Le Monde uchronie
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Le Monde uchronie
Bonjour,
Il semblerait que le journal Le Monde lance une petite série uchronique de 6 épisodes ce mois-ci, mais pour les abonnées :
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/09/et-si-le-10-aout-1792-l-emeute-des-sans-culottes-avait-ete-ecrasee_6090933_3451060.html
Premier épisode pour 1792 et les sans culottes écrasées.
Il semblerait que le journal Le Monde lance une petite série uchronique de 6 épisodes ce mois-ci, mais pour les abonnées :
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/09/et-si-le-10-aout-1792-l-emeute-des-sans-culottes-avait-ete-ecrasee_6090933_3451060.html
Premier épisode pour 1792 et les sans culottes écrasées.
ezaski- Messages : 300
Date d'inscription : 08/11/2020
LFC/Emile Ollivier aime ce message
Re: Le Monde uchronie
Épisode du jour : Robespierre reste au pouvoir !
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/10/et-si-le-9-thermidor-robespierre-etait-reste-au-pouvoir_6091025_3451060.html
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/10/et-si-le-9-thermidor-robespierre-etait-reste-au-pouvoir_6091025_3451060.html
ezaski- Messages : 300
Date d'inscription : 08/11/2020
Re: Le Monde uchronie
Argh, frustrant!
Y aurait-il un abonné pour nous partager le texte?
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DemetriosPoliorcète- Messages : 1483
Date d'inscription : 05/03/2016
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Re: Le Monde uchronie
EP 1 :
Dans la nuit du 9 au 10 août 1792, le tocsin sonne aux clochers des églises de Paris. Il appelle les gardes nationaux des faubourgs Saint-Marceau et Saint-Antoine, les « sans-culottes », appuyés par les fédérés marseillais et bretons cantonnés dans la capitale, à marcher sur les Tuileries pour renverser Louis XVI, accusé d’avoir laissé les armées autrichienne et prussienne entrer en France dans l’espoir de voir la Révolution noyée dans le sang.
LES FAITS
Le manifeste du Duc de Brunswick, chef des armées coalisées, qui, publié le 25 juillet en Allemagne, à Coblence, capitale de la contre-Révolution et connu à Paris le 1er août, menace la ville d’une « exécution militaire et d’une subversion totale » s’« il était fait la moindre violence au roi », a encore attisé la colère.
Depuis des semaines, tous les protagonistes se préparent à un affrontement que chacun pressent décisif. La cour a transformé le palais des Tuileries en forteresse, dont la garnison est formée de 4 000 à 5 000 soldats, gardes suisses, gentilshommes de la cour, gardes nationaux des sections de l’Ouest parisien fidèles au roi, gendarmes à cheval, appuyés par douze canons servis par les gardes nationaux.
Les sections des faubourgs, chauffées à blanc par les partisans du Montagnard Marat et les représentants du Club des cordeliers envoyés par Danton, resté prudemment en retrait, et du club des Jacobins – sans Robespierre, tout aussi prudent –, se sont prononcées en majorité pour la déchéance du roi. Elles ont réuni des armes et ont constitué une « commune insurrectionnelle » à l’Hôtel de ville.
L’Assemblée nationale législative, qui siège depuis le 1er octobre 1791 à la salle du Manège, située dans le jardin des Tuileries, à quelques centaines de mètres du palais, est tout aussi oscillante. La majorité de ses 745 députés entend défendre la monarchie parlementaire telle qu’elle fonctionne depuis l’adoption, le 3 septembre 1791, d’une Constitution inspirée du Bill of Rights de la révolution anglaise (1689). Elle a déjà entériné des réformes libérales décisives, telles que l’égalité devant la loi et l’impôt, la souveraineté de la nation (le roi n’est plus que le chef du pouvoir exécutif), la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, l’abolition des privilèges et corporations de l’Ancien Régime, la liberté individuelle inscrite dans la Déclaration des droits de l’homme. Selon les termes de la Constitution, « il n’y a point en France d’autorités supérieures à celle de la loi. Le roi ne règne que par elle ». C’est l’Assemblée législative qui, comme le Parlement anglais, détient le pouvoir et incarne les principes de la révolution de 1789.
En finir avec les veto royaux
C’est pourquoi les Girondins, qui « tiennent » l’Assemblée avec les députés Brissot, Vergniaud, Roederer, Roland, Condorcet, veulent en finir avec les tentatives continuelles de Louis XVI d’enrayer leur travail législatif à coups de veto, utilisé à cinq reprises, et surtout avec sa complicité avec l’envahisseur. Mais ils souhaitent tout autant ne pas être pris en otage par la violence des sectionnaires parisiens : après la journée du 20 juin, qui avait déjà vu les sans-culottes envahir, certes pacifiquement, les Tuileries et contraindre le roi à arborer un bonnet phrygien, l’Assemblée vote, le 21 juin, un décret interdisant toute réunion de citoyens armés de se présenter à l’Assemblée ou devant une autorité constituée.
Pour l’historien Jean-Clément Martin, le régime de monarchie parlementaire est bien celui qui, en cet été 1792, recueille l’assentiment de la majorité de l’Assemblée, de l’opinion en province et même à Paris. Ne s’y opposent, à droite, qu’une poignée de partisans du retour à l’Ancien Régime à la cour des Tuileries, dans l’émigration à Coblence, ou dans les campagnes de l’ouest (pour des raisons surtout religieuses). Et, à gauche, les orateurs des clubs et des sections des faubourgs parisiens.
Comme l’écrit l’historien Jules Michelet, « si au parti de l’élan [les Girondins] les forces du parti modéré [l’Assemblée] s’étaient jointes, il est douteux qu’on eût eu besoin du parti de la Terreur ». Et la Révolution française aurait pris un autre cours.Mais, le 13 juin, lançant une nouvelle épreuve de force avec l’Assemblée, le roi remplace par des ministres proches de la cour les ministres girondins qui lui avaient été imposés trois mois auparavant. Le 3 juillet, Vergniaud, le grand orateur des Girondins, s’en prend directement au roi : « Vous n’êtes plus rien pour cette Constitution que vous avez si indignement violée, pour ce peuple que vous avez si lâchement trahi ! » Mais, trois jours plus tard, alors que Condorcet, entre autres, propose que l’Assemblée se saisisse par conséquent du pouvoir exécutif, celle-ci n’ose pas franchir le pas. Les députés, écrit Michelet, « commençaient à craindre de trop bien réussir, de n’abattre le trône que pour asseoir sur ses débris le trône de l’anarchie, la royauté des clubs ».A l’aube du 10 août, chacun retient son souffle, dans l’attente de l’issue de l’insurrection. A vrai dire, le tocsin n’a guère mobilisé. Les faubourgs ne se mettent en marche que vers 8 heures. Impatients, les plus mobilisés et les fédérés forment une avant-garde de 2 000 à 3 000 hommes. A leur approche, Roederer, « procureur général syndic » (équivalent des futurs préfets) du département de Paris, alors présent aux Tuileries, suggère au roi de venir se présenter à l’Assemblée, où il sera mieux protégé par la Constitution que par la force armée – une façon élégante de le prendre en otage.
