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La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin

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Thomas
LFC/Emile Ollivier
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Message par LFC/Emile Ollivier Dim 8 Nov - 16:16

Bonjour à tous,

Voici le sujet où je posterai le récit officiel de LFC.

Pourquoi pas un livre ?

Et bien, je ne pense pas que ce récit soit assez bon pour être édité. Je ne suis pas à la hauteur de Thomas et Anaxagore.

Comme je n'ai pas écrit pour rien et que je souhaite bien évidemment vous le partager, je le poste ici.

J'espère que je ne vous déçoit pas en faisant cela.

Le PDF existe, je pourrai vous l'envoyer si vous le souhaitez. N'hésitez pas à me MP pour demander un envoi par mail.

Je vous souhaite une bonne lecture.

Chapitre 1 : La croisée des chemins


« Je sentis, au fond de mon âme, que le mystérieux incident de voiture qui frappa le maréchal Pétain émanait d’une Force désireuse de sauver la France. Je le considéra de suite comme une sorte d'appel du destin. D’ailleurs les évènements qui suivirent le prouvèrent. »
Charles de Gaulle, Mémoires de guerre – Le Sursaut : 1940-1941 (tome I)


10 juin 1940, dans la soirée. Une voiture quitte Paris en trombe en direction de la Touraine. À son bord, le vice-président du conseil de la République française, le maréchal Philippe Pétain. Alors que le gouvernement évacue Paris, celui-ci semble véritablement pressé de quitter la capitale.

Trop…

L’un des pneus cède, faisant quitter la route au véhicule.

Il n’y eut aucune survivant.

Pour remplacer le maréchal à la vice-présidence, Reynaud nomme en urgence, poussé en ce sens par le Général, un « jusqu’au boutiste », son ministre de l’intérieur, Georges Mandel.

Le camp de la continuation des combats sort ainsi grandement renforcé tandis que celui des « Flanchards », comme les surnommait de Gaulle, est quant à lui gravement affaibli par la mort du Maréchal, avec la perte de son héraut.

Malgré la catastrophe militaire, on rend les honneurs au Maréchal, qui restera à jamais le « vainqueur de Verdun ».

À l’issue de l’hommage, le général de Gaulle murmurera à l’oreille de Mandel, selon les mémoires de ce dernier : « Dieu merci, il ne pourra plus barrer la route au destin de la France... ».

C’est encore effarés par la soudaine disparition du Maréchal que les dirigeants français apprennent que leurs homologues britanniques, avec à leur tête Winston Churchill, veulent les rencontrer au GQG du commandant de l’armée française, le général Maxime Weygand, le château du Muguet à Briare[1], le jour même.

Sont présents Paul Reynaud, Georges Mandel, les généraux français Weygand, De Gaulle, Winston Churchill, Anthony Eden, les généraux britanniques Ismay et Spears.

Après un exposé dramatique de la situation sur le front par Weygand, Reynaud réclame à Churchill l'appui massif de la RAF, qui peut selon lui faire « pencher le plateau de la balance ». Mais Churchill refuse d'envoyer les restes de la chasse britannique en France, après les combats de Dunkerque il ne lui reste que 25 escadrons disponibles dont il estime avoir besoin à tout prix pour défendre son pays.

Churchill propose en revanche de se battre dans Paris mais Weygand refuse catégoriquement de transformer Paris « en un nouveau Madrid »

Churchill propose alors, pour pousser les États-Unis à intervenir, de conduire une guérilla quotidienne contre l’occupant allemand.

Reynaud, cependant, affiche ses réserves, craignant les représailles contre les civils et la destruction des villes françaises, ce qui choque de Gaulle et Mandel, non par volonté de sacrifier délibérément le peuple de France, mais bien car les 2 hommes commencent à percer la fêlure dans l’armure du président du conseil.

Churchill a les mêmes sentiments, et promet pour faire pencher la balance du bon coté, le soutien du Bomber Command britannique contre les colonnes de Panzers qui filent vers le sud via des raids nocturnes.[2]

Le premier ministre de sa Majesté fait cette promesse, car, en effet, il sent qu’une faille s’est ouverte pour la cause du maintien en guerre de la République française avec la mort de Pétain…

Plus tôt dans la journée, d’accord avec le général Georges, Maxime Weygand avait ordonné un repli général de l’armée française sur une ligne allant de Caen à Dôle et s’appuyant largement sur la Loire.  La tristement fameuse instruction personnelle et secrète « NI 1444/3 FT » qui ordonne d’appliquer ce retrait « le plus rapidement possible, sans préoccupation d'alignement et sans esprit de liaison. »...

Ce repli implique l’abandon de la Ligne Maginot, non préparée pour soutenir une « guerre de siège ».

La conférence se poursuite le lendemain, 12 juin 1940, au château de Cangé cette fois.

Darlan, cette fois-ci présent, s’engage envers Churchill à ce que jamais la flotte française ne tombe entre les mains des Allemands.

L’histoire prouvera qu’il est, à ce niveau, un homme de parole.

En revanche, Weygand continue ses exposés catastrophiques sur la situation militaire « et les divisions cuirassées allemandes qui enfoncent notre dispositif et font beaucoup de prisonniers. ».

Reynaud, de plus en plus las, travaillé au corps par sa maîtresse, épuisé par la tournure des évènements, promet néanmoins qu’aucune décision de poursuite ou d’arrêt des combats ne sera prise sans en informer les Anglais.

Churchill, un peu provoquant, mais pour la bonne cause, dira que si le Royaume-Uni vainqueur restaurera la France « in her dignity and greatness » (« dans sa dignité et sa grandeur »), ajoute dans la langue de Molière « vous les Français avez cette phrase. « Mieux vaut mourir debout, que vivre à genoux ! », et bien je vous le dis mes amis, que si la France se tient debout aux côtés de l’Angleterre, elle ne mourra pas !  En revanche, je ne peux vous offrir ce genre de garanties de la part de Herr Hitler...».

Inutile de dire que cette boutade ne fut guère du goût de Weygand.

En se retirant pour rentrer à Londres, Churchill murmura, en Français toujours, à l’oreille de de Gaulle « L’homme du destin... »

Du soir, les Britanniques partis, le généralissime français expose pour la première fois au conseil des ministres la nécessité d'un armistice. « Il faut éviter avant tout la décomposition de l'armée, dit-il, et pour cela adresser dès maintenant au gouvernement allemand une demande d'armistice. » Il ajoute : « La France peut aujourd'hui demander un armistice sans rougir. Je me félicite d'avoir livré sur la Somme une bataille qui a restitué à l'armée française son vrai visage. Devant le monde, elle a sauvé l'honneur, et traiter, désormais, ne sera plus indigne d'elle. ».

Reynaud s’y oppose, il faut soit constituer un réduit breton, soit continuer la lutte depuis l’Afrique du nord en concluant « Qu’Hitler, c’est Gengis Khan ! » et qu’il ne se contentera pas comme Guillaume Ier d’annexer une ou deux provinces…

Weygand éructe alors : « La guerre est perdue ! L’Angleterre n’attendra pas 8 jours après l’écrasement complet de notre pays pour demander de son côté les conditions de paix. 2000 soldats tombent chaque jour sous les balles ennemies. Les politiques ont commencé cette guerre, à eux de la terminer ! »

Reynaud, faisant preuve cependant de caractère, et en dépit de forts visibles signes de faiblesse[3] réplique à Weygand qu’il a été désigné président du conseil sur ce programme. « La victoire à tout prix ! ».

Malheureusement, Hitler a deux atouts. Ses panzers et… la propre compagne de Reynaud, Helène de Portes !

Ainsi, le Reynaud combatif du conseil, en dépit de son stress, se dissout dans la nuit, sa maîtresse l’ayant traité… « D’Isabeau de Bavière ! ».

Celle qui en signant avec Henry V, roi d’Angleterre, le traité de Troyes, faillit livrer la France à ce dernier...

Ainsi, lorsque de Gaulle et Mandel insiste auprès de Reynaud pour que ce dernier remplace Weygand, celui- s’y refuse.

La dernière phase de la conférence se tient à Tours, le 13 juin.

Le but de ce dernier jour de conférence est de déterminer le sort de la France pour l’avenir. Doit-on continuer de se battre en créant soit une forteresse en Bretagne, soit en se repliant en AFN, ou bien cesser immédiatement les hostilités ? Dans cette seconde option, comment réagirait l’Angleterre ?

À 15h30, Churchill et Reynaud s’entretiennent ensemble. Reynaud qui qu’opposé à la signature d’un armistice, demande tout de même ce qu’en pense le gouvernement anglais.

Churchill lui répond après un moment de silence, dans un élan lyrique :

« Bien que nous comprenions la situation où vous vous trouvez, le gouvernement que je représente ne peut que s’opposer avec force à cette décision, bien que dans tous les cas, la Grande-Bretagne restaurera la France dans toute sa puissance et sa grandeur qu'elle qu'ait été son attitude après sa défaite.

Dans le cas contraire, je puis vous affirmer ceci. La Grande-Bretagne soutiendra avec force votre pays, la France, si vous décidez de vous replier soit en Bretagne, soit en Afrique du nord, avec nos vaisseaux, nos soldats et du matériel. Sachez que la Grande-Bretagne fera bloc derrière vous si vous décidez de continuer la guerre ! »

Cette réponse conforte les partisans de la poursuite de la lutte des combats. Les « capitulards » viennent encore de perdre une bataille.

C’est dans ce contexte que le gouvernement entame un nouveau repli, cette fois sur Bordeaux.

Bordeaux, où règne une atmosphère de fin d’un monde, atmosphère qui impressionna jusqu’au président Lebrun, et où opposants et partisans de l’armistice s’affrontent désormais ouvertement lors des réunions du conseil des ministres.

La capitale de la défaite sera-t-elle le tombeau de la grandeur de la France ?

Après l’annonce par Weygand de l’effondrement du front, Chautemps, meneur du camp défaitiste propose au vote des ministres une motion appelant non à l’armistice mais ayant comme objectif de demander à l’Allemagne les conditions de celui-ci.

Mandel, furieux, s’en prend alors violemment à Camille Chautemps en le traitant ouvertement de lâche.

En réponse, ce dernier utilise l’argument premier des futurs laquais français d’Hitler. Mandel serait « indifférent à la souffrance des Français… ».

Le pire étant que Reynaud ne défend même pas Mandel.

De Gaulle, lui, est en Bretagne, où après avoir conféré avec les généraux Altmayer et Guitry pour, dit-il, « préparer la défense du terrain » à Rennes, se rend ensuite à Brest pour préparer les évacuations.

Il ne rentre à Bordeaux que du soir. C’est par la voix de Mandel qu’il apprend que c’est in-extremis que Reynaud a rejeté la proposition Chautemps mais qu’aussi, le chef du gouvernement semble en passe de rompre.

De Gaulle répond alors :

« Soit, nous n’avons qu’une nuit pour agir ! ».

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A10
Progression du front dans l’après-midi du 16 juin 1940 (Source  [WW2] The Battle of France and the Low Countries: Every Hour  https://www.youtube.com/watch?v=fa6FpphhBUo par Yan Xishan 閻錫山)

[1] Dans le département du Loiret
[2] Churchill a en revanche en plus d’avoir refusé l’envoi d’escadrilles de chasse de la RAF en France, seulement promis 2 divisions d’ici la fin juin et 20 supplémentaires si… la France tient jusqu’au printemps 1941 !
[3] Reynaud a ainsi les jambes flageolantes…


Dernière édition par LFC/Emile Ollivier le Mer 3 Fév - 17:45, édité 6 fois
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Message par LFC/Emile Ollivier Dim 8 Nov - 16:22

Chapitre 2 : Alea Jacta Est

« À l’issue de l’écriture de l’adresse aux Français annonçant le « sursaut », le président du conseil me dit, visiblement ému. « C'est parfait mon général, enregistrons l'appel du 16 juin puis diffusons le sur les ondes. Le Monde doit connaître notre résolution ! »
Charles de Gaulle, Mémoires de guerre – Le Sursaut : 1940-1941 (tome I)

Le lendemain 16 juin, les ministres continuent de s’entre-déchirer sur le destin de la France.

Armistice ou capitulation ?

Mandel, le Général mais aussi Louis Marin, Ministre d’État, défendent bec et ongles l’idée d’une continuation de la lutte.

Tandis que Chautemps, Weygand mais aussi Paul Baudouin et Bouthillier, qui trahissent donc Reynaud, portent eux, l’étendard blanc de la déroute.

Les autres, certes patriotes, n’en constituent pas moins une sorte de marais pouvant bousculer d’un côté ou l’autre, même si, les recherches historiques le prouveront, ils penchaient plutôt du côté de la lutte.

Reynaud, livide, effaré et écœuré par la trahison de ceux qu’il pensait être des proches et des soutiens, espérant faire taire les partisans de l’armistice, lit sur un ton qui ne cache pas sa nervosité, le refus catégorique de Churchill de délier la France de son serment de ne pas signer de paix séparée, en réponse à un câble envoyé dans ce sens à Londres la veille.

Chautemps, sort alors de ses gonds et dit avec fracas.

« Le gouvernement français n’a pas à demandé son accord au gouvernement anglais ! Nous ne sommes, et ne seront jamais, un Dominion ! »

« Là n’est pas la question… Il s’agit juste de concertation entre alliés. » répond froidement de Gaulle.

Yves Bouthillier, le félon, demande alors, sur un ton faussement conciliant, que comme le gouvernement n’arrive pas à trancher, il faut faire voter les chambres.

Il sait très bien le caractère peu combatif d’une majorité de députés.

Et en démocratie, le tombeau se joue à une voix...

Mandel eut alors ces mots historiques.

« Messieurs les ministres,

La situation dramatique que connaît notre malheureux pays a fait perdre leur sens du devoir à certains, dont le rôle eut été pourtant d’être des modèles à suivre.

De surcroît, face à l’adversité, une fraction des représentants de la nation se sont abaissés jusqu’à plus n’être que les simples représentants d’une fraction de leurs électeurs.

Pourtant, ici, il est encore des ministres qui ne sont point sourd au cri silencieux de la majorité des Français, qui est de continuer la guerre, pour, un jour prochain, les restaurer, eux et la patrie, dans leur honneur, leur dignité, et leur droit.

Quand aux députés, je puis désormais vous assurer de leur soutien plein et entier. »

Chautemps, Baudouin et Bouthillier n’eurent pas le temps de réagir que MM. Herriot, président de la chambre des députés, et Jeanneney, président du sénat, entrent dans la pièce et annoncent leur soutien, et donc celui du parlement, à une reconduction de Paul Reynaud à la tête d’une nouvelle équipe, à la condition qu’elle soit favorable à la poursuite de la guerre depuis l’Afrique du nord, où seraient transportées les institutions de la République.

Mandel ajoute alors. « M. Bouthillier, nous sommes effectivement en faveur du vote que vous proposez... »

Les « Flanchards » du gouvernement ayant été neutralisés, du fait de leur futur évincement du gouvernement, restait à ajourner le conseil, pour converser avec Reynaud quant à la future composition du nouveau cabinet de la République.

Celui du combat.

Mais les évènements se précipitent alors...

Weygand, apprenant que les événements n'allaient plus dans le sens de son camp, fait soudain irruption dans la pièce.

« Messieurs ! Comment pouvez-vous un instant imaginer pouvoir continuer la guerre dans ces conditions ? Nos armées sont disloquées, brisées, à genoux, et ce, en dépit d'un héroïsme sans borne, submergés qu'elles sont par la masse de milliers de panzers ! Nos lignes de défense sur la Somme et l’Aisne ont été écrasé. En cette heure, l’ennemi fonce vers la Loire et menace les arrières de nos troupes stationnées le long de la ligne Maginot ! J'ajoute que la valeur admirable dont font preuve nos soldats fait que vous les politiques, qui seuls ont décidés de cette guerre, doivent de ce pas trouver une solution pour mettre un terme à ce bain de sang ! MM. désirez-vous vraiment que le drapeau rouge flotte sur l’Élysée ? »

De Gaulle s'apprêtait à intervenir quand Mandel le devança.

« Imaginez-vous, généralissime, ce cabinet inconscient de notre situation ? Ne sachant pas l'héroïsme de nos troupes ? Ignorant de la situation militaire ? Méprisant de la souffrance des Français ?

Mais ce cabinet est également conscient de la barbarie de l'ennemi auquel nous faisons face ! Hitler est un nouvel Attila et la France ne pourra vivre que quand lui et ses hordes sanguinaires seront anéanties !

La… »

Weygand vitupère alors…

« Hitler est un Attila pour certaines catégories seulement... »

Mandel le regarde alors froidement puis se tourne vers Reynaud avec un regard explicite qui signifie : « Faîtes quelque chose M. le président du conseil ! »

Reynaud, rasséréné par la force de conviction de ses ministres, prononce alors cette phrase décisive.

« Vous êtes limogés de votre poste de commandant suprême des armées françaises, général. »

Weygand devient alors rouge de colère.

« De quel droit vous permettez-vous cela ? »

« De par le fait, ou plutôt le principe, que l'autorité militaire est toujours subordonnée au pouvoir politique... » répondit simplement Paul Reynaud.

Maxime Weygand avait compris. Le coup de génie de Mandel et de Gaulle avait changé la donne. Lui, le général Weygand, ne pourrait plus faire pression sur la présidence du conseil pour le conduire à prendre la décision, plus honorable selon lui, de conclure un armistice politique plutôt qu'une capitulation militaire de la Métropole.

L'ex-généralissime, sur un ton beaucoup plus posé mais toutefois animé d'un tic, signe de son extrême nervosité, demande alors la permission d'être affecté à la tête d'une unité combattante.

Reynaud, finalement satisfait de la soumission de Weygand, accepte.

Maxime Weygand, salue en silence le président du conseil et se retire.

Weygand, qui demanda à être rétrogradé colonel, se suicidera, après s'être vaillamment battu.

Le 23 juin au petit matin...

Voyant que leur dernier atout vient de s’effondrer avec l’éviction de Weygand, les partisans de l’armistice, menés par Chautemps, qui quoi que muets pour certains lors de cette réunion du 16, mais s’étant de toute façon révélés au grand jour la veille, quittent la pièce.

N’ayant commis, heureusement, aucun crime, Mandel, ministre de l’intérieur, ne peut totalement les neutraliser, mais une lourde surveillance s’exerce dès ce jour sur eux.[4]

Les tenants de la continuation de la lutte, se doutant bien de leur côté qu’ils sont prolongés dans leur mission, restent dans la pièce, qui est bien évidemment le cas.

Les Flanchards partis, Reynaud annonce, à la stupeur des ministres et des présidents des chambres, qu’il va démissionner en faveur de Georges Mandel.

Face à leur opposition, Reynaud insiste.

« Non non, messieurs les ministres, ma décision est irrévocable. Je ne suis plus l’homme de la situation. L’action de MM. De Gaulle et Mandel l’a prouvé. M. Mandel est le mieux placé pour conduire la France à la victoire finale. Quant à vous mon général, ma dernière décision en tant que président du conseil est de vous nommer général à titre définitif. »

Le président Lebrun approuve immédiatement cette double décision.

Il restait maintenant à annoncer au monde la nouvelle détermination française.

Les mots prononcés par Mandel sur les ondes, bien qu'universellement connus, méritent d'être retranscrit dans cet ouvrage.

« Mes chers compatriotes,

Le Président de la République m'a désigné pour prendre la tête du gouvernement en ces heures tragiques pour notre pays.

Oui, nous subissons une grande défaite. Un système militaire mauvais, les fautes commises dans la conduite des opérations, l'esprit d'abandon de certains, nous ont fait perdre la bataille de France.

En effet, bien que nous avons été et que nous sommes, submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne, de l'ennemi, le dernier mot n'a pas été dit. L'espérance ne doit pas disparaître et la défaite n'est pas définitive !

Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n'est perdu pour la France. Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire.

Car la France n'est pas seule ! Elle n'est pas seule ! Elle n'est pas seule ! Elle a un vaste Empire derrière elle. Elle peut faire bloc avec l'Empire britannique qui tient la mer et continue lui aussi la lutte. Elle peut, comme l'Angleterre, utiliser sans limites l'immense industrie des États-Unis.

Cette guerre n'est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre n'est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est une guerre mondiale. Toutes les fautes, tous les retards, toutes les souffrances, n'empêchent pas qu'il y a, dans l'univers, tous les moyens nécessaires pour écraser un jour nos ennemis. Foudroyés aujourd'hui par la force mécanique, nous pourrons vaincre dans l'avenir par une force mécanique supérieure. Le destin du monde est là.

L'honneur, le bon sens, l'intérêt de la Patrie, commandent à tous les Français de continuer le combat

Conscient de tout cela, le gouvernement de la République que je préside a pris la décision de partir pour l'Afrique du nord afin d'y continuer la lutte.

Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas.

Vive la République ! Vive la France ! »

Mais le Général ne s'était pas contenté d'aider Mandel à écrire l'appel à l'attention du peuple de France et de ses amis. De Gaulle aide de même le président du conseil fraîchement nommé à constituer une liste de noms pour son gouvernement. Reconduire l’autre vice-président du conseil du gouvernement précédent, Camille Chautemps étant bien évidemment exclu. Mais qui dès lors pour les remplacer à ce poste qu'en toute logique seules des personnalités politiques majeures pouvaient occuper ?

Aux postes de vice-présidents du conseil, de Gaulle et Mandel s’entendent pour nommer Joseph Paul-Boncour et Louis Marin, un ancien président du conseil de la République française de gauche et le meneur de la droite conservatrice française.

Le premier, anti-munichois de valeur, fut un chaud partisan d’un rapprochement franco-soviétique lors de la montée des périls.

Le second, ministre d’État jusque là, monte en grade. Il servira à rallier les plus conservateurs des Français. Marin est un véritable signe que l’anti-fascisme n’est pas que de gauche. Bien que chef de la droitière Fédération républicaine, cela ne l’a pas empêché d’être un tenant de la résistance à tout prix.

2 poids lourds de la vie politique française pour un gouvernement de combat donc.

Un homme de gauche et un homme de droite.

L’Union sacrée...

Aux affaires étrangères, alors que de Gaulle pressent le caractère mondial du conflit et la future guerre germano-soviétique, et dans la droite ligne de la nomination de Paul-Boncour à la vice-présidence du conseil, celui-ci obtient de Mandel la nomination de Léon Blum.

Le chef des socialistes français. Le nommer au gouvernement est donc dans la droite ligne de ce renouveau de l'Union sacrée de 1914. De plus, il permet de placer un individu apte à négocier avec Staline à la tête de la diplomatie de la République.

De Gaulle aurait aimé qu’il fut le vice-président du conseil représentant la gauche, mais Mandel refusa catégoriquement. Pour lui placer 2 juifs aux plus hautes sphères de l’État eut pu faire capoter son gouvernement en incitant les antisémites à l’action.

Hélas, sa « judéité » est à cette époque source d’un profond complexe chez le nouveau chef du gouvernement français.

En effet, au sortir de la réunion qui l’a vu propulsé à la présidence du conseil, Mandel connaît un instant de doute.

« Je suis Juif. » dit-il au Général. « Jamais ils ne m’accepteront... »

Ce à quoi répond de Gaulle.

