Le Dernier Jour de la Création de Wolfgang Jeschke (1981)

par Uranium Colonel Mar 12 Jan - 17:21

Qu'est qui relie les restes d'une Jeep retrouvée par un officier britannique à Gibraltar dans les années 1840, les restes d'un masque de pilote pris pour une sainte relique par le Vatican ou bien un bien étrange lance-grenade, retrouvé dans une couche sédimentaire datée de 5 millions d'années?

Rien en apparence...à moins que L'amiral de l'US Navy Francis n'ait en partie la réponse. Sous couvert de mission spatiale, la NASA et l'US Navy ont rassemblé volontaires et techniciens pour le plus grand plan jamais développé par l'espèce humaine: faire voyager un groupe de soldats et de spécialistes du forage avant l'ouverture de la méditerranée afin de détourner les réserves pétrolières du monde arabe en Europe!

Wolfgang Jeschke (1936-2015) (dont c'est l'un des seuls romans à avoir été traduit en français) nous livre ainsi une acerbe critique de la société contemporaine et plus particulièrement des institutions militaires américaines post-guerre du Vietnam.
Les Puissants sacrifient ainsi tout un groupe de malheureux pour réaliser un projet (qui n'aboutira pas, il y a une jolie évocation de l'effet "Aloysius" (référence à l'auteur de SF Raphaël Aloysius Lafferty, impliquant que si vous avez modifié un événement dans le Passée, vous n'en saurez rien à votre retour, puisque ça sera une vérité historique!), coincée en plein Miocène, les hommes de la NASA/Navy constatent non seulement que leur arrivée s'est fait en ordre dispersée (sur une échelle de 70ans) et que des "mercenaires au service des Cheikhs" ont fait le même trajet , à ce désagréable constat s'ajoute l'impossibilité de revenir dans le futur (la zone de "rappel" des Bermudes recrache cependant toute sorte d'éléments et de pièces provenant de l'Ère humaine, plus ou moins en bon état ) et le télescopage total de l'Histoire humaine (les arrivants viennent tous de chronologie différente, dans l'une les États-Unis sont les perdants d'une guerre froide avec un Empire mexicain toujours dirigé par un Habsburg, dans l'autre l'État d'Israël n'a tout simplement pas existé et la puissance économique majeure est la République Arabe Unie).
La méditerranée (qui est encore une plaine) est victime de ce joli chaos, armes nucléaires et missiles s'abattent au petit bonheur la chance, et pis encore des tribus de proto-anthropoïdes ont été levés par les différents camps pour défendre leurs bases!.

Profondément déprimant, ce roman n'en reste pas moins un obscur livre de SF à lire, non seulement pour l'aspect uchronique (qui reste limitée, bien que l'on suivent de près les efforts infructueux d'un homme de dresser tous les points de divergence historiques) mais aussi pour la bonne maitrise du caractère des personnages, jetés comme de la chair à canon temporel dans un monde qu'il n'ont jamais compris pour une mission, échoué d'avance!.