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Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes

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Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes Empty Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes

Message par DemetriosPoliorcète Dim 11 Juin - 21:45

« Pour la France il fut un Scipion, héros couronné par la victoire sur ses plus grands ennemis, mais à qui la droite République refusa le pouvoir et dont le corps échappa à la Patrie. Pour l’Angleterre, il fût Hannibal, l’ennemi terrifiant que l’on craignait partout de voir apparaître, menant derrière lui ses invincibles vétérans » Victor Hugo

« Quel roman que ma vie ! » Napoléon Bonaparte

Peu de personnages surent incarner leur époque comme le fit le général Napoléon Bonaparte, « héros des trois mondes ». Le caractère exceptionnel de sa destinée est d’autant plus marqué que, s’il exerça de fait le gouvernement d’immenses territoires, son pays lui refusa toujours le pouvoir, et il ne fut jamais chef d’Etat malgré plusieurs tentatives en politique. Or, si l’histoire a laissé de bonnes places aux Lazare Carnot, aux William Pitt et autres Paul Ier, aucun n’a acquis la célébrité intemporelle d’un Napoléon Bonaparte.

Outre son talent militaire indéniable et l’énergie qu’il déploya en tant qu’administrateur, la célébrité de Bonaparte tient sans doute au caractère mondial de sa carrière qui fit de lui, d’après les mots d’un historien, « la première grande figure mondialisée de son vivant ». Le général corse incarne le succès des idées de la révolution française au-delà du Rhin, des Alpes et des Pyrénées, et leur destinée mondiale. A ce titre, il apparaît comme un héros universel de la liberté, magnifié par les artistes et les écrivains.

Certes, les recherches récentes ont nuancé son portrait, et fait apparaître des aspects plus sombres : chef extrêmement dur subjuguant tout à l’objectif militaire fixé, tendance à la mégalomanie et goût affirmé pour le decorum, et, surtout, des opinions raciste, visant notamment les Irlandais. Mais si l’image de l’homme en est écornée, rien ne semble pouvoir faire pâlir la légende.

Ainsi, la Louisiane a choisi à son indépendance en 1954 de déplacer sa capitale de la Nouvelle-Orléans à Bonaparteville, et a également fait figurer le général sur son Grand sceau. La République du Mysore a quant à elle décidé de l’évoquer dans son hymne national, en 1962. Ses nombreux descendants ainsi que ceux de ses frères sont toujours nombreux à exercer des responsabilités en Louisiane, en France, aux Etats-Unis ou dans les Etats indiens.

Retraçons ensemble le parcours incroyable d’un homme dont les immenses talents lui assurèrent une renommée sans égal.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes 1280px-Antoine-Jean_Gros_001

Les lendemains de la campagne d’Italie

Aux lendemains de la chute de Mantoue, Napoléon Bonaparte avait déjà accompli, à un âge extrêmement jeune, plus que ce que beaucoup de généraux n’auraient espéré accomplir dans une vie  entière : il avait réalisé l’une des plus belles campagnes militaires de l’histoire, vaincu successivement sept armées sardes et autrichiennes, et avait conclu de sa propre initiative un armistice avec l’Empire des Habsbourg, mettant fin à la guerre de la première coalition. Pour ajouter à sa satisfaction, son épouse Marie-Josèphe Rose de Beauharnais, qu’il surnommait Joséphine et qui l’avait rejoint, non sans rechigner, en août de l’année précédente, était enceinte de leur premier enfant.

C’est alors qu’un événement tragique allait changer à jamais le destin de Bonaparte : le 10 mai 1797, Joséphine donna naissance aux deux enfants du couple, Charles-Napoléon et Marie-Joséphine. D’abord en bonne santé, Madame Bonaparte vit soudain, dans les minutes qui suivirent, son état s’aggraver. Dans la soirée, elle rendit l’âme. Son mari, alors en pleine préparation des négociations franco-autrichiennes, apprit en même temps la naissance de ses enfants et la mort de sa femme.

D’un naturel instable et profondément romantique, Bonaparte fut effondré par la mort de sa femme dont il était sincèrement amoureux, et plongea dans une grave crise de mélancolie. Il sollicita au Directoire un congé et, avant même de l’obtenir officiellement, abandonna son armée pour rentrer à Paris avec ses deux jeunes enfants. Le général qui avait montré son esprit d’indépendance et son ambition en signant la paix de Leoben avec les Autrichiens se désintéressa pour un moment de toute affaire militaire ou politique, plongé dans ce que l’on appellerait aujourd’hui une dépression, et rongé par les idées suicidaires.

A ses nouvelles responsabilités familiales et à la mort de son épouse s’ajoutèrent bientôt les révélations sur les infidélités de celle-ci, qui firent un instant douter Bonaparte de la paternité de ses enfants (la concordance des dates éloigna néanmoins bientôt ce doute), et aggravèrent encore son état mental.

Le Directoire n’était pas mécontent de voir son nouveau César se mettre ainsi à l’écart de la politique. Les grandes lignes qu’il avait tracé pendant la campagne d’Italie ne furent néanmoins jamais réellement modifiées, et le traité de Campo Formio signé par les représentants du Directoire ne différa probablement pas de ce qu’il aurait été si Bonaparte avait mené les négociations : la France annexait Nice et la Savoie, l’Autriche acceptait la perte des Pays-Bas et obtenait en compensation la Vénétie. Seule l’Angleterre demeurait en guerre contre la France.

Songeant régulièrement au suicide, malgré les injonctions de sa famille à se relever pour assumer son nouveau rôle de père (l’éducation de ses enfants fut, dans les faits, disputée dès le début entre les sœurs de Napoléon et sa belle-fille Hortense de Beauharnais).

Un événement allait pourtant le pousser à revenir sur le devant de la scène : après avoir refusé de prendre le commandement d’un expédition destinées à conquérir l’Egypte, il apprit que son rival Bernadotte, époux de son ancienne fiancée Désirée Clary, était désormais pressenti pour la diriger. Blessé dans son orgueil, il écrivit un long mémoire pour tenter de prouver l’impossibilité d’un tel projet. Il ne parvint pas à convaincre Talleyrand et les directeurs, mais on décida de réduire la force expéditionnaire de 45 000 à seulement 25 000 hommes, et de ne pas y adjoindre de généraux qui avaient fait leurs preuves, tels que Kléber ou Desaix.

Alors que le 19 mai, l’Armée d’Orient prend la mer, Bonaparte accepte de prendre la tête d’une autre expédition, qu’il avait jugée impossible auparavant : un débarquement en Irlande, pour venir au secours des Irlandais unis de Theobald Wolfe Tone.



Dernière édition par DemetriosPoliorcète le Dim 11 Juin - 22:50, édité 1 fois
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Message par Yodarc Dim 11 Juin - 22:06

Super que tu retranscrives ton idée de TL napoléonienne !

J'adore le détail concernant les traits de caractère de Napoléon à l'époque (surtout vu qu'il avait considéré le suicide et avait mal supporté la rupture de ses fiançailles avec Désiré Clary, au point d'écrire un texte qui retranscrivait son désarroi et se concluait sur le suicide de son héros).

L'introduction est intéressante et sait jouer sur une variation les thèmes de la légende napoléonienne (même si j'ai bien le sentiment que la légende noire ne sera pas au rendez-vous. Au passage, c'est un des nombreux éléments que je trouvais intéressant chez Napoléon : la présence de la légende dorée et de la légende noire qui pouvaient aider à mieux considérer la complexité du personnage, à la différence d'autres figures historiques où ces deux faces d'une même pièce hagiographique n'étaient pas équilibrées, voire existantes). Le commentaire sur les recherches "récentes" et sur la Louisiane donne un caractère "historiographique" au récit que je trouve intéressant.

Je suis très intrigué de voir comment tu vas développer ton récit à partir des bases que tu as imaginées.