« La seule dévotion qui compte en ces temps troublés, c’est la dévotion envers la partie, M. Le président du conseil... »

Mandel, rasséréné par ces mots justes, mais toujours conscient de la terrible menace intérieure constituée par l’extrême droite antisémite, conserve le portefeuille de l’Intérieur. Et c’est à d’ailleurs à ce titre qu’il publie un décret ordonnant aux autorités civiles de rester sur place, et de maintenir l’autorité républicaine jusqu’à l’arrivée des Allemands. Interdiction est donnée aux policiers et aux gendarmes de se replier. Mieux, ceux-ci doivent aider à contenir l’Exode, qui gène l’armée française et qui est désormais, bien inutile, le pays ayant comme vocation d’être destiné à l’occupation totale à court terme…

Mieux, bientôt, la police et la gendarmerie fourniront des renseignements sur les activités des Allemands dans le pays au gouvernement en exil !

Véritable cabinet de lutte, de Gaulle et Mandel s’attachent à se lier les combatifs de la première heure, quitte à leur donner des portefeuilles secondaires sur le papier.

Le président du conseil et le Général se mette d’emblée d’accord pour se rallier Henri de Kérillis, seul député de droite ayant voté contre les accords de Munich et qui dénonça vivement devant la capitulation qui livra la Tchécoslovaquie à Hitler.

« Messieurs, ceux d'entre nous qui eussent voulu qu'on trouvât beaucoup plus tôt la ligne de résistance aux prétentions allemandes, qu'on sauvât la Tchécoslovaquie et en même temps la paix, on les accuse d'avoir voulu la guerre. (...) Non messieurs, je ne voulais pas la guerre mais lorsque la guerre menace un pays, il ne faut pas donner l'impression de la craindre si on veut la faire reculer. (...) Cette paix consacre le triomphe d'Hitler, c'est-à-dire à la fois celui de l'Allemagne et celui du fascisme international. (...) Je sais bien qu'il y a parmi nous des hommes pénétrés de patriotisme (...) qui espèrent que la France pourra vivre en paix, fière, libre, à côté de cette nouvelle et gigantesque Allemagne. [...] Non ! N'espérez pas ! L'Allemagne est insatiable devant les faibles, l'Allemagne est impitoyable pour les faibles, l'Allemagne ne respecte que les forts et nous venons de lui montrer que nous ne l'étions pas ! (...) Vous croyez qu'elle va devenir douce et conciliante. Moi je crois qu'elle va devenir exigeante et terrible. Hitler nous a prévenus, dans Mein Kampf, que son but suprême était d'écraser la France ».

Triste présage de la part d’un Cassandre...

De Kérillis devient ministre des anciens combattant dans le ministère du sursaut.[5]

Enfin, pour montrer une rupture avec Reynaud tout en montrant le caractère jusqu’au boutiste de son cabinet, Mandel rappelle en tant que ministre d’État, celui qui déclara la guerre au Reich après son invasion de la Pologne et qui fut écarté par Reynaud, son ennemi, début juin.

Édouard Daladier

Mais la continuation de la lutte serait impossible sans l’aide de la flotte, dont l’Amiral de France, François Darlan, a fait sa « chose ».

Et, désormais, ses fusilliers-marins quadrillent Bordeaux depuis le milieu de la nuit.

Pour maintenir l’ordre mais, surtout, pour éviter un coup de force des défaitistes.

En effet, dans la nuit du 15 au 16 juin, de Gaulle et Mandel ont rencontré Darlan à l’Amirauté.

Celui-ci, qui affirme la fidélité de la flotte au gouvernement et la volonté farouche des marins français de continuer la guerre. Puis, il souligne la tenue admirable de la marine durant les opérations tout en sous-entendant que l’armée de terre a beau s’être mal comportée durant la Bataille de France, elle a son ministre en la personne de de Gaulle.

Il conclut en montrant l’importance de celle-ci pour la poursuite des combats depuis l'outre-mer.

Comprenant le message, Mandel et de Gaulle promettent à Darlan le poste de ministre de la marine, qui regroupera les marines marchande et militaire.

En échange, Darlan, fournit entre autres des fusilliers-marins donc pour quadriller Bordeaux, noyautée par les défaitistes, dont rien moins que son propre édile, Adrien Marquet, dont l’esprit est gangrené par les idéaux fascistoïdes…

Président du conseil : Georges Mandel

   • Vice-présidents du conseil
       ◦ Joseph Paul-Boncour
       ◦ Louis Marin

   • Ministres :
       ◦ Ministre de la Défense nationale et de la Guerre : Charles de Gaulle
       ◦ Ministre des Affaires étrangères : Léon Blum
       ◦ Ministre de l'Intérieur : Georges Mandel
       ◦ Ministre des Armements : Raoul Dautry
       ◦ Ministre des Finances : Paul Ramadier
       ◦ Ministre du Travail : Charles Pomaret
       ◦ Ministre de la Justice : Albert Sérol
       ◦ Ministre de la Marine: François Darlan
       ◦ Ministre de l'Air : Laurent Eynac  
       ◦ Ministre de l'Éducation nationale : Jean Zay
       ◦ Ministre des Anciens combattants et des pensions : Henri de Kérillis
       ◦ Ministre de l'Agriculture : Paul Thellier
       ◦ Ministre du Ravitaillement : Henri Queuille
       ◦ Ministre des Colonies : Marius Moutet
       ◦ Ministre des Travaux publics : Charles Vallin
       ◦ Ministre de la Famille française : Georges Pernot
       ◦ Ministre des Postes, Télégraphe, Téléphone et Transmissions : Alfred Jules-Julien
       ◦ Ministre de l'Information : Daniel Mayer
       ◦ Ministre du Commerce et de l'Industrie : Louis Rollin
       ◦ Ministre du Blocus : Georges Monnet
       ◦ Ministres d'État : Auguste Champetier de Ribes et Édouard Daladier

Quant à Paul Reynaud, admirateur des régimes anglo-saxons et parfaitement anglophone, il est nommé au poste non moins capital d’ambassadeur à Washington.

Il sera la voix de la France combattante auprès du président Roosevelt.

La France ayant un nouveau gouvernement à sa tête, reste à organiser le « sursaut », tandis que l’offensive allemande se poursuit implacablement…

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A10
Georges Mandel, nouveau président du conseil (Source Wikipédia)

[4] Mandel a un temps envisagé de les arrêter pour haute trahison tout de même.
[5] Notons qu’il sera l’auteur d’une analyse de qualité sur la défaite de 1940, Français, voici la vérité.


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Message par LFC/Emile Ollivier Dim 8 Nov - 17:01

Chapitre 3 : Tandis que la France brûle...

« Je constata alors avec dédain qu'en dépit des propos belliqueux qu'il tenait encore moins d'une heure auparavant, M. le Président de la Chambre des Députés n'en était resté pas moins qu'un simple politicien, fermement attaché à sa propre réélection. »
Charles de Gaulle, Mémoires de guerre – Le Sursaut : 1940-1941 (tome I)

Ainsi donc, le gouvernement de la République, désormais dirigé par Georges Mandel, avait pris la décision de continuer la lutte depuis l'Afrique du nord.

Mais encore fallait-il décider selon quelles modalités…

Se battre jusqu'à la Méditerranée comme le voulait le Général ? Idée sublime sur le papier mais qui aurait sans doute fait exploser le gouvernement.

Capituler de suite ? Une économie de souffrances pour le peuple de France dans l'immédiat mais qui prolongerait certainement les douleurs liées, elles, à l'occupation allemande. En effet, cela signifierait la perte de l'intégralité des ressources, encore abondantes, présentes en Métropole.

Hélas, la situation dramatique sur le front contraignit Mandel à suivre la majorité des ministres et à opter pour cette seconde option bien qu’il eut envisager de prolonger le combat en Métropole de quelques semaines, le temps d'évacuer un maximum de ressources vers l'Afrique et l'Angleterre puis de capituler seulement une fois qu'une ligne allant de Valence à Bordeaux serait franchie par les armées nazies.

Compte-tenu de l’échec de la retraite sur la Loire, déjà franchie à Orléans par les forces allemandes, un effondrement total n’était plus qu’une question de jours.

Il fallait donc parer au plus pressé...

Priorité fut rapidement accordée à l'unanimité des ministres à l'évacuation des réfugiés anti-nazis austro-allemands présents en France.

Concernant les moyens vitaux à la continuation de la lutte qui seront évacués, on décide d'accorder la priorité au transfèrement en AFN des ingénieurs spécialistes de l'armement et de leurs prototypes.

En effet, ce n’est pas avec les quelques jours qui restaient à la Métropole que l’on pourra évacuer beaucoup d’hommes.

Heureusement, l'Afrique ne manque pas de soldats potentiels. Et des soldats dévoués à la France de plus.

Le général Spears, représentant du gouvernement de sa Majesté auprès de celui de la République, annonce que la Royal Navy participera au maximum de ses capacités à cette opération dénommée « Anabase ».

Comme l’héroïque retraite grecque au travers un Empire perse hostile…

La difficile tâche de signer l’acte de reddition de la Métropole, tâche ardue au cœur d’un soldat, est confiée au successeur de Weygand à la tête des armées françaises, Charles Huntziger.

Huntziger, le vaincu de Sedan...

Mais comme le fait constater de Gaulle, celui-ci a connu son propre sursaut ensuite[6].

Léon Blum, vice-président du conseil, demande alors

« Soit. Mais qui va lui succéder ? »

De Gaulle répond alors.

« Ce qu'il faut à la France, c'est un officier de haut rang dont la réputation dans le domaine militaire est sans tâche et dont la détermination à poursuivre la lutte n'a jamais vacillé. Oui, celui dont je parle est le général Charles Noguès, commandant le théâtre nord africain, dont les câbles nous appelant à poursuivre la lutte, nous le gouvernement de la République, pourraient facilement recouvrir la table autour de laquelle nous débattons. Cet officier de très haute valeur prépare d'ailleurs déjà activement l'Afrique du nord à la continuation du combat.

Mais la France doit également promouvoir aux côtés de notre futur généralissime un autre officier. En effet, dans cette guerre, dans laquelle la vaillance de nos hommes a été vaincue par la supériorité mécanique de l'ennemi, l'homme qui doit prendre la tête de nos futures forces blindées doit être un soldat qui a montré son aptitude à la maîtrise de cette arme. Cet homme, c'est le général Charles Delestraint, qui a admirablement couvert avec ses chars la retraite de nos armées du front de la Somme à celui de la Loire ! 

Par ailleurs, nombre d'officiers, du lieutenant au général de division, ont prouvé leur aptitude en dépit des difficultés immenses imposées par l'ennemi. Malheureusement, l'Afrique, quoi qu'entièrement à nos côtés, si elle est apte à fournir des fantassins de valeur, ne pourra fournir à moyen terme les officiers de terrain accompagnant nos tirailleurs. Nous nous devons d'évacuer un maximum de ses hommes brillants en vue de les placer à la tête de nos unités.[7]

Enfin, il nous faut prendre la décision lourde de rappeler d'Indochine le général Catroux.

Oui, je vois sur vos visages que vous craignez pour notre souveraineté sur cette Union. Souveraineté gravement menacé par le Japon. Mais si Catroux serait parfaitement apte à faire face aux prétentions de Tokyo, l'urgence est de regrouper les officiers français valeureux. Mais la France ne manque pas d'officiers coloniaux pouvant tenir tête à Hiro Hito et à ses ambitions. La République dispose aussi d'un homme de valeur pouvant prendre la direction civile de la colonie pour en décharger l'officier désigné par M. le Président du conseil.

Les hommes que je vous propose de nommer à la direction de l'Union indochinoise sont Vincent Auriol, pour le volet civil, et Raoul Salan, pour le domaine militaire. Oui, vous ne connaissez pas encore ce dernier, mais il est un proche de M. le chef du gouvernement, un vétéran des colonies et il connaît bien l'Indochine et ses habitants.

Mais le plus important, c'est que son unité, le 44e régiment d’infanterie coloniale mixte sénégalais, se comporte admirablement sur le front de la Loire.

Voilà le militaire apte à remplacer Catroux à Saïgon ! » Conclue le Général.

Ce choix est immédiatement approuvé par les autres ministres. Tous ont vu les télégrammes du général Noguès. Voilà l'homme qui pourra non seulement préparer l'armée d'Afrique à l'immense tâche de défendre l'AFN face à un éventuel assaut du Reich mais aussi pourra conduire la réforme de l'armée française afin d'en faire un formidable outil pour la future reconquête. Les ministres ont aussi entendu parler de l'excellente tenue du général Delestraint, qui tranche avec les câbles pessimistes d'un officier comme Alphonse Georges. Soucieux d'éviter une éventuelle capture dans le chaos de la défaite, ordre lui est immédiatement donné de quitter son unité afin qu'il rallie au plus vite Bordeaux. Même chose pour Salan. Certes, l'immense majorité du gouvernement ne le connaît pas encore, mais tous font confiance à l'instinct de de Gaulle dans le choix des officiers à évacuer. Quant à Catroux, il obtient le commandement du théâtre nord-africain, en remplacement de Noguès.

Compte tenu de la rapidité de l’avance allemande, Bordeaux n’est d’or et déjà plus sûre. Décision est prise par le gouvernement d’évacuer le lendemain en compagnie des parlementaires sur le paquebot Massilia.

De Gaulle et le vice-président du conseil Marin se portent volontaires pour n’évacuer Bordeaux par hydravion qu’une fois la capitulation militaire actée. Le but étant de maintenir une présence gouvernementale en Métropole le plus longtemps possible.

Entre-temps, le gouvernement utilisera les moyens de communications bordelais pour transmettre ses décisions et des paroles d'espérances (Le général de Gaulle s'avérant être particulièrement doué dans ce domaine) au reste du pays.

Notons que, soucieux d’éviter qu’elle ne tombe entre les mains des Allemands, la dépouille du maréchal Pétain sera de même transportée par le paquebot vers l’Afrique du nord.

Au sortir de cette réunion du conseil, Édouard Herriot s'approche de Mandel et lui demande de déclarer Lyon « ville ouverte » comme le fut Paris.

En effet, Guderian s’approche rapidement de la capitale des Gaules. La discussion s'envenime et Herriot finit par menacer le président du conseil de lui retirer son soutien si Lyon est défendue !

Mandel, la rage au cœur, cède, mais impose quand même la destruction des ponts, afin de ne pas faciliter à l'extrême l'avance de la Wehrmacht. Herriot accepte, d'autant que le Général n'est pas loin.

Ainsi, on se battra, comme pour la Capitale, devant puis derrière la cité, mais non en son sein…

Huntziger est informé en catastrophe de cette disposition. Analysant la situation, il exclut désormais l'idée de faire de Lyon un point d'appui défensif et prépare déjà la retraite de ses forces au sud de la cité dès lors qu'il sera devenu impossible de tenir au nord de la ville.

Mandel, désireux de montrer qu'il n'a pas cédé à Herriot mais qu'il désire plutôt ménager les grandes villes françaises, déclare « Villes ouvertes », en plus de Lyon, Bordeaux, Toulouse et Marseille. De toute façon, toutes, en dehors de Lyon, sont situées très loin du front et seront de toute façon non encore occupée lorsque les combats prendront fin...

Herriot montre donc la part sombre de son combat politique, celui d’un vulgaire politicien déjà soucieux de sa future réélection après la victoire.

Cependant, maintenir le Front commun, l'Union sacrée de 1940, contraint malheureusement à certains marchandages…

À Londres, Churchill, terrifié à l'idée que la France ne conclue un armistice, reprend du poil de la bête. « Voilà des hommes bien dignes de Clemenceau » pense-t-il.

Sa position solidifiée par le « sursaut français », Churchill démet de ses fonctions de Secretary of State for Foreign Affairs, soit de ministre des affaires étrangères, l’appeaser[8] Lord Halifax, partisan d’un compromis avec le Reich au profit du combatif  Anthony Eden, jusque là ministre de la guerre[9].

Soucieux de soutenir à fond son allié français dans son projet de repli en Afrique du Nord, il est prêt à faire participer la Royal Navy au maximum de ses capacités à l'opération Anabase comme l'a déjà annoncé Spears.

Plus inavouable est l'idée que plus le combat se prolonge en France, plus le Royaume-uni aura du temps pour se préparer au futur assaut nazi sur la Grande-Bretagne avec, en plus, la France en exil à ses côtés…

Dès l’annonce du « rebond » français, c’est donc un Churchill considérablement renforcé par la décision française qui informe les nouveaux dirigeants de la République de son souhait de les rencontrer.

La nouvelle conférence interalliée se tiendra à Quimper le lendemain, 18 juin.

Autre personnalité qui avait des sueurs froides du fait de la situation militaire et politique françaises et qui, désormais, n'a plus qu'à penser à la manière dont il soutiendra la France en exil dans la poursuite de son combat contre Hitler, Franklin Delanoe Roosevelt, président démocrate des États-Unis d'Amérique.

Le président américain décide, secrètement, de tout faire pour que le maximum d'armes soit livré à l'Afrique du nord française, des transports étant déjà en route.

De même, c’est à une Angleterre désarmée depuis Dunkerque qu’il accepte de livrer immédiatement 200 000 fusils.

D’ailleurs, Roosevelt, soucieux de renforcer son cabinet, y intègre 2 Républicains d'envergure. Henry Stimson devient secrétaire d'État à la guerre tandis que Frank Knox devient secrétaire d'État à la Marine. Stimson, adversaire de l'isolationnisme, sera un champion du Lend-Lease, le Prêt-Bail aux nations en guerre contre les puissances fascistes.

Dans le même temps, la tragédie française pousse de plus en plus la population américaine, d'abord isolationniste, vers l'interventionnisme dans le conflit contre Hitler. Car si la France est tombée si rapidement, qu'est-ce qui prouve que l'Amérique n'est pas elle-même en danger ?

De plus, le panache dont on fait preuve les dirigeants français en décidant, au mépris de la situation militaire, de s’accrocher et de continuer le combat contre l’ennemi, a de quoi impressionner favorablement les Américains.

Darlan, désormais ministre de la Marine, s’attelle à une tâche immense.

En effet, les bases de Bizerte, Mers-El-Kébir ne sont pas vraiment en mesure d’accueillir sur le long terme les grosses unités de la Royale[10] tandis que l'industrie quasi-inexistante de l'Afrique française mettra du temps à fournir les munitions nécessaires à la Flotte pour lui permettre continuer le combat.

Certes, on peut compter sur l'appui américain pour pallier à cette défaillance (tout comme pour l'équipement de l'Armée de terre), mais l'industrie US mettra elle aussi un certain moment avant de pouvoir soutenir efficacement la Marine nationale. De plus, on ne pourra compter sur l'aide britannique, les types de munitions étant incompatibles.

Le ministre décide donc d'évacuer massivement vers l'AFN les stocks de munitions de la Royale entreposés à Toulon, quitte à surcharger les vaisseaux évacuant vers l'AFN.

Mandel, rapidement convaincu par les arguments de son ministre, lui donne carte blanche dans ses démarches.

Le 17 juin au soir, Mandel embarque à bord de l’aviso Chevreuil en direction de Quimper pour y rencontrer Churchill.

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A11
Mort pour la France (Source Le Printemps Tragique
Mai-Juin 1940 : Relecture de la «Grande Défaite»  https://leprintempstragique.wordpress.com/2017/09/19/recueil-de-citations-1939-1940/)

[6] On pense à la bataille de Stonne.
[7] De Gaulle pense, entre autres, aux généraux De Lattre de Tassigny et Fagalde.
[8] Équivalent britannique d’un Munichois.
[9] Eden deviendra rapidement le dauphin « officieux » de Churchill.
[10] Surnom de la marine nationale dont le ministère est situé Rue Royale à Paris !


Dernière édition par Emile Ollivier le Mer 18 Nov - 11:52, édité 4 fois
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Message par Thomas Dim 8 Nov - 18:05

Déçu ? Non. Il ne faut pas faire un livre pour faire un livre. Il faut y croire, savoir si on est prêt et si le texte l’est aussi.
Dans cette nouvelle mouture je constate une nette amélioration. Plus de ce contenu et de récit.
Certains éléments que tu mets en note, pourrait être tournée autrement et intégré dans le texte. Part du principe que les personnes qui te liraient ne sont pas forcément au fait de tous ces éléments pour lesquels tu te contentes d’une note.

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Message par DemetriosPoliorcète Dim 8 Nov - 18:10

Thomas a raison, faire un livre n'est pas une fin en soi, et quoi qu'il en soit je te remercie pour ce texte que tu veux bien nous partager.

Ne sois pas trop dur avec tes écrits: fit faber fabricando comme disent les Romains, plus on écrit, plus on s'améliore.
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Message par LFC/Emile Ollivier Dim 8 Nov - 19:45

Chapitre 4 : Fureur du Reich. Panache français.

« Hitler, à l'annonce du remplacement de Paul Reynaud par Georges Mandel, resta un temps sans réactions. Puis, sortant de sa torpeur, il vitupéra « Vous voyez messieurs, c'est bien là la preuve de ce que j'ai annoncé dans Mein Kampf. À savoir que la France est l'amie des nègres et sert les desseins juifs à la domination mondiale. Cette sous-nation a mis bas les masques. Soit, nous allons l'écraser définitivement ! » Au delà de l'idéologique, Hitler avait compris qu'il ne pourrait pas s'appuyer sur un gouvernement français à sa solde. Du moins un gouvernement légal. Là où il aurait pu avoir un Chautemps il n'eut qu'un Laval.»
John Keegan, La Seconde guerre mondiale

La nouvelle de l'arrivée au pouvoir de Georges Mandel, de confession juive, et de son appel à continuer le combat, se répandit comme une traînée de poudres au sein de l'armée allemande. Cela signifiait, pour ces soldats, certes victorieux, mais faisant toujours face sporadiquement à de durs combats, que la guerre n'était pas prête de s'arrêter et que, peut-être, il faudrait poursuivre l'armée française jusqu'à la frontière espagnole. Quant à la religion du nouveau chef du gouvernement français, elle fut le prétexte au déversement de leur propre frustration sous des motifs racistes et haineux.

La plus célèbre victime fut le Préfet d'Eure-et-Loire, Jean Moulin. Ce dernier, refusant de signer un document infâme, accusant fallacieusement les Tirailleurs sénégalais de crimes envers des civils, finit fusiller par les Allemands qui l'avaient accusé « d'être à la solde du Juif Mandel » ce à quoi il répondit fièrement « pas à la solde, au service ».

Les soldats allemands, déjà brutaux, se comportèrent désormais comme leurs pères en 1914. Destructions de villages, massacres de civils, devinrent le triste lot de la France envahie à tel point que l'OKW dû produire dans les jours suivants une directive appelant ses hommes à la retenue tandis que l'on préféra ne pas afficher les placards annonçant « Populations abandonnées, faîtes confiance à l'armée allemande » et montrant un soldat aryen souriant aux côtés d'enfants français…

« Détruisez Bordeaux ! » Ordonne Hitler à son laquais, Goering.

Entre temps, la colère d'Hitler ne l'empêche pas de rencontrer, comme prévu, Mussolini au col du Brenner, à la frontière austro-italienne. Après une violente diatribe antisémite, à laquelle l'Italien est de moins en moins insensible, le Führer intime au Duce d’accélérer les préparatifs de sa propre offensive générale alors que partout, l'armée italienne est repoussée par les courageux chasseurs alpins.

Mais les chasseurs alpins ne sont pas les seuls à porter haut la valeur militaire française. Envers et contre tout, les jeunes élèves cavaliers de l'école de Saumur ont décidé de tenir, comme il était prévu, la portion de 40 km sur le front de la Loire qui leur avait été dévolu, en dépit d'un ordre de repli sur Montauban en date du 15 juin.

Du moins ont-il désormais une raison autre que l'honneur pour laquelle se battre…

De Gaulle aimerait compter sur ces courageux garçons pour les placer à la tête des unités de la future armée française mais, effectivement, ces diables d'Allemands risquent fort de profiter de la brèche ainsi ouverte pour déferler vers le sud !