Dans la nuit du 9 au 10 août 1792, le tocsin sonne aux clochers des églises de Paris. Il appelle les gardes nationaux des faubourgs Saint-Marceau et Saint-Antoine, les « sans-culottes », appuyés par les fédérés marseillais et bretons cantonnés dans la capitale, à marcher sur les Tuileries pour renverser Louis XVI, accusé d’avoir laissé les armées autrichienne et prussienne entrer en France dans l’espoir de voir la Révolution noyée dans le sang.
LES FAITS
Le manifeste du Duc de Brunswick, chef des armées coalisées, qui, publié le 25 juillet en Allemagne, à Coblence, capitale de la contre-Révolution et connu à Paris le 1er août, menace la ville d’une « exécution militaire et d’une subversion totale » s’« il était fait la moindre violence au roi », a encore attisé la colère.
Depuis des semaines, tous les protagonistes se préparent à un affrontement que chacun pressent décisif. La cour a transformé le palais des Tuileries en forteresse, dont la garnison est formée de 4 000 à 5 000 soldats, gardes suisses, gentilshommes de la cour, gardes nationaux des sections de l’Ouest parisien fidèles au roi, gendarmes à cheval, appuyés par douze canons servis par les gardes nationaux.
Les sections des faubourgs, chauffées à blanc par les partisans du Montagnard Marat et les représentants du Club des cordeliers envoyés par Danton, resté prudemment en retrait, et du club des Jacobins – sans Robespierre, tout aussi prudent –, se sont prononcées en majorité pour la déchéance du roi. Elles ont réuni des armes et ont constitué une « commune insurrectionnelle » à l’Hôtel de ville.
L’Assemblée nationale législative, qui siège depuis le 1er octobre 1791 à la salle du Manège, située dans le jardin des Tuileries, à quelques centaines de mètres du palais, est tout aussi oscillante. La majorité de ses 745 députés entend défendre la monarchie parlementaire telle qu’elle fonctionne depuis l’adoption, le 3 septembre 1791, d’une Constitution inspirée du Bill of Rights de la révolution anglaise (1689). Elle a déjà entériné des réformes libérales décisives, telles que l’égalité devant la loi et l’impôt, la souveraineté de la nation (le roi n’est plus que le chef du pouvoir exécutif), la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, l’abolition des privilèges et corporations de l’Ancien Régime, la liberté individuelle inscrite dans la Déclaration des droits de l’homme. Selon les termes de la Constitution, « il n’y a point en France d’autorités supérieures à celle de la loi. Le roi ne règne que par elle ». C’est l’Assemblée législative qui, comme le Parlement anglais, détient le pouvoir et incarne les principes de la révolution de 1789.
En finir avec les veto royaux
C’est pourquoi les Girondins, qui « tiennent » l’Assemblée avec les députés Brissot, Vergniaud, Roederer, Roland, Condorcet, veulent en finir avec les tentatives continuelles de Louis XVI d’enrayer leur travail législatif à coups de veto, utilisé à cinq reprises, et surtout avec sa complicité avec l’envahisseur. Mais ils souhaitent tout autant ne pas être pris en otage par la violence des sectionnaires parisiens : après la journée du 20 juin, qui avait déjà vu les sans-culottes envahir, certes pacifiquement, les Tuileries et contraindre le roi à arborer un bonnet phrygien, l’Assemblée vote, le 21 juin, un décret interdisant toute réunion de citoyens armés de se présenter à l’Assemblée ou devant une autorité constituée.
Pour l’historien Jean-Clément Martin, le régime de monarchie parlementaire est bien celui qui, en cet été 1792, recueille l’assentiment de la majorité de l’Assemblée, de l’opinion en province et même à Paris. Ne s’y opposent, à droite, qu’une poignée de partisans du retour à l’Ancien Régime à la cour des Tuileries, dans l’émigration à Coblence, ou dans les campagnes de l’ouest (pour des raisons surtout religieuses). Et, à gauche, les orateurs des clubs et des sections des faubourgs parisiens.
Comme l’écrit l’historien Jules Michelet, « si au parti de l’élan [les Girondins] les forces du parti modéré [l’Assemblée] s’étaient jointes, il est douteux qu’on eût eu besoin du parti de la Terreur ». Et la Révolution française aurait pris un autre cours.Mais, le 13 juin, lançant une nouvelle épreuve de force avec l’Assemblée, le roi remplace par des ministres proches de la cour les ministres girondins qui lui avaient été imposés trois mois auparavant. Le 3 juillet, Vergniaud, le grand orateur des Girondins, s’en prend directement au roi : « Vous n’êtes plus rien pour cette Constitution que vous avez si indignement violée, pour ce peuple que vous avez si lâchement trahi ! » Mais, trois jours plus tard, alors que Condorcet, entre autres, propose que l’Assemblée se saisisse par conséquent du pouvoir exécutif, celle-ci n’ose pas franchir le pas. Les députés, écrit Michelet, « commençaient à craindre de trop bien réussir, de n’abattre le trône que pour asseoir sur ses débris le trône de l’anarchie, la royauté des clubs ».A l’aube du 10 août, chacun retient son souffle, dans l’attente de l’issue de l’insurrection. A vrai dire, le tocsin n’a guère mobilisé. Les faubourgs ne se mettent en marche que vers 8 heures. Impatients, les plus mobilisés et les fédérés forment une avant-garde de 2 000 à 3 000 hommes. A leur approche, Roederer, « procureur général syndic » (équivalent des futurs préfets) du département de Paris, alors présent aux Tuileries, suggère au roi de venir se présenter à l’Assemblée, où il sera mieux protégé par la Constitution que par la force armée – une façon élégante de le prendre en otage.
