La Grande Bibliothèque d'Alexandrie sauvegardée.

Baptisée du nom de Musée puisqu'elle était dédiée aux sept muses, il n'y avait pas une bibliothèque à Alexandrie mais trois. Et Oui !

La première partie est la bibliothèque royale Elle abritait entre 300 000 et 500 000 rouleaux de papyrus. même en comptant plusieurs rouleaux pour un "livre" au sens moderne, il s'agit tout de même d'une bibliothèque conséquente... autour de 100 000 ouvrages modernes. c'est pour organiser cette masse de connaissance que pour la première fois on classa les textes alphabétiquement. IL faut bien comprendre que le nombre de ces livres ne veut rien dire en chiffre pur. Il faut comparer. En 1450, il y avait dans toute l'Europe quelques 250 000 livres ! C'est à dire qu'il y en avait le double à Alexandrie, dans une seule bibliothèque !

La seconde partie est le Musée proprement dit, ici sont exposés des objets, par exemple les machines de Hiéron d'Alexandrie, mais aussi les cartes du ciel et de la Terre.

La troisième partie est le Serapeum , c'est à dire le temple du dieu Sérapis https://fr.wikipedia.org/wiki/Sarapis.
Il abritait 50 000 rouleaux de parchemins traitant de la doctrine religieuse de tous les peuples connus de l'antiquité. C'est d'ailleurs pour les besoins du Serapeum que la Bible hébraïque fut traduite en Grec par 70 rabbins... donnant naissance à la septante. Livre qui est à la base de l'Ancien Testament de la Bible chrétienne...


Que contenait La Grande Bibliothèque ?
Personne ne le sait exactement. Il y avait tous les livres connus des Grecs. Une bonne partie des livres Perses (dont il ne reste plus rien, même pas le souvenir), des livres Africains (oui les gens écrivaient en Afrique. Par exemple, les Carthaginois ont eu des philosophes, des géographes, des dramaturges et des auteurs de comédie... seul le nom de quelques-uns, des fragments de texte au mieux sont parvenus jusqu'à nous).

Pour prendre une seule catégorie : la poésie dramatique grecque.
- Seul 44 tragédies grecques ont survécu jusqu'à nos jours.
Sophocle à lui seul en a écris 123, Eschyle 90, Euripide 92.... et comme les autres auteurs sont à présent presque oublié comparons avec Aristophane qui a écris 54 comédies.

Outre les bibliothécaires, la bibliothèque hébergeait 14 000 étudiants. Vous connaissez certainement certains d'entre eux... leurs théorèmes vous ont faire faire des cauchemars quand vous étiez collégiens.

- Euclide : mathématicien, spécialiste de la géométrie.
- Appolonios de Perga : Astronome et mathématicien, tous les travaux sur les sections de cône préfigurent ceux de Kepler (qui s'en inspira)
- Archimède : savant génial dans le domaine de la mécanique : vis sans fin, poulie, roues dentées on lui doit surtout la célèbre poussée d'Archimède : " Tout corps plongé dans l'eau subit une poussée verticale de bas en haut, égale en masse au volume d'eau déplacer".
- Aristarque de Samos : le premier astronome à avoir décris le mouvement de la Terre autour du Soleil (Copernic, copieur !) Il a aussi attribué l'alternance des jours et des nuits à la rotation de la terre.
- Hérophile : anatomiste. Il démontra que le siège de la pensée était le cerveau.
- Eratosthène : heu hypergénie sachant tout faire ? On le connait surtout comme poète et philosophe... (imaginez de réduire Léonard de Vinci à son seul talent de peintre !) Mais il fut aussi mathématicien, astronome et géographe. Il calcula les méridiens, et la circonférence de la Terre. A côté de ça il fut aussi directeur de la bibliothèque d'Alexandrie et critique littéraire.
- Hipparque : Astronome grec ayant créé le premier catalogue des constellations. Coup de bol, une statue de marbre d'Atlas le représentant portant les constellations a survécu... puisqu'il ne reste rien de ses livres.
-Héron d'Alexandrie : mécanicien génial, sorte de Léonard de Vinci qui a inventé la machine à vapeur.

90% des livres de l'antiquité sont perdus à jamais. Je trouve ça extrêmement triste. Imaginez si cette source de connaissance et ce centre de formation ait continué à produire à l'époque arabe ? Le monde serait différent. Nous aurions gagné des siècles d'évolution scientifique, politique, géographie, littéraire et nous ne serions pas aussi désarmé face aux constructions du passé, surgies des sables. Imaginez le travail qu'il a fallu pour reconstituer l'écriture hiéroglyphique.

Et savez-vous pourquoi tout ça a été détruit ?
Lorsque les Arabes prirent Alexandrie, le Sérapeum n'existait plus depuis longtemps. l'empereur Théodose avait interdit les religions païennes et condamné cette bibliothèque religieuse aux flammes. Mais la Bibliothèque royale hébergeait encore une partie de ses livres (on ne sait pas au juste combien...  mais vu que 200 000 livres de la bibliothèque de Pergame avait été rajouté au fond déjà détenu à la fin de la dynastie lagide, au moins 300 à 400 000).

Le conquérant arabe assez mal à l'aise envoya un courrier à la Mecque pour demander des instructions. Il revint avec ces mots : " Si ce qui est écris se trouve aussi dans le Coran. Brûlez-les. Ils sont inutiles. Si ce qui est écris dans ces livres n'est pas dans le Coran. Brûlez-les, ils sont blasphémateurs".

Petite anecdote, les bibliothèques de Byzance comprenaient la plupart des tragédies grecques antiques.
Et ces ouvrages n'ont pas été perdus seulement en 1204 ou en 1453, mais a cause des byzantins eux-même, qui ont décidé sur des critères totalement subjectifs de conserver seulement sept pièces de chaque auteurs qu'ils possédaient.

Bon, ces pièces n'étaient pas conservés qu'a Byzance, mais c'est quand même un gâchis jamais vu.(Et ça pénalise totalement nos recherches sur ces périodes. Les historiens antiques ont très peu de matière sur laquelle travailler, par exemple sur la culture, et les réponses étaient peu être dans ces piéces perdues a jamais)
Je vais retrouver l'interview où j'avais lu ça, c'était dans un numéro d'Actuel de 1992, par un intellectuel italien dont j'ai oublié le nom.

Oh, je te crois, les Byzantins avaient un singuliers amours de l'Histoire antique... singulier dans le sens de "sélectif". Ils aimaient certaines choses et détestaient le reste. Ils la voyaient au travers d'un filtre déformant et s'efforçaient de "rectifier" ce qui la contredisait. par exemple, c'est Justinien qui a fermé le Lycée et l'académie. les écoles philosophiques d'Athènes.