Le Général téléphone personnellement au colonel Michon pour lui ordonner à se tenir prêt à se replier avec ses élèves sur Montauban, comme prévu à l'origine.

Le front est déjà brisé et la capitulation imminente, tant pis alors qu’une nouvelle brèche de 40 km s’ouvre sur le front de la Loire...

Les généraux des divisions mécaniques allemandes ont d’or et déjà un boulevard devant eux. Ainsi, plus au nord, Rommel, le boucher d'Airaines, toujours à l'avant garde et méprisant du danger, conquiert la Normandie et se rue vers Cherbourg à la tête de sa 7ème Panzerdivision, tandis que sa division sœur, la 5ème, a pour but la Bretagne. À l’est de la France, Heinz Guderian, s'empare, dans la soirée de 17 juin, de Pontarlier, isolant définitivement le Groupe d'armée 2, qui défend l'est de la France.

Ce dernier commandant nazi est en effet bien aidé en cela par l’application stricte de l’instruction « NI 1444/3 FT » par celui qui lui aurait dû lui faire face.

Le commandant de la seconde armée, le général Henry Freydenberg, qui a abandonné ses troupes, lui et son État-major...

Son PC est ainsi à plus de 160 km du front lors du sursaut. Les nouveaux dirigeants français, désireux de faire un exemple, le destituent sur le champ, le cassent de son grade et le chassent de l’armée sans aucun droit à la pension.

« Il a de la chance, sous Clemenceau c’eut été minimum 12 balles dans la peau ! » Murmure-t-on.

Freydenberg a effet peut être eu la chance que le gouvernement n’avait pas vraiment les moyens d’organiser un procès…

Dans l’extrême opposée du domaine militaire, on trouve le général Jean Flavigny, à la tête du XXIème corps qui s’est illustré à Stonne et qui s’apprête à défendre la nasse des Vosges, isolée du reste de l’armée française.

Mais c’est un destin autre que la captivité qui l’attend.

Il est en effet placé sur la liste des officiers à évacuer vers l’AFN.

Ce n’est qu’au prix d’une sortie rocambolesque de la poche, effectuée par avion et de nuit, qu’il rejoint l’Afrique à bord du Farman F.222 Jules Verne, commandé par Henri Daillière.

Celui là même qui bombarda Berlin le 7 juin précédent en riposte à l’opération Paula, le bombardement la région parisienne par la Luftwaffe !

Le malheureux GA2, lui, cesse alors toute tentative d'échapper à la nasse et se place en hérisson pour résister aux assauts allemands, conformément aux ordres du GQG et d’Huntziger.

L'appel du 16 juin n'a pas remonté le moral qu'aux soldats, il a également touché les marins de l'île de Sein. Après concertation et sous l'impulsion du curé, du maire mais aussi, des femmes de l'île, 128 d'entre eux partent vers l'Angleterre, qui est à la portée de leurs bateaux, contrairement à l'Afrique.

La « Nuit des patriotes » n’est cependant, hélas, pas un échec et mat pour la Trahison. Se rendant compte que malgré l'ordre d'embarquer vers l'Afrique fait aux parlementaires, certains d'entre eux ne se sont pas présentés, la police reçoit l'ordre de se lancer à leur recherche mais le principal absent a disparu.

Pierre Laval…

Si les autres sont rapidement retrouvés et embarqués manu militari à bord du paquebot (avant d'être déchu de leur mandat sur décret), un mandat d'arrêt est lancé contre Laval qui parviendra, grâce au chaos et à des complicités, à traverser la frontière espagnole déguisée en bonne sœur (au prix de sa moustache et de sa dignité)…

En parallèle, l'« Anabase » ne concerne pas que les troupes alliées. En effet, Churchill a réitéré sa demande de transférer en Grande-Bretagne ou en AFN la centaine de pilotes allemands capturés par l'armée française. Conscient de l'importance de priver le Reich de pilotes expérimentés, ils seront évacués à fond de cale au-delà des mers et placés dans des camps, hors de portée d'Hitler.

D’ailleurs, réunis à Quimper, le Prime Minister et le président du conseil se mettent d’accord sur les modalités d’exécution de l’opération Anabase tandis que toute idée de constitution d’un réduit breton est définitivement abandonnée, le délai pour sa mise en place étant désormais bien trop court, suite à son sabotage par Weygand.

Mais l’Anabase n’est qu’un des sujets de discussion entre les deux chefs de gouvernements alliés.

Les deux hommes sont en effet inquiets par la perspective d’un second « coup de poignard dans le dos ».

L’entrée en guerre de l’Espagne franquiste ![11]

Entrée en guerre qui entraînerait une double menace.

Une menace sur le Maroc français, qui inquiète particulièrement le général Noguès.

Mais surtout, plus inquiétante, une menace directe sur Gibraltar, dont la perte permettrait à l’Axe de ferme aux Alliés le détroit de Gibraltar !

Mais le vieux lion anglais a plus d’un tour dans son sac.

Un plan vieux de 5 ans, un plan d’attaque sur Tarente, la grande base navale italienne !

Churchill veut rien moins que détruire la flotte italienne en s’en prenant à elle directement dans ses bases !

Mandel est séduit. Déjà, ce raid risque fort de décourager Franco à entrer en guerre. Mais aussi, il va non seulement porter un rude coup à l’Italie mais aussi de permettre aux Franco-britanniques de voir l’avenir plus sereinement, sachant que la flotte française devra se retirer quelques temps de la première ligne pour reconstituer ses stocks de munitions, presque entièrement abandonné dans les arsenaux bretons et toulonnais, en dépit des efforts exceptionnels fournis par l’Amiral de France Darlan pour en évacuer un maximum.

L'opération Catapulte/Catapult est prévu pour le début du mois de Juillet.

Le Britannique, tout en félicitant son homologue français pour sa détermination, prédit qu’une fois la France entièrement occupée, Hitler ne se lancera pas à l’assaut de l’Afrique du nord, la flotte italienne gisant alors au fond de ses ports, mais attaquera directement l’Angleterre.

Car en effet, « Hitler voudra faire d’une pierre, deux coups » comme le dit en Français Winston Churchill car pour lui, si l’Angleterre tombe, la France en exil ne pourra continuer la lutte ou sera du moins neutralisée.

Ainsi, il réclame rien moins que la majeure partie des excellents chasseurs français Dewoitine 520 pour contrer la très probable offensive aérienne nazie contre l’Angleterre. Pour contrer une éventuelle opposition du dirigeant français, Churchill lui explique que les chasseurs Maurane-Saulnier 406, ainsi que les chasseurs d’origine américaine Curtiss H-75 suffiront à défendre la Tunisie contre l’aviation italienne, la Regia Aeronautica.

D’autant que les appareils britanniques basés à Malte participeront aussi à cette bataille, comme l’explique le premier ministre.

Mandel hésite. Certes, les arguments du Britannique sont pertinents, mais il craint tout de même un assaut brusqué des Nazis alliés aux Italiens sur l’Afrique du nord française.

Cette guerre a en effet prouvée qu’Hitler n’était pas à une offensive des plus osées près.

De plus, Churchill a refusé d’envoyer sa RAF pour défendre la France mourante tandis que les forces au sol britanniques ont très souvent décrochés et abandonnés les unités françaises aux côtés desquelles elles combattaient.

Mais Mandel, comme il l’expliquera dans ses mémoires, accepta pour des motifs stratégiques d’abord, mais également d’honneur, en démontrant la grandeur de la France qui n’abandonne pas ses alliés.

N’a-t-il pas déjà ordonné de tout faire pour dégager et évacuer les forces polonaises combattant en France ?

De plus, concernant les gouvernements alliés à l’origine réfugiés en France, le gouvernement Mandel donne comme ordre d’organiser leur repli en Algérie. Ainsi, le gouvernement Sikorski (Pologne) et Pierlot (Belgique)[12] s’installent aux côtés de la France en exil. La France républicaine est tout aussi soucieuse d’offrir un refuge à ses amies que de se ménager une clientèle pour l’avenir… Subtil mélange de sincérité et d’intérêt, somme toute très Français…

À l’issu de la conférence, les deux dirigeants lancent un appel commun à la poursuite du combat fraternel.

Churchill tient à s’adresser aux Français dans leur langue :

« Français,c'est moi, Churchill, qui vous parle.

Pendant plus de 30 ans, dans la paix comme dans la guerre, j'ai marché avec vous et je marche encore avec vous aujourd'hui sur la vieille route.

Aujourd’hui, je m'adresse à vous dans tous vos foyers, partout où le sort vous a conduit.

Et je répète la prière qui entourait vos Louis d'or : « Dieu protège la France ».

Nous, les Anglais, nous n'oublions jamais quel lien et quelle attache nous unissent à la France.

Nous continuerons à lutter à côté de vous de pied ferme et d'un cœur solide pour que la liberté soit rétablie en Europe, pour que les braves gens de tous les pays soient traités décemment et pour amener ainsi le triomphe de la cause qui nous a fait ensemble tirer l'épée.

C’est ici, dans cette belle Bretagne, terre de courageux marins français, que j’ai rencontré vos chefs.

Nous sommes tombés d’accord pour continuer la guerre ensemble.

Herr Hitler, avec ses chars d'assaut et ses autres armes mécaniques et son petit complice Mussolini n’auront bientôt plus qu’à bien se tenir car tous leurs complots sont en train d'attirer sur leurs têtes et sur leurs Régimes un châtiment que beaucoup d'entre nous verront de leur vivant.

Il n'y aura pas si longtemps à attendre.

L'aventure suit son cours. Nous sommes sur sa piste ;et nos amis de l'autre côté de l'Atlantique y sont aussi ;et vos amis de l'autre côté de l'Atlantique y sont aussi.

Si lui ne peut pas nous détruire, nous, nous sommes sûrs de le détruire avec toute sa clique et tous leurs travaux.

Ayez donc espoir et confiance. Rira bien qui rira le dernier.

Allons, bonne nuit. Dormez bien, rassemblez vos forces pour l'aube, car l'aube viendra ;elle se lèvera brillante pour les braves, douce pour les fidèles qui auront souffert, glorieuse sur les tombeaux des héros.

Vive la France ! »

L’histoire révélera que Churchill fut aidé dans l’écriture de ce discours par Michel Saint-Denis, homme de théâtre français installé à Londres et fut volontairement conçu pour exprimer le franc-parler churchillien tout en n’étant pas dans un Français impeccable.

Saint-Denis sera à la tête de la section française de la BBC ou Radio-Londres, dont les émissions (notamment la célébrissime : Les Français parlent aux Français) seront destinées aux populations captives du nord de la France, hors de portée de Radio-Alger.

Le lendemain 19 juin 1940 à Saint-Nazaire, l'équipage du cuirassé Jean-Bart, dont le moral n'a jamais flanché, et qui atteint désormais des sommets depuis l'appel du 17, s'apprête à réaliser un exploit, bien digne du corsaire éponyme. En effet, il va fuir le port pour rallier Casablanca au Maroc afin non seulement de continuer la guerre, comme le veut Darlan, mais également… d'achever sa construction ! En effet, le navire n'est pas encore terminé…

À la Charité-sur-Loire les soldats nazis découvrent un train incendié. Il contenait les archives du GQG de l’armée française. Bloqué là suite à la destructions des voies par la Luftwaffe, les Français ont préféré y mettre le feu plutôt que de prendre le risque que ces informations capitales[13] ne tombent aux mains de l’ennemi.

À l'est, Guderian entame ses coups de boutoirs contre les troupes françaises situées au nord de Lyon mais celles-ci tiennent bon, à l'image des Tirailleurs sénégalais qui défendent Chasselay avec acharnement. Néanmoins, Huntziger, prévoyant, fait déjà placer les charges explosives sur les ponts de Lyon…

La barbarie allemande atteindra alors des sommets vis à vis de ses combattants courageux.

Les derniers défenseurs des ruines de Chasselay, bientôt encerclés et à court de munitions, finissent bientôt par se rendre aux forces allemandes, nettement supérieure en nombre. Cette résistance héroïque fit l'admiration du Monde tandis que celle-ci, tout comme celle de Lille, de Dunkerque et de la Somme, redonnera à l’armée de la République ses lettres de noblesse.

Roosevelt, qui suit avec passion le récit des combats en France, sait maintenant, après les épisodes des combats déjà héroïque sur la Somme, que l'on peut combattre Hitler et ses hordes sanguinaires.

Quant à Churchill, il multiplie les glorieux panégyriques sur « les dignes fils des vainqueurs de Verdun ».

Les Allemands ont perdus de nombreux vétérans de Pologne et des combats du nord et se vengent de ces pertes en massacrant les tirailleurs sénégalais ayant participé à la défense de la petite ville et parfois des soldats métropolitains ayant pris la défense de leurs camarades africains.

L'Afrique noire, déjà pleinement mobilisée contre le Nazisme, est horrifiée et soutient avec encore plus d'ardeur le gouvernement de combat de Georges Mandel et la France.

En dépit de l'interdiction faîtes par les Nazis d'enterrer les Tirailleurs sénégalais, de nombreux habitants de la ville passeront outre et leur fourniront une sépulture improvisée.[14]

De manière générale, la sauvagerie allemande ne connaît plus de bornes. En effet, les Nazis réduisirent ainsi en cendres le monument en hommage aux Tirailleurs sénégalais situé à Reims...

Exaspérés par la résistance française, et rendus furieux par le fait que c'est maintenant Mandel qui dirige la France, les tracts appelant à la reddition largués sur les lignes françaises prennent désormais une tournure nettement antisémite.

Ainsi, ceux-ci appellent désormais, entre autres, les soldats français à ne pas mourir « pour le cosmopolite Mandel et la Juiverie internationale » et déclarent que « l’Angleterre est prête à vous sacrifier jusqu’au dernier dans cette guerre étrangère aux véritables intérêts de votre pays »…

Néanmoins, la chute de Chasselay est révélatrice de l'effritement des lignes françaises au nord de Lyon. Huntziger ordonne alors le repli au sud de la ville pour y mener le dernier combat.

Le 19 juin, à son retour de la conférence de Quimper, Churchill s’adresse à la chambre des communes britannique en ces termes.

« La chambre ne peut que se réjouir de la décision de la grande nation et du peuple français auxquels nous sommes depuis si longtemps associés dans la guerre comme dans la paix et que nous considérons à l’égal de nous-mêmes comme les dépositaires d’une culture libérale et d’une civilisation tolérante en Europe. »

Tandis que Churchill rend hommage à la France, Rommel et sa 7ème Panzerdivision se rue vers Cherbourg.

La place de Cherbourg est commandée par l'amiral Jules Le Bigot, qui a reçu l’ordre de tenir jusqu'à la dernière cartouche ou bien, si cela était possible, jusqu'au départ du dernier soldat français.

La Marine nationale a fournie plusieurs vaisseaux[15] en vue de fournir un appui d'artillerie tandis que dans les airs, sur ordre express de Churchill, qui joint dont l’acte à la parole, la RAF veille. En parallèle, les transports qui ont évacués les soldats britanniques quelques temps auparavant sont de retour, cette fois pour évacuer les soldats français.

Au début, Rommel semble en passe de briser les espoirs du gouvernement français de rééditer l'exploit dunkerquois. En effet, des centaines de soldats sont capturés en rase campagne, sur les routes du Cotentin, tandis qu'ils se repliaient vers Cherbourg et la délivrance.

Mais les choses changent quand les Allemands atteignent les faubourgs de la cité. Comme à Varsovie, l'assaut brusqué des chars allemands fut stoppé, parfois avec de simples grenades, par les défenseurs, solidement retranchés, qui faisaient généralement partie du 208ème Régiment d'infanterie.

Bloqués aux portes de la ville par l'action des défenseurs, il subit également le bombardement de l'artillerie navale française, contre laquelle sa modeste artillerie ne peut rien.

C'est plein de rage qu'il assista au rembarquement des soldats français, en relatif bon ordre, rembarquement contre lequel il ne put rien, du fait de l'héroïsme des défenseurs du port, qui reculaient certes cette fois face à l'infanterie allemande, arrivée à marche forcée devant la ville, mais ne rompaient pas.

La Luftwaffe, qui se battaient très loin désormais de ses bases, n'y pouvait pas grand-chose non plus, du fait d'une RAF bien décidée à rééditer l'exploit de Dunkerque.

Churchill avait le bon choix. Non seulement il brisait encore une fois le mythe de l'invincibilité de la Luftwaffe mais renforçait également les liens avec la France.

En France libre, on suivait avec attention, heure par heure, le rembarquement, grâce aux rapports transmis par l'amiral Le Bigot et y trouvait là une raison d'espérer. On pouvait lutter contre les chars allemands et même leur infliger un camouflet !

Quant à Mandel et de Gaulle, en parfaite intelligence avec Huntziger (et Noguès), ils font le compte des soldats sauvés, qui seront autant d'hommes aptes à porter les armes pour la France dans les futurs combats.

Par exemple à la future offensive contre la Libye italienne, réclamée par Noguès, et dont le principe ne fait pas que plaire aux membres du gouvernement. En effet, cette attaque est vitale pour empêcher Hitler d'avoir une tête de pont toute prête pour envahir l'Afrique du nord ![16]

Au final, la résistance acharnée des défenseurs français permet l’évacuation de la majeure partie des 30 000 hommes réfugiés dans la ville le 20 juin au soir. Au nez et à la barbe d'un Rommel ulcéré.

Cependant la chute de la ville permet de « libérer » la redoutable 7ème Panzerdivision. Sur ordre de son commandant, elle se rue immédiatement vers le sud. Vers la Loire…

Manfred Rommel, son fils, dans son Rommel, mon père, aura ses mots.

« Tout à la joie de revoir mon père, pour une courte permission certes, après cette campagne victorieuse à l'ouest, je ne cessais de lui poser des questions sur Arras, Saint Valery en Caux, Dunkerque, Lille et la Somme, auxquelles il répondait avec emphase, vantant ses exploits au front. Mais le ton changea lorsque je lui demande de me raconter la bataille de Cherbourg. Il me répondit sur un ton froid, que je ne lui connaissais pas, du moins en famille, que « malheureusement, les Alliés avaient tenus assez longtemps pour pouvoir s'échapper ». Dès lors, je sus que cet échec tourmentait mon père. En effet, c'était le premier qu'il rencontrait dans sa carrière... »

En Bretagne, le retrait des troupes britanniques mais également polonaises vers l’Angleterre continue tandis que commence également l’évacuation des unités navales vers l’Angleterre ou l’Empire. L’or de la banque de France est également évacué vers Casablanca par le porte-avions Béarn et 5 paquebots, Ville d'Oran, El Mansour, El Kantara, El Djezaïr et Ville d'Alger pour qu'il ne tombe pas aux mains de l'envahisseur. De même, le stock d’eau lourde français est évacué vers l’AFN par le contre-torpilleur Milan[17].

Au milieu du chaos, un soldat se démarque encore plus particulièrement que les autres. Il s'agit de Vincent Doblin. Il sait ce qui l'attend si les Nazis ou plutôt quand les Nazis le captureront. En effet, il est non seulement Juif, mais également Allemand anti-nazi ! Pris dans la nasse, il n'a plus d'espoir de pouvoir échapper aux griffes des armées d'Hitler. Alors quitte à mourir, autant emporter avec soi un maximum de ses anciens compatriotes désormais ennemis acharnés. Né allemand, Doblin meurt le 23 juin en Français.[18]

Un autre Allemand anti-nazi, le général Carl-Heinrich von Stülpnagel, aura ses mots dans son ouvrage d’après-guerre, Des officiers contre Hitler : Une histoire de la résistance allemande au Nazisme (1933-1945)  :

« La chute de la France fut pour nous, une véritable tragédie.

Mais nous vîmes dans le courage affiché par les dirigeants français qui rejetèrent la défaite, un motif d'espoir et une source d’inspiration pour nous-mêmes, vieux officiers prussiens bloqués par notre serment de fidélité envers la personne d’Adolf Hitler.

Un jour, surgirait d'Afrique les armées qui permettraient d'écraser le Führer !

En parallèle, nous priment conscience que cela ne se ferait qu’au prix de la destruction de l'Allemagne si nous ne prenions pas clairement position à temps contre les Nazis. ».

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A12
Vincent Doblin (1915-1940) Mort pour la France (Source Wikipédia)

[11] Franco a déjà occupé Tanger, ville internationale, le 14 juin et mis fin à son statut d’État neutre au profit de celui de « non belligérant »...
[12] À l’exception notable du roi Léopold III, prisonnier des Allemands.
[13] Liste d’agents à l’étranger, convention militaire avec la Suisse neutre en cas d’invasion du pays par le IIIème Reich notamment.
[14] Après guerre, grâce au recensement clandestin effectué dès 1940 suite à l'action de Jean Marchiani, Secrétaire général de l'Office provincial des mutilés de guerre, anciens combattants et victimes de guerre, les corps de 196 Tirailleurs seront retrouvés. Les dépouilles seront ensuite enterrées dans une nécropole créée en l'honneur et située à proximité immédiate du lieu de leur sacrifice, le Tata, «enceinte de terre sacrée» en Wolof, lieu où sont enterrés les guerriers morts au combat.
[15] Notamment le cuirassé Courbet
[16] Notons que la Libye italienne vient de perdre son gouverneur, Italo Balbo, abattu par sa propre DCA ! Le même Balbo avait émis justement des doutes quant à l'entrée en guerre de son pays...
[17] Ainsi que la famille du général Charles de Gaulle !
[18] Son régiment s'apprêtant à se rendre aux ennemis suite à l’annonce de la capitulation militaire, Doblin quitte ses camarades. Il se suicide avec sa dernière balle dans une grange du village d'Housseras. Inhumé en tant que soldat anonyme, son corps ne sera identifié qu'en 1944. Doblin, au-delà de son héroïsme en tant que soldat, fut aussi un brillant mathématicien qui résolu l'équation de Chapman-Kolmogorov comme cela fut découvert par son biographe en… 1958 ! En effet, ce ne fut qu'à cette date que l'on découvrit le pli contenant la solution dans les archives de l'Académie des sciences auprès de laquelle il l'avait expédié en février 1940.


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Message par LFC/Emile Ollivier Dim 8 Nov - 21:52

Chapitre 5: Fin de partie en Métropole

« La nouvelle de la nomination de Mandel, qui était Juif, crime impardonnable aux yeux de mes convictions d'alors, me consterna. « Mais non ! C'est un Juif, il n'est pas capable de se battre, de faire la guerre mais nous, nous sommes Français, on va lui montrer ce dont on était capable ! » m'exclamais-je alors, choquant ma mère.
Bien évidemment, la teneur de l'appel du 16 juin qui suivit de près cette annonce de Radio-Bordeaux, marqua la fin de mon antisémitisme de jeunesse. « Voilà l'homme qui mènera la France à la victoire ! » Me dis-je. Je pris alors la ferme décision de rejoindre l'Afrique du nord et d'emmener avec moi le maximum de mes compagnons. »
Daniel Cordier, Alias Caracalla : mémoires, 1940-1943

20 Juin 1940 : Bordeaux est en feu. Goering vient de lancer un raid de 200 bombardiers sur la capitale temporaire de la République française. En dépit des efforts déployés par l’armée de l’air, seul 17 assaillants ont été abattus.

Des centaines de civils ont péri, les pertes étant aggravées par le fait que la cité est encombrée de réfugiés tandis que le chaos s’installe dans la « capitale de la défaite ».