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
L’HISTOIRE ALTERNATIVE : L’INSURRECTION EST MATÉE
[L’uchronie, ou « histoire alternative », consiste à exploiter, selon les représentations des acteurs de l’époque, d’autres potentialités d’un événement, ou encore les différentes lectures contemporaines de celui-ci, pour montrer que l’histoire aurait pu s’écrire différemment.]
Le roi refuse de quitter son palais, siège du pouvoir exécutif au titre de la Constitution. Roederer harangue les canonniers hésitants placés aux avant-postes et leur rappelle le décret du 21 juin : « Vous êtes là pour garder la demeure du roi et empêcher qu’on en force l’entrée. Ceux qui tireraient sur vous ne seraient plus vos frères ! » Comme l’écrit Lamartine dans son Histoire des Girondins (1847), « quatre ou cinq mille combattants dans une position forte, avec des baïonnettes disciplinées, des canons, deux corps de cavalerie, un roi à leur tête (…), une Assemblée indécise à leur porte, la légalité et la Constitution de leur côté, et l’opinion au moins partagée dans la nation, pouvaient repousser ces masses confuses et désordonnées que l’insurrection amenait lentement sur le château, rompre ces colonnes de peuple qui ne se grossissent que des incertains qu’elles entraînent ».
Nul ne sait d’où partit le premier coup de feu, mais la fusillade devient générale. Les canons chargés à mitraille ont vite fait de disperser la petite troupe des insurgés. Une heure plus tard, celle-ci revient avec les renforts des faubourgs, bien armés et encadrés par les sectionnaires. Les insurgés pénètrent dans la cour, entrent dans le vestibule d’où partent les escaliers monumentaux montant aux appartements royaux. C’est là que les attendent les gardes suisses, en rang sur chaque marche formant autant de lignes de feu, tandis que gentilshommes et gardes nationaux garnissent les fenêtres des bâtiments entourant la cour. C’est un épouvantable massacre. La foule reflue dans la Cour non sans avoir incendié les bâtiments et tué ses occupants, puis sur la place où une charge des gendarmes à cheval achève de les disperser. Il est midi, l’insurrection est matée.
Alarmé par le fracas du combat, Roederer réussit, cette fois, à convaincre le roi de se réfugier au Manège avec sa famille : « Je propose le seul parti que la destinée laisse ouvert au salut du roi » – une façon élégante de le prendre en otage.
Les Girondins décident de saisir l’occasion pour se débarrasser à la fois des ultras de la cour apparemment triomphants et des sectionnaires. Après s’être concerté avec Danton et Robespierre, Vergniaud monte à la tribune : « Je vous demande de voter, comme la Constitution nous y autorise, la suspension du pouvoir exécutif et un décret pour la nomination d’un gouverneur du prince royal. Les ministres seront nommés par l’Assemblée nationale. » Il propose le général Dumouriez, commandant en chef de l’armée des Ardennes, comme gouverneur du Dauphin, avec la charge de prendre en mains la défense du royaume. Ce général, considéré comme le meilleur de l’armée, ministre de la guerre du gouvernement girondin chassé le 13 juin par le roi, est estimé par celui-ci autant que par les jacobins. La motion est votée aussitôt.
[L’uchronie, ou « histoire alternative », consiste à exploiter, selon les représentations des acteurs de l’époque, d’autres potentialités d’un événement, ou encore les différentes lectures contemporaines de celui-ci, pour montrer que l’histoire aurait pu s’écrire différemment.]
Le roi refuse de quitter son palais, siège du pouvoir exécutif au titre de la Constitution. Roederer harangue les canonniers hésitants placés aux avant-postes et leur rappelle le décret du 21 juin : « Vous êtes là pour garder la demeure du roi et empêcher qu’on en force l’entrée. Ceux qui tireraient sur vous ne seraient plus vos frères ! » Comme l’écrit Lamartine dans son Histoire des Girondins (1847), « quatre ou cinq mille combattants dans une position forte, avec des baïonnettes disciplinées, des canons, deux corps de cavalerie, un roi à leur tête (…), une Assemblée indécise à leur porte, la légalité et la Constitution de leur côté, et l’opinion au moins partagée dans la nation, pouvaient repousser ces masses confuses et désordonnées que l’insurrection amenait lentement sur le château, rompre ces colonnes de peuple qui ne se grossissent que des incertains qu’elles entraînent ».
Nul ne sait d’où partit le premier coup de feu, mais la fusillade devient générale. Les canons chargés à mitraille ont vite fait de disperser la petite troupe des insurgés. Une heure plus tard, celle-ci revient avec les renforts des faubourgs, bien armés et encadrés par les sectionnaires. Les insurgés pénètrent dans la cour, entrent dans le vestibule d’où partent les escaliers monumentaux montant aux appartements royaux. C’est là que les attendent les gardes suisses, en rang sur chaque marche formant autant de lignes de feu, tandis que gentilshommes et gardes nationaux garnissent les fenêtres des bâtiments entourant la cour. C’est un épouvantable massacre. La foule reflue dans la Cour non sans avoir incendié les bâtiments et tué ses occupants, puis sur la place où une charge des gendarmes à cheval achève de les disperser. Il est midi, l’insurrection est matée.
Alarmé par le fracas du combat, Roederer réussit, cette fois, à convaincre le roi de se réfugier au Manège avec sa famille : « Je propose le seul parti que la destinée laisse ouvert au salut du roi » – une façon élégante de le prendre en otage.
Les Girondins décident de saisir l’occasion pour se débarrasser à la fois des ultras de la cour apparemment triomphants et des sectionnaires. Après s’être concerté avec Danton et Robespierre, Vergniaud monte à la tribune : « Je vous demande de voter, comme la Constitution nous y autorise, la suspension du pouvoir exécutif et un décret pour la nomination d’un gouverneur du prince royal. Les ministres seront nommés par l’Assemblée nationale. » Il propose le général Dumouriez, commandant en chef de l’armée des Ardennes, comme gouverneur du Dauphin, avec la charge de prendre en mains la défense du royaume. Ce général, considéré comme le meilleur de l’armée, ministre de la guerre du gouvernement girondin chassé le 13 juin par le roi, est estimé par celui-ci autant que par les jacobins. La motion est votée aussitôt.