PS : deux petites coquilles dans la dernière phrase : "Bonaparte accepte de prendre la tête d’une autre expédition, qu’il avait jugées impossible auparavat "
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Message par DemetriosPoliorcète Dim 11 Juin - 22:49

Merci pour ton retour!

En effet, l'absence d'exercice du pouvoir lui laisse moins d'occasions de se salir les mains, et il reste associé aux idéaux révolutionnaires plutôt qu'à l'établissement d'un régime autoritaire. Son parcours ne sera néanmoins pas sans certaines zones d'ombre.

J'en profite pour préciser que le point de départ m'a été donné par cette ancienne TL de Jolou, même si le développement est ensuite complètement différent : https://forumuchronies.frenchboard.com/t12-timeline-collaborative-l-aiglon

Je me suis aussi beaucoup inspiré de la vie de Jean Joseph Amable Humbert : commandant de l'expédition d'Ilrande, amant de Pauline Bonaparte, ce qui lui valut la disgrâce et une carrière de pirate à la Nouvelle-Orléans...sa vie a tout d'un roman d'aventure mais est vraie. On peut imaginer pour Napoléon Bonaparte un destin comparable, avec en plus les talents militaires qui sont les siens.

Je corrige de suite les coquilles.
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Message par Thomas Lun 12 Juin - 7:56

Je suis très curieux de lire la suite.

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Message par DemetriosPoliorcète Lun 12 Juin - 12:44

La campagne d’Irlande

Lorsque, le 22 août 1798, Bonaparte débarque en Irlande à la tête d’environ 3500 hommes, l’insurrection des Irlandais unis a déjà été écrasée, ses derniers partisans ne tenant qu’un réduit montagneux dans l’Ulster. Le pays est néanmoins profondément hostile aux Britanniques et fait bon accueil aux Français, qui s’emparent sans difficulté de la petite ville de Kilalla, défendue par seulement 200 soldats anglais.

Secondé par le général Humbert, qui avait un temps été pressenti comme commandant de l’expédition, ainsi que par son efficace chef d’état-major Berthier et par son futur beau-frère Joachim Murat, à la tête du petit corps de cavalerie de l’armée d’Irlande, Bonaparte ne perd pas u instant, sachant que la rapidité sera sa seule arme face à la disproportion des forces : à la tête d’une avant-garde réduite, il bat des Britanniques pourtant supérieur en nombre à Castelbar. Alors qu’une République de Connacie (Connaught) est proclamée, il prend la tête de 2500 hommes et marche sur Sligo, espérant faire la jonction avec les Irlandais unis, tandis que Humbert est chargé de marcher avec le reste des forces françaises sur Galway et d’organiser les forces irlandaises, dans ce que le commandant en chef espère devenir une puissant armée irlandaise, capable de faire face aux renforts britanniques. Si le Directoire espère surtout créer un équivalent britannique de la Vendée, les projets de Bonaparte sont beaucoup plus grands : il veut chasser les Britanniques de l’île et les contraindre à la paix, comme il l’avait fait avec les Autrichiens en Italie.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes 400px-G%C3%A9n%C3%A9ral_Jean_Humbert
Le général Humbert

Après la prise de Sligo, où les Français entrent sous les acclamations, le général parvient en effet à rallier une partie des Ilrandais unis, mais se retrouve bientôt confronté aux presque 30 000 hommes du Lord Cornwallis, le vaincu de Yortown, bien décidé à écraser la sédition et à chasser les révolutionnaires français. A Ballinamuck, les combat est engagé mais les Franco-irlandais se replient en bon ordre. S’engage alors ce qui sera une campagne à la hauteur de celle d’Italie : alors qu’Humbert consolide l’arrière, Bonaparte recule tout en infligeant une série de défaites aux Anglais, mal ravitaillés et bientôt contraints de se diviser, au cœur d’une île dont la population leur est profondément hostile.

Maitrisant toujours la manoeuvre en position centrale, il inflige des défaites à Roscommon puis à Ballinasloe, contraignant Cornwallis à la retraite. Reprenant l’offensive, les Français surprennent l’ennemi alors que celui-ci traverse le Shannon et capturent Cornwallis le 30 novembre. La nouvelle de la victoire provoque l’euphorie à Paris et une inquiétude jamais vue à Londres. Une République du Munster est proclamée à Cork, tandis que Humbert s’empare de Kilkenny et s’approche de Dublin, où les restes de l’armée britannique se sont repliées. L’Ulster est envahi à son tour, bien que Bonaparte  constate l’impossibilité de prendre Belfast, trop bien fortifiée. Une gravure célèbre de l’époque moque l’énorme John Bull, assailli par la petite abeille révolutionnaire Bonaparte…

Une sombre nouvelle vient assombrir le tableau : alors que le général Hardy transportait 3000 hommes et le leader irlandais Theobald Wolfe Tone dans le but de débarquer à Donegal, son escadre est capturée par les Britanniques. Reconnu parmi les prisonniers, Wolfe Tone est exécuté. Plus encore que la perte des renforts, c’est l’absence d’un chef politique incontesté qui pèsera lourd sur la suite de la campagne, en dépit de la proclamation d’une République irlandaise, unissant l’ensemble des territoires libérés, le 1er janvier 1799.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes 2560px-Green_harp_flag_of_Ireland_17th_century.svg
Le drapeau de la République Irlandaise

Si la population a fait bon accueil aux Français et a activement contribué à la défait britannique, par des actions de guérilla et le refus de ravitailler Cornwallis, et que Bonaparte est initialement fasciné, en grand lecteur des ballades d’Ossian, par la terre celtique, les relations ne tardent pas à se tendre entre Français et Irlandais. Prêts à prendre les armes pour l’insurrection, les paysans de l’île rechignent à s’enrôler dans une armée régulière et à laisser leurs terres à l’abandon. Le catholicisme fervent des insulaires, et le refus de certains d’accepter les ordres d’officiers noirs, contribuent encore à creuser l’écart. Bonaparte lui-même, constatant que les troupes de ligne qu’il cherche à lever sont quatre à cinq fois moins nombreuses que ce qu’il avait espéré, déchante et laisse éclater son amertume dans sa correspondance et ses notes. Il écrit ainsi : « il y a peu de vrais Patriotes dans ce pays ; en vérité il n’y en avait qu’un Wolfe Tone, et les Anglais l’ont pris. Désireux de chasser son ennemi ancestral, l’Irlandais ne cherche en vérité pas à bâtir une nation libre mais à retourner à la barbarie des clans et à l’oppression des monastères tout-puissants. Tout ce qu’il y avait d’éléments civilisateurs dans ce pays est parti après la bataille de la Boyne et n’a laissé que l’ignorance et l’arriération. ». Plus tard, constatant l’efficacité des troupes dominicaines, il écrira que « les Irlandais sont appelés par certains les nègres de l’Europe. Rien de plus inexact : bien commandé, le nègre fait un soldat tout à fait appréciable ; l’Irlandais, lui, se débande aux premiers coups de feu ».

Dans le même temps, alors que Bernadotte est coincé en Egypte après la destruction de sa flotte et que l’Autriche, la Russie et l’Empire ottoman ont rejoint l’Angleterre dans une deuxième coalition, Londres ne demeure pas inactif et prépare la riposte, mobilisant une centaine de milliers de soldats. Après avoir renforcé, Dublin et Belfast, l’armée royale organise le débarquement du général Ralph Abercrombie et de 25 000 anglais à Limerick, ville quasiment pas défendue. Si Humbert défend avec succès Galway à la tête d’une troupe majoritairement irlandaise, un autre corps expéditionnaire britannique débarque dans le sud-ouest et s’empare de Cork. La situation de l’année précédente s’est inversée : contrôlant les côtes, les Anglais sont ravitaillés sans problèmes par la Royal Navy, tandis que les Franco-Irlandais sont coincés au centre d’une île pauvre.