Heureusement, la Massilia est intact. Le gouvernement et le parlement sont prêt à s’exiler pour y continuer la lutte contre les « barbares et les laquais » qui contrairement à 1916, sont passés. [19]

Tandis qu’il s’apprête à quitter l’hôtel de ville, Mandel reçoit la visite surprise du consul du Portugal à Bordeaux, Aristides de Sousa Mendes.

Ce dernier lui explique qu'après plusieurs nuits de réflexions ponctuées de prières, il a décidé d'apporter son soutien aux réfugiés fuyant le Nazisme en leur accordant des visas pour le Portugal. Ce qui soulagera en partie les Franco-Britanniques, qui pourront donc prioriser l'évacuation de leurs soldats dans le cadre d'Anabase. Mandel, surpris, ne peut que remercier le consul qui s'empresse de retourner à son consulat pour pouvoir continuer à accorder le maximum de visas aux réfugiés.

Tandis que la France semble se relever, un accident puéril, caché à l’époque, se déroule à Châteauroux. Louis Deschizeaux, député-Maire de la ville tente en effet de faire désarmer les soldats d'Huntziger mettant la ville en défense. Les officiers rejettent avec hauteur et condescendance la supplique de l'édile et en informe immédiatement Mandel via le GQG. Celui-ci démet de ce pas le député-maire Deschizeaux de tous ses mandats par décret. D'ailleurs, alors que la majorité des parlementaires sont sur le Massilia, que faisait-il encore dans sa circonscription ?

Sur le front de l'Atlantique, le croiseur de bataille allemand Gneisenau est touché par une torpille du sous-marin britannique Clyde au large de Trondheim.

Concernant la puissance américaine, les dirigeants français, conscients qu'ils seront bientôt totalement privés du potentiel industriel de la Métropole, chargent Paul Reynaud de négocier avec Roosevelt l'achat d'armements américains afin d'équiper les armées qui seront bientôt formées en masse en Afrique. Plus discrètement, il devra aussi racheter discrètement des usines afin de fournir à la République des équipements non létaux mais tout aussi nécessaires à la future victoire.

Reynaud sera aidé dans sa mission par le fait que la France a, comme le dit le Général, « beaucoup d'or ».

D'ailleurs, le Général, qui allie l'art du verbe à la clairvoyance, prononce, en ce 21 juin, un nouvel appel à la résistance.

« Le gouvernement français, a pris la décision, une fois la Métropole totalement occupée, de continuer la lutte depuis l'Empire, afin de ne pas tomber sous la dépendance de l’Allemagne et de l’Italie.

En effet, négocier avec l'ennemi ne serait pas une simple capitulation, mais bel et bien un asservissement complet de notre pays.

Conscients de cela, les Français n’acceptent pas la capitulation ni la servitude, pour des raisons qui s’appellent l’honneur, le bon sens, l’intérêt supérieur de la Patrie.

Je dis l’honneur ! Car la France s’est engagée à ne déposer les armes que d’accord avec ses alliés. Tant que ses alliés continuent la guerre, son gouvernement n’a pas le droit de se rendre à l’ennemi. Le Gouvernement polonais, le Gouvernement norvégien, le Gouvernement hollandais, le Gouvernement belge, le Gouvernement luxembourgeois, quoique chassés de leur territoire, ont également compris ainsi leur devoir.

Je dis le bon sens ! Car il est absurde de considérer la lutte comme perdue. Oui, nous subissons une grande défaite. Un système militaire mauvais, les fautes commises dans la conduite des opérations, l’esprit d’abandon de certains membres du précédent Gouvernement pendant ces derniers combats, nous ont fait perdre la bataille de France. Mais il nous reste un vaste Empire, une flotte intacte, beaucoup d’or. Il nous reste des alliés, dont les ressources sont immenses et qui dominent les mers. Il nous reste les gigantesques possibilités de l’industrie américaine. Les mêmes conditions de la guerre qui nous ont fait battre par 5 000 avions et 6 000 chars peuvent nous donner, demain, la victoire par 20 000 chars et 20 000 avions.

Je dis l’intérêt supérieur de la Patrie ! Car cette guerre n’est pas une guerre franco-allemande qu’une bataille puisse décider. Cette guerre est une guerre mondiale. Nul ne peut prévoir si les peuples qui sont neutres aujourd’hui le resteront demain, même les alliés de l’Allemagne resteront-ils toujours ses alliés ? Lorsque les forces de la liberté triompheront finalement de celles de la servitude, quel aurait été le destin d'une France qui se serait soumise à l’ennemi ?

L’honneur, le bon sens, l’intérêt supérieur de la Patrie, commandent à tous les Français de continuer le combat, là où ils seront et comme ils pourront.

Vive la France dans l’honneur et dans l’indépendance ! »

La Capitale des Gaules est occupée dans la soirée du 21. Heureusement, le général Orly a pu retirer certaines unités de l'armée des Alpes du front italien et les expédier en renfort au nord, contre les Allemands.

Elles affronteront une armée allemande à ce point arrogante qu’elle se rue sur Grenoble pour y doubler son alliée italienne !

Les colonnes nazies seront stoppés à Voreppe. C’est bel et bien l’Italie qui occupera Grenoble.

Au grand bonheur de la future résistance...

L'occupation de Lyon et le prochain isolement de la Confédération inquiète les autorités helvétiques quant à l'avenir de leur pays. Hans Hausamann, capitaine des services de renseignement suisses, transmet ses prévisions à son gouvernement dans l'optique de le rassurer et de lui donner foi en l'avenir.

« La France et la Grande Bretagne ne céderont pas, quoi qu’il arrive. Même si les Allemands s’empareraient de l’Afrique du nord et de la Grande Bretagne, les flottes et les Empires français et britanniques poursuivraient le combat.

L’Allemagne va attaquer l’URSS et les États-Unis vont entrer en guerre aux côtés des Franco-Britanniques.

Français, Britanniques et Américains vont soutenir les Soviétiques dans leur résistance à Hitler.

La guerre sera longue. Elle s’achèvera par la défaite totale de l’Allemagne, pays restreint, à l’industrie limitée, et qui manque d’intelligence. La meilleure preuve en est que l’Allemagne accepte l’entrée en guerre de l’Italie, qui conduira l’Axe au désastre. »

Pro-alliés, le capitaine Hausamann transmettra ensuite des renseignements aux services secrets occidentaux puis soviétiques, tout au long de la guerre grâce à un réseau d'espionnage, crée par lui, et dont les branches allaient jusqu'aux plus hauts sommets du haut commandement allemand.

22 juin 1940 : Le jour fatidique était arrivé.

Contact avait été pris avec l’ennemi par l’entremise de l’Espagne (pour l’Allemagne) et du Vatican (pour l’Italie) pour organiser la signature de l’acte de capitulation marquant l’arrêt des combats en Métropole.

Cependant, un ordre stipulant qu’elles devaient prioriser la clandestinité à la reddition avait été discrètement être donné aux troupes. En parallèle, des dépôts d’armes secrets avaient été constitués en urgence dans la France encore libre afin, le jour venu, d’équiper les « soldats de l’intérieur ». Ces dépôts cachés avait été constitué des équipements que l’on ne pouvait évacuer dans le cadre de l’Anabase.

Huntziger, après avoir fait ses adieux à ses officiers, se rend à Tours pour y rencontrer les Allemands.

Ceux-ci l’emmènent dans un lieu qu’ils tiennent secret au Français jusqu’à son arrivée.

C’est avec stupeur que, peu avant son arrivée, le commandant en chef français comprend où l’emmènent les Allemands.

Rethondes, là même où succomba le criminel orgueil de l'Empire allemand...[20]

Les Nazis ajoutaient la symbolique à l’humiliation !

Arrivé à Rethondes, l’officier français dû y subir la lecture par Keitel d’une longue plaidoirie qui accusait la France d’être responsable de la guerre.

Une fois cette bouillie indigeste difficilement avalée par le Français, les Allemands dictèrent leurs conditions.

À leur image. Infâmes...

En effet, les envahisseurs demandèrent la livraison par la France à l’Allemagne des réfugiés allemands et autrichiens juifs et antinazis.

Ecoeuré, Huntziger, ainsi que sa délégation, se levèrent pour quitter le wagon et rejoindre la tente aménagée pour eux par les Allemands.

Quelques heures plus tard, les « négociations » reprirent leur cours. Les Allemands campèrent sur leur position mais Huntziger et sa délégation tinrent bon même quand ceux-ci menacèrent de brutaliser le conflit face à ce qui restait de l’armée française.

Finalement, les Allemands, qui avaient reçu pour consigne de signer assez vite, entrèrent en contact avec Hitler qui accepta de retirer cette exigence comme préalable à la signature.

En effet, il était d’abord désireux d’économiser son armée pour d’autres campagnes...

Quant à l’administration et au pillage de la France, il pourrait bien trouver une clique des collaborateurs français dans le style du Norvégien Quisling[21] pour obtenir tout ce qu’il voulait de la Métropole française, notamment les réfugiés allemands qui n’auront pu embarquer pour l’Afrique du nord ou passer à l’étranger.

C’est par la bouche d’Huntziger, qui allait bientôt partir pour un Oflag, que le gouvernement français appris la conclusion de la capitulation et de l’arrêt des combats en Métropole pour le 23 juin minuit. Dans les faits, l’immense majorité des combats cesseront à l’annonce de la signature de la capitulation le 22 juin au soir. A noter que l’Italie a été représentée par le Maréchal Badoglio. Les combats cesseront donc aussi officiellement entre l’Armée des Alpes et l’armée italienne ce même 23 juin à minuit.

À Londres, Churchill fait un discours mémorable aux Communes le 23 juin dans lesquels il annonce à ses concitoyens que « Certes, la bataille de France est terminée mais, la bataille d’Angleterre est sur le point de commencer. »[22] Discours guerrier, Churchill fait part de sa confiance en la victoire finale sur le Nazisme, sûr qu’il est de l’appui français face aux Totalitarismes, réitère ses appels à l’intervention américaine et aux Dominions de l’Empire britannique et conclue « Let us therefore brace ourselves to our duties, and so bear ourselves, that if the British Empire and its Commonwealth last for a thousand years, men will still say, "This was their finest hour. ». Soit « Faisons donc notre devoir, et nous nous en tenons bien, que si l’Empire britannique et son Commonwealth duraient mille ans, les hommes diraient encore: «C’était leur plus belle heure». »

L’heure est au bilan. 60 000 soldats français perdirent la vie durant la bataille de France contre 35 000 allemands en 1 mois et demi de combats. Ce qui dépasse les pires mois du précédent conflit pour les deux camps, en terme de pertes quotidiennes.

Concernant la ligne Maginot, la majeure partie de ses ouvrages tient toujours le 22 juin ! C’est donc avec un soulagement certain que les assiégeants allemands apprennent la fin de ce dur combat. Comme à Lille, ils accepteront de rendre les honneurs militaires aux garnisons qui ont enfin baissés les armes.

Hitler, lui, est moins compatissant. Il ordonne immédiatement de faire sauter les ouvrages de la ligne ! Une « séparation désormais inutile entre l’Alsace-Lorraine et le reste du Reich ! » selon ses propres termes.

Une nouvelle annexion est en route pour les malheureux Français alsaciens et mosellans…[23]

Quant à Mussolini, il organise dès le 24 une gigantesques parade militaire qu’il préside personnellement à Nice, à peine sécurisée par ses forces, et proclame le retour à l’Italie des « terres irrédentes » que sont Nice justement mais aussi la Savoie !

C’est une populace minoritaire acquise aux idées fascistes triée sur le volet qui peut assister au défilé italien, la majorité des Niçois, patriote, étant cantonnée à domicile par l’occupant.

Cela ne peut effacer le simple fait qu’à l’issue des combats en Métropole, et si on excepte quelques cols et vallées alpins, l’Italie n’a conquis que Menton. Mussolini ordonne néanmoins de faire prisonniers les chasseurs alpins qui ont humilié son armée et proclame depuis Nice, l’annexion, ou plutôt, le « retour », des terres irrédentes que constituent la Savoie et Nice !

Il reçoit également de la part du Führer une zone d’occupation s’étendant jusqu’au Rhône.

Certes, des milliers de chasseurs alpins sont saisis par les Italiens, mais certains, conformément aux consignes de Mandel, refusent de se rendre et se cachent dans les montagnes.

Quant aux troupes qui faisaient face aux Allemands plus au nord, soit 2 millions de prisonniers, près du quart tentent de s’évader et 100 000 soldats y parviennent, du fait que les Allemands ont des difficultés à gérer ces longues colonnes d’hommes se doutant pour beaucoup qu’ils ne reviendraient pas chez eux de sitôt…

La France se remplit de soldats en fuite bientôt pris en charge par la résistance naissante. Beaucoup d’entre eux en seront d’ailleurs des hérauts.

Chasseurs alpins réfractaires à la reddition et soldats évadés se cachent en milieu rural et formeront bientôt de véritables petits groupes mobiles ralliant rapidement la Résistance.

Eux et les chasseurs alpins réfractaires à la captivité seront les premiers maquisards.

À l’inverse, dans le chaos de la défaite, certains officiers destinés à continuer le combat depuis l’exil, ont été saisis par les Allemands.

C’est le cas de Bertrand Fagalde, le défenseur de Dunkerque, capturé le 18 sur la Loire.

Ce dernier, sachant la guerre finie pour lui, fait part à ses geôliers de ses profonds sentiments anglophobes, jugeant la « perfide albion » responsable des malheurs actuels de la France...

L’ennemi n’en perd pas une miette et l’information remonte rapidement à Berlin…

C’est par une foule en délire que sont accueillis Georges Mandel et son gouvernement à leur arrivée à Casablanca.

En effet, le peuple de l’Empire fut peut être le plus ardent partisan de la poursuite de la lutte, à commencer par sa presse, peu avare d’appels à la résistance.

Alors que les armes se sont tues en Métropole, les commandos britanniques lancent un raid sur Le Touquet, en France occupée. En effet, Churchill veut à tout prix frapper les Nazis « Partout, tout le temps ! ».

Ce raid/coup de main a le don de redonner le moral au peuple britannique et il est prévu de réitérer ce genre d’action à l’avenir donc.

Si les Français sont d’accord sur le principe, ils insisteront bientôt pour avoir leur propre force de raids dénommée « Corps francs », même si, bien entendu, cette dernière travaillera en parfaite intelligence avec son homologue britannique.

Les premiers membres des « Corps francs » français seront prélevés sur les troupes françaises ayant participé à la campagne de Norvège et repliées en Grande-Bretagne.

Dans les Pyrénées-Atlantiques, encore hors de portée du Reich hitlérien pour encore quelques jours, Danier Cordier embarque avec une vingtaine de compagnons sur le vapeur Léopold II à destination du Maroc. Il deviendra un héros de ces fameux « Corps francs » et sera la terreur des soldats d'Hitler.

Tandis que l'armée de Mussolini a été humiliée dans les Alpes par la résistance épique des héroïques soldats du général Olry, certains hauts-gradés italiens font néanmoins preuve d'initiative, pour la malchance, néanmoins relative, des Alliés.

Ainsi, en Afrique orientale italienne, bien qu’il soit isolé de sa métropole par les colonies des Alliés, le Duc d’Aoste, commandant en chef des armées italiennes dans cette région, n’a pas l’intention de rester inactif sur ce front et prépare une offensive contre les Somalies française et britannique ainsi que contre le Soudan et le Kenya, colonies britanniques.

D'ailleurs, sur le front colonial, les Britanniques ont déjà pris un ascendant psychologique en s'emparent du Forte Capuzzo à la frontière entre la Libye et l’Égypte.[24]

Du point de vue international et diplomatique, constatant la défaite militaire de la France en Europe, le Royaume de Roumanie change radicalement de politique étrangère afin d'assurer sa survie. De puissance pro-alliée, cette dernière se tourne vers Berlin afin, comme le roi Carol II l'a dit lui même, « de ne pas subir le même sort que la Pologne ».

Ainsi, en échange de concessions politiques et économiques[25], le Royaume espère assurer le maintien des frontières de la « Grande Roumanie ».

Or, Staline commence à masser ses troupes à la frontière de la Bessarabie…

Tout cela fit dire par Gheorghe Tatarascu, le Premier ministre roumain, à Adrien Thierry, ambassadeur de France à Bucarest, le 18 juin 1940.

« les Russes et les Hongrois, dans cette partie de l’Europe, sont devenus les gendarmes du Reich et (ils) ne tarderont pas à demander leur salaire à nos dépens »

En effet, le chef du gouvernement roumain parle en ces terme car pour lui, la défaite de la France constitue également celle de son pays.

Tout comme il a déjà envahit les 3 nations baltes le 14 juin, alors que le Monde avait les yeux braqués sur la chute de Paris, le Tyran rouge s'apprête cette fois à réclamer la Bessarabie, ancienne province de la Russie des Tsars que la Roumanie avait récupérée à l'issue de la Première guerre mondiale.

Tandis que la France achève de se consumer, Molotov envoie une note le 24 juin réclamant le retour de cette province dans le giron de la Russie désormais soviétique.

L'ambassadeur Thierry a beau pousser la Roumanie à résister comme le fit la Finlande, l'âme de Carol II ne vaut pas celle du maréchal Mannerheim…

Ainsi, le Monarque roumain se tourne en priorité vers Berlin[26] qui l'enjoint de céder aux exigences soviétiques. Seule concession faîtes aux Roumains, la Bucovine du sud, initialement réclamée par Staline, restera roumaine…

En dépit du retrait de l'armée roumaine, Staline décide de « tester » son nouveau jouet, sur l'armée en retraite. Ainsi, il lance des unités parachutistes de l'armée rouge sur les villes de Bolgrad, Cahul et Ismail dont elles s'emparent facilement[27]

Pire, une bataille éclate à Hertsa entre les 2 armées, à cause de l'épaisseur d'un crayon rouge mal taillé…

En effet, bien que ne faisant pas partie du territoire cédé par les Roumains, la ville fut incluse par accident dans le territoire soviétique du fait de l'épaisseur du crayon qui avait tracé la nouvelle frontière sur les cartes d’État-major soviétiques.

Après cette débâcle diplomatique, Carol II espère s'attirer les bonnes grâces du Reich contre l'irrédentisme hongrois en remplaçant Tartarescu par le germanophile Ion Gigurtu.

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A13
Huntziger signe l’acte de capitulation.

[19] On ne passe pas ! https://www.youtube.com/watch?v=2-JogJ7UQHE
[20] Selon les mots de Binet-Valmer inscrit sur une dalle monumentale apposée dans la clairière de l’Armistice du 11 novembre 1918.
[21] Et il allait rapidement la trouver en la personne de Laval
[22] While the Battle of France is over but, the battle of Britain is about to begin.
[23] Ce qui n’empêchera pas les Mosellans de manifester contre la présence nazie le 14 juillet suivant !
[24] Bien moins connue est la destruction d'un poste-frontière italien à l'ouest de Pisida par un détachement français dès le 19 juin.
[25] Livraisons de pétrole notamment
[27] Notamment via le redoutable ambassadeur Killinger
[28] Ainsi que d'un important nœud ferroviaire


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Message par LFC/Emile Ollivier Dim 8 Nov - 22:13

Chapitre 6 : Menace sur l'Indochine

« Arrivé à Saïgon, après un périple digne de l'Anabase des Grecs, qui nous fit passer par Fort-Lamy, Djibouti, Mascate, Bombay et Singapour, nous y découvrîmes une situation bien plus terrible que ce que nous étions imaginé, à la lecture des premiers rapports du Gouverneur Catroux. La position de la France n'était ainsi pas seulement menacée, elle était également ébranlée sur ses bases mêmes !
Qu'à cela ne tenait. Nous allions, le Gouverneur Auriol et moi-même, consolider ces dernières. »
Raoul Salan, Mémoires Pour l'Empire : Le sens d’un engagement (Volume I)

Le Japon impérial, désireux de profiter de la situation militaire dramatique de la France, envoie le 17 juin 1940 un ultimatum au général Catroux, encore gouverneur de l'Indochine en attendant l'arrivée du duo Auriol-Salan. Dans ce document, Tokyo enjoint le représentant français de cesser de ravitailler l’armée chinoise depuis la colonie et lui intime d’accepter la présence d’une commission japonaise au Tonkin pour constater que l’arrêt des livraisons d’arme à la Chine est effectif. Pour faire pression sur la colonie isolée, l’État nippon a commencé à masser ses troupes à la frontière sino-tonkinoise et ce, dès le lendemain de la chute de Paris, soit le 15 juin.

Le général Catroux, au nom du gouvernement français, rejette avec hauteur cet ultimatum, informé qu'il est de la tournure nouvelle prise par les événements en Métropole et de l'arrivée au pouvoir d'hommes de valeur, prêts à continuer la lutte contre le Nazisme.

Quelques jours plus tard, la XXIIème armée japonaise envoie d'important renforts à la frontière nord du Tonkin tandis que la flotte impériale se montre menaçante au large d'Haïphong.

Visiblement, les Japonais, hautains et fiers, ont mal pris le refus cinglant du Français… D'autant que pour eux, la défaite militaire en Métropole équivaut à la fin de la France…

Entre temps, Catroux a recherché des appuis parmi les alliés et amis de la France. Si les États-Unis, neutres, se contentent de placer la flotte d'Asie[28] en état d'alerte, les Britanniques envoient une escadrille de chasse et le Commonwealth plusieurs bâtiments de guerre à… Saïgon, à l'extrémité sud de la colonie ! Cela montre aux Japonais que l'Empire britannique interviendra si ceux-ci lancent une invasion complète de la colonie mais pas si la situation se limite à des incidents de frontière… Churchill ne veut pas d'une guerre du Pacifique alors que la Bataille d'Angleterre se prépare.

D'ailleurs, il pousse, dans cette optique, le gouvernement néerlandais à stationner au même endroit ses bâtiments.

Un incident de frontière, les Japonais en préparent un justement. Un fameux et sanguinaire. Un assaut massif sur le poste frontalier de Lang-Son, pour « punir » les Français de leur arrogance.

Le 1er juillet, 25 000 soldats japonais déclenchent leur attaque sur cette position, défendue par seulement 5000 soldats français. Ces derniers résistent pendant 6 jours lors de combats désespérés qui s'achèvent par la reddition du poste. C'est en vain que le gouverneur général Catroux réclame des renforts à Alger. L'Indochine est seule…

Une fois Lang Son conquise, les Japonais cessent leur attaque. Hiro Hito envoie un émissaire s'excuser (!) auprès de Catroux. Ce dernier explique en retour à l'envoyé de Tokyo que la France continuera toujours d'aider le gouvernement chinois dans sa lutte contre l'invasion japonaise.

Pris d'une fureur bestiale, les Japonais décapiteront une partie des prisonniers français ! Les tirailleurs annamites[29], eux, seront libérés sur parole…

La Thaïlande a suivi avec intérêt le combat de Lang Son. Immédiatement après la fin des hostilités, elle prend langue avec le gouvernement impérial de Tokyo.

Le gouvernement Mandel, lui, est profondément choqué par ce véritable acte d'agression, mais il ne peut bien évidemment rien faire, pour l'instant, si ce n'est réclamer un dédommagement de la part des Japonais, qui mettra d'ailleurs du temps à venir.

Les exactions nippones seront cachées à l'opinion publique de l'Empire par crainte de sa réaction.

Quelques jours plus tard, Auriol et Salan arrivent à Saïgon après un périple épique et Catroux ne peut que leur affirmer que, tout d'abord, le matériel français n'est pas du tout à la hauteur de l'armement japonais. Mais il y a aussi bien pire pour la place de la France en Extrême-Orient… En effet, une partie des tirailleurs ont déserté lors des combats, signe d'une situation coloniale des plus précaires.