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
Danton, ministre de la justice
Roederer, reparti au palais, convainc les gardes nationaux de protéger l’Assemblée comme ils ont protégé le château, au cas où les Suisses, triomphants, viendraient libérer le roi. Mais ils ne viendront pas : les principaux chefs royalistes ont été tués dans l’incendie des Tuileries et, malgré les objurgations de la reine, Louis XVI se résigne, invoquant le maintien de son fils sur le trône. Il est, en fait, soulagé de laisser sa charge…
Dans la nuit, les ministres girondins chassés le 13 juin retrouvent leur portefeuille – Roland à l’intérieur, Clavière aux finances, Servan à la guerre – auxquels s’ajoute Danton à la justice, poste qu’il négociait secrètement avec les Girondins depuis longtemps.
La Gironde, solidement établie au pouvoir, n’a plus besoin de la guerre. Marat se cache, Robespierre s’est rallié, les sans-culottes vaincus se satisfont de voir Louis XVI neutralisé dans son palais du Luxembourg. Dumouriez, nommé commandant des armées le 18 août, négocie avec le duc de Brunswick, devenu plus prudent depuis que l’insurrection a été matée et la monarchie conservée. Les deux généraux diplomates organisent un simulacre de combat à Valmy, le 20 septembre 1792, histoire de donner le change aux va-t-en-guerre de la Gironde et aux émigrés de Coblence. Après quoi les coalisés se replient au-delà des frontières, et un traité de paix est bientôt signé.
Le petit Louis XVII, âgé de 7 ans en 1792, est élevé sous la houlette de Dumouriez, dans le respect de la Constitution et du pouvoir de l’Assemblée. Son long règne assurera à une France où règnent les principes d’égalité, de liberté et de propriété ; une prospérité qui en fera vite la rivale de l’Angleterre dans l’industrie, le commerce au long cours et les colonies. Roederer et l’abbé Sieyès rédigent un « code civil », qui deviendra le fondement de la vie légale du pays. Condorcet, à force de persuasion, fera voter l’éducation gratuite pour tous, l’émancipation légale des femmes et, après de houleux débats, l’abolition de l’esclavage.
Roederer, reparti au palais, convainc les gardes nationaux de protéger l’Assemblée comme ils ont protégé le château, au cas où les Suisses, triomphants, viendraient libérer le roi. Mais ils ne viendront pas : les principaux chefs royalistes ont été tués dans l’incendie des Tuileries et, malgré les objurgations de la reine, Louis XVI se résigne, invoquant le maintien de son fils sur le trône. Il est, en fait, soulagé de laisser sa charge…
Dans la nuit, les ministres girondins chassés le 13 juin retrouvent leur portefeuille – Roland à l’intérieur, Clavière aux finances, Servan à la guerre – auxquels s’ajoute Danton à la justice, poste qu’il négociait secrètement avec les Girondins depuis longtemps.
La Gironde, solidement établie au pouvoir, n’a plus besoin de la guerre. Marat se cache, Robespierre s’est rallié, les sans-culottes vaincus se satisfont de voir Louis XVI neutralisé dans son palais du Luxembourg. Dumouriez, nommé commandant des armées le 18 août, négocie avec le duc de Brunswick, devenu plus prudent depuis que l’insurrection a été matée et la monarchie conservée. Les deux généraux diplomates organisent un simulacre de combat à Valmy, le 20 septembre 1792, histoire de donner le change aux va-t-en-guerre de la Gironde et aux émigrés de Coblence. Après quoi les coalisés se replient au-delà des frontières, et un traité de paix est bientôt signé.
Le petit Louis XVII, âgé de 7 ans en 1792, est élevé sous la houlette de Dumouriez, dans le respect de la Constitution et du pouvoir de l’Assemblée. Son long règne assurera à une France où règnent les principes d’égalité, de liberté et de propriété ; une prospérité qui en fera vite la rivale de l’Angleterre dans l’industrie, le commerce au long cours et les colonies. Roederer et l’abbé Sieyès rédigent un « code civil », qui deviendra le fondement de la vie légale du pays. Condorcet, à force de persuasion, fera voter l’éducation gratuite pour tous, l’émancipation légale des femmes et, après de houleux débats, l’abolition de l’esclavage.
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
LA VRAIE FIN
Les canonniers de la garde nationale passent du côté des émeutiers qui, ainsi renforcés, prennent d’assaut les Tuileries, massacrent les gardes suisses, envahissent l’Assemblée nationale, où Louis XVI s’est réfugié, et imposent l’emprisonnement de la famille royale au Temple, puis l’élection d’une Convention nationale issue de l’Assemblée. Le 21 septembre, la Convention, dominée par les jacobins et sous pression des sans-culottes, abolit la monarchie et proclame la République.
Les canonniers de la garde nationale passent du côté des émeutiers qui, ainsi renforcés, prennent d’assaut les Tuileries, massacrent les gardes suisses, envahissent l’Assemblée nationale, où Louis XVI s’est réfugié, et imposent l’emprisonnement de la famille royale au Temple, puis l’élection d’une Convention nationale issue de l’Assemblée. Le 21 septembre, la Convention, dominée par les jacobins et sous pression des sans-culottes, abolit la monarchie et proclame la République.
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
L'épisode 3 : Et si, le 18 juin 1815, Napoléon avait gagné à Waterloo ?
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/11/et-si-le-18-juin-1815-napoleon-avait-gagne-a-waterloo_6091142_3451060.html
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/11/et-si-le-18-juin-1815-napoleon-avait-gagne-a-waterloo_6091142_3451060.html
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
L'épisode 4 : Et si, le 6 février 1934, les émeutiers avaient pris l’Assemblée nationale ?
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/12/et-si-le-6-fevrier-1934-les-emeutiers-avaient-pris-l-assemblee-nationale_6091222_3451060.html
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/12/et-si-le-6-fevrier-1934-les-emeutiers-avaient-pris-l-assemblee-nationale_6091222_3451060.html
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
L'épisode 5 : Et si, le 15 juin 1940, Pétain avait démissionné ?