Cherchant à retourner cette situation désespérée, Bonaparte prend le chemin du Munster et cherche à attirer les troupes anglaises vers l’intérieur des terres, mais, mal informé sur les mouvements de l’ennemi, il se retrouve encerclé à proximité de Fermoy par une force quatre fois supérieure en nombre. Immobilisé par un cheval blessé sous lui, il est contraint à le reddition avec 1200 de ses hommes. Sa capture est célébrée en fête dans toute la Grande-Bretagne, et consterne l’opinion française. Humbert, Berthier et Murat purent négocier un reddition avec les honneurs et une évacuation vers la France. Pour des milliers d’Irlandais, la défaite annonçait une terrible répression… Si les ballades irlandaises puis les pamphlets nationalistes allaient célébrer « l’année des Français » et saluer le général Bonaparte, il est probable que beaucoup d’habitants aient maudis les étrangers venus avec des promesses de liberté et repartis en laissant derrière eux un champ de ruines.
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Message par Yodarc Lun 12 Juin - 13:12

Super seconde partie.

Ce que j'aime particulièrement, c'est l'effet miroir avec la campagne d'Egypte historique, étant donné que dans les deux cas, on a Bonaparte dans une expédition destinée à affaiblir les Anglais, une population locale au départ favorable (ou dans le cas égyptien, neutre) aux Français, un début éclatant avant que cela ne dégénère et une force française isolée. La différence notable étant bien sûr le fait que les Britanniques ont l'avantage de la proximité et qu'ils combattent sur une terre qu'ils contrôlent.

Je trouve amusant la mention de la reddition de Cornwallis, car cela fait écho à ce qui s'est passé (historiquement et dans cette réalité) à son second, le général O'Hara, à savoir une reddition/capture par Washington et Bonaparte.

La dimension culturelle, politique et locale irlandaise m'a l'air plutôt bien dépeinte (je ne suis pas très familier du contexte spécifique de l'île d'Emeraude à cette période). Je trouve assez amusant (et "ironique") le fait que le mépris de Bonaparte concernant les Irlandais puisse faire écho au potentiel mépris qu'il avait à l'encontre des noirs d'Haïti (et je soupçonne que la mention sur la bravoure et la discipline des "nègres" vient à la fois des succès de Toussaint L'Ouverture sur Saint-Domingue et d'éléments comme le général Dumas. Soit dit en passant, en petit commentaire humoristique, cela donne à Napoléon un côté hollywoodien dans le sens où de nombreux cas de "blackwashing" ont concerné des personnages roux et l'Irlande est réputé pour avoir la population la conséquente de roux, même si j'ignore ce qui en était pour l'époque).
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Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes Empty Bonaparte chez les petits hommes verts

Message par vigilae Lun 12 Juin - 16:15

. C'est bien, très bien.
. Y'a t'il un épisode de plus, dans le genre "le retour en France de Napoléon Bonaparte" ?
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Message par DemetriosPoliorcète Mar 13 Juin - 9:58

Yodarc a écrit:Super seconde partie.

Ce que j'aime particulièrement, c'est l'effet miroir avec la campagne d'Egypte historique, étant donné que dans les deux cas, on a Bonaparte dans une expédition destinée à affaiblir les Anglais, une population locale au départ favorable (ou dans le cas égyptien, neutre) aux Français, un début éclatant avant que cela ne dégénère et une force française isolée. La différence notable étant bien sûr le fait que les Britanniques ont l'avantage de la proximité et qu'ils combattent sur une terre qu'ils contrôlent.

Je trouve amusant la mention de la reddition de Cornwallis, car cela fait écho à ce qui s'est passé (historiquement et dans cette réalité) à son second, le général O'Hara, à savoir une reddition/capture par Washington et Bonaparte.

La dimension culturelle, politique et locale irlandaise m'a l'air plutôt bien dépeinte (je ne suis pas très familier du contexte spécifique de l'île d'Emeraude à cette période). Je trouve assez amusant (et "ironique") le fait que le mépris de Bonaparte concernant les Irlandais puisse faire écho au potentiel mépris qu'il avait à l'encontre des noirs d'Haïti (et je soupçonne que la mention sur la bravoure et la discipline des "nègres" vient à la fois des succès de Toussaint L'Ouverture sur Saint-Domingue et d'éléments comme le général Dumas. Soit dit en passant, en petit commentaire humoristique, cela donne à Napoléon un côté hollywoodien dans le sens où de nombreux cas de "blackwashing" ont concerné des personnages roux et l'Irlande est réputé pour avoir la population la conséquente de roux, même si j'ignore ce qui en était pour l'époque).

Merci pour ce retour.

Dans ce continuum, Bonaparte fait une partie de sa carrière outre-mer, et se trouve dans l'obligation d'utiliser des troupes coloniales, ce qui modifie son jugement (en plus, en effet, des succès déjà remportés par Louverture et Dumas; Dumas que Bonaparte appréciait d'ailleurs, avant qu'ils ne se brouillent pour des raisons politiques). L'idée que le soldat "indigène" porte des valeurs martiales et un courage qui se sont perdus chez les Européens est après tout un cliché répandu parmi les officiers coloniaux.


La suite arrive bientôt, Vigilae Wink
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Message par DemetriosPoliorcète Mar 13 Juin - 10:54

La captivité anglaise

Immédiatement transféré en Angleterre, avant même la reddition des troupes françaises restantes, Bonaparte est dans un premier temps mis sous bonne garde en forteresse à Londres, avant d’être laissé libre de ses mouvements, sous serment de ne pas quitter la capitale anglaise.

Malgré la défaite, il fait rapidement preuve d’énergie et tente, par sa correspondance, de soigner son image en France dans l’espoir d’un futur retour au pays, tout en cherchant à fréquenter autant que possible la bonne société anglaise, se créant une image d’adversaire respectable et s’entretenant avec des membres de la Royal Society au sujet des mathématiques. Les rumeurs sur ses succès amoureux auprès des dames de l’aristocratie anglaise contribuent à entretenir sa popularité en France, bien que l’on sache maintenant que certaines étaient de pures inventions (lady Hamilton, à qui on prête notamment une liaison avec Bonaparte, se trouvait à Naples pendant cette période).

L’ennui gagne cependant du terrain, entretenu par la frustration de se trouver loin des événements du continent. Bonaparte apprend ainsi les défaites initiales des armées françaises en Italie, avant que Kléber ne parvienne à empêcher la chute de Turin, les succès de l’archiduc Charles sur le Rhin, et la campagne moins heureuse des Anglais contre général Brune dans les Flandres. Dans le même temps, Bernadotte négocie l’évacuation de son corps expéditionnaire, abandonnant son éphémère République égyptienne.

Fierté familiale cependant : le 18 Brumaire de l’An II, Lucien Bonaparte, président du Conseil de Cinq-Cents, empêche le coup d’Etat du général Moreau et de l’abbé Siéyès, forçant les deux hommes à rejoindre l’autre Bonaparte à Londres… Le Directoire survit encore trois mois, avant qu’un second coup d’Etat, cette foi organisé par Lazare Carnot et soutenu par les généraux Brune et Masséna ne renverse le renverse cette fois pour de bon, avec semble-t-il l’assentiment du clan Bonaparte. On craint alors, au vu des personnalités impliquées dans l’événement, un triomphe du néo-jacobinisme et une nouvelle terreur, mais il n’en est rien : laissant le prestigieux titre de consul à ses deux complices, Carnot exerce la réalité du pouvoir sous le titre de Président du Tribunat. La nouvelle assemblée élue au suffrage universelle indirecte, les Comices, élira Lucien Bonaparte pour être son premier président.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes 1280px-Fran%C3%A7ois-Xavier_Fabre_%28Studio%29_-_Portrait_de_Lucien_Bonaparte

Si Napoléon s'est illustré à travers le monde, son frère Lucien fit une brillante carrière politique en métropole

Malgré la recherche de la paix par Carnot, il faut attendre 1801 pour que l’Autriche accepte de s’asseoir à la table des négociations, après la victoire de Kléber à Mayence. L’Angleterre, elle, ne signe la paix à Amiens qu’un an plus tard. C’est un retour sans faste pour Bonaparte, qui retrouve sa famille à Paris le 12 avril, et est reçu par Carnot le lendemain. Son prestige lui épargne néanmoins un licenciement.