Catroux, fera le même constat à Mandel et au Général lors de son arrivée en Afrique et transmettra un rapport dans lequel il réclamera vivement des réformes majeures pour la colonie.

Mandel, ancien Ministre des colonies et désormais chef du gouvernement d'une puissance en exil ne pouvant désormais que s'appuyer sur celles-ci, n'est pas insensible aux propos du soldat. Il charge son Ministre des colonies, Marius Moutet, de mettre en place un plan de réformes de l'administration de l'Union indochinoise.

Or, de la genèse de ce plan, naquit la question cochinchinoise...

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A14
L’Indochine française (Source Wikipédia)

[28] Stationnée à Manille, aux Philippines.
[29] Nom donné à l'époque aux Vietnamiens


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Message par LFC/Emile Ollivier Lun 9 Nov - 15:15

Chapitre 7 : Piraterie

« À l'instar des Panzers lors de la campagne de France, les « Seigneurs du désert » et le Long Range Desert Group avaient l'art de surgir de là où on ne les attendait pas. Échappant à la surveillance des patrouilles italiennes en prenant des routes que l'on pensait infranchissables, leurs commandants firent également preuve d'audace dans l'art du combat. »
Henri Michel, La Seconde Guerre mondiale

Alors que la Métropole vient de capituler, Noguès, qui cherche non seulement à tout prix à éviter une intervention espagnole dans le conflit, mais pour qui aussi une stratégie purement défensive n'est pas dans sa nature, se décide à frapper un grand coup contre les positions avancées italiennes le long de la frontière.

Certes, l'heure n'est pas encore à l'offensive générale, Français comme Britanniques n'étant pas encore prêts, mais l'action agressive du Commonwealthcontre Forte Capuzzo, ainsi que les premiers engagements franco-italiens, ont montré que l'armée du Duce en Afrique n'était pas si redoutable que l'on pouvait le craindre, bien qu'elle aligne 9 divisions face à la Tunisie.

Mais que faire ?

La solution lui vient des Britanniques et, plus particulièrement, de Ralph A. Bagnold, qui a proposé à Archibald Wavell de constituer une force de « raid » qui harcèlera les arrières italiens en traversant l'immensité désertique du Sahara.

Bagnold avait convaincu son compatriote en faisant planer la menace d'une rupture des communications entre l’Égypte et le Soudan via un assaut menée depuis Koufra par une colonne italienne.

« Que ferez-vous si le Italiens ne bougent pas au sud ? » dit alors Wavell.

À cette dernière réticence, Bagnold rétorqua.

« De la piraterie ! Nous attaquerons leurs convois, nous harcèlerons leurs postes, nous brûlerons leurs dépôts, nous épierons et rendrons compte de leurs moindres mouvements et effectifs, nous détruirons leurs avions… Nous leur rendrons la vie impossible. »

Ces mots permirent d'emporter la décision de Wavell qui transmis l'idée novatrice à un Noguès de suite conquis.

Le nom de l'officier à qui confier l'unité est d'ailleurs rapidement trouvé. En effet, la France a bon nombre de baroudeurs du désert et le plus illustre d'entre eux est Georges Estienne. Saharien reconnu. Celui-ci a, d'ailleurs, aussi l'immense mérite de propagande d'être le fils du général Estienne, le « père » de l'arme blindée française durant la précédente guerre…

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A15
Georges Estienne (Source Wikipédia)

Si l'unité britannique portera le nom de Long Range Desert Group (LRDG), l'unité française aura celui d'Unité transsaharienne autoportée.

À ce nom pompeux, la presse alliée, et bientôt l'histoire, préférera celui de « Seigneurs du désert », en hommage au surnom d'Estienne.

Si l'opération Compass/Compas est prévue pour le 13 septembre, 5 semaines seulement furent nécessaires pour constituer les 2 unités à compter de l'ordre de constitution du 24 juin 1940. Le 28 juillet, les « Seigneurs du désert » et le Long Range Desert Group, en parfaite intelligence, étaient prêts à frapper.

Leurs cibles ? Les puissantes bases de l'extrême-sud libyen, Mourzouk et Koufra. L'objectif de ces coups de main ? Montrer aux Italiens qu'ils ne seront en sécurité nulle part, et ce, même au cœur du Sahara !

Si la colonne française part de Largeau, au Tchad français, son homologue britannique aura, elle, comme point de départ, Assouan.

La motivation des soldats, déjà très grandes, est encore renforcée par le désastre subie par la marine italienne à Tarente.

Pour l’assaut, les Britanniques disposent des 2 portes-avions, les HMS Ark Royal et HMS Illustrious, lourdement escortés par les marines françaises et britanniques.

Alarmés par la manœuvre alliée, les Italiens réagirent en… regroupant à Tarente le gros de leur flotte !

« Tous les oiseaux étaient dans le nid » comme le dit alors l’amiral Cunningham.

Si les ballons de barrage constituaient une gène d’ampleur, l’amiral italien Campioni avait ordonné pour permettre un appareillage rapide, de laisser les filets de protection à distance.

Fatale erreur…

C’est le 3 juillet vers 22h que les avions décollèrent vers leurs proies.

Les Swordfishs arrivèrent sur cible 2h30 plus tard.

Malgré l’importance stratégique de la base, ses défenses anti-aériennes n’étaient pas à la hauteur et les biplans réussirent à passer relativement facilement le feu de la DCA.

Illuminés par 4 feux de bengale, les proies étaient prêtes pour leur exécution...

La première mise à mort fut celle du Giulio Cesare. Touché par 3 torpilles, le monstre coula en moins de 12 minutes.

La victime suivante fut le Caio Duilio, frappé à mort par 2 torpilles tout comme l’est quelques minutes plus tard le Conte di Cavour.

Le croiseur Fiume est également détruit durant le coup de main.

Plusieurs autres unités sont endommagées à des degrés divers durant l’attaque tandis que les dépôts de carburant sont en flammes.

Les pièces maîtresses de la flotte italienne, ses cuirassés, gisent désormais pour la plupart au fond de la rade !

C’est donc un immense succès pour les Alliés qui peuvent tranquillement préparer le retrait de la Royale des premières lignes tandis que ce nouveau désastre ébranle un peu plus l’opinion que se font les hauts dignitaires italiens, et surtout monarchistes, de Mussolini.

Les Britanniques pourront seuls assurer le blocus des côtes libyennes tandis que les Japonais, via leur attaché militaire à Berlin, Takeshi Naito, s’intéresseront bientôt de près à l’attaque franco-britannique...

Ce succès est d’ailleurs d’autant plus important que les bombes s’apprêtent à frapper l’Angleterre…

De plus, il pousse Franco à désormais rechigner à entrer en guerre alors que les négociations sur son intervention auprès des Nazis menaient bon train depuis la capitulation. En effet, la perspective d’une victoire rapide de l’Axe s’éloigne tandis que Franco a en tête le fait que les Alliés saisiraient en quelques semaines l’ensemble des colonies espagnoles…

De plus, ces mêmes Alliés lui promettent un accord secret par lequel ils lui remettrait les denrées agricoles dont manque tant l’Espagne ainsi que les machines-outils nécessaires à l’industrialisation du pays en échange de sa non-intervention.

En Afrique, il nous faut noter que l'un des seconds d'Estienne est le lieutenant Louis Blanchard. Bien que légionnaire à l'origine, le Général a immédiatement pressenti que le soldat Blanchard ferait un excellent meneur d'homme pour cette opération et l'a placé au sein de l'Unité transsaharienne autoportée, et non maintenu dans une unité légionnaire de l'ordre de bataille de l'opération Compass/Compas.

Tout se passa très vite pour le soldat Blanchard. Lors du passage en revue de son unité, de Gaulle s’arrêta plus longuement sur lui que sur les autres.

« Soldat, quel est votre nom ? » lui demanda le ministre de la guerre après l’avoir observé en détail près d’une vingtaine de secondes.

Après que le légionnaire se fut présenté, de Gaulle lui répondit simplement.

« Hmm je vois. » Puis il lui tira l’oreille, ce qui fit sourire ses camarades.

Appelant son officier, il lui annonça son futur transfèrement au sein de l'Unité transsaharienne autoportée et sa nomination au grade de lieutenant.

De Gaulle avait parfaitement reconnu en « Louis Blanchard » Louis Napoléon Bonaparte, le Prince Napoléon.

Engagé volontaire au sein de la Légion étrangère à la déclaration de guerre, il avait, en effet, en dépit de la loi d’exil, décidé de défendre sa véritable Patrie.

La France...[30]

Parfait connaisseur du désert, le capitaine Estienne conduit sa colonne jusqu’à Mourzouk au prix d’un seul véhicule perdu, suite à une panne moteur.

Estienne s’appuie également sur sa parfaite connaissance de l’Arabe et sur un message des plus hautes autorités religieuses musulmanes de l’Empire, qui explique les motivations de la République française, pour obtenir des autochtones des renseignements importants sur les habitudes de la garnison. Comme le fait que les soldats italiens s’enferment chaque nuit dans le fort.

Estienne décide d’en profiter pour lancer un raid nocturne dévastateur sur la piste de Mourzouk pour priver les Italiens de leur aviation. Celui-ci sera une grande réussite et se conclue par la destruction des appareils italiens.

Mourzouk était isolée du reste de la Libye !

Équipés comme une force légère, les soldats d'Estienne apparaissent néanmoins forts dépourvus face à l'énorme puissance de feu déployée par les soldats de Mussolini. En effet, si les objectifs secondaires ont donc été de suite remplis au premier assaut, la garnison italienne résistait toujours.

Le Lieutenant « Blanchard » conseilla alors à Estienne, d’utiliser la mobilité de la seule pièce d’artillerie transportée par la troupe, et de la faire tirer sur le fort quelques salves avant de la faire déplacer une bonne centaine de mètres plus loin et de recommencer la manœuvre, et ainsi de suite.

Le but étant de faire croire aux Italiens que les Français disposaient d’une importante artillerie.

Les Italiens, totalement prise au dépourvu, et croyant faire face à une déluge d’artillerie, décidèrent d’envoyer un émissaire à Estienne afin de négocier leur reddition !

La manœuvre napoléonienne avait parfaitement réussie !

Quelle ne fut pas la surprise du commandant italien lorsqu’il découvrit que les Français n’avaient qu’un seul canon.

Trop tard, le fort, et sa garnison, s’était rendu.

Graziani et le commandement italien furent effarés par cette déroute[31] tandis que les rapports sur la concentration de troupes alliées aux frontières de la colonie se multipliaient.

Le maréchal fasciste demanda à Rome des renforts mais, déjà, la majeure partie du simple ravitaillement qui lui était destiné, finissait au fond de la Méditerranée, coulé qu’il était par la Royal Navy[32]

Compas/Compass était déjà bien partie avant même d’être déclenchée...

D’autant qu’à la grande stupeur des commandants de l’armée britannique, la victime désignée d’Adolf Hitler, Winston Churchill, a en parallèle, ordonné l’envoi en Égypte des derniers blindés encore présents en Grande-Bretagne, afin qu’ils participent à la grande attaque prévue contre cette même Libye italienne.

D’ailleurs, cette décision laissait pantois les généraux Wavell et O’Connor qui commandaient au Moyen-Orient, tout en les satisfaisant bien évidemment, en dépit de leurs craintes pour leur mère-patrie tandis que John Dill, le chef d’état-major impérial commentera.

« Le Premier ministre n’avait de cesse de préparer des plans offensifs grandioses. Et pas seulement en lien avec l’offensive contre la Libye. Alors que l’heure était à la Bataille d’Angleterre, ses yeux étaient rivés sur le Dodécanèse, dont il préparait la conquête, tandis qu’il fallait toute notre force de persuasion pour l’empêcher de se ruer à nouveau sur la Norvège. »

Mais le Prime Minister était confiant en la Royal Navy et, surtout, en la RAF qui devait la protéger de la Luftwaffe nazie, et ce, malgré la capitulation honteuse des îles anglo-normandes face… à un avion de reconnaissance allemand ! Certes, il est vrai que les îles avaient été évacués par l’armée britannique et n’étaient pas sensées être défendues.

Mais déjà, depuis le 10 juillet, la bataille d’Angleterre avait commencée.

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A16
Des Swordfishs britanniques survolant le HMS Ark Royal, 1939 (Source Wikipédia)

[30] Tout comme son cousin, Joachim Murat, engagé lui dans la Résistance intérieure.
[31] D’autant que Kouffra était également tombée.
[32] La Royale, elle, restant dans ses bases, le temps qu’elle reçoive les premières munitions livrées par les arsenaux américains


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Message par LFC/Emile Ollivier Lun 9 Nov - 17:35

Chapitre 8 : Soumission

« Sous un vernis de légalité, Laval abattit la loi »
Charles de Gaulle, Mémoires de guerre – Le Sursaut : 1940-1941 (tome I)

« Le moment est venu ! » pense Pierre Laval quand, le 25 juin 1940, les premières colonnes allemandes, issues de la « division fantôme » de Rommel, atteignent Hendaye et la frontière espagnole.

Le traître a bien préparé son retour en France, désormais occupée. En effet, par l’entremise des autorités espagnoles, qui n’ont pas que servi d’intermédiaire entre la République et Hitler, il a prit langue avec les Nazis et s’est déclaré tout disposé à prendre la tête d’un nouveau gouvernement, ami du Reich.

Son certificat de Nazi-compatibilité a été confirmé par son ami, le félon édile de Bordeaux, Adrien Marquet, qui a accueilli à bras ouverts les Allemands quelques jours plus tôt[33]. Voilà l’homme que cherchaient les autorités allemandes pour leur servir de Quisling français !

Rapidement transporté à Paris, il prend langue avec la clique fascistoïde française afin de bâtir un « Ordre nouveau » en France, travaillant main dans la main avec le Reich hitlérien.

Cela passe par l’abolition de la République et la formation d’un nouveau gouvernement…

Laval, prudent, se contente de se proclamer « Chef du gouvernement provisoire ».

En effet, véritable dictateur selon la définition voltairienne, il compte utiliser les lois avant de mieux les abattre. C’est par un congrès extraordinaire, qu’il compter réunir à Versailles, sous les ores de la Monarchie et de la IIIème République qu’il compte détruire cette dernière !

L’Auvergnat est aussi, de façon moins avouable, soucieux de légitimer son pouvoir, conscient qu’il est de la relative faiblesse de sa position (Qui sait, les Allemands pourraient toujours trouver un autre traître pour les servir s’ils leur en prenaient l’envie…).

Laval ne s’appuie pas que sur des Fascistes à la sauce Déat ou Doriot, il promeut également son ami Marquet ainsi que des « Flanchards » comme Jean Ybarnégaray.

Mais le pire n’est pas là.

Dans la droite ligne des déclarations qu’il a fait à ses geôliers, Bertrand Fagalde, l’officier qui défendit avec héroïsme la poche de Dunkerque et qui aurait aurait dû être évacué vers l’AFN pour prendre la tête d’une partie des forces de la République s’il n’avait pas été capturé en se dirigeant vers Bordeaux et un navire de transport, rejoint la clique Laval ! Haïssant désormais plus que tout l’Angleterre, qu’il accuse d’avoir abandonné la France, lors du tragique mois de mai 1940, il n’aura de cesse de dénoncer la « Perfide Albion » sur les ondes de Radio-Paris et deviendra, par conséquent, un ardent partisan de l’Allemagne hitlérienne et de son « Europe nouvelle » !

Ce congrès extraordinaire est prévu pour le 4 août, jour de l’abolition des privilèges… Laval ajoute donc une symbolique supplémentaire pour son congrès…

Les députés et sénateurs qui n’ont pu ou voulu rejoindre l’Afrique du nord ou l’Angleterre sont regroupés par les Allemands (et les députés et sénateurs faits prisonniers, libérés) et envoyés à Versailles pour y participer.

Afin d’avoir un nombre de participants au congrès relativement crédible et voulant également montrer le caractère corporatiste qu’il veut donner à la « France nouvelle », Pierre Laval a également convoqué à Versailles les principaux représentants des différents corps de métier. Ils sont désignés sous le terme de « Délégués ».

C’est Laval, député lui-même, qui mène les opérations qui se déroulent dans la fameuse Salle du congrès.

Celui-ci propose plusieurs motions au « vote » des parlementaires et des délégués.

La première reconnaît la vacance du pouvoir après la « fuite » du gouvernement Mandel et du Président Albert Lebrun.

La seconde propose au vote des Congressistes la nouvelle constitution griffonnée par Laval et ses amis comme nous l’avons vu. Nouvelle constitution qui abolit la République au profit d'un « État national français ». La constitution de l’État national abolit la distinction entre le chef de l’État et le chef du gouvernement.

Enfin, la troisième propose l’élection de ce même « Chef de l’État » par les membres du congrès conformément aux dispositions de la constitution de « L’État national français » que viennent de voter les Congressistes.

Les baïonnettes allemandes ayant force d'arguments, le vote est un succès. Seuls quelques députés[34], qui en paieront rapidement le prix, osant se dresser contre le dictateur. Notons qu’aucun délégué n’a osé voter non…

Pierre Laval est donc désigné « Chef de l’État » de l’État national français là où la République élisait son Président…

Cette fiction démocratique ne durera que le temps du congrès. Les premières mesures dictatoriales, antisémites notamment[35], ne tardèrent pas.

La République est abolie sous les ores de la Monarchie absolue...

Notons que si les Allemands espéraient, certes, compter sur des collaborateurs pour administrer la France défaite, les Nazis furent étonner par le zèle de ceux-ci à copier leur propre régime !

L’État national choisit comme insigne le gamma, signe du Bélier, symbole de « renouveau et d'énergie ».

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin Etat_n10
Drapeau de l’État national français (Par Thomas Diana et Paul62)

Pour l'anecdote, Pierre Laval ne devient pas seulement « Chef de l’État national français » mais également… Co-Prince d'Andorre ! Il succède ainsi à Albert Lebrun, qui a cessé d'être reconnu comme tel par le petit pays mais seulement à l'arrivée des premiers soldats allemands à la frontière nord du territoire pyrénéen. D'ailleurs, les Andorrans se sont empressés de justifier cette conduite auprès de Mandel et ce, a priori, avant le départ pour l'Afrique du gouvernement de la République.

Le gouvernement légal de la France, en dépit de protestations officielles, accepte officieusement cette situation. La Principauté, protégée de l'invasion allemande, sera une base arrière pour la Résistance à venir…

Concernant l’autre micro-nation frontalière de la France envahie, la principauté de Monaco, dont la prince Louis II craint une annexion par l’Italie fasciste, elle se tourne vers le Reich pour sauvegarder son indépendance.

Hitler fait pression sur son allié italien pour qu’il se contente du statut précédent celui de 1860, à savoir que le roi d’Italie ne sera que « protecteur » de la principauté monégasque.

En effet, les Nazis seront bien content d’utiliser Monaco pour de multiples transactions financières…

Pire, Monaco copiera, sans n’avoir subie aucune pression de la part des Nazis ou de l’État national français, les législations antisémites de ceux-ci !

Furieux, le gouvernement français déclare la guerre à la principauté à la fin de l’année.

Immédiatement, les traîtres s'attellent à transformer la France occupée en une succursale fasciste de l'Allemagne hitlérienne tout en ayant, pour ainsi dire, que bien peu de moyens. Par exemple, pour compenser la faiblesse du nombre des fonctionnaires étant resté à leurs postes suite à l'occupation allemande, Laval reprend un vieux thème de l'Extrême-droite, la suppression des départements au profit du retour des provinces historiques.

Histoire d'avoir moins de postes à pourvoir…

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin Provin10
Les « provinces » de l’État national français

Mais redécouper administrativement la France captive et mutilée de 1940[36] n'est pas tout. Laval reconduit le « gouvernement provisoire » qui devient donc celui de l’État national français.

Chef de l'État national français, chef du gouvernement : Pierre Laval

Ministre des Affaires étrangères : Fernand de Brinon

Ministre de la Guerre : Bertrand Fagalde

Ministre de l'Intérieur : Adrien Marquet
(Dont secrétaire d’État aux questions juives : Louis Darquier de Pellepoix (à compter de la promulgation du statut des Juifs))

Ministre de l'information et des communications : Philippe Henriot

Ministre du Travail, des Finances, de l'Économie nationale et de la Production Industrielle : René Belin

Ministre de la Justice : Raphaël Alibert

Ministre de la Marine et des colonies : Charles Platon

Ministre de l'Air : René Fonck[37]

Ministre de l'Éducation nationale : Abel Bonnard

Ministre de l'Agriculture et du ravitaillement  : François Chasseigne

Ministre des Anciens combattants, de la Famille française et de la santé : Jean Ybarnégaray

Ministre d'État : Jacques Doriot

Ministre d’État : Marcel Déat

Ministre d’État : Eugène Deloncle

Soucieux de se les rallier, conscient de leurs rivalités mais aussi de leur incompétence, Laval nomme ministres d’État Doriot et Déat, respectivement communiste et socialiste en rupture de ban.

Il fait de même avec Eugène Deloncle, co-fondateur de la Cagoule.

L’amiral Platon, lui, dirige un ministère « fantôme », l’État national n’ayant pas de marine et encore moins de colonies…

Le félon Ybarnégaray, que De la Rocque, qui a pris le maquis, vient d’exclure du PSF, devient ministre des anciens combattants. Ironique pour un partisan de la défaite…

René Fonck, non content de ne plus descendre de Fokkers, fait désormais des courbettes devant les Boches…

Le « cabinet de la honte » est représenté par des « Français » à son image...

Du côté des Communistes, loin de résister immédiatement à l’envahisseur, comme ils le fanfaronneront après-guerre, ceux-ci tentent même, par l’intermédiaire du numéro deux du Parti, Jacques Duclos, d’obtenir des autorités allemandes la reparution de leur journal, L’Humanité.

Ils se verront signifier une fin de non-recevoir et le Parti reste clandestin sans pour autant entrer en Résistance.

Cependant, la gauche française n’est pas représentée que par le seul Parti communiste. La gauche socialiste, quoi que profondément choquée par la défaite, a connue elle aussi un sursaut depuis le 16 juin 1940 et l’arrivée au pouvoir de Mandel.

Celle-ci, soucieuse de poursuivre la lutte, la SFIO clandestine[38] fonde le mouvement « Liberté ».

Liberté, est certes ouvert à toutes les bonnes volontés mais sa base sera belle et bien socialiste.

Parallèlement, la droite, elle aussi, commence à s’organiser en la personne d’Henri Frenay qui fonde le « Mouvement de libération national ».

Militaire ayant échappé à la capture lors du désastre de mai-juin, Frenay est contraint à la clandestinité du fait que les Allemands traquent les militaires français qui ont échappés à la captivité car ceux-ci sont susceptibles de vouloir rallier l’Angleterre ou l’Afrique du nord.

Frenay ne se contente pas de se cacher et décide de résister à l’envahisseur et, même, au Régime de Laval car si Frenay est politiquement assez proche des idées proférées par la droite dure française, il est écœuré par sa collaboration manifeste avec l’ennemi.

Ainsi, on ne peut en ce mois d’août 1940, limiter l’affrontement résistance/collaboration à un duel gauche/droite car quelques anciens communistes, en rupture de ban,[39] rallient également l’État national français tout comme un petit nombre de socialistes.