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/13/et-si-le-15-juin-1940-petain-avait-demissionne_6091310_3451060.html
https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2021/08/13/et-si-le-15-juin-1940-petain-avait-demissionne_6091310_3451060.html
ezaski- Messages : 300
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Re: Le Monde uchronie
Merci, j'avais loupé les derniers articles mais je n'arrive pas à trouver leurs textes complets.
Re: Le Monde uchronie
je pourrais les copier ici si jamais !
ezaski- Messages : 300
Date d'inscription : 08/11/2020
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Re: Le Monde uchronie
ezaski a écrit:je pourrais les copier ici si jamais !
Avec plaisir!
Si possible, je lirais bien en priorité l'épisode sur le 6 février 34.
DemetriosPoliorcète- Messages : 1483
Date d'inscription : 05/03/2016
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Re: Le Monde uchronie
Et si, le 6 février 1934, les émeutiers avaient pris l’Assemblée nationale ?
« C’eût été une autre histoire… » (4/6). Ce soir-là, à Paris, sous les coups de boutoir des ligues d’extrême droite et des anciens combattants Croix-de-Feu, la République vacille. Dans cette uchronie, les manifestants envahissent le Palais-Bourbon, un an après l’accession d’Hitler au pouvoir en Allemagne…
Les flammes des réverbères à gaz arrachés illuminent la nuit froide. Un autobus finit de se consumer au milieu de la place de la Concorde. Sur le pont, les cordons de policiers et de gardes mobiles qui barrent l’accès au Palais-Bourbon ont toujours plus de peine à contenir les manifestants qui sans cesse repartent à l’assaut. « A la Chambre, à l’eau les gardes ! », hurle la foule.
LES FAITS
Les affrontements ont commencé en fin d’après-midi et n’ont fait depuis que s’intensifier. Les Camelots du roi, service d’ordre de l’Action française de Charles Maurras, ravis d’en découdre avec la « Gueuse », côtoient les nervis des ligues d’extrême droite comme les Jeunesses patriotes, et surtout, des milliers d’anciens combattants rameutés par leurs associations, dont les Croix-de-Feu. Si elle n’est pas la plus importante, cette organisation reste la plus efficace, avec sa discipline quasi militaire imposée par son chef, le colonel François de La Rocque, qui désormais ne recrute plus seulement les vétérans des tranchées de la Grande Guerre.
En cette soirée du 6 février 1934, l’émeute fait rage au cœur de la capitale. Le scandale politico-financier de l’affairiste et escroc Alexandre Stavisky, juif d’origine russe, « suicidé » à Chamonix, puis la révocation par Edouard Daladier, le nouveau président du Conseil radical, du préfet de police Jean Chiappe, très populaire dans la droite dure, ont mobilisé l’opinion contre les « voleurs ». Même l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC), une organisation communiste, est dans la rue pour dénoncer « les escrocs et leurs complices ». Le Parti communiste français est encore sur la ligne gauchiste « classe contre classe » imposée par Moscou. Des Internationale se mêlent aux Marseillaise et aux Madelon. « Nous voulons que la France vive dans l’honneur et la propreté », clame l’immense banderole en tête du cortège de l’Union nationale des combattants. Cette association pourfend l’impéritie des « politicards » qui a rendu vains les sacrifices de la Grande Guerre. Certains tentent de marcher vers l’Elysée pour remettre une adresse au président de la République. Les affrontements gagnent les abords du palais présidentiel.
Les Croix-de-Feu sont, eux, déployés de l’autre côté de la Seine pour « envelopper » symboliquement l’Assemblée, comme ils l’avaient fait la veille pour le ministère de l’intérieur. « Nous nous plaçons au-dessus de tous les partis discrédités. Nous allons balayer toutes ces dissensions honteuses pour établir un gouvernement de bons Français libérés de toute fourberie politique », clame leur appel. Comte et colonel, « aristo et sabreur » honni à gauche, François de La Rocque est moqué par l’Action française qui lui reproche ses sempiternelles indécisions. Ses hommes, en revanche, l’adulent, et s’il n’est pas à leur tête ce soir-là, c’est parce qu’il craint de ne pouvoir contrôler leurs réactions s’il était arrêté ou blessé. Il les commande à distance.
Une « tentative de coup d’Etat »
Cette nuit d’émeutes et de sang, avec son lourd bilan d’au moins 16 morts et plus de 1 500 blessés, a profondément marqué l’imaginaire politique français. « Derrière les forces qui s’affrontent le 6 février 1934 se profilent les ombres d’Hitler et de Mussolini, les silhouettes des futurs tenants de la révolution nationale de Vichy, et bientôt, la volonté antifasciste des organisateurs du Rassemblement populaire et des animateurs de la Résistance française », écrit Serge Berstein dans Le 6 février 1934 (1975). La gauche, quant à elle, dénonça une tentative de coup d’Etat avec l’appui du grand capital pour imposer un régime autoritaire voire un fascisme à la française. Nombre d’historiens aujourd’hui sont plus nuancés.
« La République n’a pas été réellement menacée même s’il y a toute une imagerie autour du complot fasciste. C’était une émeute, pas une conjuration, et chacune des organisations défilait avec ses objectifs propres contre le parlementarisme et la corruption, sans aucun projet commun de prise du pouvoir », explique Olivier Dard, historien et professeur à Sorbonne Université. « L’ordre public était menacé mais pas la République en tant que telle », renchérit Simon Epstein, de l’Université hébraïque de Jérusalem, soulignant que « les institutions républicaines étaient incomparablement plus fortes que ces manifestants qui d’ailleurs, pour beaucoup d’entre eux, n’étaient pas des extrémistes ». Les travaux de Serge Berstein et Michel Winock, qui ont notamment dirigé l’ouvrage collectif Fascisme français (Perrin, 2020), montrent que le fascisme au sens strict n’influençait que des cercles restreints. Les leaders des mouvements plus importants, à commencer par le colonel de La Rocque, étaient certes nationalistes et partisans d’un Etat autoritaire, mais ils n’étaient pas fascistes et, surtout, ils n’avaient ni l’envergure ni les capacités de prendre le pouvoir par la force.
A l’opposé, s’inscrivant dans l’héritage de l’historien israélien Zeev Sternhell (1935-2020), d’autres jugent que le fascisme était bien un danger en France, le pays qui en fut le berceau conceptuel. « Bien avant la débâcle [de 1940], des franges importantes de la société française et notamment de ses élites politiques, économiques et intellectuelles ont été sensibles aux aventures fascistes, même si peu s’en réclamaient ouvertement au nom d’une recherche d’une formule française », souligne le politiste Didier Leschi dans sa préface à L’Histoire refoulée, ouvrage collectif sous la direction de Zeev Sternhell (Cerf, 2019).
