Je partage l'opinion de Demetrios. L'Indochine a vu ses bases lancées par Napoléon III. Sans lui, pas obligé que la République se lance dans cette conquête.

Franchement histoire passionnante, je pense qu'une France plus stable irait peut-être moins dans la colonisation directe car elle aurait moins besoin de prouver sa puissance que pendant la troisième république

Merci!

Oui, d'autant plus que le système des Républiques soeurs a habitué la République à la domination indirecte en Europe.

Chapitre 13.Les idéologies à la conquête de l'Europe

La transformation accélérée de l’Europe, l’industrialisation et la naissance du prolétariat industriel tendent à complexifier la césure entre d’un côté les monarchistes conservateurs et, de l’autre, les libéraux, qui structurait jusque-là l’Europe d’après la Révolution française. L’apparition de l’anarchisme, du socialisme et de nouvelles formes de nationalisme transforme le paysage politique de nombreux pays.

En France, le socialisme anarchiste de Pierre-Joseph Proudhon a, pendant un temps, les faveurs des ouvriers qualifiés, des artisans et autres indépendants des grandes villes, mais il s’avère rapidement inadapté aux transformations de l’industrie. Deux tendances deviennent dominantes dans le socialisme français : un syndicalisme inspiré des unions britanniques et une tendance mutuelliste et coopérativiste qui s’implante en Belgique avant de se répandre dans l’ensemble du pays.

En politique, l’intégration progressive des Jacobins du Parti démocrate à la vie politique et leur acceptation du régime présidentiel provoque l’émergence d’un mouvement plus radical, bien qu’acceptant de se présenter aux élections, les jacobins-socialistes, qui s’opposent à la tendance des jacobins-démocrates. Un groupe d’intellectuels plus radicaux, la Ligue des Egaux, inspirés de Gracchus Baboeuf, reste actif à Paris et est bientôt dirigées par Karl Marx, un citoyen de la République rhénane, qui oriente ses travaux vers l’idée de lutte des classes.

Mais c’est surtout le nationalisme qui marque le débat d’idées en Europe. Des grandes œuvres littéraires viennent compléter les romans nationaux des années 1830 aux années 1840 : Le Grand roi, magnifiant la vie de Frédéric II, en Prusse, ou La Faide royale en France. Cette dernière œuvre, immensément populaire et déclinée en pièces de théâtre et en opéras, est à l’origine d’une mode pour les prénoms mérovingiens en France.

En Angleterre, après un relatif retour au calme de 1830 à 1845, les tensions sociales et politiques remontent en flèche avec une nouvelle poussée du radicalisme, bientôt doublée sur sa gauche par les mouvements socialistes et républicains. La classe dirigeante, qui craint toujours autant une révolution, accorde plusieurs avancées sociales, mais refuse obstinément d’avancer vers le suffrage universel. Le radicalisme se mêle souvent au nationalisme anglais, dans une puissance obsédée depuis 1797 par l’idée de son déclin. Le « mouvement saxon », mouvement à la fois politique et intellectuelle, cherche à retrouver l’idée d’un peuple d’égaux dans une nation qui ne veut rien devoir à la noblesse anglo-normande. Il se traduit par des tentatives d’épuration de la grammaire et du vocabulaire de l’Anglais de ses influences françaises et une série de productions culturelles.

Le proto-fascisme naitrait-il en Angleterre ?

ezaski a écrit:Le proto-fascisme naitrait-il en Angleterre ?

J'y pense pour la suite!

Mais la purification de la langue ressemble aussi à celle entreprise par les intellectuels allemands dans la première moitié du XXe siècle, qui voulaient expulser les termes français.
Evidemment, avec l'Anglais, ce ne serait pas une mince affaire...

DemetriosPoliorcète a écrit:

Flosgon78 a écrit:

LFC/Emile Ollivier a écrit:Je partage l'opinion de Demetrios. L'Indochine a vu ses bases lancées par Napoléon III. Sans lui, pas obligé que la République se lance dans cette conquête.

Franchement histoire passionnante, je pense qu'une France plus stable irait peut-être moins dans la colonisation directe car elle aurait moins besoin de prouver sa puissance que pendant la troisième république

Merci!

Oui, d'autant plus que le système des Républiques soeurs a habitué la République à la domination indirecte en Europe.

ça pourra avoir des conséquences intéressantes