L’expédition dans l’Atlantique


La paix d’Amiens avait rendu à la France la possession de ses colonies outre-mer ; restait à y rétablir concrètement l’ordre et le contrôle de Paris. Récemment cédée à la France par l’Espagne, la Louisiane était mal connue, mal administrée, et une proie facile pour ses voisins britanniques ou américains. A Haïti, le gouverneur Toussaint Louverture avait établi un pouvoir de plus en plus personnel et autoritaire, qui prenait chaque jour un peu plus ses distances vis-à-vis de la métropole.

Si le lobby des planteurs, partisan du rétablissement de l’esclavage, n’était pas parvenu à imposer ses vues auprès du nouveau pouvoir, les partisans d’une entente avec Louverture avaient de moins en moins d’audience, et les partisans d’une solution médiane, comme François-Henri de Kerversau ou le général Rigaud, préconisant l’élimination de Louverture mais le maintien d’armées composées de soldats noirs dans les Antilles avaient l’oreille de Carnot…et celle de Bonaparte, qui brûlait d’envie de renouer avec la victoire.

Celui-ci avait soumis au Tribunat un vaste plan de reprise de Saint-Domingue, avec une armée métropolitaine qui, une fois la situation stabilisée, devait faire voile vers la Nouvelle-Orléans et fortifier la position de la France en Amérique du Nord, et avait mis toute son influence dans la balance pour imposer cette solution.

Le 6 juillet 1802, Bonaparte embarque avec les 32 000 hommes de « l’Armée d’Occident » pour accomplir sa mission de reprise en main de l’Amérique française. Le 22 août, l’amiral Linois est en face de Port-au-Prince, prêt à débarquer. Les deux fils de Louverture, élevés en France, lui sont envoyés, porteurs d’une lettre lui signifiant la fin de ses fonctions et son nouveau poste de gouverneur de la Guyane française. Devant le refus, l’armée d’Occident s’empare de Fort-Dauphin et de Port-au-Prince, forçant Louverture à se réfugier à l’intérieur des terres. Après deux mois de combats, le ralliement de Dessalines et de Christophe, les lieutenants du gouverneur, permettent la fin des combats et l’arrestation de ce dernier, tandis que la nouvelle de l’abolition de l’esclavage à la Martinique voisine par décret de Paris rassure les populations émancipées.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes Battle_for_Palm_Tree_Hill

Combats à Saint-Domingue

La discipline des soldats antillais surprend Bonaparte, qui en fait part dans ses rapports, tandis que l’épidémie de fièvre jaune qui se déclenche parmi ses troupes le convient de laisser la garde de l’île et les combats contre les derniers rebelles aux troupes locales. Après une brouille personnelle avec le général Dumas, qui devait prendre la direction de la colonie après le départ de Bonaparte, il nomme finalement Alexandre Pétion, représentant des élites mulâtres de l’Île, à ce poste, tandis que le commandement et la formation des troupes locales sur le terrain est confié à Jean-Jacques Dessalines, « un homme aussi efficace que vaniteux qui sera notre Cerbère », note Bonaparte. Celui-ci met le cap sur la Nouvelle-Orléans avec l’essentiel de ses troupes métropolitaines et y parvient le 4 janvier 1803.

Toussaint Louverture, déporté en métropole malgré les promesses de le laisser de retirer sur sa plantation, fût gardé quelques mois en forteresse avant d’être libéré avec interdiction de rejoindre Saint-Domingue.
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Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes Empty Re: Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes

Message par Yodarc Mar 13 Juin - 11:16

Toujours excellent.

J'adore les mentions à l'alternative de coup d'état du 18 Brumaire (et le rappel que c'est Sieyés qui en était à l'initiative) ou le fait que Lucien Bonaparte soit élu consul (ce qui pourrait être un bien : Lucien était brillant sur le plan politique et aurait pu être un atout pour Napoléon si leurs personnalités respectives et des désaccords notamment sur la politique et le mariage de Lucien (Lucien qui épouse une veuve aubergiste quand Napoléon souhaitait lui faire marier une princesse) n'avaient pas contribué à la disgrâce de Lucien et à la perte pour Napoléon du seul membre de la famille qui lui aurait été d'une vraie aide (surtout vu que c'est sa capacité à réagir qui a sauvé le coup d'état du 18 Brumaire historique, amenant à la transformation du coup d'état politique raté à cause de l'impatience de Napoléon en coup d'état militaire mené par Murat et Leclerc).
Les mentions sur la capacité à rebondir de Napoléon sont bien amenés et bien adaptées au contexte et les mentions des résultats militaires de la seconde coalition sont intéressants et plutôt bien amenés (et j'apprécie la mention d'une expédition anglaise dans les Flandres qui me rappellent la tentative anglaise d'utiliser Walcheren comme base pour attaquer Napoléon en 1809-1810).
Une situation haïtienne fort différente mais qui marche bien du fait du contexte et du regard différent de Napoléon sur les antillais (notamment l'absence de rétablissement de l'esclavage qui va contribuer à l'indépendance de l'île, proclamée le 1er janvier 1804 (une des "fautes" de Napoléon, même s'il est vrai qu'il n'avait qu'une vision erronée et tronquée de la situation et de la question, étant donné que la perspective qu'il avait résultait en partie de ce que les représentants de la marine et des plantations lui présentaient et bien sûr de sa vision personnelle)).

J'ai hâte de découvrir comment la Louisiane française va évoluer avec l'arrivée de Napoléon.

Au passage, je trouve amusant et intéressant que notre Corse national ait d'une certaine manière parcouru déjà de grandes distances du fait de ses voyages en mer alors qu'il n'avait pas trop le pied marin (étant donné que ses voyages maritimes pourraient se résumer à : Corse/France (allers-retours jusqu'en 1793), France/Malte/Egypte, Egypte/France, France/Ile d'Elbe, Ile d'Elbe/France, France/Sainte-Hélène). Et vu le résumé de ta TL dans le sujet des uchronies napoléoniennes, il va largement avoir le pied marin et parcourir bien plus de distance qu'il ne l'a fait historiquement.
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Message par DemetriosPoliorcète Mer 14 Juin - 9:30

Le proconsul du Mississipi

Dès son arrivée à la Nouvelle-Orléans, Bonaparte se saisit de tous les leviers du pouvoir local et montra dans l’administration du territoire une énergie qui n’avait rien à envier à celle qu’il déployait sur le champ de bataille. C’était la première fois que le général se retrouvait dans une position de dirigeant : Paris était loin, il avait obtenu des pouvoirs d’exception qu’il ne tarda pas d’ailleurs, à outrepasser. Le régime, content de tenir éloigné le populaire général, laissa faire.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes LouisianaPurchase-fr

La Louisiane à l'arrivée de Bonaparte

La menace britannique était éloignée par la paix d’Amiens, mais le voisinage des immenses Etats-Unis était une menace tout aussi préoccupante. Washington, qui envisageait depuis longtemps de saisir par la force le territoire, avait très mal accueilli le traité de San Idelfonso de 1800 qui prévoyait sa restitution en échange de la création du royaume d’Etrurie pour un Bourbon en Italie. Le président Jefferson soufflait depuis lors le chaud et le froid auprès de la diplomatie française, proposant des ouvertures diplomatiques tout en laissant sur la table la possibilité d’un conflit. Ayant eu vent de négociations qui se seraient tenues à Paris entre représentants français et américains, Bonaparte décida de prendre les devants et de négocier directement avec les Etats-Unis. Les négociations tenues à Atlanta en Virginie virent les Français refuser catégoriquement de céder la Nouvelle-Orléans, mais accorder au commerce américain des droits de navigation et d’entreposage avantageux sur le Mississipi. Jugées à l’poque moins importantes que l’accès au fleuve mais d’une importance capitale pour la suite de l’histoire nord-américaine, des négociations concernèrent également les territoires les plus septentrionaux du domaine français. Pour un prix relativement faible, Bonaparte céda ce qui allait devenir les Etats de l’Iowa, du Minnesota, du Montana et des deux Dakota. Difficiles à contrôler, ces territoires ne représentaient pas d’intérêt aux yeux du gouverneur, et leur cession permettait également de se débarrasser d’une frontière commune avec les britanniques ; l’extension des Etats-Unis vers l’ouest, toujours gênée, n’était pour autant plus impossible. Le parti belliciste à Washington perdit dès lors son audience : le lobby commerçant autant que les partisans de l’extension vers l’ouest, avaient été rassurés par le gouverneur.