« C’eût été une autre histoire… » (4/6). Ce soir-là, à Paris, sous les coups de boutoir des ligues d’extrême droite et des anciens combattants Croix-de-Feu, la République vacille. Dans cette uchronie, les manifestants envahissent le Palais-Bourbon, un an après l’accession d’Hitler au pouvoir en Allemagne…
Les flammes des réverbères à gaz arrachés illuminent la nuit froide. Un autobus finit de se consumer au milieu de la place de la Concorde. Sur le pont, les cordons de policiers et de gardes mobiles qui barrent l’accès au Palais-Bourbon ont toujours plus de peine à contenir les manifestants qui sans cesse repartent à l’assaut. « A la Chambre, à l’eau les gardes ! », hurle la foule.
LES FAITS
Les affrontements ont commencé en fin d’après-midi et n’ont fait depuis que s’intensifier. Les Camelots du roi, service d’ordre de l’Action française de Charles Maurras, ravis d’en découdre avec la « Gueuse », côtoient les nervis des ligues d’extrême droite comme les Jeunesses patriotes, et surtout, des milliers d’anciens combattants rameutés par leurs associations, dont les Croix-de-Feu. Si elle n’est pas la plus importante, cette organisation reste la plus efficace, avec sa discipline quasi militaire imposée par son chef, le colonel François de La Rocque, qui désormais ne recrute plus seulement les vétérans des tranchées de la Grande Guerre.
En cette soirée du 6 février 1934, l’émeute fait rage au cœur de la capitale. Le scandale politico-financier de l’affairiste et escroc Alexandre Stavisky, juif d’origine russe, « suicidé » à Chamonix, puis la révocation par Edouard Daladier, le nouveau président du Conseil radical, du préfet de police Jean Chiappe, très populaire dans la droite dure, ont mobilisé l’opinion contre les « voleurs ». Même l’Association républicaine des anciens combattants (ARAC), une organisation communiste, est dans la rue pour dénoncer « les escrocs et leurs complices ». Le Parti communiste français est encore sur la ligne gauchiste « classe contre classe » imposée par Moscou. Des Internationale se mêlent aux Marseillaise et aux Madelon. « Nous voulons que la France vive dans l’honneur et la propreté », clame l’immense banderole en tête du cortège de l’Union nationale des combattants. Cette association pourfend l’impéritie des « politicards » qui a rendu vains les sacrifices de la Grande Guerre. Certains tentent de marcher vers l’Elysée pour remettre une adresse au président de la République. Les affrontements gagnent les abords du palais présidentiel.
Les Croix-de-Feu sont, eux, déployés de l’autre côté de la Seine pour « envelopper » symboliquement l’Assemblée, comme ils l’avaient fait la veille pour le ministère de l’intérieur. « Nous nous plaçons au-dessus de tous les partis discrédités. Nous allons balayer toutes ces dissensions honteuses pour établir un gouvernement de bons Français libérés de toute fourberie politique », clame leur appel. Comte et colonel, « aristo et sabreur » honni à gauche, François de La Rocque est moqué par l’Action française qui lui reproche ses sempiternelles indécisions. Ses hommes, en revanche, l’adulent, et s’il n’est pas à leur tête ce soir-là, c’est parce qu’il craint de ne pouvoir contrôler leurs réactions s’il était arrêté ou blessé. Il les commande à distance.
Une « tentative de coup d’Etat »
Cette nuit d’émeutes et de sang, avec son lourd bilan d’au moins 16 morts et plus de 1 500 blessés, a profondément marqué l’imaginaire politique français. « Derrière les forces qui s’affrontent le 6 février 1934 se profilent les ombres d’Hitler et de Mussolini, les silhouettes des futurs tenants de la révolution nationale de Vichy, et bientôt, la volonté antifasciste des organisateurs du Rassemblement populaire et des animateurs de la Résistance française », écrit Serge Berstein dans Le 6 février 1934 (1975). La gauche, quant à elle, dénonça une tentative de coup d’Etat avec l’appui du grand capital pour imposer un régime autoritaire voire un fascisme à la française. Nombre d’historiens aujourd’hui sont plus nuancés.
« La République n’a pas été réellement menacée même s’il y a toute une imagerie autour du complot fasciste. C’était une émeute, pas une conjuration, et chacune des organisations défilait avec ses objectifs propres contre le parlementarisme et la corruption, sans aucun projet commun de prise du pouvoir », explique Olivier Dard, historien et professeur à Sorbonne Université. « L’ordre public était menacé mais pas la République en tant que telle », renchérit Simon Epstein, de l’Université hébraïque de Jérusalem, soulignant que « les institutions républicaines étaient incomparablement plus fortes que ces manifestants qui d’ailleurs, pour beaucoup d’entre eux, n’étaient pas des extrémistes ». Les travaux de Serge Berstein et Michel Winock, qui ont notamment dirigé l’ouvrage collectif Fascisme français (Perrin, 2020), montrent que le fascisme au sens strict n’influençait que des cercles restreints. Les leaders des mouvements plus importants, à commencer par le colonel de La Rocque, étaient certes nationalistes et partisans d’un Etat autoritaire, mais ils n’étaient pas fascistes et, surtout, ils n’avaient ni l’envergure ni les capacités de prendre le pouvoir par la force.
A l’opposé, s’inscrivant dans l’héritage de l’historien israélien Zeev Sternhell (1935-2020), d’autres jugent que le fascisme était bien un danger en France, le pays qui en fut le berceau conceptuel. « Bien avant la débâcle [de 1940], des franges importantes de la société française et notamment de ses élites politiques, économiques et intellectuelles ont été sensibles aux aventures fascistes, même si peu s’en réclamaient ouvertement au nom d’une recherche d’une formule française », souligne le politiste Didier Leschi dans sa préface à L’Histoire refoulée, ouvrage collectif sous la direction de Zeev Sternhell (Cerf, 2019).