La continuation de la résistance française n’empêche cependant pas le Führer de faire un retour triomphal à Berlin qui acclame celui qui a écrasé la France…

Le 5 août, c’est un Mandel bien décidé à riposter à cette proclamation, qui reçoit Rudolf Hilferding, meneur du Sopade, le SPD[40] en exil. Mandel et lui se mettent d’accord pour mettre en place un « Comité de l’Allemagne libre », sorte de gouvernement en exil de la République de Weimar, qualifié discrètement de « farce » par rien moins que certains membres du cabinet !

Néanmoins, malgré le mépris affiché par certains envers l’Allemand, celui-ci n’en mène pas moins un réseau d’informateur disséminé dans l’ensemble du Reich hitlérien.

En dépit de l’évidente soumission de Laval, qui va constamment au devant des volontés nazies, Hitler souhaite s’assurer personnellement de la fidélité de celui-ci et de son régime tout en maintenant une pression, à moindre frais, sur les Franco-britanniques. Pour cela, il décide de le rencontrer à Hendaye. Montrant là son mépris pour le régime de l’État national, c’est donc en territoire français qu’il convoque le dirigeant français reconnu par le Reich !

Hendaye, ville à la frontière franco-espagnole donc, a été choisi car le Führer veut également rencontrer Franco, le dictateur espagnol, pour le pousser à entrer en guerre et lui demander quel en serait le prix.

Cependant, la rencontre avec ce dernier n’aboutit pas. Franco demandant une aide allemande, à la fois militaire et économique, massive en échange de son intervention aux côtés de l’Axe.

D’aucun n’y verront que le dictateur espagnol a voulu faire monter les enchères trop haut pour que l’Allemagne ne puisse accepter son alliance, effaré qu’il était désormais par les insuccès notoires que subissait non seulement l’Italie (Destruction de ses cuirassés à Tarente, guerre éclair du désert) mais aussi l’Allemagne dans la bataille d’Angleterre…

Mais du côté de Laval, la rencontre est, au contraire, un succès.

Le dictateur français accepte de renforcer la collaboration, notamment économique, en fournissant au Reich les ressources de la Métropole pour son économie de guerre.

Certes, les Allemands pillaient déjà la France, mais si en plus des Français peuvent les y aider...

Mais malgré cela, Pierre Laval se voit refuser la création d’une armée pour son État national français, Hitler se doutant que les soldats français déserteront à la première occasion pour se battre aux côtés des Alliés.

Le Führer ne souhaite pas, en effet, donner à la France de Laval cette monnaie d’échange pour de futurs marchandages. Il désire, au contraire, complètement abaisser la France et lui redonner une armée n’est donc pas du tout dans ses projets.

Néanmoins, le laquais des Allemands qu’est Laval obtient de son maître la formation d’une « Garde nationale légionnaire »[41] de 100 000 hommes pour pallier au peu de loyauté des gendarmes et policiers envers son Régime...

Cette force, bientôt dénommée simplement « La Légion[42] », se fera rapidement connaître de tous pour ses exactions de diverses natures.

Cette force paramilitaire, sorte d’hybride entre une force de police et une armée, sera commandée par Joseph Darnand, libéré sur parole par les Nazis de son Stalag car jugé « sûr politiquement »...

Laval, admirateur des régimes fascistes, et de l'Italie mussolinienne en particulier, désirait par dessus tout fonder un parti unique en France, parti unique qui serait au service de la « Révolution nationale » lancée par lui dès les lendemains du congrès de Versailles.

Cette « Révolution », était encensée par les Fascistes français à la sauce Déat[43] ou Doriot[44].

En « souvenir » des élections de 1936, ce rassemblement fut dénommée « Front de la liberté », bien qu’en 1936, l’élection fut pour l’extrême-droite un cinglant revers.

Cependant, comble du ridicule chez les crapules, Jacques Doriot renâcle à intégrer ce front car il ne souhaite pas voir son mouvement, sur lequel il est tout puissant, être fondu dans la masse du « Front » ! De plus, son pire ennemi et son mouvement, qui ne sont autres que ce Marcel Déat et son Rassemblement national populaire, ont, eux, intégrés de suite le parti unique. Raison de plus pour Jacques Doriot de ne pas vouloir être confondu avec son rival…

Laval compose et accepte le maintien du PPF de Doriot comme entité autonome au sein du « Front de la liberté ».

Ainsi, la farce criminelle qu’est l’État national français, devient la seule entité pseudo étatique à parti unique autorisant plusieurs partis politiques !

[34] Tel le socialiste Jean Bouhey, qui avait déjà voté non aux accords de Munich tout comme de Kérilis. Sa présence au Congrès lavalien s’explique par sa capture au front, ayant été volontaire aux armées dès septembre 1939. Il sera immédiatement renvoyé dans un stalag dont il s’évadera en 1942. Mais c’est une autre histoire...
[35] Et le tristement célèbre « Statut de Juifs » promulgué dans les jours qui suivent.
[36] Hitler qui vient d’annexer directement l’Alsace-Moselle, en a expulsé les fonctionnaires français.
[37] L’aviateur héros du précédent conflit mondial.
[38] Laval a immédiatement interdit les partis politiques de gauche sans mener, pour l’instant, une politique équivalente avec ceux de droite, soucieux de les rallier ainsi à l’État national.
[39] Et qui en paieront bientôt le prix…
[40] Parti social-démocrate allemand.
[41] Tout comme la milice citoyenne du XIXème siècle.
[42] À ne pas confondre avec la Légion étrangère qui elle continue le combat contre l’ennemi.
[43] Ancien membre de la SFIO.
[44] Ancien communiste.


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La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin Empty Re: La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin

Message par LFC/Emile Ollivier Mer 11 Nov - 17:33

Chapitre 9 : La guerre prend une nouvelle tournure

« L’armée italienne, broyée par les assauts répétés de l’aviation et soumis au feu incessant de l’artillerie alliée ne pouvait guère espérer tenir bien longtemps. Isolée par terre et par mer comme l’était l’armée du Duce, son seul espoir était dans la reddition. Ce ne pouvait en effet être un nouveau Dunkerque. Ce serait donc un nouveau Sedan. »
Journal de guerre de José Aboulker à propos du siège de Syrte, en Libye, octobre 1940.

Les services de renseignement britannique ont eu raison de signaler au premier ministre que l’Angleterre serait la prochaine cible d’Hitler. Le temps que la Luftwaffe se prépare et recomplète ses effectifs[45]. Concernant les effectifs de sa RAF, Churchill faisait ses comptes.

L’apport de 400 D.520 de l’armée de l’air (dont la moitié servent de réserves en pièces détachées du fait de la perte des usines aéronautiques françaises) permet aux Alliés d’avoir environ 1000 chasseurs à opposer à la Luftwaffe ennemie. Ainsi, l’apport français s’avérait déjà décisif en permettant une supériorité numérique alliée en terme de chasseurs du moins.

De plus, contrairement à ce que pourrait laisser croire la propagande nazie, les usines aéronautiques britanniques, tournent à plein régime et même plus vite que celles du Reich, comme on le saura après guerre ! Ces dernières produisent un peu moins de 560 chasseurs supplémentaires par mois !

Les commandants allemands ont prévu, comme phase initiale de la bataille, de s’en prendre aux convois britanniques dans la Manche, afin de tester les temps de réaction de la RAF et connaître ses doctrines d’engagement.

L’assaut est prévu pour le 10 juillet.

Pourquoi un assaut sur l’Angleterre et non l’AFN ?

Tout d’abord, Hitler a conscience de la supériorité sur le plan naval des Franco-britanniques, les premières semaines d’engagement peu flatteuses de la Regia Marina l’ayant prouvées.

Envoyer une armée en Afrique, c’est risquer de la voir finir au fond de la Méditerranée…

Mais le principal argument du Führer est que s’il envahit l’AFN, il neutralisera peut être la France, mais l’Angleterre restera en guerre.

« Ce qu’il nous faut, c’est faire tomber Churchill par une campagne aérienne massive sur la Grande-Bretagne. Une fois celui-ci renversé, nous négocierons la paix avec les Anglais. Le Juif Mandel aura alors du souci à se faire. » explique-t-il devant l’OKW.

Comme l’avait prédit Churchill...

Ainsi, c’est bel et bien en Angleterre, ou plutôt au dessus d’elle, que se jouera le sort du conflit.

Les Luftflotte 2 et 3, stationnées dans les pays occupés situés face à l'Angleterre (Hollande, Belgique, Nord de la France), épaulées par la cinquième, basée en Norvège, s’apprêtent à attaquer.

En effet, ce sont 2500 appareils, dont un tiers de chasseurs[46], qui s’apprêtent à porter l’estocade à la Royal Air Force qui, heureusement dispose déjà à elle seule d’un nombre équivalent de chasseurs, dont le très maniable et puissant Spitfire. En outre, l'Angleterre, le seul pays en 1940 à posséder un réseau radar efficace, dispose de moyens antiaériens importants.

Les forces britanniques sont sous le commandement du maréchal de l’air Hugh Dowding.

Le 10 juillet 1940 débute donc le Kanalkampf, la première phase de la Bataille d’Angleterre.

Les combats sont violents mais rassurent le Premier ministre britannique. En moyenne, les Allemands perdent 3,5 appareils pour 1 appareil franco/britannique abattu.

C’est aussi avec une stupéfaction facile à deviner que les aviateurs nazis virent surgir des nuages des Dewoitine 520 à cocarde bleu blanc rouge !

Churchill ne se prive pas pour manifester sa confiance à ses généraux et leur réitérer le fait qu’il a eu raison d’envoyer en Égypte les derniers blindés de l’armée britannique.

Quant aux Nazis, ils voient fondre leurs effectifs alors que le trafic maritime allié n’est pas interrompu dans la Manche.

Le 1er août, Goering déclenche la seconde phase de la bataille, un assaut direct et massif sur les aérodromes et les usines aéronautiques anglaises.

Et chaque jour le nombre d’appareils allemands manquant à l’appel continue de progresser.

Et que dire des pertes catastrophiques des Stukas qui finit par pousser les Nazis à les retirer des premières lignes !

Tout comme les ouvriers français en Juin 1940, les ouvriers anglais continuent de travailler pendant les raids, mais petit à petit, la production britannique commence à diminuer.

Le 15 août, Goering ordonne à la Luftflotte 5 basée en Norvège d’attaquer l’Écosse et le nord de l’Angleterre afin « d’occuper » les escadrilles britanniques qui y sont stationnées et éviter qu’elles ne viennent renforcer leurs homologues plus au sud. Le Maréchal de l’air, successeur désigné d’Hitler, rejette d’un revers de la main les objections de ses subalternes qui arguaient du coût probable de l’opération.

Les pertes allemandes sont très lourdes, à tel point qu’au final les appareils de la Luftflotte 5 seront transférés aux Luftflotte 2 et 3 stationnées en France.

Le Jeudi 15 août 1940 sera d’ailleurs surnommé le « Jeudi noir » par les aviateurs allemands.

En réaction, le Führer demande avec insistance à Mussolini de lancer ses propres attaques sur Malte, la Tunisie mais surtout Alger pour contraindre Français et Britanniques à retirer des escadrilles du front anglais afin de défendre la Méditerranée. Or, Mussolini est déjà engagée dans des attaques similaires, combats dans lesquels les escadrilles de la RAF basée à Malte et les Maurane-Saulnier 406, obsolètes, qui auraient été dépassés par les avions allemands, tiennent ici largement tête aux escadrilles mussoliniennes !

Comme l’avait prédit encore une fois Churchill...

Le Duce ne peut donc qu’ordonner d’intensifier les raids, au prix de lourdes pertes pour la Regia Aeronautica[47].

Le 4 septembre, Hitler, effaré par les pertes de son « invincible » Lutwaffe (Près de 900 appareils contre moitié moins pour les Franco-Britanniques), ordonne de cesser les raids de jour sur les cibles militaires au profit de raids nocturnes sur Londres et les grandes villes anglaises.

En effet, en dépit de la destruction de ses usines et de ses pistes, la RAF a encore de la ressource, alors que les pertes nazis restent élevées en dépit d’un semblant de rééquilibrage.

Churchill, enragé par l’attaque nazie sur sa capitale, ordonne un raid nocturne de représailles sur Berlin.

Goering peut désormais s’appeler Meier ![48]

Londres brûle mais l’Angleterre, et le Monde, sont sauvés.[49] 15 000 Britanniques périront cependant sous les bombes du Blitz[50] nazi sur les villes anglaises.

En dépit de l’espoir d’Hitler que les attaques sur les villes briseront le moral des Britanniques et les pousseront à la négociation, la population fait bloc autour de Churchill, rassérénée par les discours enflammée du premier ministre, la résistance efficace de la RAF et le fait que l’Angleterre peut aussi compter sur l’aide française.

Tandis que la guerre aérienne fait rage, la politique et la préparation de l’avenir n’en continue pas moins d’avoir de leur importance.

Tout d’abord, dans le domaine de l’éloquence, Mandel tînt ce discours aux Français, relayé par la BBC, sur les ondes de Radio-Alger.

« Aujourd’hui, 17 septembre 1940, la guerre a pris une nouvelle tournure.

Dans les cieux anglais, l’ennemi, effaré par ses lourdes pertes, faisant face à la détermination sans faille des alliés et à valeur de leurs pilotes, a renoncé aux attaques de jour sur l’industrie britannique au profit d’attaques terroristes et nocturnes sur les villes anglaises.

Cette bataille de Londres est un aveu d’échec pour le Führer et son aviation de mort.

En effet, loin de faire plier l’Angleterre, les combats au dessus de la Grande-Bretagne ont, au contraire, considérablement affaiblis l’aviation de nos ennemis, déjà réduite de 1000 appareils, lors de l’invasion.

Incapable de contraindre l’Angleterre, Hitler se venge, comme à son habitude, en massacrant en masse des malheureux civils innocents, méprisant qu’il est des lois humaines.

Varsovie, Rotterdam, Bordeaux et désormais Londres.

Ainsi, la guerre aérienne a pris une nouvelle tournure. Et elle n’est pas favorable à M. Hitler.

Sur le front maritime, la flotte italienne, bien que regroupée dans ses bases, a néanmoins été rudement frappé par les forces combinées des flottes françaises et britanniques tandis que chaque jour, les tentatives désespérées du Duce de ravitailler par convois ses colonies méditerranéennes, se heurtent à notre efficace blocus.

Mais les Allemands ne sont pas en reste. Faisant face à la puissance supérieure des marines combinées des Alliés, toute idée de voir les forces du Reich pouvoir se projeter, que ce soit en Afrique du nord ou bien en Angleterre, apparaît des plus illusoires. J’en veux pour preuve que pour frapper notre commerce, Hitler en est réduit aux mêmes bassesses que le précédent Empire allemand.

Flottes sous-marines, corsaires se cachant sous un faux drapeau allié ou neutre et bâtiments de guerre réduits à conduire une guerre de coups de main maritimes.

Contrat de ce fait à une guerre de harcèlement, le Reich démontre là son infériorité sur ce second front, ce qui est pour lui une tare, vu qu’il affronte les deux plus grands empires du monde, à la fois en terme démographique mais également de superficie et de ressources diverses.

Bientôt, nous aurons reconstitués nos forces et M. Hitler n’y pourra rien.

La guerre navale a pris la même tournure que lors du précédent conflit.

Le temps joue pour nous.

Sur le front terrestre, ici, en Afrique, je puis désormais vous confirmez l’écrasement des lignes italiennes, dont les forces en pleine débandade, refluent en désordre, que ce soit en Cyrénaïque ou en Tripolitaine, sous l’action combinée et efficace des forces de l’Empire français, du Commonwealth britannique mais aussi, ne les oublions pas, de nos frères d’armes polonais, tchèques, belges et des autres nations membres de la grande coalition alliée ainsi que de la multitude des volontaires étrangers[51] se battant pour la cause de la liberté.

Pour les criminels fascistes, qui mènent l’Italie à sa ruine, la justice, elle aussi, sera rendue !

La guerre a, ici aussi, pris une nouvelle tournure.

Sur le front de la guerre du renseignement, chaque jour de nouveaux Français, désireux de sauver la patrie, rejoignent les rangs de l’armée de l’intérieur. Leurs renseignements sur les activités ennemies, cumulés petit à petit par les Alliés, sont vitaux dans la préparation de la grande reconquête.

Quant aux traîtres au service de la clique, ils ne perdent rien pour attendre. Se croyant aujourd’hui dans le camps des victorieux, ils verront que c’est leurs maîtres allemands qui seront au final écrasés par les forces chaque jour grandissantes des Alliés tandis que celles du Reich, elles, s’amenuisent petit à petit, comme le montre simplement les évènements sur terre, sur mer et dans les airs.

Ils paieront leurs crimes lorsque le vent aura définitivement tourné en faveur du camp de la liberté.

Peuple français, l’heure de la revanche sonnera bientôt.

Et ce jour là, la justice aura le dernier mot bien qu’il faudra, et vous en êtes conscients mes amis, encore subir de très nombreuses épreuves avant que les criminels ne connaissent leur juste châtiment.

Le jour de gloire arrivera, cependant.

« Aux armes, citoyens ! » »

Sur le plan politique, le 30 septembre 1940, en grande partie suite au « forcing » exercé par les Français, les Franco-Britanniques font une déclaration commune dénonçant la nullité des accords de Munich et annonçant le retour à la Tchécoslovaquie des territoires sudètes après la victoire commune. Cette dénonciation est la continuité même de la dénonciation du second arbitrage de Vienne, accordant la Transylvanie du nord roumaine à la Hongrie ainsi que celle des accords de Craiova par lequel le nouveau dictateur roumain, Ion Antonescu, cède la Doubroudja du sud à la Bulgarie.[52]

Georges Mandel, ancien ministre des colonies, est bien conscient des réformes nécessaires au maintien de l’unité de « l’Empire » dans l’avenir.

Il décide donc d’organiser l’élection d’un « Conseil de l’Empire », élection à laquelle pourront participer non seulement les citoyens français mais aussi les « Indigènes ».

Conscient que la chambre des députés et le Sénat seront hésitants face à une réforme aussi audacieuse, Mandel utilise les armes qui lui procure la loi française. Dans le strict respect des règles que la République s’est donnée à elle-même depuis son entrée en guerre.

En effet, les premiers sondages de députés ont confirmé l’opposition virulente de la droite au projet. Mais aussi celle, plus sournoise, du centre-gauche radical.

Ainsi, le propre président de la chambre des députés, Édouard Herriot, issu des rangs de ce parti, travaille en sous-main pour liquider un projet « qui fera de la France une colonie de ses ex-colonies » !

Mandel s’appuie donc sur la loi du 8 décembre 1939 modifiant l'article 36 de la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation de la nation en temps de guerre qui l’autorise à procéder à des décrets-lois pour gouverner le pays en guerre.

Léon Blum, chef de la diplomatie française, est pleinement satisfait. En 1936, il s’était vu refuser par les chambres l’obtention de la citoyenneté française aux Musulmans d’Algérie.

L’élection aura lieu dans les 6 mois, le temps de l’organiser. Le « conseil de l’Empire » devra débattre et voter des réformes concernant l’Empire et, notamment, du statut des territoires le constituant et des droits futurs de ses habitants.

C’est le tout nouvel organe de presse de la France en exil, « La France combattante », qui publie l’annonce dans ses colonnes.

« La France combattante » regroupe dans ses équipes des journalistes volontaires, issus de différentes feuilles, et désireux de porter la voie de la République contre Laval et les collaborateurs.

Mandel, en tant que fils spirituel de Clemenceau, ne connaît-il pas, d’ailleurs, l'importance de la presse ?

Le chef du gouvernement de la France en exil est désormais un adversaire résolu d’Herriot. Après son opposition à la défense de Lyon, voilà qu’ils s’opposent encore une fois à lui et à sa conduite du bateau France !

Mais Mandel prépare déjà, à l’aide du Général et Louis Marin, sa riposte.

Il faut en effet les mains libres pour conduire la France en exil…

Une entrevue secrète a lieu à Gibraltar entre Sir Andrew Duncan, ministre britannique des approvisionnements (qui gère les armements) et Raoul Dautry.

Les 2 hommes disposent d’un mandat de leurs gouvernements respectifs pour négocier la mise en commun des ressources des 2 alliés dans la création d’une arme nouvelle.

L’arme atomique.

De cette entrevue naîtra le projet franco-britannique Nero/Néron, qui travaillera en parfaite intelligence avec le projet américain dénommé lui Manhattan mais permettra aux 2 puissances européennes d’obtenir leur propre armement, et donc une autonomie stratégique dans l’avenir.

Frédéric Joliot-Curie, fils de Pierre et Marie Curie, sera le meneur de la partie française du Projet Néron.

C’est donc en Afrique du nord que la guerre terrestre recouvre ses droits avec le déclenchement de l’offensive conjointe des Franco-britanniques contre la Libye italienne.

C’est l’Opération Compas/Compass, déclenchée le 13 septembre.

En vue d’équiper l’infanterie portée, les Bren Carrier gracieusement fournis par les Britanniques ne suffisaient pas. Il a donc fallu réquisitionner partout en Afrique du nord les véhicules aptes pour le désert et qui ne servaient pas au transport de la logistique. C’est donc une foule de véhicules disparates qui se met en branle à compter du 13 septembre 1940 pour transporter l’infanterie et la logistique

Pour une fois, ce sont les Alliés qui font preuve d’audace et qui surprennent les forces italiennes par l’utilisation en masse et en des points précis de leur force blindée.

Le fleuron de l’attaque française est la toute nouvelle 1ère division blindée, produit de la refonte des DCr et autres DLM repliées en AFN sous la houlette du général Delestraint et de Charles de Gaulle. Elle est commandée par le général Touzet du Vigier.

Déjà moralement fortement éprouvée par les « Seigneurs du désert » et considérablement affaiblie par le blocus allié, l’armée italienne craque rapidement.

La retraite devient rapidement débâcle, tant elle est incapable d’arrêter l’attaque alliée par manque,  non de courage mais d’équipements et, surtout, d’un chef compétent.

Tronçonnés par la 1ère DB, les divisions d’infanterie s’infiltrent dans brèches ainsi ouvertes et foncent vers l’est.

Tripoli tombe le 19 septembre et le drapeau français flotte désormais sur le palais de Graziani, qui a pris la poudre d’escampette.

À l’est, en Cyrénaïque, la Western Desert Force britannique, attaque depuis sa pointe avancée du Forte Capuzzo et opère un vaste mouvement tournant par le désert qui la mène à Tobrouk qui tombe rapidement. Là aussi, les Italiens sont en déroute. L’offensive générale des Alliés est donc un succès bien plus grand que ce qu’ils avaient pu prévoir au départ, ce qui redonne du baume au cœur à leur population, que ce soit la malheureuse population française de Métropole, qui subit le joug ennemi, ou bien la population urbaine britannique, frappée par les bombardements allemands.

Les Italiens, poursuivis sans relâches par les soldats alliés se placent en hérissons dans les villes côtières, utilisant les cités libyennes comme bouclier, ce qui retarde la ruée alliée et la jonction franco-britannique.

Au milieu de cette guerre, un officier de la 1ère DB s’illustre encore plus que les autres. Issu de l’infanterie, vétéran de la campagne de France, il a donc également une grande maîtrise des combats entre fantassins.

Arrivé dans la capitale provisoire de la République française après une épopée épique à travers la France envahie puis l’Espagne franquiste, l’officier y découvrit une ville pleine de réfugiés de Métropole. Officiers méritants évacués en priorité, ingénieurs en armement, exilés politiques qu'ils soient des Allemands ou des Autrichiens juifs ou antifascistes ou enfin des Républicains espagnols justement.

Mais il n’eut n'a pas vraiment le temps de découvrir Alger car il fut rapidement convoqué au ministère de la guerre pour rencontrer le ministre en personne.