Avec les mains désormais libres, Bonaparte s’attela à la transformation de la Louisiane, renommée entre temps Provinces françaises du Mississipi. Le nouveau découpage administratif en provinces et la création à l’occasion du poste de préfet marquèrent une forte volonté de centralisation. En 1805, le titre de gouverneur fût changé pour celui, antiquisant, de « proconsul », déclinaison républicaine de vice-roi. Les réformes entreprises furent considérables en quelques années : exploration et cartographie du territoire, délimitation des territoires indiens et des terres ouvertes à la colonisation, création d’un cadastre.

Le principal problème était celui du peuplement du territoire, le proconsul n’ignorant pas que la ruée des colons anglo-saxons était, à moyenne échéance, inévitable. Après avoir encouragé les anciens esclaves libérés à migrer vers le nord, entrainant des protestations des propriétaires terriens, le pouvoir colonial mena une campagne de promotion des nouvelles terres en France et en Italie, promettant de nombreux avantages aux nouveaux arrivants. Le succès fut néanmoins très relatif.

La question amérindienne fut très vite marquée par une ambivalence entre la tradition de coopération existant depuis l’ancien régime et la brutalité de l’imposition du pouvoir central. La volonté de délimiter strictement les territoires indiens se heurta à la réticence des tribus, et Murat dut notamment mener une rapide campagne contre les Natchez. Mais la Nouvelle-Orléans ne pouvait, dans le même temps, ignorer la nécessité de s’entendre avec les autochtones dans un territoire sous-peuplé. Le découpage finalement acté témoigne d’ailleurs d’une volonté de faire des indiens les limitanei du Mississipi, les territoires tribaux s’étendant souvent sur les pistes empruntées par les colons américains, auxquels on espérait rendre la traversée impossible. Cette stratégie trouvera son aboutissement une trentaine d’années plus tard, avec la migration des « tribus civilisées » de la rive gauche du Mississipi.

Après la vente des territoires du nord-est aux Etats-Unis, la carte du Mississipi fut à nouveau modifié en juillet 1805 par la cession par l’Espagne de la bande de territoires située à l’ouest de la Nouvelle-Orléans. C’est à cette occasion que Bonaparte se remarie avec une épouse issue de l’aristocratie créole mexicaine. Naîtront de cette union Alexandrine Bonaparte en 1806, Paul-Emile Bonaparte en 1807 et Octavie Bonaparte en 1810.

A la Nouvelle-Orléans même, la vie du proconsul ressemble de plus en plus davantage à celle d’un chef d’Etat, sinon d’un monarque, plutôt qu’à celle d’un simple administrateur. Ainsi, la Garde proconsulaire compte deux fois plus de soldats que les gardes des deux consuls réunis, et une véritable vie de cour se met en place. « Les Bonaparte sont définitivement des Florentins » notera, moqueur, un envoyé de Carnot. Aux côtés de l’Empereur et de son épouse se trouvent toujours la famille Beauharnais (Hortense a épousé Louis, frère de Napoléon), ainsi que Jérôme, qui a pour sa part épousé une américain, Elisabeth Paterson. L’écrivain Chateaubriand, de passage après les demandes insistantes de Bonaparte, qui lui demande conseil sur les affaires nord-américaines, ne s’établira pas, mais décrira brillamment l’ambiance qui règne alors autour du proconsul.


La guerre en Amérique du Nord


La reprise de la guerre franco-britannique en 1807 surprit peu de gens ; malgré la prudence de Carnot à l’international, Londres s’inquiétait de la politique de fortification des colonies et du développement de la flotte française, sous l’impulsion de l’énergique ministre de la marine Decrès. L’entrée en guerre de l’Autriche contre la France, dans le cadre de la troisième coalition, était également prévisible, étant donné le poids des bellicistes à Vienne. Mais la déclaration de guerre de l’Espagne à la France, voulue par le premier ministre Manuel de Godoy, surprit l’Europe entière.

Alors que l’attaque conjointe anglo-espagnole sur Saint-Domingue isole le Mississipi, la Nouvelle-Orléans est menacée par une offensive terrestre espagnole. Celle-ci fait néanmoins long feu : la fourniture d’armes aux Comanches, éternels ennemis de la Nouvelle-Espagne, perturbe les préparatifs, avant que Joachim Murat, à la tête de la Légion des cavaliers du Mississipi (une troupe hétéroclite composée d’Indiens, de créoles et de métropolitains détachés de leurs unités) mène un raid en profondeur sur le Texas, ruinant la logistique espagnole.

Le plus grand danger vient néanmoins de la mer : avec le soutien officieux des Etats-Unis, assurés de pouvoir racheter le territoire après la conquête anglaise, la flotte britannique prévoit une vaste expédition pour s’emparer de la Nouvelle-Orléans. Le 19 novembre, 30 000 britanniques sous le commandement du général Moore débarquent à proximité et sont engagés dans les premiers combats. Néanmoins, la sous-estimation des fortifications françaises rend leur progression difficile. Le 2 décembre, l’affrontement final est remporté par Bonaparte et son armée hétéroclite de réguliers métropolitains et  créoles et de 300 volontaires Sud-Américains prévus pour une expédition au Vénézuela et commandés par Francisco de Miranda. L’armée anglaise se retire avec de lourdes pertes, autant dues aux combats qu’à la maladie.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes Sketch_of_miranda

L'aventurier et indépendantiste vénézuelien Francisco de Miranda.

L’année 1808 est marquée par un retour des Français à l’offensive et la victoire lors de la campagne du Texas, au cours de laquelle la menace espagnole est définitivement écartée. Dans le même temps, l’expédition de Miranda au Venezuela s’avère un échec : faute de soutien des populations, l’aventurier est vaincu et exécuté. Un raid sur Veracruz a plus de succès, mais n’entraîne pas de gains stratégiques réels.

Le 3 juillet arrive à la Nouvelle-Orléans l’annonce de la paix entre la France et l’Espagne suite à l’invasion française de l’Aragon.

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Message par Yodarc Mer 14 Juin - 9:54

Excellente partie.

La mise en contexte de la situation de la Louisiane, les références aux réformes napoléoniennes dans un nouveau cadre, la complexité des relations avec les Etats-Unis, les relations avec les Amérindiens, l'entrée de l'Espagne aux côtés de la Troisième coalition qui fait écho à ce qui a failli se passer lors de la quatrième historique ; tout cela fait un ensemble bien intéressant et développé.
J'adore tout particulièrement le fait que le caractère diplomate de Napoléon (qui historiquement, l'a quelque peu perdu par la suite) soit mis en avant pour négocier avec les Etats-Unis et neutraliser la menace potentielle que pourrait représenter un conflit avec ces derniers tout en neutralisant tout risque pour la colonie en cas de nouveau conflit avec l'Angleterre.