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Re: Le Monde uchronie
L’HISTOIRE ALTERNATIVE : LES BARRAGES DE POLICE CÈDENT
Tout bascule en cette nuit du 6 au 7 février 1934, peu après minuit. Militaire avant tout, et prudent, le colonel de La Rocque hésite mais, sur le pont, les barrages policiers sont finalement enfoncés. Il lance alors aussi ses hommes vers l’Assemblée. La plupart des députés ont déjà fui, notamment ceux qui, quelques heures plus tôt, avaient voté par 300 voix contre 259 la confiance au radical Edouard Daladier sous les cris d’une droite hurlant « démission ! démission ! ». « Notre but était de pénétrer au Palais-Bourbon par le seul effet d’une poussée de masse et d’y exercer de solides représailles, mais non sanglantes, sur les élus d’un suffrage qui mène la France à la ruine », dit Henry du Moulin de Labarthète, inspecteur des finances (qui deviendra plus tard directeur de cabinet de Pétain à Vichy).
Les députés de droite, dans leur majorité, soutiennent les émeutiers et pressent pour de nouvelles élections à même de balayer cette Chambre de 1932, dominée par les radicaux et les socialistes. « Ce choc politique aurait obligé le président à proposer la dissolution au Sénat. Et on voit mal comment il aurait pu la refuser sauf à risquer lui aussi l’envahissement. La symbolique “ancien combattant” était très forte, et aucune force politique n’avait la légitimité suffisante pour s’y opposer », souligne Didier Leschi. L’ancien président Gaston Doumergue, homme politique de droite à même de faire consensus, préside un gouvernement pour organiser les élections.
La campagne électorale est courte, dure, parfois violente. Léon Blum, le leader de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO), a compris le danger et tente d’unir la gauche. Le communiste Maurice Thorez s’y rallie finalement, sous la pression de la base et poussé par Moscou, qui incite désormais les partis communistes aux alliances antifascistes les plus larges. Mais il est trop tard. Dans le climat de tension et de ras-le-bol contre les politiciens, le camp nationaliste et réactionnaire l’emporte assez largement. François de La Rocque lui-même n’est pas candidat. « La seule idée de briguer un mandat me donne des nausées : c’est une question de tempérament », explique-t-il alors même qu’il s’apprête à lancer son mouvement politique le Parti social français.
Les vainqueurs décident de conserver Gaston Doumergue à la présidence du Conseil. Son programme est néanmoins clairement ultraconservateur, avec une équipe regroupant tous les grands ténors de la droite : des « durs » comme le député de Paris Pierre Taittinger, le chef des Jeunesses patriotes ; des libéraux fascinés par le modèle américain et qui veulent moderniser la France comme André Tardieu ; des ex-socialistes, tel Marcel Déat, qui, depuis des mois, en appellent « à un Etat fort, un Etat puissant, un Etat d’ordre ».
Dérive vichyste avant Vichy
La première des réformes adoptées est celle de l’exécutif afin qu’il ne soit plus soumis aux humeurs du Parlement. Elle fait consensus à droite et dans les milieux patronaux. Mais beaucoup veulent aller plus loin, à commencer par le colonel de La Rocque lui-même, dont le poids politique et l’influence ne font que croître. « C’est un catholique nationaliste, conservateur, qui souhaite un pouvoir fort mais son admiration va beaucoup plus à Salazar [dirigeant du régime portugais dès 1932] qu’à Mussolini », souligne Olivier Dard. Didier Leschi estime pour sa part que « dans une telle Chambre, il y aurait eu tous les éléments pour une dérive vichyste avant Vichy : le vote accéléré de lois xénophobes, une dérive autoritaire avec la mise en place d’un corporatisme combattant la lutte des classes qui s’inspire de Salazar au Portugal ou de Dollfuss en Autriche ».
Ce pouvoir national autoritaire est néanmoins sans complaisance à l’égard d’Hitler. « Jusqu’en 1936, la droite nationaliste française est beaucoup plus sensible au danger allemand que ne l’est la gauche pacifiste. Celle-ci prône la paix avec l’Allemagne, même hitlérienne. Elle hésite, de ce fait, à s’inquiéter du réarmement allemand. Elle préfère concentrer son tir contre ses adversaires intérieurs globalement qualifiés de fascistes – à raison pour certains, à tort pour d’autres », retrace Simon Epstein. Charles Maurras ne cesse de rappeler que « la germanité est l’ennemie de la latinité ».
Quand, à l’aube du 7 mars 1936, Hitler ordonne à la toute nouvelle Wehrmacht d’occuper la zone démilitarisée de Rhénanie, instituée par le traité de Versailles, la réaction des autorités françaises est immédiate. Quelque 200 000 hommes sont aussitôt déployés pour bloquer l’avance allemande. Hitler hésite, puis recule, conscient que le rapport de force n’est pas en sa faveur. Cette défaite ébranle sérieusement son pouvoir. Paris, en revanche, pavoise pour fêter la victoire. Avec ses 1,2 million de membres, le Parti social français devient le plus grand parti de masse du pays. Il triomphe aux élections suivantes.
Tout bascule en cette nuit du 6 au 7 février 1934, peu après minuit. Militaire avant tout, et prudent, le colonel de La Rocque hésite mais, sur le pont, les barrages policiers sont finalement enfoncés. Il lance alors aussi ses hommes vers l’Assemblée. La plupart des députés ont déjà fui, notamment ceux qui, quelques heures plus tôt, avaient voté par 300 voix contre 259 la confiance au radical Edouard Daladier sous les cris d’une droite hurlant « démission ! démission ! ». « Notre but était de pénétrer au Palais-Bourbon par le seul effet d’une poussée de masse et d’y exercer de solides représailles, mais non sanglantes, sur les élus d’un suffrage qui mène la France à la ruine », dit Henry du Moulin de Labarthète, inspecteur des finances (qui deviendra plus tard directeur de cabinet de Pétain à Vichy).
Les députés de droite, dans leur majorité, soutiennent les émeutiers et pressent pour de nouvelles élections à même de balayer cette Chambre de 1932, dominée par les radicaux et les socialistes. « Ce choc politique aurait obligé le président à proposer la dissolution au Sénat. Et on voit mal comment il aurait pu la refuser sauf à risquer lui aussi l’envahissement. La symbolique “ancien combattant” était très forte, et aucune force politique n’avait la légitimité suffisante pour s’y opposer », souligne Didier Leschi. L’ancien président Gaston Doumergue, homme politique de droite à même de faire consensus, préside un gouvernement pour organiser les élections.