Charles de Gaulle, dont il avait lu les ouvrages et connaissait les théories.

Bien que très occupé par sa tâche de ministre de la Guerre et de réorganisation de l’armée française, le Général de Gaulle n’en prend pas moins en effet le temps de rencontrer tous les Français qui sont parvenus à s’échapper, par leurs propres moyens, de Métropole pour rallier l’Afrique du nord.

Bien qu’ayant servis dans l’infanterie, de Gaulle vit en lui un officier idéal pour la toute nouvelle 1ère division blindée en cours de formation par amalgame des différents Bataillons de Chars de Combat présents en Afrique du nord ou rapatriés du Levant[53]. Le ministre le verse donc dans cette nouvelle unité avec le grade de commandant[54] car avec le désastre en Métropole, la capture de nombreux officiers et l’incompétence crasse montrée par les autres, l’armée française manque cruellement d’officiers aptes à la diriger à sa tête.

Il rejoignit donc son unité dans le sud tunisien où elle s’entraînait déjà pour incorporer en urgence les tactiques nouvelles prônées par le Général.

Ces coups de colère, mais surtout sa fougue communicatrice qui avait le don de motiver ses hommes, firent rapidement le tour de l'armée et était parvenu aux oreilles de De Gaulle, qui était bien heureux d'avoir fait monter en grade le noble picard.

Il savait d’ailleurs, comme de Gaulle, aussi très bien utiliser le verbe pour gonfler le moral de ses troupes auxquels il promet qu'elles participeront à la future libération de la France. Troupe composée d'officiers volontaires prônant des méthodes nouvelles basés sur celles qu’avaient employés l’ennemi contre la France, baroudeurs ayant fait les colonies et bien décidés à « casser du Boche », volontaires d’Afrique du nord ou subsaharienne désireux de défendre leur « mère-patrie » contre la barbarie nazie.

En Afrique, il a désormais la capacité de préparer son unité à la guerre nouvelle grâce au vivier humain de l’Empire, la protection de la flotte et de la Méditerranée et l'armée française ne faisait désormais plus face qu'à un ennemi bien plus faible que les Allemands et replié derrière sa frontière.

Bien que préparant ses forces pour l’offensive, l’armée française n’était donc pas restée inactive comme on l’a vu. De plus, des corps francs mobiles, harcelaient les positions avancées et les convois de ravitaillement italiens.

D’ailleurs, des prisonniers avaient été fait et interrogés.

Le commandant n’y alla pas par quatre chemins et proclama l’ennemi « démoralisé ».

Il n’était d’ailleurs pas loin de la réalité car en effet, la plupart des soldats italiens, déjà stupéfait par l’annonce qu’il devait faire la guerre à la France, furent doublement démoralisés par le « Sursaut » de la République, par le manque de ravitaillement du fait du blocus opéré sur les côtes libyennes par la force combinée des marines britanniques et françaises et surtout par la catastrophe de Tarente. Mais cela n’était valable que pour le soldat italien de base, les divisions d’élite et la garde prétorienne du Fascisme que représentait le corps des chemises noires conservaient tout leur mordant.

Cet homme qui n’a pas peur du danger et qui sait motiver ses troupes, c’est Philippe de Hauteclocque.

Après 1 mois de furieux combats, les Français et les Britanniques font leur jonction à Syrte, où se sont regroupés les troupes italiennes en déroute. Les Alliés ayant nettoyés une par une les villes côtières de toute présence italienne, les derniers débris des troupes italiennes de Libye s’y sont agglutinés. Celles-ci sont pilonnées non seulement par l’artillerie des unités terrestres françaises et britanniques, qui les encerclent, mais aussi par les canons des navires stationnés au large.

Un nouveau Dunkerque se déroule sous les yeux de Philippe de Hauteclocque, qui assiste au pilonnage de la malheureuse cité libyenne et des troupes de Mussolini par les canons alliés. Mais cette fois, aucune évacuation est possible pour l’assiégé, la Marine nationale et la Royal Navy contrôlant les mers. Seuls quelques privilégiés ont pu fuir par avion, tel Rodolfo Graziani, le commandant en chef Italien en Libye avant le commencement de l’assaut et des bombardements alliés qui ont transformés les aérodromes de la ville en vaste champs de cratères.

C’est donc un général italien de second rang, bombardé commandant en chef d’une armée moribonde, qui signe l’acte de capitulation des armées encerclées à Syrte.

L'un de ses soldats, Massimo Bara, futur grand auteur italien et qui survivra au naufrage du Normandie en février 1942, fera le récit poignant de la détresse profonde des soldats italiens soumis au blocus allié qui les isolent de leur Métropole et de leurs familles puis de l'assaut soudain et décisif des alliés sur la colonie, le tout sur fond de remise en cause de sa « foi » dans le Duce chez le jeune homme de 20 ans qu'il était alors dans son célèbre roman Come scritto nella sabbia.[55]

Comme l’étaient les rêves de grandeur de Mussolini...

De Hauteclocque, passionné d’histoire, se rend rapidement compte qu’il n’a pas assisté à un nouveau Dunkerque, mais bien à la version italienne de la défaite de Sedan, où une armée isolée de ses bases s’est rendue après un bombardement d’enfer.

La reddition ennemie obtenue, de Hautecloque monte sur un char italien abandonné et harangue ses soldats.

« Soldats ! Jurez de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur la cathédrale de Strasbourg ! »

En ce jour d’octobre 1940, de Hauteclocque vient de prononcer ce qui sera connu plus tard comme le « Serment de Syrte ».

La troupe enthousiaste, s’exclame en cœur. « Nous le jurons ! ». Tous, « Sénégalais », Nord-Africains ou Métropolitains, ont désormais jurés de libérer la mère patrie, même s’ils doivent en mourir.

De Gaulle est désormais sûr d'avoir affaire à un l'un des officiers dont la France a besoin pour se relever et reconquérir sa Métropole. De Hauteclocque, pour ses exploits, reçoit le grade de colonel, toujours au sein de la 1ère Division blindée qui sera bientôt appelée pour de nouvelles batailles.

Notons que les événements récents firent revenir De Hauteclocque sur ses préjugés d’avant-guerre, notamment l’antisémitisme. En effet, voyant les Juifs d’Afrique du nord et rapatriés de Métropole s’engager en masse et avec enthousiasme dans l’armée française, de Hauteclocque dit à l’un de ses hommes. « Avant, je ne savais pas supporter ces gens-là. Aujourd’hui, je me rends compte que ce sont de fiers Français et de bons patriotes ! »

Bien que politiquement opposés, le nouveau colonel devînt ainsi proche de José Aboulker, jeune sous-officier volontaire affecté à la compagnie du nouveau colonel.

Mais bien d'autres combats auront lieu avant que la troupe de de Hauteclocque ne foule à nouveau le sol de la Mère-Patrie.

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A17
Philippe de Hauteclocque

[45] Étrillés par la bataille de France et le transfèrement au-delà des mers des centaines d’aviateurs abattus, capturés par les Alliés, comme nous avons vu.
[46] Soit 850 appareils.
[47] L’aviation italienne.
[48] En référence à l’expression allemande « Vous pourrez m’appeler Meier » lorsque que l’on est certain que quelque chose ne se produira pas. Or, Goering avait promis qu’aucune bombe ne tomberait sur Berlin !
[49] Ce qui fit dire à Churchill « Never in the field of human conflict was so much owed by so many to so few ». Soit en Français, « Jamais dans l'histoire des conflits tant de gens n'ont dû autant à si peu »
[50] Que Radio Alger appelle « Bataille de Londres ».
[51] Mandel, à dessein, ne mentionne pas directement les Républicains espagnols, pour ne pas irriter Franco.
[52] Et en conséquence de quoi les Alliés rompirent leurs relations diplomatiques avec la Hongrie puis la Bulgarie.
[53] Où ils étaient stationnés en vue d’une opération dans les Balkans pour l’instant hors de propos.
[54] Il était capitaine
[55] « Comme écrit dans le sable » en Français.


Dernière édition par Emile Ollivier le Mer 18 Nov - 16:42, édité 8 fois
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Message par Collectionneur Mer 11 Nov - 18:59

Je recommence juste la lecture. Un mot oublié dans le premier message :

La dernière phase de la conférence se tient à Tours, le 13 juin.

Le but de ce dernier jour de conférence est de déterminer ... sort de la France pour l’avenir.

Au fait, en PDF, cela fait combien de pages ?


Dernière édition par Collectionneur le Mer 11 Nov - 19:54, édité 1 fois
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Message par LFC/Emile Ollivier Mer 11 Nov - 19:18

Salut Collectionneur Smile

Je remanie beaucoup mais pour l'instant 156 pages. Et le tome 1 s'arrête à Pearl Harbor.
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Message par Rayan du Griffoul Mer 11 Nov - 21:59

156 pages ca c'est du boulot

Et ça va faire combien de tomes ?
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Message par Thomas Mer 11 Nov - 22:45

Du coup vu que tu veux des feedbacks pour aller vers un éventuel livre en voici :
Ton texte est trop aéré et n’est pas structuré. Il n’y a pas de paragraphes et des sauts de ligne à chaque phrase ou presque. Il faut que tu fasses des paragraphes mêmes cours.
De la même manière, chaque chapitre traitant de plusieurs sujets différents, il faudrait que tu les découpes en sous-parties. Par exemple, la partie sur la bataille Angleterre, celle sur la guerre en AFN…
D’ailleurs tu annonces la déroute italienne dès le début du chapitre, mais n’amène l’opération Compass que bien après.
Encore une fois, capitalise sur les éléments que tu mets en note de pied de page pour ajouter au récit au lieu d’en faire des notes.

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Message par LFC/Emile Ollivier Jeu 12 Nov - 10:45

Rayan du Griffoul a écrit:156 pages ca c'est du boulot

Et ça va faire combien de tomes ?

156 pages, c'est juste le tome 1. A priori, il y en aurait 3.
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Message par Rayan du Griffoul Jeu 12 Nov - 12:29

Ah 3 tomes
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Message par LFC/Emile Ollivier Jeu 12 Nov - 14:11

Collectionneur a écrit:Je recommence juste la lecture. Un mot oublié dans le premier message :

La dernière phase de la conférence se tient à Tours, le 13 juin.

Le but de ce dernier jour de conférence est de déterminer ...  sort de la France pour l’avenir.

C'est corrigé !
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Message par LFC/Emile Ollivier Ven 13 Nov - 9:26

Chapitre 10 :  Le conflit s’étend

« Le Führer apprendra dans la presse que j’ai occupé la Grèce ! »
Mussolini, à l’annonce de l’entrée des troupes allemandes en Roumanie.

Le Régime fasciste roumain finit de sombrer dans la honte et la trahison envers les intérêts supérieurs de sa patrie quand il autorise le 8 octobre 1940 la Wehrmacht à pénétrer et à stationner sur son territoire. Voulant mettre main basse sur le pétrole roumain, les Nazis découvrent à leur arrivée à Ploiesti que des agents des services secrets français ont partiellement détruits les installations pétrolifères !

Malgré une traque sévère, les agents de Léon Wenger parviendront à s’échapper par la Yougoslavie.

En parallèle, Mussolini, qui considère la puissance latine comme sa chasse gardée, est furieux et décide de « montrer ses muscles » à Hitler. La cible toute désignée est la Grèce, d’ailleurs déjà victimes d’agressions italiennes[56] et considérée comme bien plus faible que la Yougoslavie, sur lequel le Duce avait également des vues.

De plus, cela devait non seulement permettre une communication bien plus facile avec les îles du Dodécanèse italien mais également, de manière moins avouable, de faire oublier le désastre africain au peuple italien.

Et tandis que la Libye s’effondre, Mussolini a donc déjà tourné les yeux ailleurs…

Le 27 octobre, tandis que des milliers de soldats italiens partent en captivité en Afrique, l’ambassadeur italien remet un ultimatum au dictateur grec Ioannis Metaxas qui le rejette avec hauteur et en Français de surcroît ![57]

Quelques heures plus tard, l’armée italienne franchit la frontière entre l’Albanie et la Grèce.

Heureusement pour le Duce, la Regia Marina et l’aviation italienne étaient encore assez vaillante pour conserver le contrôle du détroit d’Otrante, séparant l’Italie du sud de l’Albanie, ce qui permit d’y envoyer la force d’invasion.

Le plan italien, Emergenza G[58], prévoit l’occupation du pays en 3 phases. Pour commencer, l’on occupera l'Épire et les îles Ioniennes.

Dans un second temps, l’armée italienne effectuera une percée en Macédoine de l'Ouest vers Thessalonique afin de contrôler le nord de la Grèce.

Enfin, l’Italie envahira le reste du pays.

Les troupes italiennes sont commandés par Sebastiano Visconti Prasca, un membre de la célèbre famille noble des Visconti.

Bien que les piètres performances de l’armée italienne depuis le début du conflit[59] soient évidentes, personne ne s’attendait à ce que l’armée grecque parvienne à enrayer seule, avant même l’arrivée des renforts franco-britanniques, la machine de guerre mussolinienne.

Enrayée dès le 9 novembre dans la partie occidentale du front, en Épire, l’offensive est également stoppée en Macédoine de l’ouest[60] le 13 après la destruction de la division Julia, encerclée par les Evzones, l’élite de l’armée grecque.

Dès lors, le commandant en chef grec, Alexandros Papagos, peut lancer une contre-attaque en direction de Korçë, en Albanie qui est prise le 22 novembre !

Soucieux de montrer qu’ils se battent non pour des conquêtes territoriales mais pour libérer les victimes des dictatures fascistes, les Franco-britanniques convainquent les Grecs et l’ancien roi d’Albanie, Zog Ier, de signer un accord qui stipule que les territoires d’Albanie dont ont été chassés les Italiens seront dirigés par une administration albanaise provisoire.[61]

Cependant, cette administration est entièrement à construire et, en attendant, ce sont bel et bien les Grecs qui dirigent les zones d’Albanie qu’ils ont conquis, bien que cela montre que l’Albanie est désormais un gouvernement allié en exil au même titre que la Tchécoslovaquie par exemple.

Cette extension inattendue du confit impose aux deux camps de prendre des mesures.

À Alexandrie, se déroule une rencontre entre Mandel, Churchill et leurs principaux ministres. À l’ordre du jour, la stratégie alliée dans les Balkans en général et en Grèce continentale en particulier ainsi que la menace qui pèse sur la Corse depuis l’instauration d’un blocus par l’Allemagne, qui a rameuté son aviation dans le sud de la France et en Italie.[62]

Tout d’abord, les 2 alliés décident d’accéder à la demande de la Grèce d’un renfort de 9 divisions pour participer à se défense contre une intervention allemande, en dépit des craintes de certains officiers alliés, notamment Wavell.[63]

Le corps expéditionnaire alliée, surnommé « Armée d’Orient »[64] par la presse française en exil, est cependant essentiellement constitué de troupes britanniques[65]. Sa mission est double. Soutenir directement les Grecs dans leur conquête de l’Albanie mais également sécuriser les frontières bulgare et yougoslave[66].

L’ensemble des troupes alliées en Grèce sont sous commandement unique britannique. Leur commandant est le héros d’Afrique du nord, Richard O’Connor.

En parallèle, les Alliés décident de lancer la conquête des îles du Dodécanèse, désormais permise par leur supériorité maritime totale dans la région et de l’« écran » protecteur formé par la Grèce, désormais membre de la coalition alliée.

Privés de ravitaillement, les Italiens n’opposèrent qu’une faible résistance au débarquement allié, consécutif à un intense bombardement des cuirassés et de l’aviation franco-britanniques. Seules les fanatiques chemises noires opposèrent une résistance aussi inutile que désespérée.

Les 2 alliés décident également de tout faire pour reconstituer un front balkanique en envoyant des représentants à Ankara.

Concernant la Corse, les 2 marines[67] assureront la protection de l’île contre le probable assaut de l’Axe.

En effet, Hitler a planifié un assaut aéroporté sur l’île française, dernière forteresse républicaine en Métropole, et donc cible privilégiée du Führer ainsi que de Mussolini, qui veut annexer l’île.

L’Autrichien a de même décidé, malgré les protestations des commandants de la marine allemande, qui estiment les moyens déjà insuffisants pour la « Bataille de l’Atlantique », l’envoi de 20 U-Boots en Méditerranée pour s’en prendre à la fois aux convois alliés traversant le chenal entre la Sicile et la Tunisie mais, surtout, pour attaquer les convois qui ne cessent de déverser des renforts alliés en Grèce ainsi que renforcer le blocus de la Corse.

Si la France envoie des divisions « libérées » par la défaite axiste en Libye[68] et l’achat de la neutralité espagnole, dans l’île, Churchill, envoie une division symbolique, ayant allouer l’essentiel de ses moyens à la défense de la Grèce, dans une sorte de partage inavoué des tâches entre alliés.

La défense de la Corse est confiée au général Mollard.

Tandis que la Grèce a rejoint les Alliés, contre le gré de son dictateur, la majorité des pays d’Europe de l’est adhèrent au pacte tripartite. C’est le cas de la Slovaquie, de la Roumanie et de la Hongrie tandis que seule une crise interne a empêché la Bulgarie d’en faire autant, provoquant l’ire d’Hitler, très pressé d’en finir avec la Grèce tant la débâcle italienne s’intensifie en Albanie[69]

Du côté des Amériques, les franco-britanniques peuvent souffler. Leur ami, Franklin Roosevelt, a été réélu face au républicain Willkie avec 54,74 % des voix[70]. Ils peuvent donc toujours compter sur l’aide américaine pour lutter contre l’Allemagne et ses alliés.[71]

Alors que les Alliés prennent pied en Grèce, Hitler reçoit à Berlin, Viatcheslav Molotov, le ministre stalinien des affaires étrangères et, comme on le sait, négociateur du pacte qui permit au Führer de mettre le feu à l’Europe…

Molotov, fut accueilli par Ribbentrop à la gare, décorée avec des drapeaux soviétiques et nazis au-dessus d'un grand panier de fleurs, avec un orchestre qui jouait l'Internationale pour la première fois depuis 1933…

Tandis que Ribbentrop puis Hitler fanfaronnaient sur la défaite prochaine des Alliés avant de proposer à l’URSS un accès aux mers chaudes via le golfe arabo-persique, Molotov, sur ordre de Staline, réclama l’extension de la sphère d’influence russe en Roumanie et en Bulgarie.[72]

Or, la première était déjà dans la sphère nazie tandis que la seconde était sérieusement draguée par le Troisième Reich…

Molotov demanda également, de façon péremptoire, pourquoi les troupes allemandes se positionnaient en Finlande, pourtant dévolue à l’URSS selon les termes du pacte germano-soviétique.

Notons que certains entretiens durent avoir lieu dans un abri anti-aérien du fait des raids de la RAF sur Berlin !

Les négociations se conclurent sur un échec. Hitler eut ces mots.

« L’intransigeance de Molotov est bien la preuve de ce que j’ai constamment avancé. À savoir que les Soviétiques ont pactisé avec les Franco-britanniques pour détruire l’Allemagne ! Seul l’espoir de l’intervention russe dans le conflit pousse ceux-ci à continuer la lutte.

Qu’à cela ne tienne, nous détruirons l’URSS l’année prochaine... ».

Hitler ordonne alors d’intensifier les préparatifs de l’opération Barbarossa.

Quelques jours plus tard, le dictateur allemand tance vertement le ministre italien des affaires étrangères, Ciano, pour la politique conduite par l’Italie en Grèce et lui enjoint d’au moins amener la francophile Yougoslavie, dans les filets de l’Axe en lui promettant Salonique si elle entre en guerre contre la Grèce. Plus discrètement, Hitler promet au ministre italien d’importants moyens allemands pour la reconquête de la Libye et l’invasion de l’Afrique du nord française et de l’Égypte.

Mais pas avant 1942…

En France métropolitaine, le 11 novembre est célébré, malgré l’interdiction faîte par les autorités d’occupation, par les étudiants parisiens. Des centaines d’arrestations seront procédées par les forces allemandes en représailles.

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A18
Ioannis Metaxas (Source Wikipédia)

[56] Citons la destruction du croiseur grec Elli en rade de Tinos par le Delfino, un sous-marin italien en août.
[57] En effet, celui-ci répondit « Alors, c’est la guerre. » Devenu « okhi », « non » en grec pour la bonne cause.
[58] Urgence Grèce.
[59] Sauf en Afrique orientale.
[60] Le secteur oriental du front
[61] Au grand dépit des Grecs qui voulaient récupérer l’Épire du nord albanaise. Cependant, la Grèce se voit promettre, en compensation, le Dodécanèse italien après la victoire commune.
[62] Ce qui contraint d’ailleurs Hitler à mettre fin à la « Bataille de Londres ».
[63] Ce qui lui vaudra le mépris de Churchill.
[64] Appelée ainsi en souvenir du premier conflit mondial. Mais l’essentiel des moyens défendant le secteur seront britanniques comme nous le verrons.
[65] Le corps expéditionnaire allié ne compte qu’une division française. Le gros de l’armée d’Alger ayant une autre mission comme nous allons le voir…
[66] La première étant sur le point de signer le pacte Tripartite et grande ennemie de la Grèce depuis la second guerre balkanique, la seconde louvoyant, via le régent Paul, au grand désespoir des officiers serbes…
[67] La Marine nationale est désormais de nouveau opérationnelle.
[68] Et notamment la redoutable 1ère Division blindée française
[69] Vlorë vient de tomber.
[70] Mais 449 grands électeurs contre 82 pour son adversaire.
[71] Bien que Willkie était loin d’être un isolationniste.
[72] Ainsi que le contrôle des détroits turcs.


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Message par LFC/Emile Ollivier Ven 13 Nov - 14:35

Chapitre 11 : Hitler attaque au sud

« Dans les montagnes des Balkans,
Les moteurs de nos Panzers chantent.
Blindés allemands dans l’enfer des cîmes,
Prêts au combat contre les Alliés.
Cliquettent les chaînes, grondent les moteurs !
Dans les Balkans, les chars avancent ! »
Hymne du Balkankorps.

Bien que furieux des atermoiements bulgares, Hitler préféra jouer la prudence et ne pas perdre un allié potentiel si ce n’est probable en lançant son armée à travers la Bulgarie pour attaquer directement la Grèce. D’autant que, sans l’alliance yougoslave, cela équivaudrait à devoir affronter une ligne Metaxas désormais tenue par les Alliés franco-britanniques.

Mais la situation était dramatique en Albanie et requérait des mesures urgentes.

Tandis que les Alliés avaient les yeux braqués sur la Corse et attendaient d’un jour à l’autre un assaut allemand, Hitler délaya celui-ci et préféra faire passer en force un convoi dans le détroit d’Otrante, sous lourde escorte navale italienne et aérienne allemande, qui transportait le nouvellement formé Balkankorps, soit 45 000 hommes et près de 250 chars.

Rommel et ses troupes débarquent à Durrës fin novembre. Le fin stratège a recours a une astuce pour faire croire que ses forces sont largement supérieures à ce qu’elles sont en réalité aux yeux des espions alliés.

Il leur fait faire simplement le tour du pâté de maison afin qu’elles passent plusieurs fois au même endroit…

À peine le défilé terminé que Rommel lance ses troupes au sud, contre les Britanniques et les Grecs qui ont mis en déroute les Italiens.

Le premier choc a lieu aux environ de Fier, près des ruines de l’antique cité d’Apollonie. Le diable nazi repousse les Anglais et se lance à leur poursuite, en dépit des protestations des officiers italiens, qui arguent que la mission de l’Allemagne était purement défensive…

En quelques jours, Vlorë est reprise et Rommel se dirige vers Korçë.