Je sens que d'une certaine manière, la carte des Amériques risque d'être fort redessinée avec ce nouveau contexte.

PS: petite coquille au début du texte avec "Jugées àl’poque moins importantes que l’accès au fleuve mais d’une importance capitale pour la suite de l’histoire nord-américaine"
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Message par Wardog1 Mer 14 Juin - 14:05

Le scénario avec une Louisiane encore française me fait penser au tome de la série Jour J le gang Kennedy, on vas peut être croiser les frères Kennedy traverser la Louisiane avec des chargement d'alcool de contrebande?
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Message par vigilae Mer 14 Juin - 17:12

. oui, jusqu'au percement du canal Erie et du Canal Champlain, circa 1820, l'accès aux ressources de "l'arrière pays" nord américain était surtout pratique par le Mississipi; cf. La Nouvelle Orléans.
. Donc, dans notre "continuum", cette dernière était en position de force pour s'imposer, de façon beaucoup plus substantielle, comme une des capitales économiques de l'Amérique du Nord.
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Message par Flosgon78 Mer 14 Juin - 20:59

Fantastique uchronie !!!
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Message par DemetriosPoliorcète Ven 16 Juin - 10:21

Le retour en France


Le traité de Bayonne conclu entre la France et l’Espagne accordait somme toute peu d’importance aux Amériques, à l’exception de la parte orientale de Saint-Domingue, qui devait être cédée à la France, mais dont Pétion et Dessalines ne pouvaient prendre le contrôle effectif. L’Espagne cédait le Texas mais son Empire colonial restait, pour le reste, intact.

N’ayant pris aucune part dans les négociations, Bonaparte se borna à assister à des commissions chargées de la fixation des frontières, qui restèrent surtout dans les mémoires pour l’effet qu’y produisirent les uniformes extravagants de Joachim Murat, inspirés des tenues amérindiennes. Les deux pays fixèrent également les frontières d’une nation comanche indépendante, mais cela faisait peu de sens pour un peuple de cavaliers et les Français les affrontèrent bientôt à leur tour. Frustré de se trouver loin des combats décisifs, Bonaparte démissionna de son poste de proconsul et rembarqua pour la France, arrivant le 10 novembre 1809.

Hélas pour lui, il apprit en arrivant que le général Davout avait remporté une victoire décisive face aux Autrichiens à Stuttgart, tandis que Moreau, revenu en grâce, s’était emparé de Trieste. L’armistice fut signé dis jours plus tard, laissant une fois encore la Grande-Bretagne seule adversaire de la France et privant Bonaparte de la perspective d’un commandement important. Ses réseaux en métropole avaient néanmoins été actifs pour diffuser les nouvelles de ses victoires outre-Atlantique et entretenir sa popularité, sur laquelle il comptait bien capitaliser pour entreprendre une carrière politique.

Refusant le poste de commandant de l’armée de la Manche, sachant que le débarquement en Angleterre n’était pas envisagé sérieusement, il se fit élire en 1810 député de Paris aux Comices. Néanmoins, son incapacité à s’entendre avec son frère Lucien, devenu un fidèle soutien du régime, et sa position qui tranchait avec l’opinion publique l’empêchèrent d’obtenir des responsabilités importantes : critiquant la prudence de Carnot et de Talleyrand après les victoires militaires, il se faisait le chantre d’une réorganisation complète de l’Europe et d’une mobilisation de toutes les ressources disponibles pour soumettre la Grande-Bretagne, dans un pays qui souhaitait ardemment la paix. Il maintint ses positions après la signature d’une trêve avec les Britanniques, ce qui équivalait à se rendre inaudible.

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Napoléon Bonaparte, membre des Comices

Amer, il écrivit dans une lettre à son beau-fils Eugène qu’il avait « échangé un royaume pour un fauteuil » et se désintéressa des affaires politiques pour préparer, en coulisses, de futures opérations militaires, sans en référer au Tribunat ni aux consuls (Masséna et Brune avaient été remplacés par Jean-Jacques-Régis de Cambacérès et Martin-Michel Charles Gaudin, Duc de Gaëte, tandis que Carnot restait pour un an encore Président du Tribunat). Il mit notamment au point un projet d’invasion de l’Australie avec 600 soldats devant provoquer une rébellion parmi les bagnards et établir une République en Nouvelles-Galles du Sud.

La reprise des hostilités contre les Britanniques en 1811 est l’occasion d’exercer à nouveau un commandement militaire, tout en se débarrassant de Carnot, qui démissionne. Mais Bonaparte a bientôt la mauvaise surprise d’apprendre qu’il est nommé lui-même commandant de l’expédition d’Australie, comme une punition pour l’avoir organisée hors de toute surveillance. Embarquant pour l’Île Maurice, il ignore les proportions que prendra cette expédition.

De l’Australie à Ceylan

Embarqué pour une longue traversée, Bonaparte rejoint l’île Maurice avant de lancer son expédition, sous le commandement de l’amiral Linois, pour tenter son débarquement dans les Nouvelles-Galles du Sud. Si l’Atlantique reste dominé par les Britanniques, le renforcement sous Carnot des points d’appuis français et néerlandais permet aux escadres françaises d’agir avec une certaine liberté dans l’Océan indien et d’y gêner le commerce britannique.

S’il n’est pas enchanté à l’idée de combattre à l’autre bout du monde, Bonaparte espère un succès rapide qui lui permettra ensuite de mener d’autres opérations contre les Britanniques ; il envisage déjà une action contre les Indes britanniques, comme il l’écrit à Talleyrand.

Très vite, l’opération tourne au fiasco : retardée par les intempéries, la flotte débarque à plusieurs dizaines de kilomètres de l’espace défini en amont. Les Français ne parviennent pas à prendre contact avec les prisonniers et sont pris à partie par la garnison, obligeant Bonaparte à rembarquer, laissant une cinquantaine d’hommes sur le terrain. C’est la plus courte et la moins glorieuse des actions du général… Alors que Linois souhaite retourner vers l’Île Maurice, Bonaparte impose de faire voile vers Java, où il est bien accueilli par l’administration coloniale néerlandaise, qui s’inquiètent de la menace britannique et voient arriver des renforts inopinés.

Si l’hypothèse de certains selon laquelle l’ancien proconsul aurait sciemment raté le débarquement en Australie pour pouvoir ensuite mettre à bien son projet en Asie du Sud paraît très douteuse, il est clair qu’il a très vite commencé à proposer aux Hollandais une action offensive contre les Britanniques. Son projet de débarquement à Ceylan rejoint les vues de plusieurs officiers hollandais, malgré les réticences du gouverneur Janssens.

Le 6 juin 1813, Bonaparte débarque au sud-ouest Ceylan avec 1800 hommes, pour deux tiers néerlandais.
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Message par DemetriosPoliorcète Ven 16 Juin - 10:28

Merci à tous pour vos retours!

En effet, l'Amérique du Nord va rester profondément modifiée, même si nous ne verrons pas cette histoire en détail, l'uchronie étant centrée sur la carrière de Bonaparte.

Je n'y avais pas pensé mais oui, il y a de fortes similitudes avec Le Gang Kennedy, même si le Mississipi de cet univers est bien plus modeste que la Nouvelle-France de cet album.
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Message par LFC/Emile Ollivier Sam 17 Juin - 9:43

Salut Demetrios ! Excellent récit, comme d'habitude !

Je noterais cependant qu'à mon humble avis, les frontières du territoire cédé aux États-Unis en 1803 auraient été différentes si la France en avait effectivement pris le contrôle, surtout au sud. Je ne vois pas la France récupérer la Nouvelle-Orléans mais pas La Mobile ainsi que le territoire directement situé à l'ouest de la ville. Je pense que les Espagnols l'ont gardé IRL car ils ne voulaient pas y voir les Américains.