La campagne électorale est courte, dure, parfois violente. Léon Blum, le leader de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO), a compris le danger et tente d’unir la gauche. Le communiste Maurice Thorez s’y rallie finalement, sous la pression de la base et poussé par Moscou, qui incite désormais les partis communistes aux alliances antifascistes les plus larges. Mais il est trop tard. Dans le climat de tension et de ras-le-bol contre les politiciens, le camp nationaliste et réactionnaire l’emporte assez largement. François de La Rocque lui-même n’est pas candidat. « La seule idée de briguer un mandat me donne des nausées : c’est une question de tempérament », explique-t-il alors même qu’il s’apprête à lancer son mouvement politique le Parti social français.
Les vainqueurs décident de conserver Gaston Doumergue à la présidence du Conseil. Son programme est néanmoins clairement ultraconservateur, avec une équipe regroupant tous les grands ténors de la droite : des « durs » comme le député de Paris Pierre Taittinger, le chef des Jeunesses patriotes ; des libéraux fascinés par le modèle américain et qui veulent moderniser la France comme André Tardieu ; des ex-socialistes, tel Marcel Déat, qui, depuis des mois, en appellent « à un Etat fort, un Etat puissant, un Etat d’ordre ».
Dérive vichyste avant Vichy
La première des réformes adoptées est celle de l’exécutif afin qu’il ne soit plus soumis aux humeurs du Parlement. Elle fait consensus à droite et dans les milieux patronaux. Mais beaucoup veulent aller plus loin, à commencer par le colonel de La Rocque lui-même, dont le poids politique et l’influence ne font que croître. « C’est un catholique nationaliste, conservateur, qui souhaite un pouvoir fort mais son admiration va beaucoup plus à Salazar [dirigeant du régime portugais dès 1932] qu’à Mussolini », souligne Olivier Dard. Didier Leschi estime pour sa part que « dans une telle Chambre, il y aurait eu tous les éléments pour une dérive vichyste avant Vichy : le vote accéléré de lois xénophobes, une dérive autoritaire avec la mise en place d’un corporatisme combattant la lutte des classes qui s’inspire de Salazar au Portugal ou de Dollfuss en Autriche ».
Ce pouvoir national autoritaire est néanmoins sans complaisance à l’égard d’Hitler. « Jusqu’en 1936, la droite nationaliste française est beaucoup plus sensible au danger allemand que ne l’est la gauche pacifiste. Celle-ci prône la paix avec l’Allemagne, même hitlérienne. Elle hésite, de ce fait, à s’inquiéter du réarmement allemand. Elle préfère concentrer son tir contre ses adversaires intérieurs globalement qualifiés de fascistes – à raison pour certains, à tort pour d’autres », retrace Simon Epstein. Charles Maurras ne cesse de rappeler que « la germanité est l’ennemie de la latinité ».
Quand, à l’aube du 7 mars 1936, Hitler ordonne à la toute nouvelle Wehrmacht d’occuper la zone démilitarisée de Rhénanie, instituée par le traité de Versailles, la réaction des autorités françaises est immédiate. Quelque 200 000 hommes sont aussitôt déployés pour bloquer l’avance allemande. Hitler hésite, puis recule, conscient que le rapport de force n’est pas en sa faveur. Cette défaite ébranle sérieusement son pouvoir. Paris, en revanche, pavoise pour fêter la victoire. Avec ses 1,2 million de membres, le Parti social français devient le plus grand parti de masse du pays. Il triomphe aux élections suivantes.
Dernière édition par ezaski le Mar 17 Aoû - 18:17, édité 2 fois
ezaski- Messages : 300
Date d'inscription : 08/11/2020
Collectionneur et Rayan du Griffoul aiment ce message
Re: Le Monde uchronie
LA VRAIE FIN
Le colonel de La Roque ne donna pas l’ordre de prendre le Parlement et retira finalement ses hommes. La présidence du Conseil fut confiée à Gaston Doumergue, avec une équipe aussi conservatrice que le permettait la Chambre. L’émeute fut un électrochoc pour les socialistes et les communistes. Dans les jours suivants, ils posèrent les bases de ce qui allait devenir le Front populaire, qui triompha aux élections de 1936.
Le colonel de La Roque ne donna pas l’ordre de prendre le Parlement et retira finalement ses hommes. La présidence du Conseil fut confiée à Gaston Doumergue, avec une équipe aussi conservatrice que le permettait la Chambre. L’émeute fut un électrochoc pour les socialistes et les communistes. Dans les jours suivants, ils posèrent les bases de ce qui allait devenir le Front populaire, qui triompha aux élections de 1936.
ezaski- Messages : 300
Date d'inscription : 08/11/2020
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Re: Le Monde uchronie
Message de modération :
Ezaski, je vais te demander à minima de mettre le contenu des articles en spoiler STP car il s'agit initialement de contenus copyrightés.
Ezaski, je vais te demander à minima de mettre le contenu des articles en spoiler STP car il s'agit initialement de contenus copyrightés.
_________________
« Ce n’est que devant l’épreuve, la vraie, celle qui met en jeu l’existence même, que les hommes cessent de se mentir et révèlent vraiment ce qu’ils sont. »
Alexandre Lang.
Au Bord de l'Abîme et au-delà
Re: Le Monde uchronie
Thomas a écrit:Message de modération :
Ezaski, je vais te demander à minima de mettre le contenu des articles en spoiler STP car il s'agit initialement de contenus copyrightés.
Je me suis posé la question si en effet je pouvais les mettre là, bon du coup je vais pas poster les autres, sauf si messages privés c'est possible ?
ezaski- Messages : 300
Date d'inscription : 08/11/2020
Collectionneur aime ce message
Re: Le Monde uchronie
Entre spoiler, devrait éviter qu'ils apparaissent dans recherche web.
Le copier/coller d'article complet si elle est découverte par les ayants droit amènera à une demande pure et simple de surpression pure du sujet.
Le copier/coller d'article complet si elle est découverte par les ayants droit amènera à une demande pure et simple de surpression pure du sujet.
_________________
« Ce n’est que devant l’épreuve, la vraie, celle qui met en jeu l’existence même, que les hommes cessent de se mentir et révèlent vraiment ce qu’ils sont. »
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Au Bord de l'Abîme et au-delà
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