[CT011] Un coup du sort
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[CT011] Un coup du sort
Un coup du sort
« 3 jours, cela fait 3 jours en ce mois de décembre 1941, que le soldat Fernand Cron entend les balles siffler autour de lui et pour cause, il est coincé avec ses camarades dans le fortin de Dong Dang. »
Frank Ferrand, Au cœur de l’histoire du 1er septembre 2016.11 décembre 1941, Dong Dang, Nord-Tonkin, à la frontière chinoise.
Malgré la nette supériorité numérique japonaise, les soldats français défendant la position frontière de Dong Dang entre le Tonkin français et la portion de Chine occupée par le Japon impérial se battent avec acharnement et infligent des pertes conséquentes à l’ennemi, et ce depuis 3 jours et le déclenchement de l’offensive japonaise.
Sur les 400 défenseurs initiaux, plus des 3/4 sont déjà tombés à l’ennemi lorsqu’un dernier assaut tranche l’issue du combat. Le fortin tombe aux mains de l’ennemi et une cinquantaine de survivants, tous blessés, dont fait partie le soldat Fernand Cron, sont capturés par les Japonais.
Exaspérés par cette résistance, les commandants locaux décident de leur propre chef, et à l’encontre des ordres du général commandant l’invasion de l’Indochine française, Nishimura Takuma, qui a appelé au bon traitement des prisonniers faits (ce qui reste néanmoins relatif quand on connaît les Japonais…), d’exécuter les 23 survivants français du poste (tout en attendant pour les Indigènes, qui seront au final incorporés plus ou moins volontairement à l’armée de l’État du Vietnam collaborateur).
Les Français sont contraint de creuser leurs propres tombes sous la menace des armes ennemies, avant qu’un Japonais francophone ne leur ordonne de se mettre à genoux. Seul un d’entre eux cède à la panique et pousse des hurlements. Les autres restent de marbre, s’adressant parfois à Dieu, insultant souvent leurs ennemis cruels, toujours en marmonnant entre leurs dents.
Aucune chance n’est laissée aux malheureux français. En effet, un premier soldat décapite sa victime au sabre tandis qu’un second l’achève d’un coup de baïonnette. Fernand Cron est en bout de file. Il sera le dernier à mourir. Triste privilège que de voir ses camarades et frères d’armes perdre la vie les uns après les autres…
Mais, le soldat Cron a une idée…
Au moment où la lame fatale touche son cou, il se penche, pour accompagner le mouvement et ainsi limiter si l’on peut dire l’ampleur de la blessure. Cela réussit car Cron est toujours en vie, en dépit de la gravité du coup infligé.
Reste le second Japonais à la baïonnette…
C’est alors qu’un officier braille un ordre. Au bruit, tous les envahisseurs semblent s’agiter puis, rapidement, le silence…
Le miracle s’était accompli. L’ordre de l’officier japonais avait fait oublier sa funeste activité au second soldat qui, ainsi distrait, n’avait pas porté le fatal coup à Fernand. Sans doute les assassins étaient-ils partis chercher de quoi brûler les corps. On n’est jamais trop prudent quand on est un meurtrier de masse… « Ces hommes n’avaient rien à envier aux Boches » pensa d’ailleurs furtivement le Français à moitié décapité qui s’éloigne avec difficulté des lieux du crime, non sans avoir vérifié qu’un de ses camarades et amis n’aient survécus. Mais Cron était bien l’unique miraculé de Dong Dang.