Au nord, bien sûr, et surtout avec un Bonaparte, dans ce territoire encore indigène, le général peut en profiter pour vendre ce qu'il ne possède pas. J'imagine que même dans les temps précédents directement la vente, il n'y avait pas un seul soldat des Bourbons de Madrid au Dakota.
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Message par DemetriosPoliorcète Jeu 22 Juin - 9:38

La campagne indienne

Alors que l’armée réduite de Bonaparte s’apprête à débarquer à Ceylan, son projet peut apparaître, comme l’expédition d’Irlande, comme une attaque de David face à Goliath, en plein cœur de l’Empire britannique.

Pourtant, à y regarder de plus près, la situation apparaît plutôt favorable à une expédition étrangère. Alors que l’EIC avait atteint son apogée en terme d’emprise territoriale et de force armée (jusqu’à 190 000 hommes, en grande majorité des Cipayes indiens) sous la direction de Richrd Wellesley, la politique dispendieuse de celui-ci avait effrayé les actionnaires de la compagnie et conduit à son rappel. Son successeur, George Barlow, avait réduit les dépenses et cherché avant tout à dégager un profit pour ce qui restait, malgré son emprise territoriale, une compagnie privée. Profitant de la période de paix, Paris avait également pu discrètement retrouver une présence auprès des Etat indiens, notamment la Confédération marâthe et l’Hyderabad, vieil allié du temps de l’ancien régime. Les pressions britanniques suite à ces ouvertures diplomatiques avaient amené un nouveau regain de tensions anglo-indiennes, malgré la prudence du gouverneur général Lord Minto. Le belliqueux marquis d’Hastings, qui lui avait succédé en 1813, avait aggravé cette hostilité et avait provoqué un nouveau conflit avec les Marâthes, à la grande fureur de Londres, dont les finances étaient déjà assez érpouvées pour avoir à soutenir un nouveau conflit indien. De plus, depuis 1806, une série de mutineries des troupes cipayes avaient affaibli l’outil militaire de la compagnie et ébranlé la confiance mutuelle entre Britanniques et locaux.

Alors que Bonaparte débarque à Ceylan, le commandant de la garnison britannique de Colombo, persuadé d’avoir affaire à un raid plutôt qu’à une invasion, mobilise toutes les troupes disponibles pour l’affronter en rase campagne. Bien conseillé par l’anciens administrateurs coloniaux hollandais, Bonaparte remporte facilement la victoire puis poursuit sa conquête, prenant Colombo puis l’essentiel de l’île. Après avoir signé un traité avec le royaume de Kandy, les franco-néerlandais marchent sur Jaffna, dans le nord du pays, où ils défont une armée britannique arrivée en renfort, avant de recevoir le renfort de plusieurs centaines de soldats envoyés du Cap et de l’Île Maurice.

Pour Hastings, l’invasion française est un imprévu majeur, qui l’oblige à ne pas exploiter ses premiers succès dans la lutte contre les Marâthes et à laisser ceux-ci se réorganiser. Dans le même temps, une nouvelle inquiétante lui parvient : la flotte de l’amiral Decaen a remporté une victoire importante sur les Britanniques dans l’Atlantique nord, obligeant la Royal Navy à se concentrer sur la défense de la Grande-Bretagne et laissant aux Français une plus grande liberté de mouvement sur les théâtres périphériques. A Paris et La Haye, on envisage déjà l’envoi de renforts massifs en Inde, sous l’impulsion de Lucien Bonaparte, qui déclare aux Comices que « le cerveau de la puissance britannique est à Londres, mais son cœur battant est à Calcutta ; frappons le de toutes nos forces tant que nous le pouvons ! ».

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Dessin d'époque d'un cipaye de l'EIC

Le 12 mars 1814, sous le commandement de l’excellent amiral Hamelin, la flotte franco-hollandaise trompe la vigilance des britanniques et débarque un corps expéditionnais de 3300 hommes à proximité de Mahé, ancien comptoir français sur la côte occidentale du sous-continent. La troupe prend rapidement la ville puis se lance à l’assaut du sultanat de Mysore. Presque sans combat, Bonaparte prend la forteresse de Seringapatam et rétablit le pouvoir des successeurs de Haidar Ali et de Tipû Sahib, promettant la restitution à l’Etat mysorien de toutes les provinces perdues.

S’attendant à un débarquement du côté de Pondichéry, Hastings est contraint de réagir rapidement et de marcher contre le Mysore. Contraint de lutter sur trois fronts, à la fois contre Bonaparte, les Marâthes et les dissidences internes aux domaines de l’EIC, il doit abandonner après six mois de campagne, laissant les Franco-hollandais seuls maitres du la pointe sud. Néanmoins, son remplaçant, Arthur Wellesley, frère de l’ancien gouverneur général, arrive avec 15 000 hommes de renforts à Madras. Militaire brillant, il réorganise ses troupes et leur redonne confiance, avant d’attirer dans un piège et de détruire le gros de l’armée marâthe. Libéré du front nord, il lance l’offensive contre Bonaparte et le force à reculer jusqu’à Seringapatam.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes 1280px-Sir_Arthur_Wellesley%2C_1st_Duke_of_Wellington

Arthur Wellesley, sans doute le meilleur adversaire que Bonaparte eût à affronter
L’affrontement décisif voit Wellesley aligner plus de 40 000 hommes, tandis que les Français ont péniblement rassemblé 25 000 hommes, européens et locaux, dont plusieurs centaines de vétérans des campagnes de l’Atlantique récemment arrivés.et fanatiquement dévoués à Bonaparte. Le 18 juin 1816, le Franças est confiant en la qualité de ses troupes et sa position défensive, mais est surpris par l’habileté manœuvrière de son adversaire et manque de se faire déborder sur sa gauche. Pensant la bataille perdue, il envisage une charge de la dernière chance, quand la cavalerie du Nezam d’Hyderabad apparaît sur les arrières de l’ennemi et fait basculer

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Message par DemetriosPoliorcète Mar 27 Juin - 16:41

La fin des guerres révolutionnaires


Le caractère décisif de la bataille de Seringapatam a longtemps été reconnu comme un fait par l’historiographie, mais a été l’objet de questionnement au cours des dernières décennies. Des recherches récentes insistent notamment sur les conséquences de l’éruption du Tambora l’année précédente et de ses répercussions climatiques : pour certains historiens, le Royaume-Uni aurait pu poursuivre la guerre plusieurs années et rétablir la situation en Inde si la crise économique n’avait pas rendu intenable la situation sociale en Grande-Bretagne.

Quoi qu’il en soit, la nouvelle de la défaite indienne provoque une consternation plus profonde encore que celle des revers navals, abattant pour de bon le moral de la population, déjà soumise depuis des mois à d’importantes privations et au constat de récoltes désastreuses. Le 3 septembre, à Londres, le départ d’un stock de blé pour Southampton provoque une émeute : la rumeur prétend que le blé servira à nourrir un nouveau corps expéditionnaire vers l’Inde. Alors que l’ordre est rétabli à Londres après plusieurs jours de violences, ce sont les villes du nord, déjà en proie à l’agitation luddiste, qui s’enflamment. A Manchester, la troupe refuse de tirer sur les émeutiers et une municipalité insurrectionnelle se met en place. Demandant d’abord la garantie de l’approvisionnement en blé et une représentation au Parlement, le mouvement se radicalise et fonde une Commune libre refusant l’autorité de Londres. Il faut utiliser le canon pour mettre fin à cette dissidence. C’en est trop pour Londres : face au risque de révolution, la Grande-Bretagne signe le 15 septembre un armistice à Cherbourg. Le président du Tribunat, Joseph Fouché, impose que des négociations pour l’Europe et les questions maritimes soient tenues à Bruxelles tandis que la question indienne sera réglée par un congrès ad hoc à Pondichéry, sans doute dans l’optique de tenir le toujours plus populaire Bonaparte éloigné de la métropole.