Celui que l’on commence à surnommer « Le Renard des Balkans » fera-t-il tomber la Grèce à lui tout seul ?

Non, car les alliés grecs et britanniques reçoivent des renforts et parviennent à bloquer Rommel le long de la frontière entre l’Albanie et la Grèce.

En dégarnissant la frontière bulgare…

En parallèle, l’Allemagne multiplie les pressions sur cette même Bulgarie mais aussi sur la Yougoslavie, pour qu’elles adhèrent au pacte tripartite. La Bulgarie, dont le roi est bien conscient d’être sur la « liste noire » des alliées suite à la rupture des relations diplomatiques consécutives à l’annexion de la Doubroudja du sud roumaine par son pays, cède et laisse l’armée allemande pénétrer sur son territoire. Bientôt les Gebirgsjäger (troupes de montagnes allemandes) s’en prennent à la redoutable Ligne Metaxas. Concernant la Yougoslavie, si le régent Paul est prêt à s’allier à l’Axe, il sait qu’il doit compter sur un peuple serbe et un corps d’officiers acquis à la cause alliée. Néanmoins, la Yougoslavie signe un traité d’amitié avec la Hongrie pro-allemande, dont on sait qu’elle s’est déjà bien gavé de territoires appartenant à ses voisins avec la bénédiction allemande…

Rommel désormais fermement installé dans les Balkans, la situation apparaît stabilisée en Albanie. Hitler peut donc déclencher son attaque sur la Corse.

Nom de code : Opération Merkur.

Certes, les défenses de la Corse ont été renforcées par l’arrivée de plusieurs divisions en provenance d’Afrique du nord, mais l’ampleur des moyens aériens mobilisés par l’Axe lui permet de compenser son infériorité au niveau naval.

Les Allemands, qui ont pu juger de la qualité des troupes italiennes, décident que le premier choc sera porté par leurs parachutistes ainsi que par leurs troupes alpines, transportées par planeurs. L’objectif de ces forces sera les aérodromes de l’île, dans une sorte de réédition, mais à une échelle bien plus grande, de l’attaque sur les Pays-Bas en mai 1940 alors que malheureusement, l’essentiel des forces alliées sont postées sur les plages.

Les Italiens, notamment les Alpini, ne participant qu'à la seconde vague, qui débarquera sur les côtes corses.

L’assaut général est déclenché dans la nuit du 15 au 16 décembre 1940.

Il a été précédé d’une opération de diversion consistant en un assaut aérien sur Malte, la Tunisie et la capitale de la France en exil, Alger, mené par la Luftwaffe[73] et débute par des raids de terreur nazis sur les grandes villes de l’île.

Au soir du 16, tandis que l’île est devenue une gigantesque champs de bataille, Bastia, Ajaccio et Corte sont en flammes. Des milliers de civils ont péri sous les bombes de l’Axe.

Il faudra l'intervention de la police et de la gendarmerie pour empêcher la foule, ivre de colère, de lyncher les équipages des appareils abattus par la chasse française.

Concernant les combats à proprement parler, les forces conjuguées de l’armée de l’air, basée sur l’île, et de la flotte combinée des Franco-britanniques, permettent d’infliger de lourdes pertes à la Regia Marina, déjà largement affaiblie par les combats précédents.

On pense notamment à la bataille de Tarente.

Néanmoins, la Marine italienne parvient à faire débarquer son infanterie en soutien aux parachutistes et aux chasseurs alpins allemands débarqués par voie aérienne durant la nuit et ce, près des pistes aériennes.

Les débarquements italiens ont lieu uniquement sur la côte orientale de l’île, autour de Bastia, Aléria et Porto-Vecchio, afin de garantir plus de sûreté aux bâtiments.

Les forces de l'Axe voient non seulement s’opposer à elles l’armée de terre, mais également les forces de gendarmerie soutenues par de nombreux volontaires, se battant souvent avec leurs armes personnels, des fusils de chasse ou bien des souvenirs de guerre de 14-18 !

Les parachutistes allemands et les fantassins italiens font en effet face à la résistance héroïque du peuple corse en plus de celle des troupes du général Mollard, défenseur acharné de la souveraineté de la France et ardent partisan de la lutte contre les ennemis de celle-ci.

Néanmoins, cette résistance courageuse, qui sera d’ailleurs encensée par la presse américaine, finira écrasée par les forces additionnées de la Luftwaffe, de la Regia Aeronautica qui attaque en force et de l’arrivée continue des renforts terrestres italiens dans l’île tandis que la résistance des Français est d’emblée sapée par la capture de la majeure partie des pistes aériennes par les troupes de l’Axe au bout de quelques jours.

À cela s’ajoute le relatif isolement de l’île, coincée entre la Sardaigne, la péninsule italienne et la France occupée.

Cependant, les pertes ont été terribles pour la marine de Mussolini, ses troupes d’élites de chasseurs alpins ainsi que pour les parachutistes et troupes alpines d'Hitler. Ces unités d'élite sont considérablement affaiblie à l'heure où l'Allemagne prépare l'invasion de la Grèce.

Le coup a aussi été rude pour le moral des rares troupes motivées de Mussolini, à qui on avait dit qu’elles allaient être accueillies en libératrices et qui se sont vues accueillir à coup de fusil de chasse par les Corses.

Certes, les Italiens sont aussi capables de brutalité, mais ils sont tout de même profondément écœurés par la barbarie des Nazis, qui n’hésitent à passer des villages entiers par les armes pour fait de résistance, là où les Italiens les plus brutaux se seraient contentés de fusiller les « Francs-tireurs »…

L’île d’origine de Napoléon fait partie du partage de la France entre les deux dictatures allemandes et italiennes. Partage dans lequel les collaborateurs de l’État national n’ont pas eu leur mot à dire. La France est en effet partagée depuis les Accords du Brenner de juillet 1940 entre une zone d’occupation allemande et italienne.[74]

Sur mer, l’engagement n’en a pas moins été terrible. L’Italie dispose depuis quelques semaines des cuirassés Littorio et Vittorio Veneto que Mussolini envoie protéger la force d’invasion. Hitler, qui a compris l’efficacité de l’aviation contre les vaisseaux de guerre, envoie sa Luftwaffe contre les navires alliés partis intercepter les Italiens.

Ainsi, le cuirassé français Bretagne succombe sous les bombes allemandes. Heureusement, son équipage est en grande partie sauf, évacué par plusieurs torpilleurs français et destroyers britanniques.

La bataille de Corse est certes officiellement terminée mais nombre de Corses ont pris le maquis et mèneront une guérilla contre l’occupant italien[75] à tel point qu’on déconseille à Mussolini de se rendre à Bastia pour y proclamer l’annexion de l’île, par crainte qu’il ne se prenne une ou plusieurs balles tirées depuis la foule…

Quant à Mollard, il est évacué vers l’Algérie. Mais il prépare déjà des plans de reconquête !

Certes, Hitler a remporté d’importants succès mais les Alliés n’ont toujours pas été chassés de Grèce, faisant ressurgir dans son esprit le spectre de « L’Armée d’Orient » du premier conflit mondial. Chose intolérable à ses yeux. D’autant que, pour une fois, le soleil se lève à l’ouest. En effet, les premières réunions d’état-major entre des officiers américains et franco-britanniques ont lieu. Il est décidé de donner la priorité à la défaite de l’Allemagne sur celle du Japon après sa probable intervention dans le conflit. Ces réunions ont pour objectif d’habituer les officiers américains et franco-britanniques à travailler ensemble pour être prêt le jour où les États-Unis entreront dans le conflit.

Le 29 janvier 1941, le dictateur grec, le général Metaxás, meurt. C’est Alexandros Koryzis, le gouverneur de la banque hellénique, qui devient le nouveau premier ministre grec. Cependant, il entretient de mauvaises relations avec le général Papagos, le commandant en chef des armées grecques…

Quelques jours plus tôt, le 20, en Roumanie, le parti fasciste de la « Garde de Fer » tente un coup d’état avorté contre Antonescu. C’est le meurtre d’un officier allemand par un citoyen grec qui met le feu aux poudres entre les 2 complices Horia Sima et Ion Antonescu alors qu’ils ne s’entendaient pas sur la politique à appliquer à l’encontre des Juifs roumains, Sima voulant les exproprier de suite tandis que le Conducator, lui, voulait le faire progressivement…

Les Légionnaires profitent du chaos qu’ils ont eux-mêmes crées pour massacrer les Juifs roumains et voler leurs biens. Brûlant les synagogues, ces barbares épargnent par miracle la synagogue Heichal Hakorali de par l’intervention de la chrétienne, Lucretia Canjia[76], qui les implore de ne pas la brûler, leur rappelant les enseignements chrétiens.

La révolte finit par être matée 3 jours plus tard par Antonescu grâce à l’aide de l’armée roumaine arrivée en renfort à Bucarest et au soutien affiché par Hitler.

Néanmoins, Horia Sima, le chef de la garde, ainsi que plusieurs de ses compagnons, trouvent refuge en Allemagne…

L’activité diplomatique allemande devient intense en février.

Ainsi, les négociations se poursuivent avec la Yougoslavie mais cette dernière, en la personne de son président du Conseil, Tsvetkovitch, impose une fin de non-recevoir aux demandes allemandes de signature du pacte tripartite.

Néanmoins, dans le même temps, les Yougoslaves refuseront d’accueillir une délégation franco-britannique composée d’Anthony Eden, ministre britannique des affaires étrangères, Léon Blum, son homologue français, Sir John Dill, chef d’État-major impérial britannique, De Gaulle et Noguès. Cette délégation, s’est néanmoins rendue à Ankara après avoir discuté avec les Grecs à Athènes, mais les Turcs refuseront sa proposition d’alliance.

Cependant, du point de vue politique, l’événement majeur de ce mois de février 1941 est l’élection du « Conseil de l’Empire », où votent donc non seulement les citoyens français des colonies mais également ceux qui portent encore le statut d’Indigènes. L’élection ayant été démocratique, c’est une majorité de personnes originaires des colonies qui sont élues et qui siégeront donc aux côtés du parlement à Alger même si la proportion de colons au sein du « Conseil de l’Empire » est supérieure à celle qu’ils représentent dans la population, signe de l’influence encore importante de ceux-ci.

Du point de vue de la politique politicienne, Léon Blum est satisfait des résultats qui ont placé des partis proches de la SFIO en tête. Dans le même temps, Mandel et de Gaulle constatent que l’immense majorité des élus sont de farouches partisans de la guerre contre l’Axe et que les seuls opposants à celle-ci sont à compter parmi les colons, notamment indochinois.

Un certain Félix Houphouët-Boigny devient ainsi représentant de la Côte d'Ivoire à ce conseil.

En Norvège, un raid est mené conjointement par des résistants norvégiens et des commandos franco-britanniques sur les îles Lofoten le 4 mars 1941. Des centaines d’Allemands seront capturés tandis que de nombreux jeunes volontaires norvégiens se joignent aux Alliés pour poursuivre la lutte en exil. Cependant, les représailles nazies seront sanglantes ce qui poussera la résistance norvégienne à demander aux Alliés d’arrêter ce type d’opération.

Mais bientôt dans les Balkans, le régent Paul allait céder aux sirènes du IIIème Reich et signer le pacte tripartite.

La seconde phase de la bataille de Grèce allait bientôt commencer...

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A19
Le général Mollard (Source Wikipédia)

[73] Raids conduits également dans l’espoir, qui s’avérera vain, de faire plier la République française en poussant les Algérois à la révolte. Des centaines de malheureux y perdirent cependant la vie.
[74] Cette dernière correspondant au sud-est de notre pays moins la Savoie, Nice, la Corse et quelques régions frontalières qui sont, elles, directement annexées à l’Italie fasciste.
[75] En effet, les troupes allemandes quitteront rapidement l'île.
[76] Plus tard reconnue « Juste parmi les nations ».


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Message par LFC/Emile Ollivier Ven 13 Nov - 17:31

Chapitre 12 : Héroïque peuple serbe

« C’était magnifique. Les rues étaient emplies des habitants de Belgrade chantant à tue-tête l’hymne national et brandissant des drapeaux britanniques mais surtout français. La communion était totale entre les officiers qui venaient de renverser le régent Paul et la population de la capitale. Dans l’enthousiasme général, on ne pensait même plus que de cette fête, naîtrait la guerre et on n’imaginait même pas que moins de 2 semaines plus tard, la ville serait en ruine, détruite par la barbarie de nos ennemis. »
Raymond Brugère, Mandel franchit le Rubicon.

La joie sincère du peuple serbe est ici décrite par l’ambassadeur de France à Belgrade, Raymond Brugère. Elle fait donc suite au renversement du Régent Paul qui avait pactisé avec Hitler en adhérent au fameux pacte tripartite.

La présence de plus en plus grande de l’armée allemande en Bulgarie fut un bon moyen de pression sur la malheureuse Yougoslavie dont le Régent fut expressément convoqué à Berchtesgaden où il se vit réclamer par Hitler l’adhésion de son pays au pacte, un droit de passage pour les troupes allemandes chargées d’envahir la Grèce en échange de l’annexion du port de Salonique et d’une partie de la Macédoine grecque. Hitler explique que la Yougoslavie n’a comme possibilité que celle de choisir l’alliance allemande ou bien celle des Franco-britanniques.

Mais, malgré les menaces du Führer, le régent avait tergiversé. En effet, les Alliés semblent bien plus forts qu’il ne se l’était imaginé suite au désastre de mai-juin 1940 et des émeutes anti-allemandes et anti-italiennes avaient éclatés en Serbie.

Néanmoins, face aux pressions allemandes, le régent s’était résolu à signer. Plusieurs de ses ministres, qui y étaient opposés, avaient alors démissionné.

Quoi qu’accusé d’être plus un coup d’état d’officiers serbes désireux de punir Paul des avantages consentis aux Croates auxquels il a accordé leur propre banovine[77], on ne peut nier la francophilie sincère des Serbes, fiers d’avoir rejetés un gouvernement ayant pactisé avec les Allemands. Dusan Simovic devient premier ministre et le roi Pierre II[78] est proclamé majeur et en capacité de régner.

Hitler est furieux de ce coup d’état dans lequel il voit la main d’Alger et du « Juif Mandel ». Il ordonne immédiatement de préparer la conquête de la Yougoslavie ainsi que l’opération châtiment, la destruction de Belgrade par la Luftwaffe.

De Gaulle, Blum, Noguès, Eden et Dill se rendent en urgence à Belgrade où ils rencontrent Simovic et promettent à leur pays toute l’aide possible mais ce dernier reste inflexible lorsque de Gaulle lui conseille de préparer un vaste mouvement de retrait de l’armée yougoslave vers la Macédoine. En effet, les Yougoslaves préfèrent défendre l’ensemble de leur territoire en dispersant leurs forces tout le long de leurs frontières. Ils préparent même une offensive contre l’Albanie.

Stratégie suicidaire qui laissera aux Nazis toute l’amplitude nécessaire pour attaquer et percer là où ils le souhaitent…

De Gaulle, revenu à Alexandrie, a une discussion avec Dill. Il lui demande de regrouper les blindés alliés, désormais essentiellement britanniques[79], en une imposante masse, à la frontière yougoslave.

Cette masse se ruera sur la Macédoine lorsque Hitler déclenchera son assaut.

L’objectif ? Recueillir l’armée yougoslave en retraite lorsque Simovic aura compris la futilité de ses plans de défense de l’intégralité de son territoire…

« It sounds like the Dyle-Breda maneuver... » rétorque le Britannique ce que l’interprète traduit en « Cela ressemble furieusement à la manœuvre Dyle-Breda... ».

« Dans la méthode oui, dans l’esprit non. Notre but ne sera pas de nous fixer. De plus, c’est par la Macédoine yougoslave que passera la masse des panzers regroupés en Bulgarie. Il vaut donc mieux non seulement recueillir nos frères d’armes serbes (sic) en ne laissant pas les Allemands les isoler de notre base que de les laisser venir à nous et les affronter directement en Grèce en ayant abandonné nos alliés. De toute façon Hitler viendra à nous. »

Dill, quoi que peu enthousiaste, transmet l’idée à un Churchill nettement plus favorable au plan, tant il aime les manœuvres osées.

Le retrait des blindés anglais de la frontière albanaise est rendu moins dangereux car Rommel a envoyé des troupes au nord pour se prémunir contre les Yougoslaves.

Cette masse blindée est placée sous le commandement de Michael O'Moore Creagh, vainqueur des Italiens dans la guerre du désert puis en Albanie avec sa 7ème division blindée.

Le 6 avril, sans sommations préalables, l’aviation nazie lance un assaut meurtrier sur Belgrade.

« Au bout d'un quart d'heure, la grande place Terazié, la Kralja Milana ulitza, la Knez Mihailova ulitza, artères principales de Belgrade, n'étaient que des champs de mort. Les abords de la gare étaient réduits en poudre. Dans le Milocha Velikog, tous les ministères flambaient. Un peu partout, des formes humaines gisaient sur la chaussée parsemée d'entonnoirs et où pendaient les fils des trolleys. Des blessés se traînaient contre les murs. D'autres cherchaient dans les portes un illusoire abri pour mourir. Les tramways, saisis en pleine course, n'étaient plus que des carcasses déchiquetées sur lesquelles l'éternelle réclame d'un dentifrice se lisait encore, comme le témoignage d'une époque qui mourait seconde par seconde…

Ce premier bombardement s'arrête à 9 h 30. »

Témoignage de Jean Blairy, dans son ouvrage Crépuscule danubien.

L’armée yougoslave est anéantie d’autant plus facilement qu’à la fuite du gouvernement, qui laisse son état-major sans directive, s’ajoute la destruction lors de Châtiment, des moyens de communication entre Belgrade et le reste du pays.

D’ailleurs, c’est l’État yougoslave lui-même qui s’effondre sur ses bases mêmes. En effet, Macédoniens et surtout Croates désertent, voir, mêmes, retournent leurs armes contre les soldats serbes ! C’est d’ailleurs une foule croate en liesse qui accueillent les Nazis à Zagreb, le 10…

Pire, un État indépendant croate est proclamé et Ante Pavelic, le chef des redoutables Oustachis, en exil à Rome, rentre à Zagreb pour en devenir le Poglavnik.

Le Chef...

Le 13, c’est à Belgrade qu’entrent les Allemands. Le même jour, Simovic donne autorité à Danilo Kalafatovic pour signer l’acte de capitulation de l’armée[80] avant d’être évacué en compagnie du roi et du gouvernement par les Français vers Athènes.

Le gouvernement en exil yougoslave prendra ses quartiers à Alger.

En revanche, toute retraite de l’armée royale a été empêchée par la débâcle des chars alliés en Macédoine, écrasés par la puissance de feu et la supériorité tactique des Panzers du Führer.

Une importante quantité de matériel a été perdu dans ce désastre tandis que les Allemands prennent Skopje le 8 avril, soit 2 jours seulement après le déclenchement de l’assaut...

Néanmoins, Alger et Londres tombent d’accord pour déclarer immédiatement la guerre aux pays ayant contribué directement ou indirectement à l’invasion de la Yougoslavie, à savoir, la Hongrie, la Roumanie (qui n’a servie que de base pour les Nazis) et la Bulgarie (qui n’a pas participé à l’assaut mais enverra son armée occuper la Macédoine).

Gravement affaibli par le désastre macédonien, les Alliés ne peuvent rien faire pour empêcher la chute de Salonique, le 10, entraînant l’isolement des forces défendant la Ligne Metaxas.

La ligne de l’Aliakmon, elle-même, ne tiendra que quelques jours.

Il fallut se résoudre à lancer l’opération Demon/Démon, l’évacuation de la Grèce continentale.

Talonnée par Rommel, qui a déclenché sa propre offensive, l’armée britannique se replie vers le Péloponnèse, non sans conduire des actions de retardement, notamment aux célèbres Thermopyles.

Athènes tombe le 28 avril tandis que seule la moitié environ du corps expéditionnaire peut être évacué de Grèce[81]. De plus, seule l’arrivée des transports de la Marine nationale, venue aider au rembarquement d’un corps expéditionnaire tout à la fois pléthorique et bien trop faible pour pouvoir arrêter la machine de guerre allemande, permet de limiter le nombre des soldats britanniques destinés à la captivité…

Mais toute la Grèce n’était pas occupée. Il restait encore les îles dont celles du Dodécanèse, colonie italienne capturée par les Franco-britanniques.

Une nouvelle bataille allait rapidement succéder à la conquête de la Grèce continentale…

La Grèce et la Yougoslavie sont partagés entre l’Allemagne et ses affidés.

Concernant la Monarchie slave du sud, le partage se conclue ainsi :

- L’Italie, déjà maîtresse de l’Albanie, l’agrandit du Kossovo et de l’ouest de la Macédoine. Elle s’empare de même de la côte dalmate, d’une partie de la Slovénie et du Monténégro.

- La Bulgarie, dont les troupes ont suivis les forces de l’Axe sans participer aux combats, annexe le restant de la Macédoine.

- La Hongrie annexe l’est de la Slovénie et le nord de la Serbie.

- Le Reich, lui, annexe directement les parties de la Slovénie non dévolues à ses alliés.

- Le restant est partagé entre un soi-disant État serbe totalement dévolu à Hitler et, comme on l’a vu, l’État indépendant de Croatie.

Pour la Grèce, la Bulgarie récupère la majeure partie des territoires qui furent siens entre la seconde guerre balkanique et 1918, à l’exception de la région directement frontalière de la Turquie, occupée par le Reich nazi qui s’arroge aussi, notamment, la région d’Athènes et divers points stratégiques du pays mutilé. Le restant est dévolue à l’occupation italienne.

Car il s’agit bien d’une occupation, le pays devenant, à l’instar de la France occupée et contrairement à la Yougoslavie, un État fantoche du Reich, administré par le général Georgios Tsolakoglou.

La France exilée. Tome 1 : 1940 La roue du destin A20
Scène de liesse à Belgrade à l’annonce de la déchéance du régent Paul (Source Wikipédia)

[77] Borivoje Mirkovic, l’organisateur du coup d’état, est favorable aux Nazis.
[78] Le roi a 17 ans.
[79] En effet, le matériel français de la 1ère DB a été fortement éprouvé en Libye et est, irremplaçable, du fait de la perte de l’industrie de la Métropole. Celle-ci est donc en pleine reconstitution en AFN, en attendant l’arrivée du matériel américain. D’ailleurs, des ingénieurs français évacués travaillent déjà sur une refonte du char américain M3, en cours de conception.
[80] Actée le 17.
[81] Et c’est sans compter la perte d’une très importante quantité de matériels.


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Message par Thomas Ven 13 Nov - 18:28

depuis l’abandon du matériel de 1ère DB française[79] en Corse
J'ai raté un épisode, que la 1ère DB n'était pas en AFN. Pourquoi déployer une unité offensive à la logistique lourd pour la défense de la Corse. C'est du suicide.
C'est typiquement le genre d'unité que les alliés aurait déployer dans les Balkans.

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Message par LFC/Emile Ollivier Ven 13 Nov - 18:33

C'est pas faux. Je l'avais envoyé en Corse pour montrer la séparation des tâches entre alliés et pour montrer que la République veut défendre à fond la Corse.
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Message par LFC/Emile Ollivier Sam 14 Nov - 15:58

J'ai bien une idée pour la 1ère DB.

Elle serait toujours en AFN, en attente de l'arrivée du matériel américain, le matériel français utilisé en Libye étant à la fois très éprouvés et irremplaçable, avec la perte de l'industrie de la Métropole.
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