Fernand Cron se cache alors dans une rizière pour échapper au retour des bourreaux quand il sent une présence près de lui…
C’est un Tirailleurs annamite. En dépit de l’extrême douleur et de la panique, Cron réfléchit rapidement. Les Tirailleurs ont été épargnés de ce que les Français ont pu comprendre. Si celui-ci se cache, c’est qu’il est peu désireux de servir l’Empire du Soleil Levant…
Et en effet, le Tirailleur explique qu’il est un « ami » et desserre les liens du Français pour le prouver. Les 2 soldats de la République assistent à l’incinération des cadavres des 22 autres Métropolitains, massacrés par l’ennemi. Puis, les Japonais s’éloignent, ils ont une colonie à conquérir, un Empire dont ils doivent s’emparer…
Le Vietnamien aide alors le Français à la plaie sanguinolente et déjà attaquée par les insectes aux proportions impressionnantes de la jungle tonkinoise et le conduit vers une maison habitée par des Indigènes, si proche mais tellement loin pour un homme quasiment décapité…
Mais Cron veut vivre. Aidé par son ami et frère d’arme asiatique, il atteint le petit village dont les habitants, reconnaissant le Tirailleur, accueillent chaleureusement le Français, qu’ils commencent à soigner, en pansant la plaie béante à l’aide du mixture à base de plante locales.
Le Français cicatrise. Il peut survivre espèrent ses soignants.
Mais le décapité ne pense pas ainsi. Pour lui, il va survivre. Cet optimisme, cette force de caractère, cette volonté de ne pas céder au désespoir, est dans sa nature.
Mais celui-ci, apprenant les succès japonais, dont ils se doutaient déjà, ne veut faire prendre aucun risque à ses généreux hôtes. Il se décide à partir, à reprendre la route, pour ne pas que ses sauveurs, qui auraient très bien bien pu le dénoncer aux vainqueurs mais qui avaient décidés de l’aider, contre ce qui semblait être le cours des choses, ne payent de leurs vies leurs secours si les Japonais découvrent sa présence lors d’une descente.
Mais pour aller où ? Les Japonais sont partout, l’emportent partout. Son choix se porte en conséquence vers les régions montagneuses du nord et de l’ouest du Vietnam, isolées, bien moins stratégiques certainement aux yeux des envahisseurs, qui leurs préféreront pour un temps du moins, la côte est, Hanoï, Tourane et Saïgon, la grande ville du sud.
Ce sera le choix de la vie.
Car en effet, la chance n’a pas tournée pour Fernand Cron. Après des jours de marche, il tombe sur une colonne française en retraite dont les membres lui fabriquent un brancard et s’occupent de lui, le soignent.
Grâce à ses nouveaux camarades de la colonne Alessandri, et quoi qu’en piteux état, Cron parvient grâce à leur protection, leur vigilance de tous moments, en Chine non occupée vers laquelle ils retraitent pour continuer la lutte. Arrivés en Chine non occupée, à Kunming, le décapité de Dong Dang sera transporté de là en Inde britannique pour y être soigné.
De son incroyable survie, Cron ne conservera qu’une longue cicatrice qui lui mangera tout l’arrière du cou. Il finira sa vie comme viticulteur du côté de Cognac.
Son épopée digne de Saint Denis, le martyr qui porta sa tête décapitée sur plusieurs kilomètres, sera relatée des années plus tard par le conteur Pierre Bellemare puis par Frank Ferrand sur les ondes en 2016.
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LFC/Emile Ollivier- Messages : 2721
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Thomas, DemetriosPoliorcète et Collectionneur aiment ce message
Re: [CT011] Un coup du sort
Une histoire vraie, que j'ai voulue adapter LFC. Comme en ce moment je suis sur l'invasion de l'Indochine par le Japon, y adapter cette histoire m'a paru logique.
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Re: [CT011] Un coup du sort
Bon récit, et j'aimerais imaginer les japonais après guerre qui on participé à ces executions, (ceux qui on survécu à la guerre ceci dit) mourir de maniéré "accidentelle" en ayant comme dernière parole 'le fantôme de dong dang...aaaargh!'
Wardog1- Messages : 356
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Re: [CT011] Un coup du sort
Wardog1,
J'ai failli lui accorder un destin dans les renseignements mais je pense qu'il est inapte au combat. Bien que ce soit LFC, je le vois plus préférer sa vie peinard à Cognac.
J'ai failli lui accorder un destin dans les renseignements mais je pense qu'il est inapte au combat. Bien que ce soit LFC, je le vois plus préférer sa vie peinard à Cognac.
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