Napoléon Bonaparte, général et héros des trois mondes FrameBreaking-1812

Emeutes luddites

Dans le même temps, avant que la nouvelle du traité de Cherbourg ne soit connue, les Franco-Hollandais et leurs alliés indiens avaient poursuivi sur leur lancée et mis le siège devant Madras, tandis que Wellesley avait été contraint de déplacer son quartier général au Bengal, région encore hors d’atteinte des ennemis de l’Angleterre ; il apprit son remplacement par Lord Minto en même temps que la paix.

La délégation française à la conférence de Calcutta était dirigée par Bonaparte lui-même, toutefois flanqué d’une équipe de diplomates envoyés par Paris. Les négociations consacrèrent le retour de la France dans le jeu indien : Paris voyait ses possessions côtières perdues au cours de la guerre de Sept ans revenir dans son giron, et devenait la puissance protectrice de Tavancore et du Mysore. Les Etats comme l’Hyderabad et la Confédération marâthe seraient quant à eux des alliés reconnaissants, mais sauraient jouer sur la rivalité entre les deux puissances pour conserver la plus vaste marge de manœuvre possible. Après de longues hésitations, la conférence décida de maintenir la fiction de la suzeraineté de l’Empereur moghol sur le sous-continent ; il ne récupérerait bien entendu pas de pouvoir réel sur les autres Etats indiens, encore moins sur les territoires sous contrôle européen, mais obtenait néanmoins l’évacuation de Delhi par les britanniques, reprenant le contrôle de la ville à la manière d’un roi capétien gérant son petit domaine royal.

Nommé Proconsul des Indes, Napoléon Bonaparte mit toute son énergie à imposer dans les territoires reconquis les mêmes réformes qu’il avait mises en pratique dans les Provinces du Mississipi : réorganisation administrative, développement militaire local, début d’une industrialisation. « L’Inde ne se contentera pas d’envoyer du thé vers la France, elle contribuera à faire rayonner la Patrie dans le monde par l’usage de ses propres forces. ». C’est aussi à cette période que naît son dernier enfant, Alexandre Bonaparte, de sa liaison avec une aristocrate locale.

En 1819, il créé néanmoins la surprise en quittant ses fonctions et en décidant de rentrer en métropole. Ce choix s’explique par les premières défaillances de sa santé, ainsi que par la nouvelle de la mort de son fils ainé Charles-Napoléon, emporté par la tuberculose, qui laisse derrière lui trois enfants en bas âge.

Les dernières années

Si les dirigeants de la République craignent un retour du général couronné de lauriers dans la politique métropolitaine, ils se rassurent bien vite en voyant le Bonaparte affaibli et grossi qui se présente à eux. « Comment un homme aussi bedonnant que moi pourrait-il être ambitieux ? » dira-t-il d’ailleurs en plaisantant [1].

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Joseph Fouché, Président du Tribunat

Il reste à Paris pour assister à la nomination de Lucien comme Président du Tribunat, après la chute de Joseph Fouché, mais ne tarde pas à s’embarquer pour la Nouvelle-Orléans, où il a depuis longtemps déclaré vouloir finir ses jours. Débarqué en mai 1821, il retrouve son beau-frère Murat, qui dirige la colonie depuis son départ, dans la droite ligne de sa politique de pouvoir personnel. Installé dans une plantation au nord de la capitale, il se consacre à la rédaction de ses deux ouvrages qui seront publiés à titre posthume : une réflexion théorique, De la guerre expéditionnaire et des Mémoires qui resteront en inachevés.

Certains, pourtant, veulent croire à un retour fulgurant dans les affaires militaires : une délégation grecque traverse en effet en 1822 l’Atlantique pour lui proposer de prendre la tête d’une rébellion future ; il décline l’offre, adressant néanmoins des officiers de valeur à ses invités. Des recherches récentes ont montré l’existence d’un projet similaire parmi les indiens du cône sud des Amériques : une délégation devait se rendre dans le Mississipi pour proposer à Bonaparte la couronne d’Araucanie et de Patagonie !

C’est néanmoins contre la maladie que Bonaparte lutte au cours des dernières années de sa vie. C’est le 12 février 1823 qu’il rend son dernier souffle, dictant un testament sans surprises répartissant sa fortune entre ses enfants. Un deuil national est proclamé à la Nouvelle-Orléans puis à Paris. Une bataille s’engage entre les deux capitales pour déterminer le lieu de son tombeau, Murat imposant finalement la Nouvelle-Orléans, où un gigantesque mausolée est construit à la suite d’une souscription. C’est sur son cercueil qu’est gravée le titre sous lequel il est le plus connu aujourd’hui : « général et héros des trois mondes ».

Epilogue

Sorti de l’ombre grâce à la révolution, Bonaparte n’avait jamais porté de couronne, mais il fonda en quelque sorte une dynastie, tant sa nombreuse descendance sera associée aux destinées des siècles suivants : si son petit-fils par Charles-Napoléon aura fait une carrière honorable mais sans éclat en métropole, Paul-Emile Bonaparte s’est couvert de gloire comme officier de cavalerie pendant les guerres du Missouri face aux colons anglophones, avant de devenir préfet puis Proconsul du Mississipi de 1855 à 1861. La branche indienne de la famille a quant à elle donné de multiples administrateurs coloniaux, puis le premier dirigeant après l’indépendance, Eskandar Bonaparte, en 1987. Par une série de mariages prestigieux, ce dernier était lié par le sang à la plupart des grandes maisons princières du sous-continent. Les descendants d’Octavie Bonaparte sont, de leur côté, restés connus comme les barons des vins et spiritueux du Mississipi et du Texas, exportant notamment les fameux whiskys du pays !

En dehors des descendants directs de Napoléon, d’autres Bonaparte ont également gravé leurs noms dans l’histoire : si Lucien ne survécut pas longtemps son frère, Louis-Napoléon, fils de son frère Louis, fut ainsi ministre de l’industrie puis Président du Tribunat de 1862 à 1869, et passe pour une figure de modernisateur. La dynastie des Murat pèse, quant à elle, toujours autant dans la politique mississipienne, un arrière petit-fils de Murat et Caroline Bonaparte devenant notamment le premier Président de la République du Mississipi.


[1] Authentique citation qui date des Cent Jours !

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Message par LFC/Emile Ollivier Mar 27 Juin - 18:19

Excellent ! Comme toujours Wink
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Message par Thomas Mar 27 Juin - 20:18

C’est aussi à cette période que naît son dernier enfant, Alexandre Bonaparte, de sa liaison avec une aristocrate locale.
C'est-à-dire ? Aristocrate française vivant en Inde ? Aristocrate indienne ?
La branche indienne de la famille
et
Eskandar Bonaparte
Me fait plutôt pencher pour "Aristocrate indienne".

En tout cas, une chouette TL napoléonienne qui change des habituelles PODs et explorations.

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Message par Rayan du Griffoul Mar 27 Juin - 21:37

Belle histoire en tout cas
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Message par Flosgon78 Mar 27 Juin - 23:04

excellent !!!!
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Message par DemetriosPoliorcète Mer 28 Juin - 12:35

Merci à tous pour vos messages !


Thomas a écrit:
C’est aussi à cette période que naît son dernier enfant, Alexandre Bonaparte, de sa liaison avec une aristocrate locale.
C'est-à-dire ? Aristocrate française vivant en Inde ? Aristocrate indienne ?
La branche indienne de la famille
et
Eskandar Bonaparte
Me fait plutôt pencher pour "Aristocrate indienne".

En tout cas, une chouette TL napoléonienne qui change des habituelles PODs et explorations.

Je pensais à une aristocrate indienne oui. Le métissage est courant dans les colonies indiennes, avant le milieu du XIXe siècle.
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